Informations
Equipo Nizkor
        Bookshop | Donate
Derechos | Equipo Nizkor       

12fév16

English | Español | Русский


Premier rapport du Mécanisme d'enquête conjoint de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques et de l'Organisation des Nations Unies


Haut de page

Nations Unies
Conseil de sécurité

S/2016/142

Distr. générale
12 février 2016
Français
Original : anglais

Lettre datée du 12 février 2016, adressée au Président du Conseil de sécurité par le Secrétaire général

J'ai l'honneur de vous faire tenir ci -joint le premier rapport du Mécanisme d'enquête conjoint de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques et de l'Organisation des Nations Unies (voir l'annexe).

Je vous serais obligé de bien vouloir faire porter à la connaissance des membres du Conseil de sécurité la présente lettre et son annexe.

(Signé) BAN Ki-moon


Annexe

Lettre d'envoi

Le Groupe de direction du Mécanisme d'enquête conjoint de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques et de l'Organisation des Nations Unies a l'honneur de vous faire tenir ci-joint le premier rapport établi par le Mécanisme en application de la résolution 2235 (2015) du Conseil de sécurité (voir l'appendice).

Le rapport expose les travaux du Mécanisme à ce jour, les sources d'information dont il dispose et les considérations d'ordre méthodologique sous-jacentes à sa stratégie d'enquête. Il décrit de plus les dispositions que le Mécanisme entend prendre dans la phase suivante, durant laquelle seront menées des enquêtes au cas par cas dans le but d'identifier dans toute la mesure possible les personnes, entités, groupes ou gouvernements qui ont perpétré, organisé ou commandité l'utilisation comme arme, en République arabe syrienne, de produits chimiques, y compris le chlore ou tout autre produit chimique toxique, ou qui y ont participé d'une manière ou d'une autre.

Chef
Mécanisme d'enquête conjoint de l'Organisation
pour l'interdiction des armes chimiques
et de l'Organisation des Nations Unies
(Signé) Virginia Gamba

Membre du Groupe de direction
(Signé) Adrian Neritani

Membre du Groupe de direction
(Signé) Eberhard Schanze


Pièce jointe

Premier rapport du Mécanisme d'enquête conjoint de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques et de l'Organisation des Nations Unies

I. Introduction

1. Le présent rapport est soumis en application du paragraphe 11 de la résolution 2235 (2015) du Conseil de sécurité. Il couvre les activités que le Mécanisme d'enquête conjoint de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) et de l'Organisation des Nations Unies (ci-après le « Mécanisme ») a menées entre le 24 septembre 2015, jour où le présent mandat du Mécanisme a commencé, et le 10 février 2016 pour identifier dans toute la mesure possible les personnes, entités, groupes ou gouvernements qui ont perpétré, organisé ou commandité l'utilisation comme arme, en République arabe syrienne, de produits chimiques, y compris le chlore ou tout autre produit chimique toxique, ou qui y ont participé d'une manière ou d'une autre.

II. Historique

2. Dans ses résolutions 2118 (2013) et 2209 (2015), le Conseil de sécurité a condamné avec la plus grande fermeté toute utilisation comme arme, en République arabe syrienne, de quelque produit chimique toxique que ce soit, a affirmé que l'emploi d'armes chimiques constituait une violation grave du droit international et a souligné que ceux qui y avaient recouru devaient répondre de leurs actes. Le 7 août 2015, le Conseil a adopté à l'unanimité la résolution 2235 (2015), par laquelle a été créé le Mécanisme pour une période d'un an, avec possibilité de prorogation à l'avenir si le Conseil le juge nécessaire.

3. Le Mécanisme a été chargé d'identifier dans toute la mesure possible les personnes, entités, groupes ou gouvernements qui ont perpétré, organisé ou commandité l'utilisation comme arme, en République arabe syrienne, de produits chimiques, y compris le chlore ou tout autre produit chimique toxique, ou qui y ont participé d'une manière ou d'une autre dans les cas où la mission d'établissement des faits de l'OIAC détermine ou a déterminé que des produits chimiques, y compris le chlore ou tout autre produit chimique toxique, ont été utilisés ou ont probablement été utilisés comme arme en République arabe syrienne.

