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Rapport de la mission du Conseil de sécurité au Mali, en Guinée-Bissau et au Sénégal


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Nations Unies
Conseil de sécurité

S/2016/511

Distr. générale
11 mai 2016
Français
Original : anglais

Rapport de la mission du Conseil de sécurité au Mali, en Guinée-Bissau et au Sénégal

I. Introduction

1. Dans une lettre datée du 10 février 2016, le Président du Conseil de sécurité a informé le Secrétaire général que le Conseil avait décidé de dépêcher une mission en Afrique de l'Ouest (Mali, Guinée-Bissau et Sénégal). La composition de la mission et son mandat ont été présentés dans une lettre datée du 3 mars 2016 adressée au Secrétaire général par le Président du Conseil (S/2016/215) et figurent en annexe I et II du présent rapport. La partie de la mission consacrée au Mali a été dirigée par le Représentant permanent de la France auprès de l'Organisation des Nations Unies, François Delattre, et le Représentant permanent du Sénégal auprès de l'Organisation des Nations Unies, Fodé Seck. La partie consacrée à la Guinée -Bissau a été codirigée par le Représentant permanent de l'Angola auprès de l'Organisation des Nations Unies, Ismael Abraão Gaspar Martins, et par M. Seck. La partie consacrée au Sénégal a été dirigée par M. Gaspar Martins.

II. Mali

A. Contexte

2. Cette mission représentait pour le Conseil de sécurité sa troisième visite au Mali après celles d'octobre 2000 (voir S/2000/992) et de février 2014 (voir S/2014/173). Comme il l'a annoncé dans son communiqué de presse du 12 janvier 2016, le Conseil comptait avant tout renouveler à cette occasion son appel en faveur de la réalisation rapide de progrès concrets dans l'application de l'Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d'Alger et à prendre la mesure de l'aggravation de l'insécurité, notamment dans le centre et le sud du pays. Cette mission visait également à évaluer les progrès accomplis dans l'application de la résolution 2227 (2015) du Conseil de sécurité, notamment concernant le suivi des arrangements relatifs au cessez-le-feu, les activités de bons offices et l'appui à la réconciliation, la stabilisation et la protection des civils, et la protection, sûreté et sécurité du personnel des Nations Unies, ainsi que des avancées réalisées et les problèmes à régler concernant le déploiement de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA). La mission a entretenu des contacts avec tout un groupe de représentants du Gouvernement malien, de groupes de femmes, de la Coordination des mouvements de l'Azawad (CMA) et de la coalition Plateforme, ainsi que de la communauté internationale.

B. Rencontres à Bamako, Mopti et Tombouctou

3. À leur arrivée à Bamako, le 4 mars, les membres du Conseil de sécurité ont été accueillis par le Ministre des affaires étrangères, de la coopération internationale et de l'intégration africaine, Abdoulaye Diop, et des représentants de la MINUSMA et de la communauté diplomatique. Le 5 mars, ils ont rencontré le Premier Ministre, Modibo Keïta, à Bamako, avant de se rendre à Mopti où ils se sont entretenus avec les autorités locales et des représentants de la MINUSMA. Plus tard dans la même journée, à Tombouctou, ils ont rencontré le Gouverneur de la région et d'autres responsables locaux, ainsi que des imams et des représentants de la MINUSMA. À leur retour à Bamako, les membres du Conseil se sont rendus à une réunion d'information de la MINUSMA sur les tendances et les menaces en matière de sécurité au Mali et au Sahel, et à un dîner auquel étaient conviés des représentants du Gouvernement, de la MINUSMA, de partis politiques, de la Plateforme, de la CMA, d'institutions financières internationales, d'organisations non gouvernementales internationales et de la communauté internationale, notamment des pays fournisseurs de contingents à la MINUSMA et de l'équipe de pays des Nations Unies.

4. Le 6 mars à Bamako, les membres du Conseil de sécurité ont entendu les exposés successifs des représentants de l'Opération française Barkhane, de la mission militaire de l'Union européenne visant à contribuer à la formation des forces armées maliennes, de responsables de la MINUSMA et de l'équipe de médiation internationale. Ils ont ensuite rencontré le Ministre des affaires étrangères, de la coopération internationale et de l'intégration africaine et des représentants du Ministère de la solidarité, de l'action humanitaire et de la reconstruction du nord, du Ministère de la promotion de la femme, de l'enfant et de la famille, du Ministère de l'économie et des finances, du Ministère de la réconciliation nationale, du Ministère de la sécurité et de la protection civile, et du Ministère de la justice et des droits de l'homme. Au quartier général de la MINUSMA, ils ont rencontré des représentants de la Plateforme et de la CMA lors d'une réunion conjointe, puis se sont rendus au déjeuner organisé par la MINUSMA, l'équipe de pays des Nations Unies et la troïka élargie des partenaires de développement au Mali. Ils se sont également entretenus avec les partis politiques de la majorité présidentielle et, dans un deuxième temps, avec les partis d'opposition. Ils ont rencontré le Président du Mali, Ibrahim Boubacar Keïta, et, après une conférence de presse, se sont rendus à un dîner organisé par le Ministre des affaires étrangères, de la coopération internationale et de l'intégration africaine.

C. Principales questions examinées

1. Rencontres avec le Président et le Premier Ministre

5. Lors de sa rencontre avec les membres du Conseil de sécurité, le Président du Mali a constaté qu'il était nécessaire d'appliquer de manière ciblée et dans les plus brefs délais l'accord de paix. Il a également noté qu'il était essentiel que toutes les parties fassent des compromis et parviennent à un consensus sur la base d'une relation de confiance qui devait être renforcée et entretenue. Il a insisté sur certaines des mesures récemment prises pour mettre en œuvre la réforme des institutions, telles que la création de deux nouvelles régions dans le nord du Mali et le lancement d'un processus de réforme constitutionnelle. Il a informé le Conseil que les trois signataires de l'accord, qui s'étaient rencontrés à Bamako le 27 février, prévoyaient de convenir, dans les deux mois, d'un nouvel échéancier concernant l'application de l'Accord. S'agissant de la réforme du secteur de la sécurité, il a expliqué que le Mali se reconstruisait et que, pour que la paix et la sécurité soient durables, il faudrait porter une attention particulière au renforcement des forces armées, et notamment à leur formation et à leur équipement. Tout en reconnaissant l'existence d'un problème de corruption au Mali, il a engagé la communauté internationale à tenir les engagements pris à la conférence internationale de haut niveau pour la relance économique et le développement du Mali, qui s'est tenue à Paris le 22 octobre 2015. Il a salué le travail de la MINUSMA et exprimé son envie de réfléchir avec elle aux moyens d'améliorer sa capacité de réaction face aux menaces pesant sur la sécurité. Il a souhaité que le mandat de la Mission soit entièrement revu, notamment pour ce qui est du renforcement de ses capacités, afin qu'elle soit mieux adaptée au contexte actuel dans lequel elle est devenue l'une des principales cibles des attaques terroristes.

6. Le Premier Ministre a souligné que les Maliens avaient de grandes attentes et que les résultats de l'accord de paix se mesureraient en particulier à l'aune de l'amélioration des conditions de vie. Il s'est félicité des progrès réalisés dans certains domaines et des mesures prises par le Gouvernement en vue de l'application de l'Accord, ajoutant que l'insécurité restait un problème de taille. Il a déploré les nombreuses attaques violentes perpétrées contre les forces nationales et internationales au Mali et a fait valoir que la réforme et le renforcement des forces armées devaient être davantage appuyés. Concernant le cantonnement et le programme de désarmement, démobilisation et réintégration, il a déclaré que les retards d'exécution risquaient d'inciter des éléments des groupes armés signataires à rejoindre les rangs de groupes terroristes.

7. Les membres du Conseil de sécurité ont insisté auprès du Premier Ministre, mais également du Président et d'autres interlocuteurs du Gouvernement, sur la nécessité d'appliquer l'accord de paix de manière concrète et dans les plus brefs délais. Ils leur ont suggéré de porter une attention particulière à la décentralisation et aux autorités administratives provisoires dans le nord du pays, aux élections locales, au cantonnement, au programme de désarmement, démobilisation et réintégration, à la réforme du secteur de la sécurité, à la réconciliation et à la lutte contre l'impunité.

2. Application de l'accord de paix

8. Lors de leurs échanges avec les membres du Conseil de sécurité, les représentants de la CMA et de la Plateforme ont souligné qu'il était essentiel, pour eux comme pour le Gouvernement, d'accélérer l'application de l'accord de paix. Les membres du Conseil, quant à eux, ont noté qu'il semblait y avoir une certaine unité entre la CMA et la Plateforme, puisqu'elles ont accepté de s'asseoir autour d'une même table lors de leur réunion. Les deux groupes armés ont présenté aux membres une évaluation commune des progrès réalisés et des difficultés rencontrées dans l'application de l'accord de paix, en soulignant les risques qu'entraîneraient de nouveaux retards. Les représentants de la CMA et de la Plateforme ont suggéré qu'en élargissant la participation du peuple malien au processus de paix et en améliorant sa représentation, on pourrait non seulement favoriser la réconciliation et faire avancer l'application de l'Accord mais également prévenir la radicalisation et lutter contre l'extrémisme.

9. Les membres de l'équipe de médiation internationale ont salué les progrès accomplis depuis la signature de l'accord de paix, notamment la cessation des hostilités entre les signataires et la réconciliation intercommunautaire, mais ont cependant noté que la situation de sécurité s'était détériorée en raison de l'augmentation, dans le même temps, du nombre d'attaques terroristes. Ils ont appelé à une application plus rapide de l'Accord, en mettant l'accent sur les dispositions relatives à la politique et à la sécurité, et mis en garde contre la rivalité manifeste entre les groupes armés favorables à l'Accord et les groupes terroristes s'y opposant.

10. Les responsables de la MINUSMA ont abordé la question du plan de retrait qu'on avait demandé il y a peu à la Mission d'établir, en se demandant s'il était judicieux de collaborer avec le Gouvernement sur la base d'engagements mutuels. À cet égard, les responsables de la MINUSMA ont insisté sur le fait qu'il était important de répartir clairement les tâches en fonction des avantages comparatifs de chacun afin de renforcer la capacité du pays à régler les problèmes qui se posent sur le plan politique et en matière de sécurité et développement. Ils ont estimé que la réunion de réconciliation annoncée par le Gouvernement, la CMA et la Plateforme, qui doit se tenir à Kidal du 27 au 30 mars, serait une étape décisive et l'occasion de relever les défis afférents au processus de paix à la faveur d'une initiative véritablement nationale.

