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30e rapport du Secrétaire général sur l'application des résolutions 2139 (2014), 2165 (2014), 2191 (2014) et 2258 (2015) du Conseil de sécurité (juil. 2016)


Nations Unies
Conseil de sécurité

S/2016/714

Distr. générale
16 août 2016
Français
Original : anglais

Application des résolutions 2139 (2014), 2165 (2014), 2191 (2014) et 2258 (2015) du Conseil de sécurité

Rapport du Secrétaire général

I. Introduction

1. Le présent rapport est le trentième présenté en application du paragraphe 17 de la résolution 2139 (2014), du paragraphe 10 de la résolution 2165 (2014), du paragraphe 5 de la résolution 2191 (2014) et du paragraphe 5 de la résolution 2258 (2015) du Conseil, dans lesquels le Conseil a prié le Secrétaire général de lui rendre compte, tous les 30 jours, de l'application desdites résolutions par toutes les parties au conflit en République arabe syrienne.

2. Les informations qui y figurent reposent sur les données dont disposent les organismes des Nations Unies présents sur le terrain et des renseignements obtenus auprès du Gouvernement syrien, d'autres sources syriennes ou de sources publiques. Les données communiquées par les organismes des Nations Unies sur l'acheminement de l'aide humanitaire portent sur la période allant du 1er au 31 juillet 2016. Des données plus récentes ont été intégrées, lorsqu'elles étaient disponibles.

II. Principaux faits nouveaux

A. Situation sur le terrain

3. Au cours de la période considérée, la détérioration des conditions de sécurité a eu des répercussions importantes sur la situation humanitaire, les infrastructures civiles telles que les hôpitaux et les écoles subissant de nouveaux dégâts, ce qui a réduit la capacité des organismes des Nations Unies et de leurs partenaires de fournir tout l'appui humanitaire nécessaire. Des activités militaires, notamment des frappes aériennes, se sont poursuivies à Alep, Deïr el -Zor, Hassaké et Edleb, ainsi qu'à Rif-Damas et dans d'autres provinces. En application de la résolution 2258 (2015), on trouvera ci-après un bref exposé de la situation sur le terrain, faisant état de l'application des résolutions 2139 (2014), 2165 (2014) et 2191 (2014) par toutes les parties en République arabe syrienne. Ces renseignements sont fournis sans préjudice des travaux du Groupe de travail sur le cessez-le-feu du Groupe international de soutien pour la Syrie.

4. Au mois de juillet, les activités militaires se sont intensifiées dans la province d'Alep, le Gouvernement et les groupes armés non étatiques ayant notamment lancé des opérations militaires d'envergure dans la ville d'Alep. Le 7 juillet, les forces gouvernementales ont progressé dans le nord de la ville, coupant la route Castello, la seule voie d'approvisionnement permettant d'accéder aux zones tenues par les groupes armés non étatiques dans la partie orientale de la ville. Le 11 juillet, des frappes aériennes contre une zone d'habitation de la vieille ville auraient tué 18 civils, dont deux enfants et une femme, et fait au moins 30 blessés. Le 16 juillet, divers quartiers dans les parties de la ville tenues par les groupes armés non étatiques, dont Firdaous, le quartier de la vieille ville et Maadi, ont été touchés par plusieurs frappes aériennes qui auraient fait au moins 22 morts et blessés parmi les civils. L'hôpital Omar Ibn Abdel-Aziz dans le quartier de Maadi aurait également été endommagé et mis hors d'usage par des frappes aériennes menées à proximité. Le lendemain, des frappes aériennes contre des zones d'habitation d'Abou el-Zouhour auraient tué 11 membres d'une même famille et blessé cinq autres civils. Les 23 et 24 juillet, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme a reçu des informations indiquant que quatre hôpitaux de fortune ainsi que la banque centrale de sang avaient été touchés par des frappes aériennes dans l'est de la ville (voir par. 42). Selon les informations reçues, un bébé de deux jours est mort dans sa couveuse à l'hôpital El-Hakim, l'alimentation en oxygène ayant été interrompue. Le 25 juillet, des frappes aériennes contre une zone d'habitation du quartier de Machhad auraient tué au moins six civils. Le 31 juillet, des frappes aériennes visant trois quartiers de la ville contrôlés par les groupes armés non étatiques - Machhad, Ansari et Soukkari - ont détruit plusieurs habitations, tuant semble-t-il au moins 15 civils, dont un enfant, et faisant 10 blessés. En outre, à la suite d'une avancée des forces d'opposition dans le sud-ouest de la ville, 25 000 personnes ont été déplacées, auxquelles le Fonds des Nations Unies pour l'enfance a porté assistance en installant des abris temporaires dans la ville.

5. Les groupes armés non étatiques ont multiplié leurs attaques au mortier et à la roquette contre les zones contrôlées par les forces gouvernementales dans l'ouest de la ville d'Alep, faisant de nombreuses victimes civiles. Au cours des célébrations de l'Eïd al-Fitr, les 8 et 9 juillet, ces groupes armés auraient ainsi, en intensifiant leurs tirs de mortier et de roquette contre les parties de la ville tenues par le Gouvernement, tué au moins 44 civils et fait des dizaines de blessés, dont beaucoup de femmes et d'enfants. Des dizaines de civils auraient été admis à l'hôpital El-Razi et à l'hôpital universitaire. Les frappes se sont poursuivies tout au long du mois de juillet et auraient fait de nouvelles victimes civiles. Ainsi, le 22 juillet, des tirs de mortier en provenance de l'est de la ville auraient touché un parc public dans un quartier contrôlé par le Gouvernement, tuant six civils dont un enfant. Le 25 juillet, une femme et son enfant auraient été tués par un tir de mortier dans le quartier de Khaldiyé.

6. Les attaques visant les infrastructures civiles de la ville d'Alep ont eu de graves répercussions sur la population civile. Les 31 juillet et 1er août, des attaques auraient endommagé un centre de transmission, provoquant une coupure de courant dans tout l'ouest et l'est de la ville. Cela a entraîné l'arrêt des deux principales stations de pompage d'eau, qui sont situées l'une et l'autre dans l'est de la ville et desservent plus de deux millions de personnes. Dans l'ouest de la ville, les agents humanitaires intensifient leurs activités de distribution d'eau, mais celles-ci ne permettent pas de couvrir la totalité des besoins de la population. Dans l'est de la ville, les puits publics répondent aux besoins d'une partie de la population mais ils auront besoin d'être approvisionnés régulièrement en carburant pour continuer de fonctionner.