4. Conformément au paragraphe 5 de la résolution 2235 (2015), le Secrétaire général de l'ONU, en coordination avec le Directeur général de l'OIAC, a adressé au Président du Conseil de sécurité une lettre datée du 27 août (S/2015/669), dans laquelle figuraient des recommandations concernant la création et le fonctionnement du Mécanisme, y compris des éléments du mandat du Mécanisme. Une deuxième lettre, datée du 9 septembre (S/2015/696), a été adressée au Président du Conseil de sécurité en réponse à une demande d'éclaircissements sur le mandat du Mécanisme. Le Conseil de sécurité a approuvé ces recommandations, comme le Président du Conseil de sécurité l'a fait savoir dans la lettre datée du 10 septembre qu'il a adressée au Secrétaire général (S/2015/697).

5. Le 15 septembre, le Président du Conseil de sécurité a informé le Secrétaire général (voir S/2015/710) que les membres du Conseil de sécurité avaient pris note de l'intention exprimée par le Secrétaire général dans sa lettre datée du 11 septembre (S/2015/709) de nommer Virginia Gamba (Argentine) à la tête du groupe indépendant de trois membres devant être constitué pour diriger le Mécanisme. Le 24 septembre, le Secrétaire général, en coordination avec le Directeur général de l'OIAC, a nommé les deux autres membres du Groupe, Adrian Neritani (Albanie) et Eberhard Schanze (Allemagne), qui font aussi office d'adjoints et sont chargés, respectivement, des composantes questions politiques et enquêtes

Activités du Mécanisme

6. Les 1er et 2 octobre, le Groupe de direction a tenu une réunion de planification à New York, avec la participation de représentants du Secrétariat de l'ONU, du Secrétariat technique de l'OIAC et des secrétariats d'organismes ayant une expertise dans des domaines pertinents, dont l'Organisation mondiale de la Santé et l'Organisation internationale de police criminelle, pour discuter de la mise en place et du lancement des activités du Mécanisme. Les participants ont identifié les tâches et les rôles clefs, y compris l'appui dont le Mécanisme a besoin, ainsi que les profils et compétences que devaient posséder les membres du personnel du Mécanisme. Sur la base des travaux de la réunion, le Groupe a arrêté les priorités et les prochaines étapes immédiates concernant les méthodes de travail.

7. Le Groupe de direction a commencé à recruter son personnel de base, ventilé en trois composantes : un bureau politique, basé à New York et chargé de procéder à des analyses politiques, de donner des conseils juridiques et de gérer l'information et les relations avec les médias; un bureau d'enquête, basé à La Haye et chargé de procéder à des analyses chimiques et médicales, à des analyses de médecine légale, à des analyses de matériel militaire et à des analyses d'autres informations pertinentes; un bureau de planification et d'appui des opérations, basé à New York et chargé d'apporter un appui au Groupe, à la composante questions politiques et à la composante enquêtes.

8. Le Groupe de direction s'est attaché avec le plus grand soin à recruter un personnel impartial et expérimenté justifiant des compétences et connaissances spécialisées voulues en conformité avec les éléments proposés par le Secrétaire général dans ses lettres adressées au Président du Conseil de sécurité (S/2015/669 et S/2015/697). En outre, le Groupe a dûment pris en considération l'importance d'un recrutement effectué sur une base géographique aussi large que faisable, conformément au paragraphe 6 de la résolution 2235 (2015).

9. Des dispositions ont été prises pour veiller à ce que soient satisfaites les exigences concernant l'intégrité et la confidentialité des travaux du Mécanisme, y compris la protection des documents et des preuves. À cet égard, pour accueillir les bureaux de toutes les composantes du Mécanisme, il fallait trouver des locaux répondant à ces exigences, y compris une gestion sécurisée des communications et de l'information. Des locaux adéquats à usage de bureaux répondant à ces exigences ont ainsi été trouvés au Siège des Nations Unies pour le Groupe de direction, les composantes « questions politiques » et « appui » du Mécanisme. Un bail a en outre été signé avec l'OIAC pour les locaux que la composante « enquêtes » du Mécanisme occupe à La Haye. À ce propos, un accord sur le statut du bureau des enquêtes du Mécanisme est en discussion avec le Gouvernement des Pays-Bas.