11. Les représentants de la CMA et de la Plateforme ont rappelé l'extrême importance du Conseil national de la réforme du secteur de la sécurité, étant donné que c'est lui qui donnera les grandes orientations des processus de désarmement, démobilisation et réintégration, et d'intégration, qui nécessitent des réformes politiques et institutionnelles. Les deux coalitions de groupes armés ont expliqué que l'expérience avait montré que, sans avancées sur la réforme du secteur de la sécurité et davantage de clarté sur les processus de désarmement, démobilisation et réintégration, et d'intégration, il serait difficile de progresser sur les dispositions de l'accord de paix relatives à la défense et à la sécurité. Les représentants de la MINUSMA, quant à eux, ont souligné qu'il était capital de poursuivre la réforme du secteur de la sécurité, notamment afin de disposer d'un cadre stratégique pour l'intégration des anciens combattants dans les institutions étatiques. Ils ont noté que, même si plusieurs volets de la réforme étaient déjà engagés, il était essentiel d'adopter une approche plus large et générale qui permette de faire le lien entre eux.

12. Concernant la réforme de l'armée, la mission militaire de l'Union européenne visant à contribuer à la formation des forces armées maliennes a présenté ses activités, notamment l'appui à l'application de la loi de programmation militaire, qui s'est fait en coordination avec les activités d'appui d'autres acteurs grâce aux mécanismes stratégiques et techniques de coordination de la réforme du secteur de la sécurité existants. Elle a également souligné que, pour renforcer les forces armées maliennes, il faudrait mettre l'accent sur la formation des responsables et la logistique.

13. Enfin, les représentants de la CMA et de la Plateforme ont évoqué la réticence des combattants à prendre part au processus de désarmement, démobilisation et réintégration en l'absence de garanties et d'engagements concernant leur avenir, notamment en ce qui concerne leur intégration dans les institutions étatiques. Ils se sont également dits inquiets et hésitants à l'idée de procéder au cantonnement de leurs combattants alors que des groupes terroristes opéraient dans le nord du Mali avec une liberté de mouvement non négligeable. Conscients des difficultés rencontrées, les membres du Conseil de sécurité ont réaffirmé qu'il était important que les groupes armés leur fournissent la liste des combattants, étape essentielle à une meilleure préparation du cantonnement et du processus de désarmement, démobilisation et réintégration.

3. Situation en matière de sécurité

14. Les représentants du Gouvernement ont fait observer que le mandat de la MINUSMA devait être adapté au contexte actuel, dans lequel la criminalité transnationale organisée et le terrorisme constituaient les principaux problèmes. Les membres du Conseil de sécurité ont expliqué que l'examen stratégique de la MINUSMA serait l'occasion d'analyser les besoins et de formuler des recommandations sur la voie à suivre, y compris pour atténuer les menaces qui pèsent sur la sécurité, que le Conseil examinerait avant de proroger le mandat de la Mission. Les représentants du Gouvernement ont également souligné qu'il était nécessaire d'appréhender la question de la sécurité du pays en la replaçant dans le contexte plus large du Sahel, en particulier compte tenu de la nature transnationale des menaces. Ils ont appelé de leurs vœux une meilleure coopération et coordination avec la MINUSMA par rapport aux questions de sécurité et à la création d'une nouvelle force antiterroriste pour soutenir la lutte contre les terroristes dans le nord du Mali. La mise en place d'un Pôle judiciaire spécialisé de lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée a été mentionnée comme une des initiatives permettant de lutter contre ces menaces.

15. Les représentants du Gouvernement à Mopti ont évoqué les opérations actuellement en cours pour déradicaliser les éléments des groupes terroristes et ont demandé l'aide de la communauté internationale à cet égard. Les interlocuteurs gouvernementaux à Tombouctou ont fait valoir que la question prioritaire était l'insécurité, qui persistait malgré les mesures prises et entravait considérablement la liberté de circulation.

16. Les représentants de la CMA et de la Plateforme ont aussi fait observer que l'insécurité gagnait les zones centrales et méridionales du Mali, et ont appelé toutes les parties prenantes à riposter ensemble contre les forces négatives. Ils ont ajouté que leurs combattants prenaient déjà part à la lutte contre le terrorisme et qu'ils la dynamiseraient une fois qu'ils seraient intégrés à des institutions nationales. Les représentants ont déploré les retards qui avaient été pris dans la mise en œuvre de l'accord de paix et qui avaient, selon eux, permis aux terroristes de se renforcer et de mieux s'organiser. Ils ont ajouté que, parallèlement aux solutions militaires, il fallait envisager d'autres approches pour contrecarrer les forces négatives au Mali.

17. Les représentants de la MINUSMA ont expliqué que la Mission contribuait déjà aux efforts visant à empêcher le terrorisme et le combattre, notamment en consolidant les institutions maliennes et en effectuant des patrouilles. Ils ont exprimé l'espoir que l'Opération Barkhane poursuivrait ses activités jusqu'à ce que la menace du terrorisme soit suffisamment réduite et les moyens maliens suffisamment renforcés.

18. Le représentant de l'Opération Barkhane au Mali a fait un exposé sur ses activités antiterroristes et a souligné qu'il était difficile de distinguer, parmi les différents groupes armés présents dans le nord, ceux qui respectaient l'accord de paix et ceux qui ne le respectaient pas. Il a aussi expliqué qu'il était manifeste que les groupes criminels et terroristes essayaient de déstabiliser la région centrale du Mali, comme le montrait notamment la multiplication des attaques contre les forces de défense et de sécurité et des actes de banditisme. Le représentant a en outre salué l'approche réaliste et efficace suivie par le Groupe de cinq pays du Sahel dans ses efforts pour lutter contre le terrorisme.

4. Les femmes et la paix et la sécurité

19. Les groupes de femmes qui ont rencontré les membres du Conseil de sécurité ont déploré la très faible participation des femmes dans les négociations de paix en 2013 et 2014-2015 et dans les institutions créées pour mettre en place l'accord de paix. Ils ont expliqué que la discrimination contre les femmes se ressentait au quotidien et qu'elle était même institutionnalisée dans les textes législatifs maliens. Ils ont aussi insisté sur les problèmes d'accès des femmes à la justice, à l'éducation et à la santé, et sur la pauvreté des femmes.

5. Déploiement de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali

20. Les partis politiques de la majorité présidentielle ont souhaité un étaiement des forces militaires et policières de la MINUSMA dans les zones où elles étaient actuellement déployées. Ils ont distribué aux membres du Conseil de sécurité un document comprenant une analyse de la mise en œuvre de l'accord de paix, ainsi que des recommandations sur le rôle et le mandat de la MINUSMA. Ils insistaient aussi dans ce document sur la dégradation de la situation en matière de sécurité au Mali, en demandant un appui accru de la part de la MINUSMA, en particulier dans la lutte contre le terrorisme.

21. Les représentants de la MINUSMA ont souligné les différentes difficultés auxquelles la Mission devait faire face pour s'acquitter de son mandat, en expliquant que ses ressources et moyens étaient sollicités à l'excès. La capacité de la MINUSMA à mettre en œuvre son mandat, que la plupart des fonctionnaires de rang supérieur considéraient suffisamment solide, était limitée par la multiplicité de tâches qu'elle devait assumer et par les attaques violentes constantes dont elle était la cible, et il était aussi nécessaire qu'elle obtienne des ressources et du matériel supplémentaires ou de meilleure qualité pour pouvoir s'acquitter correctement de ses responsabilités. Il fallait de toute urgence combler les lacunes en matière de formation et remédier au manque d'équipement, en particulier s'agissant des véhicules blindés, ainsi qu'allouer encore davantage de moyens et de matériel aux contingents de la MINUSMA. Enfin, il fallait revoir les procédures budgétaires et administratives, trop lentes et inefficaces, au vu de leur incidence négative sur la suite des opérations et la sécurité de la Mission et de son personnel.

22. Les représentants de la MINUSMA à Mopti et à Tombouctou ont fait valoir que les ressources allouées étaient sans commune mesure avec les tâches confiées à la Mission. Les membres du Conseil de sécurité ont recensé les possibilités et les difficultés particulières rencontrées dans la région de Mopti en termes de gouvernance, de sécurité et de développement, qui étaient caractéristiques des questions au cœur du mandat de la MINUSMA. Parmi les difficultés figuraient la détérioration de la situation en matière de sécurité, due principalement aux attaques terroristes, aux activités criminelles et à la violence intercommunautaire, et la dégradation de la situation socioéconomique, dont témoignaient le recul des activités économiques et la fermeture de près d'un quart des écoles.

D. Observations

23. Les membres du Conseil de sécurité ont noté les progrès accomplis dans la mise en œuvre de l'accord de paix, mais ont appelé les parties signataires à l'appliquer concrètement et le plus rapidement possible, avec l'appui des membres du Comité de suivi de l'accord. Ils ont appuyé l'établissement, par les parties, de calendriers aux fins de l'application de l'accord, en collaboration avec le Comité et d'autres partenaires clefs.

24. Les membres du Conseil de sécurité ont exprimé leur inquiétude quant au manque d'ouverture du processus de paix, en particulier concernant l'inclusion et la représentation des femmes, des jeunes marginalisés et des individus susceptibles d'être recrutés par des forces négatives. Ils ont jugé indispensable que le processus soit plus inclusif pour aboutir à des solutions et à une réconciliation plus durables, et pour éviter davantage de tensions ou une reprise du conflit.

25. Les membres du Conseil de sécurité ont relevé que dans le cadre de l'application de l'accord de paix, les questions les plus urgentes semblaient avoir trait à la décentralisation et aux autorités administratives intérimaires dans le nord, aux élections locales, au cantonnement, au désarmement, à la démobilisation et à la réintégration, à la réforme du secteur de la sécurité, à la réconciliation, à la lutte contre l'impunité, à la stabilisation et à l'antiterrorisme.

26. Plus particulièrement, les membres du Conseil de sécurité ont exhorté les parties signataires de l'accord de paix et les partenaires du pays à encourager davantage de progrès dans la réforme du secteur de la sécurité, ainsi que dans les processus de cantonnement et de désarmement, démobilisation et réintégration, considérés par la plupart des interlocuteurs comme des processus cruciaux de renforcement de la confiance et d'autonomisation liés à d'autres aspects de l'accord. Ils ont reconnu les carences sur les plans politique et institutionnel et en matière de gouvernance, de sécurité, de développement et de réconciliation, qui formaient le nœud de la crise au Mali, et la contribution que la réforme du secteur de la sécurité et les processus de cantonnement et de désarmement, démobilisation et réintégration pourraient apporter à la lutte contre ces causes profondes.

