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23mar16
Rapport du Secrétaire général sur l'application des résolutions du Conseil de sécurité par toutes les parties au conflit syrien (fév.16)
Haut de pageNations Unies
Conseil de sécuritéS/2016/272
Distr. générale
23 mars 2016
Français
Original : anglaisApplication des résolutions 2139 (2014), 2165 (2014), 2191 (2014) et 2258 (2015) du Conseil de sécurité
Rapport du Secrétaire général
I. Introduction
1. Le présent rapport est le vingt-cinquième présenté en application du paragraphe 17 de la résolution 2139 (2014), du paragraphe 10 de la résolution 2165 (2014), du paragraphe 5 de la résolution 2191 (2014) et du paragraphe 5 de la résolution 2258 (2015) du Conseil de sécurité, dans lesquels le Conseil a prié le Secrétaire général de rendre compte, tous les 30 jours, de l'application desdites résolutions par toutes les parties au conflit en République arabe syrienne.
2. Les informations qui y figurent reposent sur les données dont disposent les organismes des Nations Unies présents sur le terrain et des renseignements obtenus auprès du Gouvernement syrien, d'autres sources syriennes ou de sources publiques. Les données communiquées par les organismes des Nations Unies sur leurs livraisons humanitaires portent sur la période allant du 1er au 29 février 2016. Des données plus récentes ont été intégrées, lorsqu'elles étaient disponibles.
II. Principaux faits nouveaux
A. Situation sur le terrain
3. La déclaration adoptée le 11 février 2006 à Munich par le Groupe international de soutien pour la Syrie et l'adoption par le Conseil de sécurité, le 26 février, de la résolution 2268 (2016), qui fait référence aux conditions de la cessation des hostilités, a permis d'améliorer la situation sur le terrain pendant la dernière partie de la période considérée. Depuis le 26 février, la création par le Groupe international de soutien pour la Syrie du Groupe de travail sur l'accès humanitaire, le 12 février, a entraîné une intensification des activités d'acheminement de l'aide aux populations dans le besoin et en situation de vulnérabilité. Grâce aux efforts des convois interorganisations, les organismes des Nations Unies ont fourni une assistance à 150 000 personnes, dans 10 des 18 zones assiégées, et à des dizaines de milliers d'autres se trouvant dans des zones difficiles d'accès. La cessation des hostilités, qui a débuté le 27 février, est dans l'ensemble respectée. Plusieurs sources ont indiqué que le niveau des activités militaires et des frappes aériennes avait considérablement baissé. Le Groupe de travail sur le cessez-le-feu, du Groupe international de soutien, continue de surveiller la situation et de prendre des mesures pour faire appliquer la cessation des hostilités. Le Centre d'opérations des Nations Unies, établi pour lui apporter un appui, a reçu des informations concernant de nombreux cas de non-respect du cessez-le feu, prenant la forme aussi bien de frappes aériennes et terrestres que de coups de feu sporadiques ou d'échanges de tirs de mortier dans des zones isolées.
4. En février, avant la cessation des hostilités, le conflit généralisé et les violences se poursuivaient avec la même intensité à travers la République arabe syrienne. Les bombardements aériens aveugles et disproportionnés et les attaques au sol menés par les forces gouvernementales, soutenues par leurs alliés, ainsi que les pilonnages systématiques effectués par des groupes d'opposition armés non étatiques et des groupes désignés comme terroristes |1| ont continué de tuer, de blesser et de déplacer des civils. La conduite des hostilités était marquée, de tous côtés, par un mépris généralisé des règles du droit international humanitaire et de l'obligation de toutes les parties de protéger les civils. L'Organisation et ses partenaires ont reçu des informations indiquant qu'en février, plus de 177 000 personnes étaient déplacées dans sept provinces.
5. Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme (HCDH) a établi que les attaques commises par toutes les parties au conflit ainsi que les attaques non revendiquées avaient fait au moins 470 morts et plusieurs centaines de blessés parmi les civils lors de la période considérée |2|. Il a notamment consigné des frappes aériennes, des pilonnages d'artillerie et de barils d'explosifs, des tirs de mortier et de roquettes, ainsi que des explosions de voitures piégées et des attentats-suicides dans des zones d'habitation. Des biens privés, des infrastructures civiles et des établissements protégés, comme des écoles et des hôpitaux, ont continué d'être endommagés et détruits.
6. Les combats se sont poursuivis dans l'ensemble de la province d'Alep jusqu'à la cessation des hostilités. D'après des sources publiques, les offensives au sol menées par les forces gouvernementales dans le nord d'Alep et appuyées par de lourds pilonnages effectués par l'aviation syrienne et russe auraient causé la mort de nombreux civils en février. De plus, quelque 63 000 habitants des quartiers est d'Alep et des zones rurales au nord de la ville ont été déplacés, notamment vers des zones proches de la frontière avec la Turquie. Des infrastructures civiles ont également été gravement endommagées. D'après des informations reçues par le HCDH les 1er et 2 février, des frappes aériennes auraient touché deux dispensaires d'Anadan, les rendant hors d'usage et tuant huit civils. Des sources publiques font état de bombardements menés le 15 février contre deux écoles d'Atareb et d'Izaz, faisant 15 morts et de nombreux blessés parmi les élèves. Dans le même temps, les Forces démocratiques syriennes ont lancé des offensives contre les groupes d'opposition armés non étatiques dans le nord de la province d'Alep. Dans le sud de cette province, l'État islamique d'Iraq et du Levant (EIIL) a réussi à s'emparer pendant plusieurs jours de la ville stratégique de Khanasser, auparavant contrôlée par les forces gouvernementales, coupant ainsi du 19 au 29 février le principal itinéraire d'approvisionnement, qui va de Homs à la province d'Alep.
7. Les combats entre les forces gouvernementales et leurs alliés, les groupes d'opposition armés non étatiques et l'EIIL se sont poursuivis à Alep et alentour, faisant plusieurs morts et blessés. Le HCDH a ainsi signalé que les 7 et 8 février, deux frappes aériennes avaient touché des quartiers résidentiels d'Alep et du village de Kafr Hamra, tuant 38 civils. Les groupes d'opposition armés non étatiques ont aussi continué de bombarder des quartiers contrôlés par le Gouvernement, y compris ceux de Sleïmaniyé et de Masaken Sabil, faisant, d'après des sources publiques, plus de 40 morts, dont au moins 12 enfants, et une cinquantaine de blessés parmi les civils. D'après le HCDH, le quartier de Cheik Maqsoud, principalement habité par des Kurdes, aurait été frappé le 24 février par des tirs de mortier qui, d'après des sources publiques, auraient tué 19 civils, dont 3 enfants. Des informations indiquent que les affrontements, y compris des coups de feu de tireurs embusqués, se poursuivaient en mars entre les forces kurdes syriennes des Unités de protection du peuple et les groupes armés non étatiques sur la route de Castello, une des dernières grandes routes de l'est de la ville d'Alep. Dans la province d'Alep, l'approvisionnement en eau, qui avait été coupé à la mi-janvier par l'EIIL, a été restauré le 3 mars à partir des stations de traitement des eaux de l'Euphrate, situées à Khafsé, permettant ainsi à deux millions de personnes de bénéficier de nouveau de ce service.
8. Dans la province d'Edleb, des localités contrôlées par des groupes d'opposition armés non étatiques ont subi des frappes aériennes lancées par les forces gouvernementales et leurs alliés, qui ont entraîné des destructions et fait des morts et des blessés parmi les civils. D'après le HCDH, le 15 février, les forces progouvernementales auraient lancé des missiles sur deux hôpitaux de Maarret el-Nouman, tuant au moins 15 civils. En outre, le 24 février, plusieurs offensives aériennes non revendiquées ont touché un marché d'Ariha, faisant 13 morts, dont deux enfants, et 28 blessés parmi les civils. Des infrastructures civiles ont également été endommagées lors des combats. Ainsi, d'après des sources publiques, des frappes aériennes auraient touché une école de Taftanaz le 17 février, tuant un professeur et blessant plusieurs élèves. Du début à la mi-février, les combats dans la province d'Edleb ont entraîné le déplacement de plus de 12 000 personnes.