10. Le déploiement d'une « structure légère » à Damas demeure une priorité pour le Groupe de direction et des discussions sur les dispositions envisageables sont en cours.

11. Les dépenses de personnel du Mécanisme et les activités initiales essentielles ont été financées pour les trois premiers mois au titre de l'autorisation d'engagement que l'Assemblée générale a accordée au Secrétaire général par sa résolution 68/249 relative aux dépenses imprévues et extraordinaires de l'exercice biennal 2014-2015. Depuis le 1er janvier 2016, le Mécanisme est financé au titre du budget ordinaire de l'ONU, comme approuvé par l'Assemblée générale dans sa résolution 70/248.

12. Des contributions volontaires étant nécessaires pour appuyer les activités du Mécanisme, le Conseil de sécurité a autorisé la création par le Secrétaire général d'un fonds d'affectation spéciale pour répondre aux besoins matériels et techniques du Mécanisme, y compris pour les compétences spécialisées et les activités supplémentaires dont le besoin se ferait sentir. De généreuses contributions ont été reçues à ce jour, signe de l'importance accordée au mandat du Mécanisme.

13. Conformément au paragraphe 10 de la résolution 2235 (2015), dans une sa lettre au Président du Conseil de sécurité datée du 9 novembre (S/2015/854), le Secrétaire général a informé le Conseil que le Mécanisme commencerait pleinement ses activités le 13 novembre.

III. Considérations d'ordre méthodologique

14. Le Groupe de direction a noté qu'il n'existait pas de précédent pour la conduite d'enquêtes destinées à identifier ceux ayant perpétré, organisé ou commandité l'utilisation comme arme de produits chimiques ou y ayant participé d'une manière ou d'une autre, contrairement au Mécanisme du Secrétaire général chargé d'enquêter sur les cas allégués d'emploi d'armes chimiques et biologiques pour lequel existaient des lignes directrices et des procédures (voir A/44/561). Le Groupe a donc décidé que, avant le terme du mandat du Mécanisme concernant l'identification de ceux impliqués dans l'utilisation de produits chimiques comme arme, des lignes directrices et procédures opérationnelles pour la conduite des enquêtes sur ceux impliqués dans l'utilisation de produits chimiques comme arme seraient soumises au Conseil de sécurité.

15. Le Mécanisme n'a pas mandat pour agir et fonctionner comme un organe judiciaire ou quasi judiciaire. En outre, il n'est pas investi de l'autorité ou de la compétence, que ce soit directement ou indirectement, de rendre une décision judiciaire officielle ou contraignante établissant la responsabilité pénale de quiconque. En conséquence, le Mécanisme fonctionnera en tant qu'instance d'enquête non judiciaire dans le champ de son mandat chargée d'identifier « dans toute la mesure possible » les personnes et autres acteurs impliqués dans l'utilisation de produits chimiques comme arme et de déterminer les rôles qu'ils ont joués.

16. Les travaux du Mécanisme sont assujettis aux principes d'impartialité, d'objectivité et d'indépendance. Ses travaux seront menés sous couvert de confidentialité. Toutes les informations et tous les éléments de preuve examinés par le Mécanisme seront soumis à une évaluation par vérification et corroboration. La possibilité d'examiner, de commenter et de répondre sera, selon qu'il conviendra, donnée à ceux que le Groupe de direction pourrait identifier.

17. Le Groupe de direction a tenu plusieurs ateliers, réalisé des études comparatives et examiné les méthodes de travail adoptées par des organes internationaux compétents en matière d'enquêtes ou de sanctions.

18. Outre ces études et consultations, le Groupe de direction a élaboré des méthodes de travail pour la conduite de ses enquêtes, y compris la collecte de preuves et d'autres renseignements connexes, ainsi que pour l'analyse, la vérification et la corroboration des informations, et pour la mise en place de structures appropriées pour la protection et la gestion de l'information, comme exposé ci-dessous.

19. Le Mécanisme enquêtera sur - et tentera de les identifier - les parties de toute catégorie qui ont perpétré, organisé ou commandité l'utilisation comme arme de produits chimiques ou qui y ont participé d'une manière ou d'une autre. Il s'emploiera aussi à déterminer si les personnes occupant des postes dirigeants étaient tenues de prendre les mesures nécessaires et raisonnables pour empêcher l'utilisation comme arme de produits chimiques.