27. Les membres du Conseil de sécurité ont noté que l'examen stratégique de la MINUSMA était actuellement en cours et ont dit attendre avec intérêt ses résultats et les recommandations qui seraient formulées à cette occasion avant qu'ils n'abordent la question de la prorogation du mandat de la Mission. Dans ce contexte, ils ont noté que de nombreuses parties prenantes, y compris le Gouvernement, souhaitaient que soient revus le rôle, la position et les moyens de la MINUSMA pour faire en sorte que sa direction, ses priorités, sa configuration, son organisation interne, sa force et ses ressources soient adaptées au nouvel environnement.

28. Les membres du Conseil de sécurité ont appuyé la proposition tendant à ce que la MINUSMA et le Gouvernement prennent des engagements réciproques et se répartissent entre eux les tâches pour renforcer la capacité du pays de faire face aux difficultés rencontrées sur le plan politique et en matière de sécurité et de développement.

29. Les membres du Conseil de sécurité se sont déclarés extrêmement préoccupés par la détérioration de la situation en matière de sécurité, en particulier dans les zones centrale et septentrionale, et ont condamné avec la plus grande rigueur les attaques violentes contre les civils, les institutions nationales, les groupes armés, la MINUSMA et l'Opération Barkhane. Dans ce contexte, ils se sont demandés s'il ne serait pas souhaitable de créer une coalition plus structurée contre l'insécurité afin de mieux identifier les contributions et les avantages comparatifs de chacun, et les mécanismes de complémentarité, de coordination et d'échange d'informations dont ont besoin la MINUSMA, l'Opération Barkhane, les forces de défense et de sécurité maliennes, la CMA et la Plateforme pour lutter contre l'insécurité.

30. Les membres du Conseil de sécurité ont également constaté les déficits dont souffraient les contingents de la MINUSMA et se sont engagés à faire en sorte que la MINUSMA atteigne sans plus tarder sa pleine capacité opérationnelle, y compris en termes de formation et d'équipement.

31. Les membres du Conseil de sécurité ont pris note de la nature régionale et transnationale de bien des difficultés auxquelles le Mali faisait face et ont exprimé leur préoccupation quant au rôle que les groupes criminels et terroristes organisés au Mali jouaient dans la déstabilisation de l'Afrique de l'Ouest et du Sahel. Ils ont encouragé toutes les parties prenantes à rester engagées dans les mécanismes et processus régionaux et sous-régionaux, à continuer de les appuyer et, si possible à renforcer leur engagement et leur soutien, y compris le Groupe de cinq pays du Sahel et le Processus de Nouakchott, relatif au renforcement de la coopération en matière de sécurité et à l'opérationnalisation de l'Architecture africaine de paix et de sécurité dans la région sahélo-saharienne, en mettant particulièrement l'accent sur l'échange d'informations, la sécurité et la gestion des frontières et les initiatives axées sur les populations.

32. Les membres du Conseil de sécurité ont pris note de l'appel qui a été lancé afin que les annonces de contributions faites lors de la Conférence internationale de haut niveau pour la relance économique et le développement du Mali tenue le 22 octobre 2015 soient honorées et ils ont appelé tous les partenaires à s'acquitter de ces engagements sans délai. Ils ont aussi encouragé le Gouvernement à faire des progrès dans la création de stratégies, fonds et secteurs spéciaux pour promouvoir le développement du nord du pays.

III. Guinée-Bissau

A. Contexte

33. Il s'agissait de la troisième mission du Conseil de sécurité en Guinée-Bissau depuis ses précédentes visites, en 2003 et 2004 respectivement. Le but premier de la visite du 7 mars 2016 était d'obtenir et de rassembler des informations de première main auprès des principaux organes souverains de l'État et de faire passer des messages clefs aux parties prenantes nationales. La mission visait aussi à évaluer la situation sur place dans un contexte de tensions politiques accrues depuis août 2015, avec la dissolution du premier gouvernement issu des élections générales de 2014. La visite a été pour le Conseil l'occasion d'exprimer son inquiétude face aux tensions politiques et d'appeler au respect continu de l'état de droit et à la promotion du dialogue pour sortir de l'impasse politique.

B. Réunions à Bissau

34. Le calendrier de la mission a été modifié car elle est arrivée en retard en raison d'un brouillard épais. À leur arrivée à Bissau, les membres du Conseil de sécurité ont reçu de la part du Bureau intégré des Nations Unies pour la consolidation de la paix en Guinée -Bissau un dossier d'information concernant la situation en matière de sécurité dans le pays. Par la suite, la délégation s'est rendue au Palais du Gouvernement, où les deux personnes en charge de la mission ont brièvement rencontré le Premier Ministre, Carlos Correia, et le Ministre des affaires étrangères, Artur Silva, avant de rejoindre le reste de la délégation pour une réunion présidée par le Premier Ministre à laquelle ont participé plusieurs membres de son gouvernement, y compris les Ministres des affaires étrangères, de la présidence du Conseil des Ministres et des affaires parlementaires, de la défense, de la justice et de la communication sociale. Les membres de la mission ont ensuite rencontré tour à tour le Président de l'Assemblée nationale, Cipriano Cassamâ; le Président du parti au pouvoir, le Parti africain pour l'indépendance de la Guinée et de Cabo Verde (PAIGC), Domingos Simôes Pereira; et le Vice -Président du principal parti d'opposition, le Parti du renouveau social (PRS), Certorio Biote, au nom du Président du parti, qui était alors en déplacement à l'étranger. La réunion finale s'est tenue au Palais présidentiel en présence du Président, José Mârio Vaz. À la fin de la visite, une conférence de presse a été donnée, à l'aéroport, par le Représentant permanent de l'Angola auprès de l'Organisation des Nations Unies et le Représentant spécial du Secrétaire général pour la Guinée-Bissau et Président du Bureau intégré des Nations Unies pour la consolidation de la paix en Guinée-Bissau, Miguel Trovoada.

35. Le Représentant spécial du Secrétaire général a accompagné les membres du Conseil de sécurité à toutes les réunions. Les rencontres prévues avec la société civile, les membres de l'Organisation des Nations Unies et le corps diplomatique ont dû être annulées en raison de l'arrivée tardive de la mission à Bissau.

C. Principales questions examinées

1. Situation politique

36. Lors de leurs réunions avec les autorités nationales et les partis politiques, les membres du Conseil de sécurité se sont déclarés préoccupés par les risques liés à la persistance de l'instabilité politique dans le pays et ont exprimé leur soutien sans réserve à la résolution des problèmes politiques et au rétablissement de la stabilité par les autorités. Ils ont engagé les principales parties au conflit à mettre tout en œuvre pour régler leurs différends politiques et, ce faisant, à faire preuve de souplesse. Ils ont rappelé les avancées politiques et socioéconomiques qui avaient suivi les élections législatives réussies de 2014 et qu'il s'agirait de ne pas réduire à néant, notamment les contributions annoncées par les partenaires internationaux lors de la table ronde tenue à Bruxelles en mars 2015.

37. Les membres du Conseil ont demandé au Président de la Guinée -Bissau de garder présentes à l'esprit les conséquences régionales qu'aurait une impasse prolongée. Ils l'ont prié de parachever la formation de son gouvernement en nommant un Ministre des ressources naturelles et un Ministre de l'intérieur aux deux postes restés vacants. Ils ont par ailleurs souligné qu'il importait de résoudre la crise dans le respect de l'état de droit, notant que ce dernier s'appliquait également aux responsables politiques. Ils ont engagé les parties prenantes nationales à conclure un accord pérenne, grâce au dialogue, en faveur d'un gouvernement opérationnel et sans exclusive, capable de réaliser des réformes clefs, notamment dans les secteurs de la défense, de la sécurité et de la justice. Ils ont aussi mis l'accent sur l'intérêt de la participation et du multipartisme politiques pour la démocratie.

38. Le Président a affirmé sa volonté de venir à bout de toutes les difficultés institutionnelles que connaissait le pays et de promouvoir la réconciliation et le bon fonctionnement des institutions de l'État. Il était d'avis que la crise en cours était d'ordre politique et nécessitait par conséquent une solution politique. La voie juridique devrait selon lui venir en complément de l'action politique, plutôt que de constituer l'unique angle d'attaque. S'en remettre uniquement à la justice compromettrait davantage la situation et risquerait de politiser le système judiciaire. Il a assuré être résolu à respecter les décisions de la justice, évoquant son acquiescement au jugement rendu par la Cour suprême de justice concernant l'inconstitutionnalité du décret présidentiel portant nomination du troisième Vice-Président du PAIGC, Baciro Djâ, au poste de Premier Ministre. Nul n'était au-dessus des lois.

39. Le Premier Ministre a souligné le fait que la Guinée-Bissau vivait sous un régime multipartite depuis 1994 et comptait une quarantaine de partis politiques. Il a rappelé qu'il s'agissait d'un régime semi-présidentiel, dont les principaux organes souverains étaient dirigés par le Président, le Chef du Gouvernement et le Président de l'Assemblée nationale. Après sa victoire aux dernières élections législatives, en 2014, au cours desquelles il avait remporté 57 sièges, le PAIGC avait formé un gouvernement sans exclusive, proposant six postes ministériels au PRS et un poste à chacun des trois autres partis représentés à l'Assemblée. Dans ce contexte favorable, le Gouvernement, l'Union européenne et le Programme des Nations Unies pour le développement avaient organisé conjointement une table ronde internationale à l'appui de la Guinée-Bissau, à Bruxelles, en 2014, lors de laquelle les donateurs avaient promis de verser 1,2 milliard de dollars, alors que le Gouvernement n'en avait demandé que 500 millions.

40. Cet élan positif n'avait toutefois pas empêché la dissolution du gouvernement de M. Simôes Pereira par le Président en août 2015. Le Président avait ensuite pris l'initiative de nommer le troisième Vice-Président du PAIGC au poste de Premier Ministre, sans l'accord du parti. La Cour suprême de justice avait alors déclaré inconstitutionnel le décret présidentiel portant nomination de M. Djâ. Par conséquent, après la démission du Premier Ministre et de son gouvernement, le Président avait demandé au PAIGC de nommer un autre candidat. M. Correia, en tant que premier Vice-Président du parti, avait accepté que ce dernier le nomme, et avait formé un nouveau gouvernement en octobre 2015. Le Premier Ministre a conclu que, l'Assemblée nationale et le gouvernement étant opérationnels, il n'y avait pas de crise politique.