9. Les hostilités ont aussi continué dans la province de Lattaquié entre les forces gouvernementales, appuyées par l'aviation russe et syrienne, et les groupes d'opposition armés non étatiques. Le 18 février, les forces du Gouvernement ont repris le contrôle de la ville de Kinsibba, dans les monts Akrad. Plus de 3 700 habitants de la province ont été contraints de se déplacer, de Kinsibba à Darkouch (district de Jisr el-Choughour) et de Rabi'a à Harem (province d'Edleb).
10. Des combats ont aussi été signalés dans les provinces de Damas et de Rif-Damas. Les affrontements entre les forces gouvernementales, soutenues par l'aviation russe et syrienne, et les groupes d'opposition armés non étatiques se sont poursuivis dans Moudamiyet el-Cham et ses environs et dans la Ghouta orientale, ainsi que dans le district de Jobar (Damas). Selon les informations obtenues par le HCDH, quelque 46 civils auraient été tués et des dizaines blessés à la suite de multiples frappes aériennes lancées en février contre la ville assiégée de Moudamiyet el-Cham et des localités de la Ghouta orientale. Des sources publiques indiquent qu'un obus aurait frappé le 1er février une école de Baqqin (Rif-Damas), tuant un élève et en blessant au moins trois. Le HCDH a été informé que le 10 février, des bombes à sous-munitions auraient été utilisées dans des quartiers résidentiels de Douma, faisant parmi les civils huit morts, dont cinq enfants, et 24 blessés, dont cinq enfants, et que le 18, les forces gouvernementales auraient largué des barils d'explosifs sur des zones d'habitations de Marj, dans la Ghouta orientale, tuant 8 civils, dont un enfant, et détruisant l'hôpital. Il a signalé que les 19 et 26 février, les forces progouvernementales avaient lancé des attaques aériennes sur Douma, y compris sur des quartiers d'habitations, tuant 14 civils, dont six enfants, et en blessant 27 autres. Le HCDH a aussi indiqué qu'au moins neuf civils auraient été tués et quatre blessés à la suite d'un assaut des forces gouvernementales, qui auraient largué de nombreux barils explosifs et lancé des tirs d'artillerie et des missiles sur Daraya.
11. Les groupes d'opposition armés non étatiques et des groupes désignés comme terroristes ont aussi mené plusieurs offensives dans les provinces de Damas et Rif-Damas, y compris dans la ville de Damas, qui a été touchée par des bombardements et des tirs de mortier avant la cessation des hostilités. Le HCDH a signalé que l'EIIL avait revendiqué l'explosion d'un véhicule piégé, survenue le 9 février dans le quartier de Masaken Barzé, à Damas, et qui avait fait sept morts et 15 blessés parmi les civils. Le groupe a également revendiqué un attentat-suicide conduit le 21 février dans un marché au lieu saint de Sayyida Zeinab (province de Rif-Damas) et qui a tué 83 civils, dont nombre de femmes et d'enfants, et blessé plus de 100 personnes.
12. Des combats auraient également eu lieu en février dans les zones rurales du sud de Hama et du nord de Homs, en particulier dans les environs des villes de Harbnafsé, de Houlé, de Talbissé et de Rastan. Les conditions humanitaires dans ces régions continueraient de se détériorer. Des morts et des blessés ont aussi été signalés parmi les civils à la suite d'attaques menées par des groupes désignés comme terroristes dans la ville de Homs. Ainsi, d'après des informations reçues par le HCDH, deux véhicules piégés auraient explosé le 21 février lors d'une attaque revendiquée par l'EIIL dans le quartier de Zahra, faisant 56 morts et plus d'une centaine de blessés parmi les civils. L'accord local en vigueur à Waar (Homs) tient toujours, malgré les violations qui auraient été commises et le fait que certaines dispositions restent à appliquer.