20. Le Groupe de direction a décidé que les constatations figurant dans ses rapports au Conseil de sécurité devaient être étayées par des éléments à la force probante suffisante, c'est-à-dire des preuves crédibles et fiables, s'agissant de déterminer si une partie était impliquée dans l'utilisation de produits chimiques comme arme. Pour indiquer le niveau de preuve étayant ses constatations, le Groupe aura pour guide les normes suivantes :

    a) Preuves accablantes (éléments de preuve très convaincants étayant une constatation);

    b) Preuves substantielles (éléments de preuve très solides étayant une constatation);

    c) Preuves suffisantes (éléments de preuve crédibles et fiables permettant au Mécanisme de constater qu'une une partie a été impliquée dans l'utilisation de produits chimiques comme arme).

21. Les rapports (ou le rapport) contiendront un exposé des faits et un résumé des informations et des preuves recueillies. En outre, ils exposeront en détail les constatations, y compris une appréciation du niveau de preuve et chaque fois que possible de la force de ses constatations, et une conclusion.

22. Quand le Groupe de direction conclura que les preuves relatives à un incident faisant l'objet d'une enquête par le Mécanisme sont insuffisantes, il fera rapport en conséquence au Conseil de sécurité.

23. Le Mécanisme a dans un premier temps élaboré et mis en place un système de gestion des dossiers s'inscrivant dans un régime robuste de sécurisation de l'information applicable à toutes les informations obtenues ou produites par le Mécanisme dans la conduite de ses travaux. Ce régime tient compte des exigences jugées nécessaires en matière de confidentialité et de sécurité pour le stockage et l'utilisation des informations et des documents fournis au Mécanisme, y compris par l'OIAC. L'accès des membres du Mécanisme à l'information est sélectif au regard du besoin et les droits d'accès sont fixés par le Chef du Mécanisme. Tous les membres du personnel du Mécanisme ont signé un engagement en vertu duquel ils sont tenus de ne pas divulguer d'informations confidentielles obtenues dans le cadre de leur travail pour le Mécanisme et ils ont suivi une formation sur la sécurité de l'information.

24. Le Groupe de direction a décidé que la mise en place du Mécanisme se déroulerait selon les phases suivantes :

    a) Phase I : collecte de l'information et planification pour l'identification et le traitement des cas. Cette phase, qui a débuté dès que le Mécanisme a commencé pleinement ses activités, le 13 novembre, consiste à examiner et analyser les données provenant de la mission d'établissement des faits, à dresser une carte des incidents et à élaborer un plan et une méthodologie d'enquête, y compris des normes de preuve et des procédures pertinentes. Cette phase englobe en outre la collecte d'informations pertinentes auprès d'autres sources que la mission d'établissement des faits et la fourniture d'une formation appropriée à son personnel, y compris en vue de déploiements sur le terrain. Elle devrait s'achever à la fin du mois de février 2016;

    b) Phase II : enquêtes sur les cas. Cette phase consistera en une analyse approfondie des cas identifiés durant la phase I. Elle débutera en mars 2016 et donnera lieu à la réalisation d'analyses détaillées des informations obtenues, à des déplacements sur le terrain et à des entretiens avec des témoins, au besoin, et au recueil d'informations pertinentes en relation avec les cas auprès des États Membres et d'autres parties. Cette étape se poursuivra jusqu'à ce que les informations et les preuves recueillies soient suffisantes pour permettre au Mécanisme de faire rapport sur ses constatations au Conseil de sécurité. Le Groupe de direction soumettra en outre au Conseil des lignes directrices et des procédures relatives aux activités du Mécanisme visant à identifier ceux impliqués dans l'utilisation de produits chimiques comme arme.

IV. Activités au cours de la phase I

Sources d'information

25. Conformément aux dispositions pertinentes de la résolution 2235 (2015), le Groupe de direction a décidé que les travaux du Mécanisme reposeraient sur les sources d'information suivantes :

    a) Les informations et les éléments de preuve obtenus ou établis par la mission d'établissement des faits, y compris, mais non exclusivement, les dossiers médicaux, les enregistrements et transcriptions d'entretiens et les documents;

    b) Des informations et des éléments de preuve supplémentaires qui n'ont pas été obtenus ou établis par la mission d'établissement des faits, mais sont considérés avoir un lien avec le mandat du Mécanisme (sources extérieures à la mission d'établissement des faits), y compris les informations reçues, entre autres, des sources suivantes :

      i) La République arabe syrienne et toutes les parties en République arabe syrienne;

      ii) D'autres États Membres des Nations Unies;

      iii) Des groupes ou des entités possédant des informations pertinentes;

      iv) Les sources ouvertes.