41. Le Président de l'Assemblée nationale a lui aussi nié que le pays traversait une crise politique. Il a souligné qu'au départ, la crise avait été déclenchée par la dissolution du gouvernement de M. Simôes Pereira, à laquelle personne ne s'attendait. Il a exposé brièvement les grands événements politiques ayant suivi cette dissolution, en particulier la nomination de M. Djâ comme Premier Ministre, la décision susmentionnée de la Cour suprême de justice, les débats à l'Assemblée nationale sur le programme du gouvernement et le cas des 15 parlementaires qui avaient été expulsés du PAIGC.

42. De plus, il a estimé que, si le gouvernement du Premier Ministre était incomplet, c'était en raison de l' « intervention directe » du Président, qu'il a accusé d'être responsable de l'impasse, ajoutant que ce dernier avait eu l'intention de dissoudre le gouvernement en place et d'exercer le pouvoir exécutif, à l'instar de ses homologues dans la sous-région.

43. Par souci de temps, le dirigeant du PAIGC a remis les documents ci-après aux membres du Conseil : la contre-proposition du parti à l'égard du projet d'accord politique du Président, les observations préliminaires du parti sur ce projet et la correspondance du parti concernant le processus de consultations. Il a rappelé la démarche d'ouverture du PAIGC à la suite des élections de 2014, grâce à laquelle il avait pu rassembler toutes les forces politiques au sein du gouvernement et promouvoir des solutions concertées aux problèmes du pays. Il a fait remarquer que le principal souci de son parti était que la loi soit respectée et les institutions de l'État renforcées, d'où l'importance pour les acteurs nationaux de se conformer aux décisions de justice.

44. Les membres du Conseil ont dit espérer que les parties prenantes nationales s'accorderaient sur une solution définitive à leurs problèmes, dans le respect de la Constitution, afin d'éviter que la situation ne se dégrade et qu'elle n'ait des répercussions néfastes sur la population. Ils se sont demandé si le PAIGC était prêt à conclure un compromis politique à cette fin.

45. Le chef du PAIGC a déclaré que son parti était disposé à rechercher un compromis, notamment à former un gouvernement sans exclusive avec le PRS, à condition que toutes les parties respectent la loi. Selon lui, le fait que le PAIGC avait accepté la dissolution de son gouvernement montrait que le parti était de bonne foi et respectait la loi et les institutions de l'État, de même que la nomination de M. Correia au poste de Premier Ministre plutôt que celle du chef de parti. Il a détaillé les démarches de son parti auprès du PRS et du Président aux fins d'un échange de vues sur des propositions spécifiques. Il a demandé que le Président se conforme au résultat des élections de 2014 et laisse le PAIGC diriger le gouvernement.

46. S'exprimant au nom du chef du parti, le Vice -Président du PRS a noté qu'au cours des opérations électorales de 2014, son parti n'avait cessé de prôner la paix et la stabilité et s'était dit prêt à former un gouvernement sans exclusive en cas de victoire. Le PRS s'était par la suite joint au gouvernement ouvert à toutes les parties de M. Simôes Pereira après la victoire du PAIGC. Il a déploré le fait que le PAIGC n'avait pas proposé d'accord politique en vue de la formation du gouvernement de M. Correia et aurait cherché, au lieu de cela, à acheter la conscience des membres du PRS. Pour cette raison, le PRS avait refusé de se joindre au nouveau gouvernement.

47. Le Vice-Président a ajouté que, du point de vue du PRS, c'étaient les divisions internes persistantes du PAIGC qui étaient à l'origine de la crise en cours, bien que celui-ci occupe la présidence, se trouve à la tête du gouvernement et détienne la majorité des sièges à l'Assemblée nationale. Il a insisté sur la volonté de son parti de sortir de l'impasse et noté que ce dernier acceptait l'idée d'un cadre politique en vertu duquel le PAIGC dirigerait le pays en tant que parti ayant recueilli le plus de votes lors des élections législatives de 2014.

2. Situation de l'Assemblée nationale

48. Les membres du Conseil de sécurité ont salué la mobilisation nationale ayant permis la tenue d'élections réussies, lesquelles ont donné l'occasion à la population d'élire librement ses représentants à l'Assemblée nationale et méritaient la confiance de la communauté internationale.

49. Le Président de la Guinée-Bissau a déclaré que, si le programme du gouvernement n'avait pas été approuvé le 23 décembre, c'était en conséquence d'une grave crise dans le pays. Le PAIGC avait expulsé 15 parlementaires du parti et demandé à l'Assemblée nationale de révoquer leur mandat et de les remplacer par d'autres qui voteraient pour le programme, ce que la Commission permanente de l'Assemblée avait accepté. La décision de la Commission de retirer à ces représentants leur mandat parlementaire avait entravé le fonctionnement de l'Assemblée.

50. Le Premier Ministre a pris la parole pour justifier la décision de la Commission permanente de révoquer le mandat parlementaire des 15 anciens membres du PAIGC, qui a été prise après que ces derniers se soient joints au PRS et abstenus de voter pour le programme du gouvernement en décembre 2015. D'après le règlement du PAIGC, les candidats aux élections législatives étaient proposés et soutenus par le parti. Or, ces candidats devaient d'abord déclarer qu'ils accepteraient les conditions posées par le parti et appuieraient ce dernier. En choisissant de ne pas appuyer le programme du gouvernement, les 15 parlementaires avaient perdu l'appui du parti et leur qualité de membre. Par ailleurs, le droit électoral ne prévoyait pas de candidatures indépendantes aux élections législatives.

51. Le Président de l'Assemblée nationale a souligné que, conformément aux règlements de l'Assemblée nationale et à la Constitution (dont il a distribué des exemplaires aux membres du Conseil), l'Assemblée avait demandé l'avis juridique de sa commission d'éthique et était par la suite arrivée à la conclusion que les 15 parlementaires ne satisfaisaient plus aux critères fixés par le droit électoral pour conserver leur siège. Il a affirmé que le Président et les 15 parlementaires exclus avaient incité un juge du tribunal régional de Bissau à prononcer un jugement allant à l'encontre d'une précédente décision du même tribunal en faveur du PAIGC.

52. Le Président de l'Assemblée a rappelé que le second débat sur le programme du gouvernement, tenu le 18 janvier, avait été perturbé par les 15 anciens membres du PAIGC et le PRS. Ce débat avait finalement repris le 28 janvier et le programme avait été adopté, en l'absence des 15 individus en question et du PRS.

53. Le Président de l'Assemblée a également rappelé qu'à la demande du PAIGC, l'Assemblée nationale avait créé une commission d'enquête chargée de vérifier les allégations de crimes, notamment de corruption, de népotisme et de malversation des revenus de l'État, formulées par le Président. Le rapport de la commission serait examiné à la session suivante de l'Assemblée. Il a en outre affirmé que le Président redoutait que la commission ne révèle au contraire les infractions commises par lui-même ou par son camp.

54. Le chef du PAIGC, pour sa part, a fait observer que l'instance compétente dans l'affaire des 15 anciens parlementaires était la Cour suprême de justice. Il a proposé que ces individus, s'ils étaient déterminés à promouvoir la paix et le dialogue, engagent une action en justice et exposent tous leurs arguments. Le PAIGC pourrait revoir sa position, si ces personnes en faisaient la demande et présentaient leurs excuses pour leur comportement.

55. Le Vice-Président du PRS a mis l'accent sur la position clef que son parti occupait à l'Assemblée nationale, où il détenait 41 sièges. Il a justifié cette position en soulignant que le Premier Ministre n'avait selon lui pas réussi à soumettre le programme du gouvernement à un second vote dans les délais prévus par la loi. Il a ajouté que le PAIGC avait perdu le procès en justice et ne respectait pas la décision du tribunal.

3. Dialogue

56. Les membres du Conseil de sécurité ont systématiquement demandé aux parties prenantes nationales de continuer à œuvrer en faveur d'un véritable dialogue politique, afin de sortir de l'impasse et d'honorer les promesses électorales faites à la population bissau-guinéenne.

57. Le Président de la Guinée -Bissau a informé les membres du Conseil des consultations qu'il avait lancées en vue de résoudre la crise, en réponse à la demande du Président de l'Assemblée nationale. Ces consultations, auxquelles ont pris part toutes les principales parties prenantes du pays, à savoir l'Assemblée, les partis politiques - occupant ou non des sièges parlementaires - et la société civile, se sont tenues en présence de la communauté internationale (Union africaine, Communauté des pays de langue portugaise, Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), Union européenne et ONU). Dans le prolongement de cette démarche, le Président a organisé plusieurs réunions bilatérales, consultatives et conjointes avec les parties au conflit, afin de conclure un accord visant à instaurer une gouvernance stable jusqu'à la fin de la présente législature. Suite à ces réunions, il a proposé de rédiger un projet d'accord parlementaire. Toutes les parties ont fait des observations sur le projet, mais leurs propositions devaient encore être harmonisées, comme cela était prévu initialement. Il s'est engagé à faire de son mieux pour favoriser la compréhension mutuelle des parties prenantes nationales et assurer une gouvernance stable.

58. Le Président de l'Assemblée nationale a souligné qu'en raison de l'exclusion de 15 de ses membres, le PAIGC ne disposait pas de la légitimité institutionnelle nécessaire pour participer, aux côtés des autres institutions, aux consultations lancées par le Président de la Guinée-Bissau. Le PAIGC, qui avait déjà contesté les modalités d'organisation des consultations, a demandé à ce que celles-ci se tiennent au niveau des institutions d'État, notamment la Présidence, le Gouvernement et l'Assemblée. Il a soutenu qu'il refuserait de participer à tout dialogue auquel prendraient part les 15 parlementaires exclus, et affirmé que le Président aurait dû renvoyer l'affaire devant la Cour suprême de justice.

59. Le chef du PAIGC a réaffirmé que son parti était toujours disposé à dialoguer avec les autres partis politiques et institutions afin de trouver une solution durable à la situation actuelle. En accord avec le Premier Ministre et le Président de l'Assemblée, il a critiqué la proposition du Président concernant l'organisation des consultations, qui devraient être menées au niveau des institutions d'État. Cela étant, le PAIGC a présenté une contreproposition à l'avant-projet d'accord politique établi par le Président.

60. Le Vice-Président du PRS a souligné qu'il fallait approfondir le dialogue national afin de faire sortir la Guinée-Bissau de la crise, et assuré aux membres du Conseil de sécurité que son parti était résolu à continuer de donner la priorité au dialogue, pour le bien du pays.