13. Le 2 février, l'EIIL aurait lancé des tirs de mortier à Joura, quartier assiégé de la ville de Deir el-Zor, dans la province du même nom, tuant trois enfants et blessant neuf civils, dont deux enfants. D'après des informations reçues par le HCDH, le groupe aurait réitéré le 23 février, faisant au moins cinq morts, dont un enfant.
14. Dans la province de Hassaké, le HCDH a appris que des frappes aériennes de sources indéterminées ont endommagé l'infrastructure civile et tué au moins 67 civils. Ainsi le 16 février, une boulangerie à Chaddadé a été touchée par des frappes aériennes et 18 personnes, dont des femmes et des enfants se trouvant dans la file d'attente, ont été tuées et au moins 15 autres blessées. Le lendemain, des frappes aériennes lancées contre les zones rurales du sud de la province ont tué 36 civils, dont des femmes et des enfants, et blessé 30 autres.
15. Les combats se sont poursuivis dans le sud de la Syrie durant la période considérée. Dans la province de Deraa, les forces gouvernementales, appuyées par l'armée de l'air, ont avancé dans le sud, prenant le contrôle d'Atman et de Cheik Meskine. Le HCDH a appris que les violents combats, y compris des attaques au mortier, auraient fait 25 victimes parmi les civils. Le Gouvernement syrien a informé le HCDH que le 3 février, des attaques au mortier lancées par des groupes d'opposition armés non étatiques ont tué 17 personnes et blessé 101 autres, dont des femmes et des enfants, alors qu'elles se rendaient au travail ou à l'école. Le 9 février, Médecins sans frontières (MSF) a annoncé publiquement qu'un hôpital soutenu par l'organisation dans la province de Deraa avait été touché par une attaque aérienne qui a fait trois morts et au moins six blessés, dont une infirmière. Le 14 février, des attaquants inconnus ont tiré sur une école à el-Balad, blessant grièvement au moins trois écoliers. En février, plus de 50 000 personnes auraient été déplacées dans la province de Deraa à cause des combats. À la fin de février, un accord aurait été conclu à Ibtaa et Dael entre les forces gouvernementales et les représentants de la population locale.
16. La Fédération de Russie et les forces de la coalition dirigée par les États-Unis d'Amérique ont continué de mener des frappes aériennes en Syrie pendant tout le mois de février, d'après des informations provenant de sources officielles. Le Ministère russe de la défense n'a pas fourni des chiffres pour l'ensemble du mois mais a confirmé que plus de 1 253 « sorties de combat » avaient été effectuées en février visant 5 796 cibles dans les provinces d'Alep, de Hassaké, de Raqqa, de Deraa, de Deir el-Zor, de Hama, de Homs et de Lattaquié. Entre-temps, le Commandement central des États-Unis a confirmé qu'au moins 189 frappes avaient été menées par la coalition en février contre des cibles de l'EIIL dans les provinces d'Alep, de Hassaké, de Raqqa et de Deir el-Zor. Le HCDH a reçu de nombreuses informations selon lesquelles des raids aériens effectués par des protagonistes internationaux auraient fait des victimes parmi les civils, notamment dans les provinces d'Alep, de Raqqa, de Deir el-Zor, d'Edlib et de Hassaké. Il y aurait eu 113 morts et des dizaines de blessés. Le HCDH n'a cependant pas été en mesure de confirmer avec certitude l'origine des frappes aériennes signalées.
B. Droits de l'homme
17. L'ampleur et la gravité des violations du droit international des droits de l'homme et du droit international humanitaire et des atteintes aux droits de l'homme, y compris les enlèvements, les exécutions sommaires, les traitements inhumains ou dégradants et le recrutement d'enfants, ont continué de susciter une vive préoccupation durant la période considérée.