26. Le Mécanisme considère que son travail d'enquête a pour point de départ les informations provenant de la mission d'établissement des faits. La priorité a donc été donnée à l'examen des informations obtenues auprès de la mission d'établissement des faits. Le Groupe de direction a en outre reçu, à sa demande, des informations de la République arabe syrienne et d'autres États, qui ont accepté de coopérer et de fournir des informations conformément à la résolution 2235 (2015). Il espère recevoir des informations provenant de diverses autres sources, y compris des parties en République arabe syrienne. Il examine aussi les informations disponibles dans des sources ouvertes et sollicite, le cas échéant, une assistance au sein de l'ONU et de l'OIAC pour obtenir l'accès aux documents requis.

Informations et éléments de preuve obtenus ou établis par la mission d'établissement des faits

27. L'ONU et l'OIAC ont signé, le 20 novembre, un accord supplémentaire concernant la mise en œuvre de la résolution 2235 (2015) en vertu de l'Accord régissant les relations entre l'Organisation des Nations Unies et l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques entré en vigueur en 2001. L'accord définit les modalités de coopération entre les deux organisations visant à assurer rapidement la mise en place et le plein fonctionnement du Mécanisme.

28. Le 26 novembre 2015, le Mécanisme et l'OIAC ont signé aussi un mémorandum d'accord sur l'accessibilité, le stockage et le traitement des informations, y compris des preuves, obtenues par la mission d'établissement des faits et le Mécanisme. Il expose les procédures pour l'échange sûr et confidentiel et la rétention des informations des types visés aux paragraphes 9 et 12 de la résolution 2235 (2015), notamment grâce à l'application des règlements et règles de l'OIAC et de l'ONU concernant la protection, le contrôle et la communication d'informations classifiées.

29. Sur la base de ces dispositions, le travail d'enquête du Mécanisme a commencé en décembre avec un examen et une analyse des informations et des éléments de preuve obtenus de la mission d'établissement des faits. L'OIAC a fourni, et continue de fournir, au Mécanisme des informations et des éléments de preuve provenant de la mission d'établissement des faits en application du mémorandum d'accord signé le 26 novembre. Des informations supplémentaires ont été obtenues dans le cadre des discussions avec les dirigeants et les membres de l'équipe de la mission d'établissement des faits. Les informations fournies par la mission d'établissement des faits ont été examinées « en l'état », sans évaluer la véracité des sources de la mission ou toute méthodologie ou méthode de travail adoptée par elle.

Informations ne provenant pas de la mission d'établissement des faits

30. Dans la résolution 2235 (2015), le Conseil de sécurité a demandé à tous les autres États de coopérer sans réserve avec le Mécanisme en lui fournissant toutes informations pertinentes susceptible d'aider le Mécanisme à s'acquitter de son mandat. Après des consultations avec des États Membres, le Chef du Mécanisme a adressé à la République arabe syrienne, ainsi qu'aux États voisins et à d'autres, deux demandes officielles d'informations datées, respectivement, du 8 décembre 2015 et du 5 janvier 2016. Dans ces demandes figuraient des questions portant sur, entre autres, les principales infrastructures et installations; les données démographiques; la disposition des forces armées (forces de la République arabe syrienne, des groupes armés d'opposition et des groupes terroristes) et le matériel militaire en leur possession; les opérations aériennes. En réponse, des informations ont été reçues de plusieurs États, dont la République arabe syrienne, par écrit ou lors de réunions d'information techniques. D'autres États ont fait savoir par écrit au Mécanisme que toutes les informations pertinentes pouvant être trouvées seraient transmises au Mécanisme.

31. Le Groupe de direction a de plus reçu des invitations et s'est rendu dans plusieurs États Membres pour y recevoir des informations pertinentes au regard de son mandat et compléter les informations de la mission d'établissement des faits. Des informations ont aussi été reçues dans le cadre de réunions et de consultations bilatérales à New York et à La Haye.