7. Le 10 juillet, des frappes aériennes visant une zone d'habitation d'Irbin auraient tué au moins 19 civils, dont 11 enfants et deux femmes. Le même jour, sept civils auraient été tués par des frappes aériennes à Chantara. Le 18 juillet, à Toukhar, une frappe aérienne aurait tué huit membres d'une même famille, dont des femmes et des enfants. Tôt dans la matinée du 19 juillet, plusieurs frappes aériennes ont de nouveau frappé des zones d'habitation à Toukhar, tuant au moins 70 civils parmi neuf familles, dont au moins 20 enfants. Le 24 juillet, une unité médicale aurait également été touchée par des frappes aériennes à Atareb. Le 30 juillet, au nord-ouest de Hreïtan, un hôpital de fortune aurait été touché et mis hors d'usage par une frappe aérienne. Aucune victime n'a été déplorée. Le 30 juillet également, quatre frappes terrestres contre le village de Kafr Naha auraient tué cinq civils et fait dix blessés. Le 31 juillet, à Anadan, au moins trois civils auraient été tués et sept autres blessés lors d'une frappe terrestre contre une habitation.

8. Dans l'est de la province d'Alep, de violents combats ont continué d'opposer l'État islamique d'Iraq et du Levant (EIIL) et les Forces démocratiques syriennes et leurs alliés dans la ville de Manbej et ses environs. Le 18 juillet, à Manbej, dans le quartier de Hazaouné, au moins 15 membres d'une même famille, dont des femmes et des enfants, auraient été tués lors d'une frappe aérienne contre leur habitation. Le 28 juillet, à Ghandoura, une ville située au nord-est de Manbej et tenue par l'EIIL, des frappes aériennes contre des immeubles d'habitation auraient tué au moins 28 civils et fait des dizaines de blessés, dont plusieurs enfants. Le 2 août, le Haut-Commissariat aux droits de l'homme a reçu une note verbale du Gouvernement de la République arabe syrienne, qui indiquait que ces frappes aériennes avaient tué 45 civils. Le quartier de Hazaouné et le village voisin de Choueïha ont également été touchés, les frappes contre Choueïha ayant semble-t-il causé la mort d'un nombre indéterminé de civils. Le 28 juillet également, une frappe aérienne contre le quartier de Chariaa el-Rabita à Manbej aurait tué cinq civils et fait des dizaines de blessés. Le même jour, l'EIIL aurait exécuté au moins 25 civils, dont plusieurs femmes et enfants, après avoir pris temporairement le contrôle du village de Boueïr au nord de Manbej. Environ 13 000 civils auraient quitté la ville de Manbej en raison des combats.

9. Pendant la période considérée, les combats se sont poursuivis dans les provinces de Damas et de Rif-Damas, des attaques visant la ville de Damas ayant notamment été signalées pour la première fois depuis plusieurs mois. Le 2 juillet, à Jeïroud, des frappes aériennes et des tirs d'artillerie auraient tué au moins 35 civils, dont trois enfants, quatre femmes et un médecin. Le 4 juillet, à Khan el-Chich, des frappes aériennes contre une zone d'habitation auraient tué deux civils et fait cinq blessés. Le 12 juillet, à Marj, des frappes aériennes contre une zone d'habitation auraient tué trois civils, dont une femme, et fait au moins six blessés. Le 23 juillet, une femme et un enfant auraient été tués lors de frappes aériennes à Hammouriyé. Le lendemain, dans la même ville, des tirs d'artillerie auraient causé la mort d'au moins six civils. Le 24 juillet également, à Irbin, au moins cinq civils auraient été tués, dont une femme et trois enfants, lors de frappes aériennes contre un marché local et des maisons. Le 24 juillet encore, à Damas, au moins sept civils auraient été tués, dont trois femmes et un enfant, et au moins 19 autres blessés, lors de frappes terrestres qui ont touché la vieille ville et endommagé des maisons et des restaurants. Le 25 juillet, de nouvelles frappes terrestres à Damas ont touché le quartier d'Ich el-Wourour, ce qui aurait fait six blessés parmi les civils. Le même jour, des tirs de mortier contre une zone d'habitation du quartier de Qeïmariyé dans la vieille ville de Damas auraient blessé au moins quatre civils.

10. Pendant la période considérée, plusieurs frappes ont également été signalées dans les villes de Douma et de Daraya. Le 2 juillet, des frappes aériennes contre une zone d'habitation de Douma auraient tué trois civils, dont un enfant, et fait deux blessés. Le 22 juillet, des frappes aériennes et des tirs d'artillerie visant des zones de commerces et d'habitations à Douma auraient tué trois civils. Le 22 juillet également, une frappe aérienne aurait tué une femme et son bébé de deux mois dans une zone d'habitation de Daraya. Le 25 juillet, toujours à Daraya, trois civils, dont un enfant, auraient été tués et au moins deux autres blessés par des tirs d'artillerie et des frappes aériennes contre une zone d'habitation.

11. Dans la province d'Edleb, le 8 juillet, des frappes aériennes visant un marché local de Darkouch auraient tué au moins 22 civils, dont neuf femmes, et fait 20 blessés. Selon les informations disponibles, la ville accueille un grand nombre de personnes déplacées originaires d'autres parties de la province. L'attaque, qui a eu lieu pendant les célébrations de l'Eïd al-Fitr, s'est produite le dernier jour d'un accord de cessez-le-feu de 72 heures. Le 11 juillet, des frappes aériennes ont touché la ville d'Ihsem, à proximité de l'hôpital Chifa, et auraient tué trois civils, dont un enfant, et fait au moins trois blessés. L'hôpital, qui a subi de graves dégâts, a dû fermer. Le 13 juillet, des frappes aériennes contre un marché local à Ariha auraient tué au moins 13 civils et fait plusieurs blessés. Le 21 juillet, une frappe aérienne visant une zone d'habitation de Tell Méniss aurait tué au moins neuf civils, dont deux enfants, et fait au moins dix blessés. Le 29 juillet, une maternité du village de Kafr Takharim dans la province d'Edleb a été la cible d'une frappe aérienne. Deux civils auraient été tués dans l'attaque et la maternité a dû fermer.

12. Dans la province de Homs, le 13 juillet, des frappes aériennes ont touché plusieurs installations civiles à Rastan, dont une unité médicale du Croissant-Rouge arabe syrien. Ces frappes auraient tué au moins 17 civils, dont trois femmes, et fait environ 48 blessés.