18. Le Haut-Commissariat aux droits de l'homme a appris que, le 12 février, les forces policières des Unités kurdes de protection populaire, les Assayish, ont fait une descente au domicile d'un avocat arabe au sud de Tell Abiad dans la province de Raqqa et l'ont arrêté pour s'être exprimé trop librement sur les exactions commises contre les civiles par les forces des Unités. Le HCDH a signalé également que le 5 février, les forces des Unités de protection populaire ont démoli les maisons de 41 civils arabes dans le quartier de Ghebich à Tell Tamr, dans la province de Hassaké, accusant ces personnes d'être des sympathisants de l'EIIL.
19. D'après des informations reçues par le HCDH, le 22 février, les Assayish auraient recruté de force un garçon de 14 ans dans le quartier d'Iskan à Tell Abiad dans la province de Raqqa. Le HCDH a aussi appris qu'au moins 11 enfants âgés entre 12 et 16 ans avaient été recrutés de force par les Unités de protection populaire et emmenés au camp d'Aïn el-Batt dans la province d'Alep.
20. Le 5 février, l'EIIL aurait lapidé à mort un homme accusé d'adultère à Abou Kamal dans la province de Deir el-Zor. Le 6 février, l'EIIL aurait tué par balles une femme et son gendre accusés de blasphème à Mayadin dans la province de Deir el-Zor. Le 7 février, dans la même ville, l'EIIL aurait décapité un homme et une femme accusés de blasphème. Le 10 février, l'EIIL a diffusé une séquence vidéo montrant l'exécution de quatre hommes de la province de Raqqa : ils ont été placés dans une voiture remplie d'explosifs et le détonateur a été actionné à distance par un enfant. Les quatre hommes avaient été arrêtés par l'EIIL pour espionnage environ deux mois auparavant.
21. Durant la période considérée, selon les informations reçues par le HCDH, l'EIIL aurait relâché certains des civils qui avaient été arrêtés alors qu'ils fuyaient l'assaut lancé par l'EIIL sur le quartier assiégé de Bgheïliyé dans la province de Deir el-Zor en janvier 2016. Le HCDH a également indiqué que le 22 février, l'EIIL a libéré le dernier groupe d'Assyriens qu'il détenait. Ce groupe faisait partie des 200 Assyriens enlevés par l'EIIL en février 2015.
C. Action humanitaire
22. En février 2016, les organismes d'aide humanitaire des Nations Unies et leurs partenaires ont continué de venir en aide à des millions de personnes dans le besoin par tous les moyens, à partir du territoire syrien ou à travers la frontière, conformément aux résolutions 2165 (2014), 2191 (2014) et 2258 (2015) du Conseil de sécurité (voir tableau 1). Les organisations non gouvernementales ont également continué d'acheminer de l'aide aux populations civiles, conformément aux chiffres enregistrés au cours des mois précédents. Le Gouvernement syrien a continué d'assurer les services de base dans les zones qu'il contrôle ainsi que dans de nombreux secteurs échappant à son contrôle.
Tableau 1
Nombre de personnes qui ont reçu une aide en février 2016
Organisme des Nations Unies Nombre de personnes qui ont reçu une aide Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) 1 500 000 Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) 266 000 Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) 485 000 Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) 336 000 Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) n.d. (fourniture d'intrants pour les semailles de printemps) Organisation internationale pour les migrations (OIM) 35 000 Organisation mondiale de la Santé (OMS) 810 000 Programme alimentaire mondial (PAM) 3 800 000 Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) 321 000 Note : Chiffres de l'Organisation des Nations Unies et de l'Organisation internationale pour les migrations. Aucune information n'a été reçue d'organisations non gouvernementales ni d'organisations internationales non gouvernementales.
23. L'acheminement de l'aide par la frontière s'est poursuivi au cours de la période considérée. Au 29 février, 283 convois de l'ONU et de ses partenaires d'exécution avaient été acheminés depuis la Turquie et la Jordanie vers la Syrie, conformément aux dispositions des résolutions 2165 (2014), 2191 (2014) et 2258 (2015) du Conseil de sécurité, ce qui a permis de secourir des millions de personnes. On trouvera dans la carte 1 jointe au présent rapport un complément d'information sur les convois d'aide des Nations Unies qui ont franchi la frontière en février (voir annexe). Conformément aux résolutions du Conseil de sécurité, l'ONU avise préalablement les autorités syriennes avant l'organisation de chaque convoi et leur fournit des précisions sur le contenu et la destination des camions et sur le nombre de bénéficiaires. Il semble qu'aucun convoi n'a été refusé ou jugé irrégulier.