32. Le Groupe de direction poursuivra les contacts de ces types, y compris les visites dans des pays de la région.

Coopération avec la République arabe syrienne et toutes les parties en République arabe syrienne

33. Le 11 décembre, l'ONU et la République arabe syrienne ont signé un accord sur le statut du Mécanisme en vue d'assurer l'exécution en temps voulu et dans des conditions de sûreté et de sécurité du mandat du Mécanisme en République arabe syrienne. Le Groupe de direction s'est ensuite rendu à Damas le 17 décembre pour des réunions avec le Gouvernement de la République arabe syrienne. À cette occasion, le Groupe a rencontré Faisal Mekdad, Ministre adjoint des affaires étrangères, qui a confirmé la volonté du Gouvernement de coopérer avec le Mécanisme.

34. Lors de cette réunion, il a été convenu que le Mécanisme effectuerait une visite technique pour obtenir de plus amples informations du Gouvernement. La réunion technique entre les experts syriens et des membres de l'équipe d'enquête est prévue au cours de la phase II, une fois que le Mécanisme aura fini d'examiner les documents recueillis par la mission d'établissement des faits et des documents provenant d'autres sources.

35. Lors de la réunion à Damas, le Gouvernement a également confirmé avoir reçu la première demande d'informations. Une autre demande d'informations a été envoyée ultérieurement et des réponses à ces deux demandes ont été reçues par écrit. Les informations reçues sont en cours d'analyse par l'équipe d'enquête.

36. Le Mécanisme entend demander au Gouvernement d'avoir accès à certains lieux, personnes et documents en République arabe syrienne s'il le juge nécessaire pour ses enquêtes.

37. En novembre, le Groupe de direction a rencontré à titre officieux des représentants de la Coalition nationale des forces de l'opposition et de la révolution. Les discussions ont porté sur le mandat du Mécanisme et le Groupe a réaffirmé la nécessité d'une coopération, en particulier la nécessité de recevoir des informations pertinentes de toutes les parties en République arabe syrienne. Le Mécanisme entend établir de nouveaux contacts avec les parties en République arabe syrienne au cours de la phase II.

Autres activités de la phase I

38. Tout de suite après la pleine entrée en activité du Mécanisme, le Groupe de direction a organisé du 16 au 19 novembre 2015, à La Haye, un atelier auquel ont participé les membres du personnel du Mécanisme et les personnes en cours de recrutement. L'atelier a marqué le lancement officiel du travail d'enquête du Mécanisme et a permis de mener des discussions sur son mandat, ses priorités et ses principes, y compris son plan d'enquête et l'enchaînement des enquêtes. L'atelier a été en outre l'occasion pour les membres du Mécanisme d'être informés par les dirigeants de la mission d'établissement des faits de leurs travaux et constatations, en attendant que soient mises en place des modalités pour assurer leur plein accès aux informations et éléments de preuve obtenus par la mission d'établissement des faits.

39. Le 14 décembre, après avoir conclu les accords nécessaires avec l'OIAC et la République arabe syrienne, le Mécanisme s'est réuni à La Haye pour élaborer plus avant le plan de son travail d'enquête et examiner les progrès accomplis dans la collecte et l'analyse d'informations.

40. Après avoir examiné et analysé à titre préliminaire des documents de la mission d'établissement des faits, le Mécanisme a tenu des réunions à La Haye puis à New York, en janvier, pour revoir et adapter au besoin la méthodologie du travail d'enquête et le plan de travail du Mécanisme. Le Mécanisme a continué à élaborer des lignes directrices et des procédures types pour la conduite de ses activités. Le Groupe de direction a adopté une procédure pour la gestion des cas et la prise de décisions en la matière, y compris l'identification des cas potentiels se prêtant à une enquête par le Mécanisme, comme exposé ci-dessous.

Établissement d'une carte des incidents ayant fait l'objet d'une enquête de la mission d'établissement des faits

41. Il a été établi une carte des incidents spécifiques : a) ayant fait l'objet d'une enquête de la mission d'établissement des faits sur l'utilisation alléguée de produits chimiques comme arme en République arabe syrienne; b) au sujet desquels la mission a conclu qu'ils avaient donné lieu, ou probablement donné lieu, à l'utilisation de produits chimiques comme arme.