13. Le 3 juillet, dans la ville de Hassaké, des affrontements ont eu lieu entre les Forces kurdes et les Forces de défense nationale. Selon les informations reçues par le Haut-Commissariat aux droits de l'homme, au moins cinq civils ont péri et trois autres ont été blessés lors des échanges de tirs. Le 5 juillet, à Hassaké, un attentat-suicide a visé une boulangerie du quartier de Salhiyé. Le Haut-Commissariat s'est fait communiquer le nom de 21 civils - 15 hommes et 6 enfants - qui auraient péri dans l'attaque. Six autres personnes, dont quatre n'ont pas encore été identifiées, auraient également été tuées. L'attaque aurait fait en outre 29 blessés, dont six femmes. Le 27 juillet, à Qamichli, un attentat à la voiture piégée à proximité des bureaux du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés aurait tué 48 civils, dont des femmes et des enfants, et fait plus de 1 40 blessés. Des maisons et des immeubles ont également été détruits.

14. L'EIIL et les forces gouvernementales ont poursuivi leurs combats dans les provinces de Deïr el-Zor et de Raqqa. Le 8 juillet, à Deïr el-Zor, des combattants de l'EIIL ont tiré des obus de mortier sur les parties de la ville contrôlées par le Gouvernement, ce qui aurait causé la mort de quatre enfants dans le jardin public de Tleïtlé dans le quartier de Joura. Dans la province de Raqqa, le 12 juillet, des frappes aériennes contre une zone d'habitation de la ville de Raqqa auraient tué quatre enfants d'une même fratrie. Le 19 juillet, au moins 57 civils, dont des femmes et des enfants, auraient été blessés par des frappes aériennes visant une zone d'habitation de Tabqa.

15. Le Haut-Commissariat aux droits de l'homme a reçu des informations selon lesquelles des frappes aériennes menées supposément par des forces internationales avaient fait des morts et des blessés parmi les civils, mais n'a pu établir quels étaient les auteurs de ces attaques. Le Département de la défense des États -Unis a indiqué qu'au mois de juillet, la coalition dirigée par les États -Unis avait effectué 366 frappes contre des cibles de l'EIIL dans les provinces d'Alep, de Raqqa, de Hassaké, de Deïr el-Zor et de Homs, dont 80 % dans la région de Manbej. Le 27 juillet, lors d'une conférence de presse, le Département de la défense a déclaré qu'une enquête officielle avait été ouverte sur les allégations faisant état de victimes civiles à la suite d'une frappe aérienne menée par la coalition le 19 juillet à Manbej. Si le Ministère de la défense de la Fédération de Russie n'a fourni aucune information au Haut-Commissariat sur les opérations menées par le pays en juillet, le Ministre russe de la défense a toutefois déclaré, le 28 juillet, que les forces aérospatiales russes apportaient un appui actif aux troupes gouvernementales suite aux offensives lancées en juin et juillet par l'EIIL et le Front el-Nosra |1| près d'Alep.

16. Mon Envoyé spécial pour la Syrie continue d'évaluer la situation globale dans le pays afin de déterminer le moment le plus opportun pour la reprise officielle de négociations politiques. M. de Mistura n'a cessé de demander aux coprésidents du Groupe international de soutien pour la Syrie, aux Etats -Unis d'Amérique et à la Fédération de Russie de consolider la cessation des hostilités et de prendre des mesures visant à améliorer l'accès humanitaire dans tout le pays pour les acteurs qui fournissent un appui d'urgence aux populations. Des discussions bilatérales entre les États-Unis et la Fédération de Russie, tenues à Moscou le 15 juillet, ont ouvert la voie à une réunion trilatérale entre les deux coprésidents du Groupe international de soutien pour la Syrie et l'Organisation des Nations Unies, qui s'est tenue à Genève le 26 juillet. Toutes les parties ont convenu à cette occasion que les négociations politiques étaient la priorité et les coprésidents ont accepté de poursuivre leur dialogue bilatéral afin de consolider la cessation des hostilités, tout en continuant leur coopération en matière de lutte contre le terrorisme, et de garantir l'accès humanitaire et l'acheminement de l'aide. En vue de la reprise des négociations politiques officielles, mon Envoyé spécial a continué de débattre des questions liées à la transition politique avec le Gouvernement de la République arabe syrienne, les États de la région et la société civile syrienne pendant tout le mois de juillet.

B. Droits de l'homme

17. Le Haut-Commissariat a continué de recevoir en juillet des informations faisant état de violations graves des droits de l'homme. Le 19 juillet ont été diffusées une vidéo et des photos montrant des membres d'un groupe armé non étatique en train d'importuner et de maltraiter un jeune homme à l'arrière d'une camionnette avant que l'un des combattants ne le décapite, dans le quartier de Chaar, à Alep. L'âge du jeune homme, qui avait l'apparence d'un enfant sur les images, était alors inconnu. Le 20 juillet, le Haut-Commissariat a reçu une note verbale du Gouvernement de la République arabe syrienne, dans laquelle on apprenait que la victime était âgée de 12 ans. Le même jour, les Bataillons Noureddine Zanki ont publié un communiqué dans lequel ils condamnaient l'incident et déclaraient que les responsables avaient été arrêtés et remis à une commission d'enquête.

C. Action humanitaire

18. En juillet, les organismes d'aide humanitaire des Nations Unies et leurs partenaires ont continué de venir en aide par tous les moyens possibles à des millions de personnes dans le besoin, à partir du territoire de la République arabe syrienne ou à travers la frontière, conformément aux dispositions des résolutions 2165 (2014), 2191 (2014) et 2258 (2015) (voir tableau 1)du Conseil de sécurité. Les organisations non gouvernementales ont, elles aussi, poursuivi leur aide à des niveaux analogues à ceux des mois précédents. Le Gouvernement a continué d'assurer les services de base dans les zones qu'il contrôle, ainsi que dans de nombreux secteurs échappant à son contrôle.

Tableau 1
Nombre de bénéficiaires de l'aide des organismes des Nations Unies en juillet 2016

Organisme Nombre de bénéficiaires
Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture 26 130
Organisation internationale pour les migrations 45 561
Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés 175 570
Fonds des Nations Unies pour l'enfance 1,4 million
Programme des Nations Unies pour le développement 878 091
Fonds des Nations Unies pour la population 384 507
Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient 450 000
Programme alimentaire mondial 4,2 millions
Organisation mondiale de la Santé 746 334

19. L'acheminement de l'aide depuis les pays frontaliers s'est poursuivi au cours de la période considérée. En juillet, 10 convois composés de 335 camions sont entrés en République arabe syrienne par les frontières turque et jordanienne, conformément aux dispositions des résolutions 2165 (2014), 2191 (2014) et 2258 (2015). Six d'entre eux ont franchi la frontière à Bab el-Haoua (307 camions), trois à Bab el-Salam (13 camions) et un à Ramtha (15 camions). Ces convois portent à 9 013 le nombre total de camions ayant atteint la République arabe syrienne depuis le début des opérations (6 582 par Bab el-Haoua, 716 par Bab el-Salam et 0715 par Ramtha).