4. Sécurité, criminalité transnationale organisée et trafic de drogues, et droits de l'homme

61. Rappelant la situation régionale sur les plans de la paix et de la sécurité, les membres du Conseil de sécurité ont mis en évidence les effets négatifs que la crise pourrait avoir sur la sécurité et sur les Bissau-Guinéens, et affirmé qu'il importait d'améliorer les conditions de vie de la population. Ils ont déclaré que, devant le danger que représentaient les réseaux de criminalité transnationale organisée, il convenait de surveiller la frontière. Ils ont fait observer que les menaces transnationales telles que le trafic de drogues risquaient de s'aggraver, et que des groupes terroristes extrémistes pourraient même tirer parti de la situation en Guinée-Bissau.

62. Les membres du Conseil ont réaffirmé qu'ils soutenaient l'action menée par la Mission de la CEDEAO en Guinée-Bissau en vue de contribuer à améliorer la sécurité dans le pays. Ils ont également rappelé que l'Union européenne avait fourni une contribution financière pour garantir le bon fonctionnement de la Mission.

63. Saluant le soutien apporté par la Mission, le Premier Ministre a assuré aux membres du Conseil de sécurité que son pays prévoyait de réformer les secteurs de la défense et de la sécurité, et demandé l'appui de la communauté internationale à cet égard. Il a affirmé qu'un financement spécifique serait nécessaire pour mettre en œuvre le volet démobilisation et réintégration de la réforme. Il a soutenu que les militaires avaient hâte d'être démobilisés et de retourner à la vie civile, et étaient prêts à le faire, à condition de recevoir les fonds promis.

64. Le Président de la Guinée-Bissau s'est félicité que la première année de son mandat ait été exempte de coups de feu, de meurtres, de brutalités et d'arrestations arbitraires. Au contraire, la liberté d'expression et la liberté de presse ont été respectées, et l'armée est restée à l'écart de la vie politique.

5. Organisation des Nations Unies

65. Le Président a souligné l'importance du rôle joué par le Représentant spécial du Secrétaire général pour la Guinée-Bissau, également Chef du BINUGBIS, et l'a remercié de sa patience et des efforts de facilitation qu'il avait déployés dans le cadre des consultations menées pour trouver une solution à la crise. En outre, il a salué la décision du Conseil de sécurité de proroger le mandat du BINUGBIS afin de favoriser la consolidation de l'état de droit et de la démocratie, ainsi que la concrétisation de la réforme du secteur de la sécurité. Il s'est engagé à redoubler d'efforts pour faire de la Guinée-Bissau un partenaire actif de l'ONU. Dans cette optique, à l'exemple du Premier Ministre, il a demandé aux membres du Conseil d'envisager la réintégration des forces armées du pays dans les opérations de maintien de la paix.

66. Le Président de l'Assemblée nationale a lui aussi félicité le Conseil de sécurité d'avoir prorogé le mandat du BINUGBIS et appelé à redéfinir ce dernier pour donner au Bureau les moyens de défendre les principes de démocratie. En outre, il a proposé de renforcer le rôle que joue le BINUGBIS dans le cadre de son mandat pour aider à lutter contre le trafic de stupéfiants et l'extrémisme violent.

D. Observations

67. Les parties prenantes nationales se sont réjouies de la visite des membres du Conseil de sécurité, qui témoigne de l'importance que le Conseil accorde à la Guinée-Bissau, et de la détermination du Conseil à soutenir les efforts de stabilisation du pays.

68. Notant que les parties étaient profondément divisées, les membres du Conseil les ont exhortées à privilégier le dialogue pour régler leurs différends, conformément à la Constitution et aux lois du pays. Ils ont convenu que la solution aux problèmes de la Guinée-Bissau passait par le peuple, et souligné qu'il importait de respecter l'état de droit, de combattre l'impunité et de promouvoir le principe de responsabilité. Les autorités nationales devraient s'efforcer d'instaurer une stabilité politique durable afin de mettre fin aux problèmes de la population et de répondre à ses besoins essentiels. Dans cette optique, il est impératif que le Gouvernement joue son rôle exécutif et que l'Assemblée nationale exerce ses activités conformément à la loi. Soulignant la précarité de la situation, les membres du Conseil ont estimé que la classe politique et les organes du pouvoir pourraient surmonter leurs divergences s'ils démontraient de la patience, s'engageaient à trouver des solutions et faisaient preuve d'une certaine souplesse.

IV. Sénégal

A. Contexte

69. Le 8 mars 2016, les membres du Conseil de sécurité se sont rendus à Dakar pour la dernière étape de leur mission. La mission était conduite par le Représentant permanent de l'Angola auprès de l'ONU. Une première réunion a été organisée avec les dirigeants du Bureau des Nations Unies pour l'Afrique de l'Ouest et le Sahel (UNOWAS), puis avec les représentations diplomatiques basées au Sénégal, dont celles des pays suivants : Chine, Espagne (pour le Sénégal), France (pour la Gambie et le Sénégal), Fédération de Russie (pour la Gambie et le Sénégal), Japon (pour Cabo Verde, la Gambie, la Guinée-Bissau et le Sénégal), Malaisie (pour le Burkina Faso, Cabo Verde, la Gambie et le Sénégal), Ukraine et Venezuela (République bolivarienne du) (pour plusieurs pays). Les membres du Conseil de sécurité ont ensuite rencontré le Président du Sénégal, Macky Sall.

B. Réunions

70. L'objectif de cette visite à l'UNOWAS était d'échanger des informations sur la situation politique et les conditions de sécurité en Afrique de l'Ouest et dans le Sahel et de faire le point sur la mise en œuvre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel. La mission visait en outre à suivre l'application de la décision de fusionner le Bureau du Représentant spécial du Secrétaire général pour l'Afrique de l'Ouest (UNOWA) et le Bureau de l'Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Sahel (voir S/2016/89). Cette visite a permis aux membres du Conseil de sécurité d'exprimer leur plein appui au Représentant spécial du Secrétaire général pour l'Afrique de l'Ouest et le Sahel et de féliciter l'UNOWAS des activités qu'il mène dans le cadre de son mandat. La réunion avec le corps diplomatique a été l'occasion d'échanger des informations sur les problèmes de paix et de sécurité dans la région et sur la visite du Conseil en Guinée-Bissau, au Mali, et au Sénégal.

71. Dans ses observations, le Représentant spécial du Secrétaire général a détaillé la situation dans la sous-région et l'exécution du mandat de l'UNOWAS. Il a souligné que les problèmes de sécurité et la riposte de la communauté internationale étaient au cœur du débat régional. Depuis son arrivée à la tête de l'UNOWA, il avait constaté une augmentation des initiatives visant à améliorer la coordination et la coopération régionales, telles que l'Architecture africaine de paix et de sécurité et le Groupe de cinq pays du Sahel. Il a indiqué que la région était de plus en plus consciente de la vulnérabilité des pays face au terrorisme et d'autres menaces pour la sécurité, ce qui avait suscité une volonté commune d'unifier les forces.

72. Les membres du Conseil de sécurité ont ensuite rencontré le Président du Sénégal, en sa qualité de Président de la CEDEAO. Ils se sont entretenus avec lui de la situation en Afrique de l'Ouest et ont cherché à connaître son analyse des questions touchant la région, notamment la menace du terrorisme. Il leur a donné son opinion sur la situation au Mali et leur a affirmé qu'il fallait garantir l'intégrité territoriale du pays. Il a proposé de donner de l'autonomie à la MINUSMA dans l'exécution de son mandat, compte tenu de la violence qui sévissait actuellement au Mali.

73. Le Président a souligné que le terrorisme revêtait un caractère transnational et appelé l'ensemble de la communauté internationale à conjuguer ses efforts pour soutenir la lutte contre les groupes terroristes dans la région. Il a également fait observer que les pays d'Afrique de l'Ouest devaient renforcer leurs capacités afin de faire face à cette menace.

74. Interrogé sur son point de vue concernant la manière de résoudre les problèmes au Burundi et en Guinée-Bissau, il a déclaré que le régime semi-présidentiel, dans lequel coexistent différents niveaux de gouvernement, était la principale cause de la crise en Guinée-Bissau. Il a proposé de lancer un processus de révision constitutionnelle pour faire en sorte que cette situation ne se représente plus et exhorté les autorités à collaborer jusqu'à la fin du mandat de l'actuel Président.

75. Il a également mis en évidence l'importance de la CEDEAO dans le règlement de la crise en Guinée-Bissau et indiqué que la Mission de la CEDEAO en Guinée-Bissau, qui jouait un rôle majeur dans le maintien de la paix et de la sécurité, traversait des difficultés financières. Il a souligné que des violences risquaient d'éclater si la Mission devait quitter le pays pour des raisons financières, et affirmé que le budget annuel du Sénégal au titre de l'appui à la Mission s'élevait à 20 millions de dollars.

76. Il a expliqué qu'il avait fait partie, avec les Présidents de l'Afrique du Sud, de l'Éthiopie, du Gabon et de la Mauritanie, de la délégation de haut niveau de l'Union africaine qui s'était rendue au Burundi les 25 et 26 février. La délégation a demandé au Président du Burundi, Pierre Nkurunziza, de mener un dialogue sans exclusive avec toutes les parties prenantes burundaises, y compris celles qui avaient quitté le pays, et de libérer tous les prisonniers politiques.

77. Il a fait observer que le Président de l'Ouganda, Yoweri Museveni, jouait un rôle capital pour ce qui est de faciliter le dialogue interburundais et de trouver des moyens d'apaiser les tensions avec le Rwanda. Il a déclaré que l'Union africaine devait mener les négociations au Burundi et qu'elle enverrait 100 observateurs militaires et 100 observateurs des droits de l'homme dans le pays, le Président ayant refusé sa proposition de déployer une mission africaine de maintien de la paix. Il a demandé au Conseil de sécurité d'appuyer la mission d'observation au Burundi.

C. Principales questions examinées

1. Élections

78. Le Représentant spécial a informé les membres des activités de bons offices qu'il mène dans le cadre des élections au Bénin et au Niger et des préparatifs en cours au Cabo Verde. En ce qui concerne les élections au Bénin, il a déclaré qu'il venait de rentrer de ce pays qui, au terme d'une campagne pacifique, avait tenu avec succès le premier tour de l'élection présidentielle. Le seul point de désaccord avait porté sur les cartes d'électeurs, les cartes biométriques prévues pour 2016 n'ayant pas été distribuées à temps. Il a décrit les consultations de bons offices qu'il avait menées au nom des partenaires internationaux, dont l'Union africaine, la CEDEAO, et le Conseil de l'Entente, présents au Bénin pour l'observation des élections, afin de trouver une solution à la controverse qui opposait la Cour constitutionnelle et la Commission électorale nationale autonome sur cette question. Il a indiqué qu'il poursuivrait, en collaboration avec d'autres partenaires internationaux, ses activités de bons offices en vue du deuxième tour des élections, le 29 mars.