42. Au total, 116 cas allégués d'utilisation de produits chimiques comme arme en République arabe syrienne sont mentionnés dans les rapports (et leurs annexes) que la mission d'établissement des faits a publiés à ce jour (S/2015/138, S/2015/908 et S/2016/85). L'OIAC a enquêté sur 29 d'entre eux. Le Mécanisme a mandat pour enquêter sur les cas dans lesquels la mission d'établissement des faits a conclu que les incidents ou l'incident en cause accréditaient la thèse selon laquelle des produits chimiques toxiques avaient été utilisés, impliquaient probablement l'emploi comme arme d'un ou de plusieurs produits chimiques toxiques, et confirmaient avec un degré de certitude élevé une exposition à une substance chimique. Il s'agit des 23 incidents suivants, dans l'ordre chronologique :

    1. Kafr Zita, gouvernorat de Hama, 10-11 avril 2014

    2. Al-Tamanah, gouvernorat d'Idlib, 12 avril 2014

    3. Al-Tamanah, gouvernorat d'Idlib, 18 avril 2014

    4. Kafr Zita, gouvernorat de Hama, 18 avril 2014

    5. Talmenes, gouvernorat d'Idlib, 21 avril 2014

    6. Al-Tamanah, gouvernorat d'Idlib, 29-30 avril 2014

    7. Al-Tamanah, gouvernorat d'Idlib, 22 mai 2014

    8. Al-Tamanah, gouvernorat d'Idlib, 25-26 mai 2014

    9. Qmenas, gouvernorat d'Idlib, 16 mars 2015

    10. Sarmin, gouvernorat d'Idlib, 16 mars 2015

    11. Binnish, gouvernorat d'Idlib, 23 mars 2015

    12. Sarmin, gouvernorat d'Idlib, 23 mars 2015

    13. Sarmin, gouvernorat d'Idlib, 26 mars 2015

    14. Idlib, gouvernorat d'Idlib, 31 mars 2015

    15. Kurin, gouvernorat d'Idlib, mi-avril 2015

    16. Idlib, gouvernorat d'Idlib, 16 avril 2015

    17. Al-Nerab, gouvernorat d'Idlib, 27 avril 2015

    18. Al-Nerab, gouvernorat d'Idlib, 1er mai 2015

    19. Al-Nerab, gouvernorat d'Idlib, 2 mai 2015

    20. Saraqib, gouvernorat d'Idlib, 2 mai 2015

    21. Sarmin, gouvernorat d'Idlib, 16 mai 2015

    22. Idlib, gouvernorat d'Idlib, 20 mai 2015

    23. Marea, gouvernorat d'Alep, 21 août 2015

43. En ce qui concerne l'incident allégué du 15 février 2015 à Darayya, au sujet duquel la mission d'établissement des faits a conclu que « selon toute vraisemblance, certaines des personnes qui ont été identifiées comme ayant été concernées [par l'incident] avaient à un moment donné été exposées à du sarin ou à une substance rappelant du sarin » (S/2016/85), le Directeur général de l'OIAC a recommandé que la question soit étudiée plus avant par la mission. Le complément d'enquête a pour objet « de déterminer comment, quand ou dans quelles circonstances [l'exposition à du sarin ou à une substance rappelant du sarin] a eu lieu » (S/2016/85, annexe I). Le Mécanisme croit comprendre que la mission d'établissement des faits procède actuellement à d'autres investigations relatives à cet incident. Le Groupe de direction attendra les résultats de ces investigations de la mission d'établissement des faits.

Tri et ordre de priorité

44. Il a été procédé au tri de ces incidents et été déterminé lesquels relevaient du mandat du Mécanisme, puis un ordre de priorité a été fixé en se fondant sur les informations dont disposait le Mécanisme. Une fiche d'information a été établie pour les 23 incidents en y incorporant les informations pertinentes.