20. L'acheminement de convois par le poste frontière de Ramtha depuis la Jordanie a repris le 28 juillet après avoir été interrompu par le Gouvernement jordanien le 21 juin en raison de l'insécurité le long de la frontière syro-jordanienne. En Turquie, les convois ont été stoppés pendant deux jours à la suite de la tentative de coup d'État du 15 juillet. Ils ont repris sans encombre le 18 juillet.

21. Comme le prévoient les résolutions du Conseil, l'ONU informe préalablement les autorités syriennes de chaque convoi et leur fournit des précisions sur le contenu et la destination des camions ainsi que sur le nombre de bénéficiaires. Le Mécanisme de surveillance de l'aide humanitaire en République arabe syrienne a poursuivi ses opérations. En juillet, il a contrôlé 335 camions dans les 10 convois acheminés, confirmé le caractère humanitaire de chacun et informé les autorités syriennes de chaque expédition. Il a continué de bénéficier de la coopération active des Gouvernements jordanien et turc.

22. En juillet, les convois interinstitutions recensés dans le tableau 2 ci-après ont pu être acheminés jusqu'à des zones assiégées et des secteurs difficiles d'accès. En outre, le Programme alimentaire mondial (PAM) a réalisé 22 parachutages, larguant au-dessus de la ville de Deïr el -Zor un total de 405 tonnes de produits alimentaires fournis par lui-même et d'aide humanitaire fournie par d'autres organismes des Nations Unies. Au total, depuis avril, le PAM a réalisé 87 parachutages, qui ont permis d'acheminer 1 552 tonnes de denrées alimentaires, de matériaux de construction d'abris et de produits relatifs au programme eau, assainissement et hygiène pour tous. En outre, le PAM et la cellule d'appui au Module mondial de la logistique ont réalisé 39 ponts aériens entre Damas et Qamichli, et avaient ainsi acheminé, le 2 août, 1 464 tonnes de produits alimentaires divers ainsi que de matériel relatif à l'eau, l'assainissement et l'hygiène et des matériaux de construction d'abris. Au cours de la période considérée, les organismes des Nations Unies ont également acheminé des convois indépendants à travers les lignes de front et à destination des localités difficiles d'accès ou ont atteint ces zones dans le cadre de l'exécution de leurs programmes ordinaires.

Tableau 2
Convois interinstitutions, juillet 2016

Date Site Objectif à atteindre (nombre de bénéficiaires) Nombre de personnes ayant effectivement reçu une aide Type d'aide
2 juillet Partie orientale d'Harasta 21 000 10 000 Nourriture, compléments nutritionnels, WASH (eau/assainissement/hygiène pour tous), matériel éducatif, fournitures médicales
12 juillet Cheik Maqsoud 27 000 27 000ª Nourriture, compléments nutritionnels, eau/assainissement/hygiène pour tous, matériel éducatif, articles non alimentaires, fournitures médicales
14 et 18 juillet Waar 75 000 75 000 Nourriture, eau/assainissement/hygiène pour tous, compléments nutritionnels, articles non alimentaires, fournitures médicales
19 juillet Sirghaya 15 000 15 000 Nourriture, compléments nutritionnels, eau/assainissement/hygiène pour tous, articles non alimentaires, fournitures médicales
21 juillet Qalaat el-Madiq 32 000 32 000 Nourriture, eau/assainissement/hygiène pour tous, compléments nutritionnels, matériel éducatif, articles non alimentaires, fournitures médicales
21 juillet Big Orm 70 000 50 000 Compléments nutritionnels, articles non alimentaires, traitements et matériel médicaux
24 juillet Mouaddamiyé el-Cham 45 000 40 000 Nourriture, eau/assainissement/hygiène pour tous, matériel éducatif, fournitures médicales
26 juillet Hajeb et Banan 7 000 7 000 Nourriture, eau/assainissement/hygiène pour tous, compléments nutritionnels, matériel éducatif, articles non alimentaires, fournitures médicales
26 juillet Talbissé 84 000 84 000 Nourriture, compléments nutritionnels, fournitures médicales
28 juillet Rastan 110 000 110 000 Nourriture, eau/assainissement/hygiène pour tous, articles non alimentaires, fournitures médicales
31 juillet Houlé 71 000 71 000 Nourriture, eau/assainissement/hygiène pour tous, compléments nutritionnels, matériel éducatif, articles non alimentaires, fournitures médicales

ª Dernier de trois convois qui, au total, ont bénéficié à quelque 27 000 personnes. Les deux convois précédents ont atteint Cheikh Maqsoud les 23 et 28 juin.

Accès humanitaire

23. L'acheminement de l'aide humanitaire aux personnes dans le besoin en République arabe syrienne est toujours extrêmement ardu dans bon nombre de secteurs, à la suite des conflits en cours, de la fluidité des lignes de front et des restrictions délibérées imposées par les parties à la circulation des personnes et des marchandises.

24. En juillet, le nombre de personnes vivant dans des zones assiégées et difficiles d'accès s'établissait à 5,47 millions, soit quelque 900 000 personnes de plus que le chiffre (4,6 millions) de l'estimation précédente. Comme indiqué précédemment, cette augmentation est principalement due au fait que de nouvelles zones des provinces d'Alep, de Raqqa et d'Hassaké ont été ajoutées à la liste en raison du niveau d'insécurité, et que l'accès des acteurs humanitaires, depuis le pays même ou les pays voisins, est restreint. De plus, la population de l'est d'Alep, où résideraient 250 000 à 275 000 personnes, risque fort de finir assiégée à mesure que les combats les encerclent et que leurs moyens d'accès aux produits de première nécessité s'amenuisent.

25. L'accès aux millions de personnes qui vivent dans des zones assiégées et difficiles d'accès est resté une préoccupation majeure. Dans l'ensemble, les organismes des Nations Unies et leurs partenaires n'ont pu atteindre que 39 des 182 zones assiégées et difficiles d'accès (soit 21 %) par convois interinstitutions ou par convois indépendants. On trouvera dans le tableau 3 des précisions sur l'acheminement de l'aide dans ces zones au mois de juillet. Parallèlement, les organisations non gouvernementales ont continué, dans des conditions extrêmement difficiles, d'assurer des services limités dans les domaines de la santé, l'éducation et la protection, entre autres, dans des lieux difficiles d'accès.