79. Pour ce qui est du Niger, le Représentant spécial a déclaré que le premier tour des élections s'était déroulé dans le calme, malgré une situation extrêmement complexe marquée par l'emprisonnement d'Hama Amadou, candidat à l'élection présidentielle et ancien Président du Parlement, accusé de traite d'enfants. Il a précisé qu'il s'agissait d'une question essentiellement d'ordre juridique et que le parti de M. Amadou avait fait preuve de retenue et s'était comporté de manière très responsable. Il a ajouté que le deuxième tour des élections était prévu pour le 20 mars et que son équipe sur place continuerait d'offrir ses bons offices pour en assurer le succès. S'agissant du Cabo Verde, il a déclaré qu'il se rendrait à Praia pour y rencontrer le Président et d'autres personnalités qui jouent un rôle essentiel dans le processus électoral afin de les encourager à poursuivre l'organisation pacifique des élections du 20 mars. En ce qui concerne la situation politique au Sénégal, il a souligné que le pays jouissait en Afrique d'une réputation de solide démocratie qui était bien méritée, et indiqué qu'il encourageait les parties sénégalaises à tenir un débat serein à l'approche du référendum du 20 mars sur les réformes constitutionnelles.

2. Terrorisme et extrémisme violent

80. Évoquant les difficultés en matière de sécurité dues à la présence de Boko Haram dans le bassin du Lac Tchad, le Représentant spécial a précisé qu'il était allé, en compagnie du Représentant spécial du Secrétaire général pour l'Afrique centrale, Abdoulaye Bathily, dans tous les pays touchés par Boko Haram. À cette occasion, ils s'étaient tous deux rendus à la Commission du bassin du Lac Tchad et au siège de la Force multinationale mixte à N'Djamena, où ils avaient été informés des progrès réalisés dans la coordination des interventions entre les pays concernés et du niveau de déploiement des troupes. Il a souligné que les pays avaient dépassé l'objectif fixé à 8 500 soldats par l'Union africaine pour les effectifs de la Force. Il a fait observer que le Cameroun et le Nigéria collaboraient pour mettre sur pied des opérations transfrontières contre Boko Haram. Avec le Représentant spécial du Secrétaire général pour l'Afrique centrale, il avait encouragé les États à présenter un front plus uni face à la guerre asymétrique menée par Boko Haram, et demandé que les mesures concernant l'accès aux ressources soient le fruit d'une collaboration entre l'Union africaine et la Commission. Il a souligné qu'il fallait renforcer la coordination avec l'Union africaine afin que la Force puisse recevoir des ressources internationales fournies par l'intermédiaire de cette organisation. Une réunion consultative de haut niveau aura lieu en mai avec la participation des pays concernés. Il a vivement encouragé les partenaires internationaux à s'y faire représenter au plus haut niveau.

81. Se référant aux inquiétudes que suscitaient la menace croissante du terrorisme et l'extrémisme violent, le Représentant spécial a indiqué que le faible niveau de développement et l'absence de perspectives socioéconomiques étaient à l'origine de ce phénomène. Il a rappelé qu'il fallait se mobiliser davantage, à l'instar de ce que faisait les équipes de pays des Nations Unies dans le contexte du plan-cadre des Nations Unies pour l'aide au développement, en vue de lutter contre la marginalisation sociale et économique et d'apporter un appui aux populations touchées par Boko Haram. Comme ce groupe semblait recevoir des soutiens de toutes parts, y compris des Chabab et de l'État islamique d'Iraq et du Levant, une telle mobilisation permettrait d'affaiblir la capacité des terroristes de créer des réseaux et de tuer ou détruire des populations. Il a souligné que les jeunes dans les zones touchées par Boko Haram, dans le nord du Cameroun, le nord-est du Nigéria et le sud du Niger et du Tchad, devraient pouvoir bénéficier de perspectives économiques et sociales plus innovantes afin d'ouvrir ces régions sur l'extérieur.

3. Fusion des bureaux

82. Le Représentant spécial a donné l'assurance que des mesures étaient prises pour concrétiser la décision du Conseil de sécurité de fusionner l'UNOWA et le Bureau de l'Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Sahel qui deviendraient l'UNOWAS. Une équipe d'évaluation technique venait de rentrer à New York et poursuivrait ses travaux en vue d'élaborer des projets de recommandation qui seraient validés par les responsables du Département des affaires politiques et du Département de l'appui aux missions du Secrétariat, en consultation avec la mission. La nouvelle structure unifiée devrait être officiellement adoptée dans les semaines à venir. En attendant, l'équipe concentrait d'ores et déjà ses efforts sur la fusion.

83. Le Représentant spécial a informé le Conseil de sécurité que, dans le cadre de la mise en œuvre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel, une cellule de liaison du Groupe de cinq pays du Sahel avait été créée à Nouakchott. Il a insisté sur le fait que les travaux sur les questions de gouvernance et de résilience en matière de sécurité dans le Sahel se poursuivraient en synergie avec d'autres partenaires internationaux, y compris avec l'Union européenne, qui avait mis en place sa propre stratégie pour le Sahel, et avec le Programme des Nations Unies pour le développement. Il a estimé que les pays touchés par le terrorisme et l'extrémisme violent prenaient de bonnes initiatives pour lutter contre ces fléaux, mais que la disponibilité des ressources demeurait problématique. Il a donc demandé aux partenaires internationaux d'apporter un soutien accru à ces pays.

84. Pour ce qui est des incidences de la corruption sur le développement des pays de la région, le Représentant spécial a indiqué que, d'après le rapport de Transparency International, les pays de l'Afrique de l'Ouest étaient toujours classés parmi les derniers. Il a salué les mesures que certains pays, notamment le Nigéria, ont prises pour lutter contre la corruption, et souligné que les succès remportés par ce pays serviraient d'exemple aux autres et que, vu l'importance du Nigéria dans la région, ces succès aurait des retombées positives. À l'échelon régional et dans le cadre de la CEDEAO, certaines initiatives avaient été mises en œuvre afin que les pays puissent tirer parti de l'expérience acquise par d'autres, notamment aux fins de l'établissement de procédures d'achat plus transparentes.

4. Piraterie

85. S'agissant de la piraterie et de la sûreté maritime, le Représentant spécial avait participé, avec le Représentant spécial du Secrétaire général pour l'Afrique centrale, à une réunion de haut niveau sur la sûreté maritime dans le golfe de Guinée, qui s'est tenue à Yaoundé en février. Cette réunion, qui avait rassemblé des représentants de la CEDEAO, de la Communauté économique des États de l'Afrique centrale, de la Commission du golfe de Guinée et, parmi les partenaires internationaux, de la France, de l'Union européenne, du Groupe des Sept et du Groupe des amis du golfe de Guinée, visait à rendre opérationnel le centre de coordination mondial pour la sûreté et la sécurité dans la zone maritime de l'Afrique centrale et de l'Afrique de l'Ouest. À l'échelle du continent, l'Union africaine organiserait un sommet sur la sûreté maritime au Togo en octobre afin d'étudier les moyens de lutter contre les activités criminelles qui constituaient un obstacle à la paix et à la sécurité de la navigation dans l'espace maritime africain, notamment dans le golfe de Guinée.

5. Application de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité sur les femmes et la paix et la sécurité

86. En ce qui concerne l'application de la résolution 1325 (2000) dans le cadre du mandat de l'UNOWAS, le Représentant spécial a souligné que les femmes prenaient constamment part aux initiatives de médiation et de consolidation de la paix. Il a mentionné la journée annuelle portes ouvertes consacrée à la participation des femmes aux questions ayant trait au développement et à la paix dans la région. À cet égard, il a rappelé que l'UNOWA avait formé, de concert avec la CEDEAO, 32 médiatrices dans la région, et que des consultations se poursuivaient avec ces femmes afin de les encourager à appuyer les initiatives et les organismes dans l'action visant à promouvoir la paix, la sécurité et la stabilité.

6. Rôle du Sénégal dans la région

87. Les membres du corps diplomatique ont souligné l'importance stratégique du Sénégal et la place qu'occupait ce pays dans la région, dont les institutions démocratiques et le rôle dans la diplomatie préventive et la consolidation de la paix en Afrique devaient servir d'exemples. Ils ont ajouté que son système religieux et sa culture de la tolérance avaient permis au Sénégal d'être un pays stable dans une région en proie à des troubles.

7. Tensions politiques en Guinée-Bissau

88. Le Représentant spécial a mentionné les efforts entrepris par l'ancien Président nigérian, Olusegun Obasanjo, le Président guinéen, Alpha Condé, et le Président sénégalais en sa qualité de Président de la CEDEAO pour surmonter la crise politique en Guinée-Bissau. Il a souligné que la communauté internationale devrait poursuivre le dialogue avec ce pays, en raison des incidences que la crise politique qu'il traversait avait sur la région.

D. Observations

89. Les membres du Conseil de sécurité ont salué les efforts inlassables de diplomatie préventive déployés avec succès par le Représentant spécial et son équipe, et réaffirmé leur soutien à l'UNOWAS. Les représentants de l'Angola et de la France ont notamment mis en relief l'importance des activités de l'UNOWAS dans ce domaine, et rappelé que le Bureau complétait l'action menée par le Conseil face à la menace que représentait Boko Haram dans la région.

90. Les membres du Conseil ont confirmé qu'ils souscrivaient aux vues exprimées, qu'ils s'étaient exprimés d'une seule voix face à la situation au Mali et en Guinée-Bissau et que leur message était identique. Ils se sont déclarés particulièrement satisfaits de constater une évolution positive, quoique que plus lente que prévu, du processus de paix au Mali. Ils ont souligné qu'à la fin de leur mission, ils étaient vivement préoccupés par l'impasse politique en Guinée-Bissau et qu'ils resteraient saisis de la question.