24. Le Mécanisme de surveillance des Nations Unies a poursuivi ses activités en Jordanie et en Turquie. En février, il a contrôlé 27 convois d'aide humanitaire des Nations Unies, soit 709 camions, afin de confirmer qu'il s'agissait bien d'aide humanitaire, et a prévenu les autorités lorsque le convoi était arrivé à destination. Il a continué de bénéficier de la coopération active des Gouvernements jordanien et turc.
25. En février et au début de mars 2016, l'acheminement de convois interinstitutions aux localités assiégées et reculées énumérées dans le tableau 2 ci-dessous a permis de secourir près de 259 000 personnes dans le besoin (voir également annexe, carte 2).
Tableau 2
Convois interinstitutions de février et à mi-mars 2016
Date (2016) Destination Type d'assistance 4 février Waar (Homs) Denrées alimentaires, produits de santé, articles non alimentaires, compléments nutritionnels, aide à la purification de l'eau et à l'assainissement et fournitures scolaires. Les fournitures médicales, y compris le matériel chirurgical et les antidiarrhéiques, ont été retirées du convoi par les forces de sécurité du régime. 17 février Moudamiyet el-Cham (Rif-Damas) Première moitié de la quantité prévue de denrées alimentaires, de farine de blé, de produits de santé et de compléments nutritionnels. Certains équipements de santé ont été exclus du convoi. Fouaa et Kafraya (Edleb) Denrées alimentaires, farine de blé, médicaments, compléments nutritionnels Madaya (Rif-Damas) Denrées alimentaires, farine de blé, médicaments, compléments nutritionnels Zabadani (Rif-Damas) Denrées alimentaires, farine de blé, compléments nutritionnels 23 février Moudamiyet el-Cham (Rif-Damas) Seconde moitié de la quantité prévue de denrées alimentaires, de farine de blé, de produits de santé et de compléments nutritionnels. Un appareil de dialyse et des médicaments ont pu être inclus dans le convoi, mais pas d'autres équipements. Kafr Batna dans le sous-district de Kafr Batna (Rif-Damas) Denrées alimentaires, médicaments, fournitures médicales et compléments nutritionnels. Une partie des médicaments, fournitures médicales et compléments nutritionnels prévus ont été retirés par le Ministère de la santé. 29 février Moudamiyet el-Cham (Rif-Damas) Aide à la purification de l'eau et d'assainissement, articles non alimentaires 2 mars Moudamiyet el-Cham (Rif-Damas) Une partie des médicaments et fournitures médicales précédemment exclus 4 mars Aïn Terma, Hazzé et Saqba dans le sous-district de Kafr Batna (Rif-Damas) Denrées alimentaires, médicaments, fournitures médicales et compléments nutritionnels. Une partie des médicaments, fournitures médicales et compléments nutritionnels prévus ont été retirés par le Ministère de la santé. 7 mars Beit Siwa, Hammoura et Jisrin dans le sous-district de Kafr Batna (Rif-Damas) Denrées alimentaires, médicaments, fournitures médicales et compléments nutritionnels. Une partie des médicaments, fournitures médicales et compléments nutritionnels prévus ont été retirés par le Ministère de la santé. 16 mars Bloudan (Rif-Damas) Denrées alimentaires, farine de blé, médicaments, fournitures médicales, compléments nutritionnels et articles non alimentaires 26. En février, les organismes des Nations Unies ont également acheminé chacun de son côté des convois par la frontière vers des localités difficiles d'accès. C'est ainsi que le Programme alimentaire mondial (PAM), en coordination avec le Croissant-Rouge arabe syrien, est venu en aide à 19 000 personnes à Tiba, Jiroud et Rheïbé (Rif-Damas), ainsi qu'à Tleïsiyé (Hama). L'Organisation mondiale de la Santé (OMS) a fait parvenir, par l'intermédiaire de ses coordonnateurs, 25 trousses de diagnostic du paludisme aux provinces de Deir el-Zor et de Raqqa. Le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) ont fourni une aide à environ 40 000 personnes dans les quartiers précédemment assiégés de Noubl et de Zahra à Alep. Face à la crise de l'eau à Alep, l'UNICEF a continué d'assurer le transport d'eau dans la partie ouest d'Alep, de quoi satisfaire les besoins quotidiens de 375 000 personnes. Le 23 février, les opérations de ravitaillement en eau par camions-citernes ont débuté dans des quartiers de l'est d'Alep pour répondre aux besoins de quelque 30 000 personnes.