Tableau 3
Aide acheminée aux zones difficiles d'accès, assiégées et prioritaires situées au-delà des lignes de front, juillet 2016

Secteur (aide acheminée par les Nations Unies uniquement) Nombre de personnes ayant reçu une aide (pourcentage des 5,47 millions de personnes concernées)
Sécurité alimentaire 891 945 (16 %)
Santé (traitements) 402 433 (7,3 %)
Articles non alimentaires 119 983 (2,1 %)
Eau, assainissement et hygiène 120 898 (2,2 %)

26. Le conflit ouvert qui se poursuit dans plusieurs provinces a nui au bon acheminement de l'aide humanitaire et empêché les populations d'accéder aux services essentiels. Des marchés, écoles, infrastructures médicales et autres installations civiles ont été endommagés par les affrontements en juillet, réduisant la disponibilité de services de base essentiels dans des domaines vitaux. Le 20 juillet, par exemple, une frappe aérienne aurait frappé la cour du centre d'examens Khalid Shaar, dans la ville d'Edleb, entraînant la mort d'une étudiante et d'un autre adulte. À la suite de frappes aériennes répétées, le rectorat local a décidé de reporter la tenue de l'ensemble des examens, qui ont pu reprendre le 27 juillet. En outre, un bombardement aérien sur la ville de Saraqeb, dans la province d'Edleb, aurait frappé une université le 30 juillet, endommageant partiellement la structure des bâtiments. l'Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient n'a pas été en mesure de mener de mission à Yalda en juillet en raison de l'insécurité persistante.

27. Les combats ont également perturbé l'acheminement de l'aide humanitaire aux communautés à risque. À titre d'exemple, aucune marchandise n'a pu être livrée à l'est d'Alep au cours du mois de juillet, la route du Castillo, seule voie d'accès, étant coupée depuis le 7 juillet. Avant que cette route ne soit coupée, le PAM avait entreposé à l'avance aux alentours de la nourriture pour des dizaines de milliers de personnes, censée couvrir les besoins pour le mois de juillet et une partie du mois d'août. Malheureusement, les distributions sont actuellement interrompues car les combats se poursuivent et les conditions de sécurité sont toujours instables. Depuis que la voie d'accès est barrée, les prix des produits de première nécessité, tels que le carburant et les produits frais, ont augmenté, et certains produits de base sont introuvables sur le marché. Les partenaires de l'UNICEF ont par ailleurs recensé plus de 170 cas de malnutrition aiguë dans l'est d'Alep et fourni une assistance nutritionnelle de base. Toutefois, à mesure que les médecins et les installations se raréfient, les partenaires humanitaires peinent à maintenir les traitements. Faute d'accès aux compléments nutritionnels, les traitements de 115 enfants mal nourris, pris en charge jusqu'à récemment dans l'est d'Alep, ont dû être interrompus.

28. Le 28 juillet, la Fédération de Russie a annoncé le lancement d'une vaste opération d'assistance à la population civile d'Alep, visant notamment à permettre l'évacuation des civils par des couloirs humanitaires. L' ONU a travaillé d'arrache-pied sur les plans de préparation aux situations d'urgence pour venir en aide à l'ensemble des personnes dans le besoin, et s'est entretenue dans les détails avec les États Membres, notamment sur la proposition de la Fédération de Russie, afin de veiller à ce que les principes clefs de l'aide humanitaire soient strictement respectés, et ce dans quelque initiative que ce soit.

29. L'ingérence délibérée des parties et les restrictions qu'elles imposent ont également continué d'entraver l'acheminement de l'aide. Ainsi, le PAM n'est toujours pas en mesure de prêter assistance aux populations dans le besoin qui se trouvent dans les zones contrôlées par l'EIIL, car toutes les opérations d'assistance destinées à ces zones ont dû être suspendues en raison de l'impossibilité de travailler de manière indépendante et d'assurer le suivi des activités. Le Programme ne peut donc atteindre ni la province de Raqqa, ni l'essentiel de la province de Deïr-ez-Zor (à l'exception de la ville de Deïr-ez-Zor, où il procède à des parachutages), ni certaines zones reculées des campagnes du nord d'Alep, du sud d'Hassaké et du nord-ouest de la province de Hama. Parallèlement, en juillet, plus de 214 000 enfants, femmes et hommes vivant dans des zones assiégées ou difficiles d'accès ont reçu de l'UNICEF et de ses partenaires des aliments thérapeutiques, des produits d'hygiène et du matériel d'auto-apprentissage autonome, ainsi qu'une aide nutritionnelle et un soutien psychosocial.

30. Il était prévu qu'au mois de juillet, les convois interinstitutions de l'ONU parviennent à 1,2 million de personnes dans 35 sites assiégés, difficiles d'accès ou prioritaires car situés au-delà d'une ligne de front. L'accès à 34 de ces 35 sites a été autorisé, ce qui a permis d'atteindre environ 75 % du total des bénéficiaires escomptés, compte tenu des écarts entre le nombre des bénéficiaires approuvés et le nombre réel de bénéficiaires. L'accès à 17 sites a été approuvé sans restriction, permettant de venir en aide à 502 500 personnes; l'accès à 17 autres sites n'a été que partiellement approuvé, des restrictions ayant été imposées sur le type d'aide ou le nombre de bénéficiaires approuvés, ce qui a permis d'aider 354 000 personnes; enfin, l'accès à un site (Qaboun) a été refusé, privant 28 000 personnes d'aide humanitaire. Au total, en juillet, les convois interinstitutions de l'ONU ont atteint 484 000 bénéficiaires sur 9 sites, soit 40 % de l'objectif |2|. Des instruments médicaux ont à nouveau été retirés des convois (voir par. 31). L'insécurité accrue, la lenteur des procédures administratives aux niveaux local et national et l'absence de coopération des quatre parties à l'Accord de cessez-le-feu portant sur quatre localités (Zabadani, Madaya, Fouaa et Kafraya) ont empêché les organismes des Nations Unies et les autres partenaires présents sur le terrain de mettre pleinement en œuvre le plan établi pour juillet. Le 4 juillet, le Coordonnateur résident et Coordonnateur de l'action humanitaire des Nations Unies pour la République arabe syrienne, Yacoub El Hillo, a publié une déclaration dans laquelle il se dit alarmé par les rapports faisant état de la détérioration de la situation humanitaire dans les quatre villes parties à l'Accord de cessez-le-feu (Fouaa, Kafraya, Zabadani et Madaya) et exhorte ces dernières à autoriser immédiatement l'accès humanitaire pour éviter une famine. Il souligne également, dans cette déclaration, l'effet délétère de la stratégie « donnant-donnant » appliquée aux évacuations sanitaires et insiste sur la nécessité d'adopter une approche rationnelle des interventions de secours d'urgence. Bien que peu d'évacuations aient eu lieu en juillet, plusieurs enfants des quatre villes ont actuellement besoin d'une évacuation sanitaire immédiate.