45. Les incidents ont ensuite été évalués au regard des quatre critères suivants en leur affectant un poids égal : a) gravité (nombre de morts et de blessés, contaminations secondaires, etc.); b) mode de dispersion et type de munition; c) quantité de données; d) existence d'informations d'ordre médico-légal vérifiées. Une échelle d'appréciation a été appliquée à chaque critère, des notes étant attribuées aux éléments suivants : a) cohérence et compatibilité entre les témoignages de diverses sources sur l'incident; b) possibilité de vérifier et corroborer de façon indépendante les informations déjà disponibles.

46. Ce processus a permis de dégager plusieurs cas potentiels se prêtant à une enquête. Au 5 janvier 2016, les incidents suivants avaient été identifiés comme cas potentiels se prêtant à une enquête (dans l'ordre chronologique) :

    1. Kafr Zita, gouvernorat de Hama, 11 et 18 avril 2014

    2. Talmenes, gouvernorat d'Idlib, 21 avril 2014

    3. Qmenas, gouvernorat d'Idlib, 16 mars 2015

    4. Sarmin, gouvernorat d'Idlib, 16 mars 2015

    5. Marea, gouvernorat d'Alep, 21 août 2015

47. Le Mécanisme a continué à examiner et à analyser le reste des informations de la mission d'établissement des faits, ainsi que des éléments de preuve reçus de sources autres que la mission d'établissement des faits, en janvier 2016. Ces informations ont été intégrées dans les fiches. Il est ainsi apparu que de nouveaux incidents pouvaient constituer des cas potentiels, dont l'incident survenu à Binnish, dans le gouvernorat d'Idlib, le 23 mars 2015. Ce processus est continu et la liste des cas potentiels peut évoluer en fonction des nouvelles informations reçues et de leur analyse.

48. Le Groupe de direction arrêtera en février 2016 la liste définitive des cas se prêtant à une enquête. À partir de mars 2016, les cas identifiés donneront lieu à des investigations jusqu'à ce que suffisamment d'informations et d'éléments de preuve aient été recueillis pour permettre au Mécanisme de présenter ses constatations dans ses rapports ultérieurs au Conseil de sécurité.

49. Le Groupe de direction note que la mission d'établissement des faits pourrait avoir à enquêter sur de nouveaux incidents allégués. Certains de ces incidents pourraient relever du mandat du Mécanisme et constituer des cas potentiels se prêtant à enquête.

50. Le Groupe de direction note en outre que la situation sur le terrain en République arabe syrienne influera sur le travail d'enquête du Mécanisme en ce qu'elle aura probablement un effet sur les sources d'informations et de preuves et l'accès à ces sources. Si des enquêtes sur site sont jugées infaisables, le Mécanisme suivra l'évolution dans les zones ou la zone concernées et sera prêt à saisir toute occasion se présentant de procéder à une enquête sur site en cas d'évolution de la situation.

V. Observations finales

51. Le Groupe de direction croit fermement que tous les individus, groupes, entités ou gouvernements qui jouent le moindre rôle pour rendre possible l'utilisation de produits chimiques comme arme, pour quelque raison que ce soit et en toutes circonstances, doivent comprendre qu'ils seront identifiés et auront à rendre compte de ces actes odieux. Le Groupe espère que son travail d'enquête, en tant que tel, exercera un effet dissuasif et concourra à l'élimination de l'utilisation de produits chimiques toxiques comme arme.

52. Le Groupe de direction a conscience que le processus d'identification des parties impliquées dans l'utilisation de produits chimiques comme arme est une tâche complexe et que le Mécanisme aura besoin pour la mener à bien de l'appui et de la coopération sans relâche de tous les États et d'autres sources, en particulier afin que le Mécanisme puisse avoir accès à des informations qui aideront à son travail d'enquête et en obtenir. À ce propos, le Groupe tient à exprimer sa reconnaissance pour la pleine coopération reçue à ce jour d'États et d'autres parties à l'appui de ses travaux, y compris les généreuses contributions financières versées.

53. Enfin, le Groupe de direction souhaite exprimer sa gratitude pour l'appui reçu du Secrétariat de l'ONU, en particulier du Bureau des affaires du désarmement, et du Secrétariat technique de l'OIAC.


Bookshop Donate Radio Nizkor

Syria War
small logoThis document has been published on 19Feb16 by the Equipo Nizkor and Derechos Human Rights. In accordance with Title 17 U.S.C. Section 107, this material is distributed without profit to those who have expressed a prior interest in receiving the included information for research and educational purposes.