91. Les membres du Conseil ont estimé qu'il fallait s'attaquer aux menaces contre la sécurité en Afrique de l'Ouest et dans le Sahel dans une optique régionale de prévention des conflits. Ils ont indiqué que le caractère multidimensionnel des difficultés auxquelles faisaient face l'Afrique de l'Ouest et le Sahel, en particulier la criminalité transnationale organisée et le terrorisme, ainsi que leurs causes profondes, exigeait que l'Organisation des Nations Unies et la communauté internationale adoptent des démarches multidimensionnelles et créatives, notamment pour renforcer l'état de droit et les institutions chargées de la sécurité au niveau régional. Ils ont rappelé que le développement économique et les services sociaux devraient être accessibles à l'ensemble de la population afin d'éviter la frustration croissante qui constituait un terreau fertile pour le terrorisme et l'extrémisme violent. Ils ont également déclaré que des mesures devaient être prises pour éviter que la situation de l'Afrique ne s'apparente à celle de la République arabe syrienne ou de l'Iraq. Ils ont convenu que, malgré les effets manifestement déstabilisants des infiltrations jihadistes dans les rangs de Boko Haram, non seulement de la Libye mais aussi des Chabab de Somalie et même du Sahel, les ressources mobilisées n'avaient pas été suffisantes pour contrer ce niveau de menace.


Annexe I

Composition de la mission du Conseil de sécurité au Mali, en Guinée-Bissau et au Sénégal

M. l'Ambassadeur Ismael Abraão Gaspar Martins (Angola)
M. Zhao Yong (Chine)
M. l'Ambassadeur Amr Abdellatif Aboulatta (Égypte)
M. l'Ambassadeur Román Oyarzun Marchesi (Espagne)
M. l'Ambassadeur David Pressman (États -Unis d'Amérique)
M. Petr V. Iliichev (Fédération de Russie)
M. l'Ambassadeur François Delattre (France)
M. l'Ambassadeur Yoshifumi Okamura (Japon)
M. l'Ambassadeur Ramlan Bin Ibrahim (Malaisie)
M. l'Ambassadeur Phillip Taula (Nouvelle-Zélande)
M. l'Ambassadeur Peter Wilson (Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord)
M. l'Ambassadeur Fodé Seck (Sénégal)
M. l'Ambassadeur Volodymyr Yelchenko (Ukraine)
M. l'Ambassadeur Luis Homero Bermúdez Alvarez (Uruguay)
M. l'Ambassadeur Henry Alfredo Suarez Moreno (Venezuela, République bolivarienne du).


Annexe II

Mandat de la mission du Conseil de sécurité au Mali, en Guinée-Bissau et au Sénégal (mars 2016)

Mission au Mali, du 4 au 6 mars 2016,
dirigée par la France et le Sénégal

Références :
Résolution 2227 (2015) du Conseil de sécurité
Déclaration à la presse du Conseil de sécurité en date du 12 janvier 2016 (SC/12198-AFR/3300-PKO/555)

Application effective de l'Accord pour la paix et la réconciliation au Mali

1. Rappeler qu'il incombe au premier chef au Gouvernement malien et aux groupes armés des coalitions Plateforme et Coordination d'instaurer une paix durable au Mali, et réaffirmer son intention de faciliter, d'appuyer et de suivre de près la mise en œuvre de l'Accord pour la paix et la réconciliation au Mali.

2. Saluer les premières mesures positives prises pour appliquer l'Accord et prier instamment le Gouvernement malien et les groupes armés des coalitions Plateforme et Coordination de maintenir un dialogue constructif avec la volonté politique ferme et sincère d'appliquer pleinement et véritablement l'Accord sans plus tarder.

3. Prier instamment le Gouvernement malien et les groupes armés des coalitions Plateforme et Coordination d'appliquer en priorité les principales dispositions de l'Accord afin que les populations du pays puissent bénéficier des avantages de la paix et, à cet égard, les prier de prendre sans attendre les mesures requises pour faire progresser le déploiement de patrouilles conjointes de sécurité dans le nord du pays et le cantonnement, le désarmement, la démobilisation et la réintégration des combattants armés, ainsi que la décentralisation, comme le prévoit l'Accord.

4. Réaffirmer que le Conseil de sécurité appuie pleinement l'action menée par le Représentant spécial du Secrétaire général pour le Mali et la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) pour aider le Gouvernement malien et les groupes armés des coalitions Plateforme et Coordination à appliquer l'Accord.

5. Rappeler que le Conseil de sécurité a demandé au Représentant spécial du Secrétaire général pour le Mali d'user de ses bons offices pour jouer un rôle de premier plan pour ce qui est d'appuyer et de superviser la mise en œuvre de l'Accord, notamment en dirigeant le secrétariat du Comité de suivi de l'Accord, et évaluer la mesure dans laquelle la MINUSMA s'acquitte du mandat qui lui a été assigné d'appuyer la mise en œuvre de l'Accord, notamment les arrangements relatifs au cessez-le-feu et les mesures de défense et de sécurité, et d'user de ses bons offices et de mesures d'encouragement aux niveaux national et local.

6. Prier instamment le Gouvernement malien et les groupes armés des coalitions Plateforme et Coordination de collaborer pleinement et de coordonner son action avec le Représentant spécial du Secrétaire général pour le Mali et la MINUSMA, notamment pour l'application de l'Accord.

7. Demander de nouveau aux membres du Comité de suivi de l'Accord et aux autres partenaires internationaux d'appuyer la mise en œuvre de l'Accord et de coordonner leur action avec celle du Représentant spécial du Secrétaire général pour le Mali et de la MINUSMA, et souligner la nécessité d'appuyer la mise en œuvre de l'Accord par des mécanismes de contrôle bien définis, détaillés et concrets.

8. Évaluer les capacités des Forces de défense et de sécurité maliennes et la contribution apportée par les partenaires internationaux, notamment l'Union européenne dans le cadre de sa mission militaire visant à contribuer à la formation des forces armées maliennes (EUTM Mali) et de sa mission PSDC au Mali (EUCAP Sahel Mali), pour ce qui est de dispenser des formations et des conseils aux Forces de défense et de sécurité maliennes.

9. Évaluer la contribution qu'apporte la société civile malienne, notamment par l'intermédiaire des organisations de femmes, au processus de paix et à la mise en œuvre de l'Accord, notamment en assurant la représentation et la participation pleine et entière des femmes à tous les niveaux aux comités de suivi de l'Accord, ainsi qu'au processus de paix et de réconciliation et au processus électoral, conformément aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et au quota de représentation par sexe adopté par le Mali en 2015.

10. Évaluer l'efficacité avec laquelle la MINUSMA aide les autorités maliennes à faire en sorte que la question des violences liées au conflit, en particulier les crimes de violence sexuelle, soit pleinement prise en compte : a) dans la mise en œuvre de l'Accord; b) dans le cadre du processus de désarmement, démobilisation et réintégration et de la réforme du secteur de la sécurité; c) dans tout mécanisme de vérification du cessez-le-feu; et d) dans tout mécanisme de justice transitionnelle.

11. Évaluer l'efficacité avec laquelle la MINUSMA assure une protection particulière aux femmes et aux enfants, notamment en déployant des conseillers pour la protection des femmes et des conseillers pour la protection des enfants chargés de repérer et de signaler les cas de violences sexuelles liées au conflit armé et les graves violations commises contre des enfants, et voit dans la problématique hommes-femmes une question transversale touchant tous les aspects de son mandat.

Conditions de sécurité

12. Entendre un exposé sur les conditions de sécurité au Mali et dans la région du Sahel, exprimer la préoccupation du Conseil de sécurité à ce sujet, notamment la propagation des activités terroristes et criminelles au centre et au sud du Mali, ainsi que son appui aux forces françaises qui soutiennent la MINUSMA, et souligner que l'application intégrale de l'Accord peut contribuer à améliorer les conditions de sécurité au Mali.

13. Évaluer le degré de coopération entre le Mali et les pays de la région dans la lutte contre la menace terroriste au Sahel, en particulier par l'intermédiaire du Groupe de cinq pays du Sahel, et examiner les moyens de renforcer cette coopération, notamment les propositions faites par l'Union africaine visant à mettre en place une force de lutte contre le terrorisme au Mali et dans la région.

14. Évaluer la mesure dans laquelle la MINUSMA s'acquitte du mandat qui lui a été assigné d'assurer, sans préjudice de la responsabilité première des autorités maliennes, la protection des civils immédiatement menacés de violences physiques.

15. Évaluer la mesure dans laquelle la MINUSMA s'acquitte du mandat qui lui a été assigné, en appui aux autorités maliennes, de stabiliser les principales agglomérations et les autres zones où les civils sont en danger, y compris dans le nord du pays, notamment en effectuant des patrouilles de longue portée et, dans ce contexte, d'écarter les menaces et de prendre des mesures concrètes pour empêcher le retour d'éléments armés dans ces zones.

16. Souligner qu'étant donné l'évolution des menaces qui pèsent sur la sécurité de la MINUSMA, il importe d'offrir à son personnel une protection suffisante pour lui permettre de s'acquitter efficacement de son mandat, évaluer la qualité du matériel et de la formation dont dispose le personnel de la Mission à cet égard et demander de nouveau au Secrétaire général et à tous les pays fournisseurs de contingents ou de personnel de police, ainsi qu'aux donateurs bilatéraux, de continuer de s'employer à faire en sorte que le personnel de la MINUSMA reçoive le matériel et la formation dont il a besoin pour s'acquitter de sa mission.

Distribution des dividendes de la paix aux populations du Mali

17. Demander de nouveau aux autorités maliennes de répondre aux besoins immédiats et à long terme dans les domaines de la sécurité, de la réforme de la gouvernance, du développement et de l'action humanitaire, en vue de régler la crise au Mali et de veiller à ce que l'Accord procure des avantages concrets aux populations locales, notamment grâce à l'exécution des projets prioritaires qui y sont prévus.

18. Évaluer l'incidence de l'Accord sur les conditions de vie des populations du Mali, en particulier dans le nord du pays, évaluer l'action menée par le Gouvernement malien en vue d'assurer à nouveau la prestation des services de base aux populations du nord du Mali, et demander la mise en œuvre immédiate des engagements pris à la Conférence internationale pour la relance économique et le développement du Mali, qui s'est tenue à Paris le 22 octobre 2015.

19. Évaluer la mesure dans laquelle la MINUSMA s'acquitte du mandat qui lui a été assigné d'aider les autorités maliennes à créer les conditions de sécurité indispensables à la mise en œuvre de projets visant à stabiliser le nord du Mali, y compris des projets à effet rapide.

20. Évaluer la nécessité de mettre en place d'autres institutions et de lancer d'autres projets de développement en vue de consolider le processus de paix.

21. Évaluer la mesure dans laquelle la MINUSMA s'acquitte du mandat qui lui a été assigné de contribuer, en collaboration avec l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO), à la sauvegarde du patrimoine culturel.