31. Le point de passage de Nousseïbin/Qamichli (province de Hassaké), fermé le 27 décembre 2015 par les autorités turques pour des raisons de sécurité, n'a toujours pas été rouvert. La province de Hassaké demeure en grande partie inaccessible par la route pour les organismes des Nations Unies présents sur le territoire de la République arabe syrienne. Le 9 juillet, l'ONU a entrepris des opérations de transport aérien depuis Damas vers l'aéroport de Qamichli. Au 2 août, la cellule d'appui au Module mondial de la logistique avait réalisé 39 ponts aériens entre les deux villes, transportant 1 464 tonnes de produits alimentaires divers, de compléments alimentaires, de matériaux de construction d'abris et d'articles relatifs à l'eau, l'assainissement et l'hygiène pour tous pour le compte d'autres organismes humanitaires, et notamment des rations alimentaires suffisantes pour nourrir 121 500 personnes pendant un mois. Au cours du mois de juillet, 13 091 rations alimentaires provenant du PAM ont été envoyées à des partenaires de la province d'Hassaké pour distribution, soit assez pour nourrir 65 455 personnes pendant un mois. La province d'Hassaké n'avait pas reçu d'aide alimentaire depuis décembre 2015.

32. Au total, 31 nouvelles demandes de visa ont été soumises en juillet, dont 21 ont été approuvées, y compris des demandes plus anciennes, et dix demeurent en attente. Par ailleurs, 43 demandes de renouvellement de visa ont été déposées en juillet, dont 23 ont été approuvées (y compris des demandes plus anciennes), 19 demeurent en attente et une a été rejetée.

33. En tout, 17 organisations non gouvernementales internationales sont enregistrées auprès des autorités de la République syrienne et autorisées à mener des activités sur le territoire. Quatre autres organisations non gouvernementales internationales sont en passe d'obtenir le même statut. Ces organisations continuent de se heurter à une série d'obstacles et de restrictions administratifs qui les empêchent de mener leurs activités, et elles n'ont toujours pas l'autorisation de conduire des évaluations indépendantes des besoins.

Zones assiégées

34. Actuellement, 590 200 personnes vivent dans des zones considérées comme assiégées par l'ONU. La situation humanitaire dans ces zones reste désastreuse. L'acheminement de marchandises vers ces zones par les itinéraires officiels continue d'être largement bloqué, provoquant une flambée des prix des produits de base qui parviennent jusqu'à ces zones assiégées par des voies de ravitaillement officieuses, par ailleurs irrégulières. La liberté de circulation reste soumise à d'importantes restrictions, même si de petits groupes de personnes sont parfois autorisés par intermittence à quitter les zones assiégées et à y entrer de nouveau.

35. L'envoi de convois interinstitutions dans les zones assiégées au cours des derniers mois a mis en évidence de nombreuses lacunes critiques dans le domaine de la protection qui vont bien au-delà de la simple protection physique, en raison de la poursuite des combats et de l'absence de liberté de circulation. Nombre de familles ont été séparées, y compris des enfants de leurs parents. Des signes de traumatismes graves ont été observés, particulièrement chez les enfants. Dans toutes les régions, les habitants se sont dits très inquiets de ce que les actes d'état civil ne soient plus enregistrés et de ce que les documents officiels ne soient plus distribués. L'accès à l'éducation a été sévèrement entravé, et bon nombre d'enfants semblent avoir été recrutés dans des groupes armés, et on a vu beaucoup de garçons de moins de 18 ans en uniforme ou en civil brandissant des armes. Les informations disponibles indiquent également que le mariage des enfants est une pratique généralisée et que les familles marient leurs filles à un âge de plus en plus précoce, souvent dans le but d'éviter la pauvreté. La situation est encore aggravée par le fait que les jeunes vivant dans les zones assiégées manquent de perspectives d'avenir.

36. En juillet, l'Organisation est venue en aide à quelque 224 000 personnes vivant dans les zones assiégées (soit 37,9 % de la population totale vivant dans ces zones) dans le cadre d'opérations interorganisations, y compris au moyen d'aérolargages effectués au-dessus de la ville de Deïr el-Zor. Depuis le début de l'année, les opérations interorganisations et les opérations de l'Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche -Orient (UNRWA) ont permis de venir en aide à 401 650 personnes vivant dans des zones assiégées au total (soit 68 % de la population totale vivant dans ces zones), et beaucoup de ces personnes ont bénéficié d'une aide plus d'une fois.

37. Les forces gouvernementales continuent à assiéger diverses localités : a) dans la Ghouta orientale (province de Rif-Damas), quelque 282 500 personnes vivent encore en état de siège à Douma, dans l'est de Harasta, à Irbin, à Zamalka, à Aïn Terma, à Hammoura, à Jisreïn, à Kafr Batna et à Saqba. Dans la province de Rif -Damas, le siège imposé par les forces gouvernementales touche toujours quelque 4 000 personnes à Daraya; quelque 43 000 personnes à Madaya et Bqin; quelque 700 personnes à Zabadani; quelque 45 000 personnes à Mouaddamiyé el-Cham; dans le quartier de Waar (province de Homs), ce sont quelque 75 000 personnes qui sont concernées. Certaines localités, notamment Madaya et Bquin, n'ont pas reçu d'aide de l'ONU depuis le 30 avril.

38. À Fouaa et Kafraya (province d'Edleb), quelque 20 000 personnes continuent d'être prises au piège du siège mené par des groupes armés non étatiques et par le Front el-Nosra. Ces localités elles non plus n'ont pas reçu d'aide de l'ONU depuis le 30 avril.

39. Dans le quartier de Yarmouk à Damas, quelque 10 000 personnes vivent sous le siège imposé à la fois par les forces gouvernementales et par des groupes armés non étatiques.

40. Dans les quartiers de l'ouest de la ville de Deïr el-Zor, qui sont sous le contrôle du Gouvernement, environ 110 000 personnes vivent sous un siège imposé par l'EIIL.

Attaques contre des installations médicales et libre passage des fournitures, du personnel et du matériel médicaux

41. On constate toujours de graves défaillances dans le fonctionnement et les résultats des services chargés des soins de santé primaires, secondaires et tertiaires, en raison des dégâts considérables subis par les installations sanitaires, du renouvellement rapide du personnel sanitaire et de la pénurie de professionnels qualifiés dans différentes disciplines médicales. Les services de santé pédiatrique et maternelle, y compris la vaccination de routine, continuent d'être gravement touchés, tout particulièrement dans les provinces d'Alep, de Hama, de Homs et de Deraa, ainsi que dans les secteurs assiégés de Rif-Damas.