Accès humanitaire
27. En dépit des récents progrès accomplis en ce qui concerne l'accès à certaines zones assiégées et difficiles d'accès, il est resté difficile d'acheminer l'aide humanitaire aux personnes qui en ont besoin dans de nombreuses régions du pays en raison du conflit ouvert, des déplacements des lignes de front et des restrictions délibérément imposées par les parties à la circulation des personnes et des biens.
28. L'accès aux 4,6 millions de personnes qui vivent dans des zones assiégées et difficiles d'accès est resté une préoccupation majeure. Durant la période considérée, les organismes des Nations Unies et leurs partenaires ont pu rejoindre 48 des 154 lieux difficiles d'accès (31 %). On trouvera dans le tableau 4 des précisions sur l'acheminement de l'aide dans les zones difficiles d'accès en février 2016 : près de la moitié des habitants des zones difficiles d'accès se trouvent dans des zones contrôlées par l'EIIL, où les organismes des Nations Unies n'ont qu'un accès très limité.
Tableau 3
Aide acheminée aux 4,6 millions de personnes de zones difficiles d'accès en février 2016
Secteur (organismes des Nations Unies seulement) Nombre de personnes ayant reçu une aide (en pourcentage des 4, 6 millions de personnes concernées) Sécurité alimentaire 359 000 (7,9 %) Santé 294 000 (6,4 %) Articles non alimentaires 160 000 (3,5 %) Eau, assainissement et hygiène 65 882 (1,4 %) 29. Depuis le début de 2016, 58 demandes de convois interinstitutions ont été présentées, qui visent à apporter une aide à 1,87 million de personnes dans le besoin dans 47 zones assiégées et difficiles d'accès. Le statut de ces demandes est précisé dans le tableau 4 ci-dessous. Le 10 mars, le Gouvernement syrien a approuvé les demandes d'accès à 15 lieux difficiles d'accès présentées par les organismes des Nations Unies. Il leur a par ailleurs demandé d'apporter une aide dans plusieurs autres régions des provinces d'Alep, Lattaquié et Rif-Damas. Le 17 mars, dans le cadre des procédures simplifiées proposées par le Gouvernement syrien, les organismes des Nations Unies ont présenté un plan de convois interinstitutions afin d'apporter une aide à 356 200 personnes dans 11 zones difficiles d'accès et assiégées en avril. Au total, grâce à des convois interinstitutions, les organismes des Nations Unies et leurs partenaires comptent apporter une aide à 1,1 million de personnes dans 26 zones assiégées et difficiles d'accès d'ici à la fin du mois d'avril, si toutes les autorisations sont accordées et que les convois parviennent à destination.