Visite en Guinée-Bissau, qui sera conduite par le Sénégal et l'Angola

1. Le Conseil de sécurité effectuera une mission en République de Guinée -Bissau dans le cadre défini par sa résolution 2267 (2016) et ses déclarations à la presse en date des 12 août 2015 (SC/12005-AFR/3195), 14 août 2015 (SC/12007-AFR/3196) et 21 septembre 2015 (SC/12054-AFR/3212).

2. Le Conseil rencontrera notamment le Président de la République, le Premier Ministre et son gouvernement, le Président et le Vice -Président du Parlement, les chefs des partis politiques, y compris ceux qui siègent au Parlement, les organisations de la société civile et l'équipe de direction du Bureau intégré des Nations Unies pour la consolidation de la paix en Guinée-Bissau (BINUGBIS).

3. Conformément au cadre décrit au paragraphe 1, le Conseil :

a) Exprimera sa vive préoccupation face à l'exacerbation des tensions politiques entre le Président, le Premier Ministre, le Parlement et les chefs des partis politiques, qui empêchent le pays de faire des progrès;

b) Engagera vivement les parties concernées à s'efforcer de sortir de l'impasse dans le respect des lois et de la Constitution du pays;

c) Réaffirmera son ferme attachement à la souveraineté, à l'indépendance politique, à l'intégrité territoriale, à l'unité de la Guinée-Bissau et à la consolidation de la paix dans le pays;

d) Demandera aux dirigeants de privilégier le dialogue et le consensus pour régler la crise afin de protéger les intérêts du peuple bissau-guinéen;

e) Demandera au Président de nommer, en coopération avec le Gouvernement, les personnes qui seront appelées à diriger les ministères qui n'ont toujours personne à leur tête, à savoir le Ministère de l'intérieur et le Ministère des ressources naturelles;

f) Soulignera que le pouvoir judiciaire doit régler la question du statut des 15 parlementaires qui ont été expulsés du parti au pouvoir et auxquels on a interdit de siéger à l'Assemblée nationale;

g) Invitera le Président à voir dans le Pacte de stabilité facilité par l'ONU un outil qui permettra aux acteurs politiques de tenir un dialogue et des négociations ciblés lors de la mise en place d'un cadre destiné à assurer le bon fonctionnement des institutions publiques;

h) Saluera l'importante action que mène la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) et encouragera cette dernière à continuer d'apporter son appui politique aux autorités et aux responsables politiques de la Guinée-Bissau au moyen de missions de bons offices et de médiation (voir résolution 2267 (2016) du Conseil, par. 8);

i) Encouragera la CEDEAO et la Communauté des pays de langue portugaise à prendre les mesures nécessaires pour organiser une réunion du Groupe de contact international pour la Guinée-Bissau, en consultation avec l'Organisation des Nations Unies, l'Union européenne et toutes les parties prenantes (voir résolution 2267 (2016), par. 9) et, à cet égard, priera instamment les autorités bissau-guinéennes de faire preuve de la volonté nécessaire pour rétablir une dynamique de progrès dans des domaines clefs (voir résolution 2267 (2016), première partie du paragraphe 18);

j) Demandera de nouveau que les forces de sécurité et l'armée s'abstiennent de toute ingérence dans la situation politique;

k) Saluera le rôle crucial joué par la mission de la CEDEAO en Guinée -Bissau dans l'action menée pour sécuriser les institutions publiques et soutenir la réforme du secteur de la sécurité, se déclarera favorable au maintien de la Mission, conformément à la volonté exprimée par les autorités bissau-guinéennes, et demandera instamment aux partenaires bilatéraux, régionaux et internationaux d'envisager de fournir une assistance financière pour aider la CEDEAO à maintenir le déploiement de sa mission en Guinée-Bissau, conformément à la demande formulée lors du Sommet des chefs d'État et de gouvernement de la CEDEAO à sa quarante-huitième session ordinaire (voir résolution 2267 (2016), par. 13);

l) Affirmera clairement qu'il importe de maintenir la paix et la diplomatie préventive, et exprimera son intention de suivre la situation de près et de prendre les mesures voulues si la situation en vient à menacer la paix et à la sécurité en Guinée-Bissau.

4. Les membres du Conseil s'acquitteront également des tâches suivantes :

a) Évaluer les répercussions des tensions politiques sur les conditions de vie des populations en Guinée-Bissau;

b) Évaluer les progrès accomplis dans la mise en œuvre des réformes, notamment en ce qui concerne le secteur de la sécurité et le système judiciaire;

c) Évaluer la mesure dans laquelle le BINUGBIS s'acquitte du mandat qui lui a été assigné d'aider les autorités bissau-guinéennes à créer des conditions de sécurité propices à l'exécution des projets prioritaires visant à stabiliser le pays;

d) Évaluer les mesures prises par les autorités bissau-guinéennes pour mettre en œuvre et réviser les textes législatifs et les mécanismes nationaux de façon à combattre plus efficacement la criminalité transnationale organisée, notamment le trafic de drogues et le blanchiment d'argent, qui menacent la sécurité et la stabilité de la Guinée-Bissau et de la sous-région (voir résolution 2267 (2016), par. 15);

e) Réaffirmer que le Conseil appuie le rôle essentiel et l'engagement actif du Représentant spécial du Secrétaire général pour la Guinée-Bissau et Chef du Bureau intégré des Nations Unies pour la consolidation de la paix en Guinée-Bissau (BINUGBIS), Miguel Trovoada, qui a usé de ses bons offices et assuré une coordination étroite avec la communauté internationale;

f) Réaffirmer que le Conseil appuie les organisations sous-régionales, régionales et internationales qui œuvrent activement à la stabilisation de la Guinée-Bissau.

Visite au Sénégal, qui sera conduite par l'Angola

I. Réunion avec les autorités sénégalaises

  • Rôle de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), qui présidera la réunion :

Références :
Déclaration à la presse du Conseil de sécurité, en date du 15 janvier 2016 (SC/12207)
Déclaration du Président du Conseil de sécurité, en date du 11 juin 2015 (S/PRST/2015/12)

- Évoquer la situation politique et les conditions de sécurité en Afrique de l'Ouest, ainsi que les bons offices et la médiation assurés par le Sénégal, notamment la visite de l'Union africaine au Burundi et les mesures prises dans la perspective de la prochaine réunion au sommet de la CEDEAO, qui se tiendra à la mi-2016;

- Se féliciter de l'évolution politique positive en Afrique de l'Ouest, et en particulier de la tenue d'élections libres et pacifiques au Nigéria, au Togo, au Burkina Faso, en Guinée et en Côte d'Ivoire;

- Souligner qu'il importe que l'élection présidentielle qui sera tenue au Niger, au Bénin, à Cabo Verde, au Ghana, en Gambie et au Tchad soit libre, équitable, pacifiques, crédible et ouverte à tous;

- Réaffirmer que le Conseil de sécurité condamne fermement les attentats terroristes récurrents perpétrés dans la région, en particulier au Mali et au Sahel, ainsi que dans la région du bassin du Lac Tchad, notamment par Boko Haram, et évaluer l'action menée par la CEDEAO et d'autres organisations régionales, dont la Commission du bassin du Lac Tchad, pour lutter contre les menaces terroristes. Souligner de nouveau la nécessité d'adopter une démarche globale pour écarter une fois pour toutes la menace que fait peser Boko Haram sur la région;

- Déclarer que le Conseil appuie les mesures visant à promouvoir la coopération entre la CEDEAO, le Bureau des Nations Unies pour l'Afrique de l'Ouest et le Sahel (UNOWAS), le Bureau régional des Nations Unies pour l'Afrique centrale (BRENUAC), la Commission du Bassin du Lac Tchad et d'autres organisations multilatérales et régionales concernées en vue d'aider la région à faire face à ses problèmes politiques et sécuritaires;

- Examiner la question de la présence de la CEDEAO en Guinée-Bissau, en particulier l'avenir de sa mission en Guinée-Bissau;

- Examiner la question de la préparation par la CEDEAO de la réunion du Groupe de contact international pour la Guinée-Bissau.

II. Réunion avec le Représentant spécial du Secrétaire général, Chef du Bureau des Nations Unies pour l'Afrique de l'Ouest et le Sahel et l'Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Sahel

Références :
Déclaration de la Présidente du Conseil de sécurité, en date du 8 décembre 2015 (S/PRST/2015/24)
Lettre datée du 28 janvier 2016, adressée au Secrétaire général par le Président du Conseil de sécurité (S/2016/89)

- Procéder à un échange de vues sur la situation politique et les conditions de sécurité en Afrique de l'Ouest et dans la région du Sahel, y compris l'initiative de diplomatie préventive menée par le Bureau des Nations Unies pour l'Afrique de l'Ouest et le Sahel (UNOWAS);

- Exprimer son plein appui au Représentant spécial et saluer les activités menées par l'UNOWAS en vue d'offrir ses bons offices, de renforcer les capacités sous-régionales de lutte contre les menaces transfrontières et transversales qui pèsent sur la paix et la sécurité, de promouvoir la bonne gouvernance, l'état de droit et les droits de l'homme et de prendre en compte la problématique hommes-femmes;

- Saluer l'action que l'UNOWAS continue de mener auprès des organisations régionales et sous-régionales, en particulier la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), la Commission du bassin du Lac Tchad, le Groupe de cinq pays du Sahel, l'Union africaine et l'Union du fleuve Mano, pour promouvoir la paix et la stabilité en Afrique de l'Ouest et dans la région du Sahel;

- Se déclarer de nouveau favorable à ce que le Secrétaire général procède immédiatement à une fusion complète du Bureau du Représentant spécial du Secrétaire général pour l'Afrique de l'Ouest (UNOWA) et du Bureau de l'Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Sahel grâce à la centralisation de la gestion et au regroupement des activités au sein d'une seule et même structure;

- Recevoir des informations actualisées sur la mise en œuvre de la stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel et engager l'UNOWAS à continuer de progresser dans son exécution et de travailler en étroite collaboration avec les États de la région, notamment le Groupe de cinq pays du Sahel, en vue d'écarter les menaces qui pèsent sur la paix, la sécurité et le développement au Sahel et de s'attaquer à leurs causes profondes;

- Mettre l'accent sur les efforts visant à renforcer les capacités sous-régionales de lutte contre les menaces transfrontières et transversales qui pèsent sur la paix et la sécurité, à promouvoir la bonne gouvernance, l'état de droit et les droits de l'homme et à prendre en compte la problématique hommes-femmes.


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