42. En violation flagrante de la protection spéciale dont jouissent les installations sanitaires au regard du droit humanitaire international et des dispositions de la résolution 2286 (2016) du Conseil de sécurité, adoptée le 3 mai, des installations médicales ont continué d'être endommagées ou détruites suite à des combats en République arabe syrienne. D'après des informations crédibles reçues par l'ONU et ses partenaires dans le domaine de la santé, lesquelles sont en cours de vérification, 44 attaques auraient visé des installations médicales au cours du seul mois de juillet. Ainsi, au cours du mois de juillet, cinq des neuf hôpitaux de l'est d'Alep ont été attaqués à plusieurs reprises, ce qui a gravement perturbé leur fonctionnement et limité de façon drastique la fourniture de soins de santé vitaux à des enfants et à leurs familles. Des patients ont été tués et des membres du personnel médical auraient été blessés au cours de ces attaques, qui ont notamment visé les hôpitaux El-Bayan, El-Hakim, El-Daqaq, el-Sayyida el-Zahra et Omar Ibn Abdel-Aziz. Un bébé de deux jours serait décédé dans sa couveuse suite aux interruptions de l'alimentation en oxygène provoquées par l'attaque. Trois autres bébés seraient morts le lendemain en raison de problèmes respiratoires causés par les retombées des bombardements. Ces centres médicaux sont gravement endommagés. Les autres hôpitaux de l'est de la province d'Alep ne peuvent pas répondre aux besoins de la population, soit entre 250 000 et 275 000 personnes environ. Les rares professionnels de santé qui restent sont soumis à rude épreuve et travaillent selon un système de roulement. La pénurie de travailleurs sanitaires est encore aggravée par le fait que nombre de ces travailleurs sont dans l'incapacité de faire le trajet quotidien entre leur domicile, dans l'ouest de la ville, et les quartiers situés à l'est. La pénurie d'électricité et d'eau entrave gravement le fonctionnement des services de santé.

43. En outre, un hôpital d'Andana, une banque du sang d'Atareb (tous deux dans la province d'Alep), ainsi qu'un hôpital de campagne situé à Jassem (province de Deraa) ont été touchés par des frappes aériennes le 31 juillet. La veille, une maternité d'Edleb avait été touchée par des frappes aériennes qui ont rendu l'établissement inutilisable et tué au moins deux personnes; en outre, plusieurs patients, dont des bébés, ont été blessés, de même que trois travailleuses sanitaires. Il s'agissait de la seule maternité de ce type dans la région, et l'établissement accueillait plus d'un millier de femmes et d'enfants et permettait la naissance de centaines de nouveau-nés chaque mois. D'après les autorités sanitaires locales, l'établissement a été délibérément pris pour cible, étant donné qu'il a essuyé trois des six frappes aériennes enregistrées lors de cette matinée. Ces frappes auraient fait des douzaines de victimes et de blessés, parmi lesquels des femmes enceintes, des enfants ainsi que des travailleurs sanitaires. Avant d'être visés par ces frappes, ces établissements fournissaient des soins de santé vitaux à des dizaines de milliers de personnes. Nombre d'entre eux sont désormais hors d'usage. En outre, selon des informations vérifiées, l'hôpital national de Raqqa continue d'être utilisé par l'EIIL à des fins militaires et des combattants armés - parmi lesquels des enfants - sont postés à l'extérieur de l'établissement pour monter la garde et contrôler l'accès.

44. L'Organisation mondiale de la Santé (OMS) et le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) ont poursuivi leur campagne de vaccination à l'échelle nationale. À ce jour, la première phase de la campagne dans la zone transfrontalière a permis de vacciner quelque 1 070 245 enfants, ce qui représente un taux de couverture vaccinale de 86 %. En outre, à partir de Damas, l'Organisation a eu accès à 1,2 million d'enfants dont 476 000 vivent dans des zones difficiles d'accès ou assiégées. En juillet, l'OMS, l'UNICEF et leurs partenaires ont lancé, à partir de l'intérieur de la République arabe syrienne, la deuxième phase de la campagne qui cible les enfants de moins de cinq ans, en mettant l'accent sur les zones difficiles d'accès ou assiégées.

45. Depuis le début de l'année 2016, l'OMS a déposé 29 requêtes auprès du Gouvernement de la République arabe syrienne en vue d'accéder à 93 localités situées dans 11 provinces (quatre requêtes ont été soumises en juillet). Le Gouvernement syrien a accédé à huit de ces 29 requêtes. Aucune réponse favorable n'a été reçue en juillet et 21 requêtes demeurent sans réponse, en dépit des nombreux rappels adressés par l'OMS à ce sujet.

46. Les opérations de confiscation de médicaments et de fournitures médicales qui permettent de sauver des vies se sont poursuivies. Des sérums, des articles jetables (rasoirs, lames de scalpel, gaze) et du matériel chirurgical (forceps, ciseaux, aiguilles) sont systématiquement retirés des kits obstétriques et pédiatriques, des kits sanitaires d'urgence interinstitutions et des kits de prise en charge des maladies diarrhéiques. Au cours du mois de juillet, les traitements et fournitures ci-après ont été retirés des convois |3| :

Localité Nombre de traitements Type de traitements
Irbin 343 Kits de soins des brûlures, médicaments pour le traitement et la prophylaxie des accidents cardiaques et des angines et confiscation de certains articles du kit pneumonie type B
Waar 2 104 Kits de traumatologie « italiens » types A et B, stérilisateur à vapeur, psychotropes, atropine et lidocaïne, articles chirurgicaux
Sirghaya 509 Psychotropes, kits de soins des brûlures, confiscation de certains articles des unités supplémentaires des kits sanitaires d'urgence insterinstitutions et des kits pneumonie type B, à quoi s'ajoute la réduction du nombre de kits
Qalaat el-Madiq 1 572 Kit pneumonie type B, kits sanitaires d'urgence insterinstitutions (unités de base et unités complémentaires) (fluide pour injection intraveineuse, psychotropes, anesthésiques et médicaments essentiels) et antiseptiques
Talbissé 660 Antiseptiques et kits d'injection intraveineuse

47. Craignant que les établissements sanitaires soient pris pour cibles, les femmes enceintes du sud de la République arabe syrienne continuent de privilégier l'accouchement à domicile. Cette tendance est renforcée par le fait que ces femmes souhaitent obtenir des documents attestant en bonne et due forme de la naissance de leur enfant, or ce service n'est guère plus assuré que par des sages-femmes qui sont des salariées du Gouvernement et qui craignent des représailles de la part de ce dernier si elles sont surprises à officier dans des établissements sanitaires non autorisés ou non reconnus par le Gouvernement. Le Comité international de secours a procédé à une évaluation des documents d'état civil en avril-juin 2016, dont il ressort que des certificats de naissance ont été délivrés dans 35% des cas seulement à Deraa et dans 15 % seulement des cas à Qouneïtra. En outre, des bénéficiaires de Rif-Damas, Qouneïtra et Deraa ont indiqué comme principal élément justifiant leur demande de protection « l'absence ou la perte de documents d'identité ».

Sûreté et sécurité du personnel et des locaux

48. Vingt-sept membres du personnel des Nations Unies, dont 25 membres du personnel recruté sur le plan régional de l'UNRWA, 1 membre du personnel du Programme des Nations Unies pour le développement et 1 de l'UNICEF, sont toujours détenus ou portés disparus. Depuis le début du conflit, des douzaines d'humanitaires ont été tués, dont 17 membres du personnel de l'ONU, 53 membres et bénévoles du Croissant-Rouge arabe syrien et huit bénévoles et membres de la Société du Croissant-Rouge palestinien. Parmi ces victimes figure Yasser Mahmoud Shuaeeb, membre du personnel de l'UNRWA, qui est décédé le 17 juillet après avoir été touché par des éclats d'obus. De nombreux membres du personnel d'organisations non gouvernementales internationales et nationales auraient également été tués.

III. Observations

49. Plus de cinq ans après le début du conflit, il ne reste guère de mots pour décrire les souffrances endurées par les Syriens. Aux civils morts et blessés, dont le nombre ne cesse d'augmenter, à la destruction des biens matériels et du patrimoine culturel et au déplacement de dizaines de milliers de personnes vient s'ajouter le fait que nombre de Syriens sont également en proie à de graves pénuries d'eau et de carburant, ce qui exacerbe les maladies et les difficultés, en particulier dans les zones assiégées et difficiles d'accès.

50. Dans les zones assiégées, rien ne vient soulager les souffrances des Syriens. Dans certaines des zones en théorie couvertes par l'Accord de cessez-le-feu portant sur quatre localités - Zabadani, Madaya, Fouaa et Kafraya - et leurs environs, des Syriens ayant désespérément besoin d'une évacuation sanitaire continuent de se voir refuser l'accès aux soins médicaux nécessaires en raison de la nature de l'accord, fondé sur une logique du donnant-donnant. Parmi ces personnes se trouvent des enfants, des mères de famille, des personnes âgées et d'autres groupes de personnes vulnérables. En outre, les populations de ces zones n'ont pas reçu d'assistance de l'Organisation depuis le 30 avril 2016, ce qui laisse craindre des cas de malnutrition risquant de dégénérer en famine. Cette pratique consistant à prendre les civils en otages pendant les combats est illégale et doit cesser.

51. À Alep, plus de deux millions d'habitants vivent dans la crainte que la ville soit assiégée et dans des conditions précaires et dangereuses, les combats faisant rage autour d'eux. La situation s'aggrave pour les 250 000 à 275 000 personnes piégées dans l'est de la ville depuis le 7 juillet et elle est extrêmement précaire pour les habitants de l'ouest de la ville. La conduite des hostilités reste caractérisée par un non-respect généralisé des règles fondamentales du droit international humanitaire. Toutes les parties au conflit manquent à l'obligation qui leur incombe de protéger les civils. Dans leur lutte visant à s'emparer de territoires et de ressources, elles lancent des attaques aveugles contre des zones résidentielles, y compris au moyen de barils d'explosifs, tuant des centaines de civils, dont des douzaines d'enfants. La situation à Alep laisse présager une catastrophe humanitaire sans précédent dans le conflit syrien, qui depuis plus de cinq ans a causé tant de souffrances et fait couler tant de sang. Je ne saurais souligner assez fermement la nécessité de marquer une pause de 48 heures dans les combats ainsi que de permettre un accès humanitaire sûr et durable à l'ensemble des zones de la ville. J'exhorte les deux coprésidents du Groupe international de soutien pour la Syrie, les États-Unis et la Fédération de Russie, à parvenir rapidement à un accord en vue d'un cessez-le-feu à Alep et ailleurs. Un tel accord pourrait non seulement alléger les souffrances du peuple syrien, mais également contribuer à créer un environnement plus propice à la reprise des pourparlers entre Syriens.

52. En juillet, des dizaines de milliers de personnes ont été contraintes de quitter leurs foyers pour se mettre à l'abri. Les combats ont continué à toucher les civils dans tout le pays, à Alep, à Manbej, dans la Ghouta orientale, à Deraa et ailleurs. Les attaques contre des hôpitaux, des écoles, des services essentiels et les convois d'aide humanitaire se sont poursuivies sans relâche. D'après des informations crédibles reçues par l'ONU et ses partenaires dans le domaine de la santé, lesquelles sont en cours de vérification, 44 attaques auraient visé des installations sanitaires au cours du seul mois de juillet. Ce qui était impensable il y a cinq ans est devenu la norme pour les familles et les populations syriennes. Les combats doivent cesser pour que les humanitaires puissent acheminer l'aide et sauver des vies. Mais, plus important encore, les combats doivent cesser pour soulager les souffrances de ceux qui ont déjà tant perdu.

53. Alors que mon Envoyé spécial se prépare à organiser la prochaine série de négociations politiques, je réitère mon appel à la communauté internationale et, plus particulièrement, aux membres du Groupe international de soutien à la Syrie, pour qu'ils renforcent la cessation des hostilités et prennent des mesures visant à améliorer l'accès de l'aide humanitaire dans l'ensemble de la République arabe syrienne. Je salue les efforts constants déployés par la Fédération de Russie et les États-Unis pour maintenir l'élan et être à la tête de l'appui que la communauté internationale donne aux parties syriennes, pour qu'elles oeuvrent en vue d'un accord politique sur la base de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité. Le peuple de la République arabe syrienne ne devrait pas être obligé d'attendre plus longtemps pour que les parties syriennes, régionales et internationales parviennent à un accord. Il a assez souffert et mérite qu'on lui accorde pleine attention, que de véritables mesures soient prises, que des idées naissent et que la volonté s'affiche, pour que prenne fin ce qui est devenu l'une des pires tragédies humanitaires de notre époque.


Notes :

1. Le 28 juillet, le Front el-Nosra a annoncé qu'il s'appellerait désormais Front Fatah el-Cham - ou Front de la conquête du Levant - et qu'il ne prêtait plus allégeance à Al-Qaida. [Retour]

2. Le total ne prend pas en compte les 10 000 bénéficiaires ayant reçu de l'aide le 2 juillet dans l'est d'Harasta, qui ont été comptabilisés parmi les bénéficiaires du plan de juin. [Retour]

3. Des articles médicaux, sanitaires et chirurgicaux ont également été retirés des convois à destination de Rastan et de Houlé. Le nombre d'articles confisqués est en cours de vérification. [Retour]


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