Tableau 4
État des demandes de convois interinstitutions en 2016
État des demandes Nombre de demandes Demandes approuvées, convois parvenus à destination 13 Demandes approuvées en principe; dans l'attente de lettres de facilitation finales 11 Demandes présentées; en attente de l'autorisation du Gouvernement de la République arabe syrienne 34 Nombre total de demandes présentées en 2016 58 30. Le conflit ouvert qui se poursuit dans plusieurs provinces a nui au bon acheminement de l'aide humanitaire et empêché les populations d'accéder aux services essentiels. Les principales voies de ravitaillement qui relient Damas au sud de la Syrie et à Alep, au nord, ont continué de souffrir de l'insécurité, due à la poursuite des affrontements. La route de Khanasser, qui relie Alep à Homs, a d'ailleurs été fermée du 19 au 29 février en raison d'une attaque de l'EIIL, gênant les déplacements de toutes les missions des Nations Unies à destination et en provenance d'Alep et la distribution des fournitures humanitaires. La perturbation de la ligne de ravitaillement aurait donné lieu à une augmentation dramatique des prix des denrées alimentaires et du carburant et entraîné une pénurie de produits frais à Alep. Parallèlement, les affrontements qui se déroulent fréquemment sur la route reliant Homs à Salmiyé et Hama perturbent la circulation et continuent de gêner toutes les missions des Nations Unies qui se rendent à Hama. Les affrontements et le déplacement des lignes de front dans la province d'Alep au début de février ont continué de perturber les opérations humanitaires, en particulier celles menées depuis la Turquie vers la partie est de la ville d'Alep.
31. L'ingérence délibérée des parties et les restrictions qu'elles imposent ont également continué d'entraver l'acheminement de l'aide. Le PAM, par exemple, n'est toujours pas en mesure de prêter assistance aux personnes dans le besoin qui se trouvent dans les secteurs contrôlés par l'EIIL, car il ne peut pas mener ses activités de manière indépendante ni en assurer le suivi. Quelque 720 000 personnes sont concernées, qui vivent dans la majeure partie des provinces de Deir el-Zor et de Raqqa, une partie des faubourgs d'Alep, la banlieue est de Homs, des poches des zones rurales du sud de Hassaké et du nord-ouest de Hama. Parallèlement, les autorités syriennes ont rejeté, pour des raisons de sécurité, 14 demandes présentées par le PAM pour apporter de l'aide à 67 310 personnes à Herné, Qastal, Tell et Halboun.
32. Le 27 décembre 2015, pour des raisons de sécurité, les autorités turques ont fermé le point de passage de Nousseibin/Qamichili (province de Hassaké), qui n'a toujours pas été ré-ouvert. Le prix de la plupart des produits alimentaires de base aurait doublé dans la province depuis novembre 2015. Selon certaines sources, les habitants ont recours à des stratégies de survie extrêmes : ils font un seul repas par jour et ont une alimentation nettement moins variée qu'avant.
33. Le 1er mars, le Ministère des affaires étrangères syrien a adressé une Note Verbale aux Nations Unies, dans laquelle il a proposé des procédures simplifiées concernant le passage des convois interinstitutions à travers les lignes de conflit, qui réduiraient le nombre d'étapes à franchir et amélioreraient la prévisibilité des délais. En vertu du nouveau mécanisme, les organismes des Nations Unies et leurs partenaires élaboreraient chaque mois un plan concernant l'envoi de convois interinstitutions vers les zones assiégées et difficiles d'accès, que le Gouvernement syrien approuverait dans les sept jours suivant sa réception. Toutes les lettres de facilitation requises pour le déplacement des convois seraient approuvées dans les trois jours ouvrables. Le 17 mars, les organismes des Nations Unies ont soumis le premier plan mensuel de convois interinstitutions, conformément aux nouvelles procédures.
34. Au 29 février, 67 demandes de visas (nouveaux visas ou renouvellements) pour les fonctionnaires des Nations Unies étaient encore en attente, le délai des 15 jours ouvrables ayant été dépassé pour 31 d'entre elles. En février, 108 visas ont été approuvés pour des fonctionnaires de neuf organismes des Nations Unies (44 nouveaux visas et 64 renouvellements).
35. Au total, 16 organisations non gouvernementales internationales sont autorisées à mener des activités en République arabe syrienne. Deux autres ont sollicité l'autorisation du Gouvernement. Ces organisations internationales continuent de se heurter à une série d'obstacles administratifs et de restrictions qui les empêchent de conduire leurs activités, notamment d'obtenir l'autorisation de conduire des évaluations indépendantes des besoins. Le Gouvernement syrien a cependant fait part de sa volonté de s'attaquer, au cas par cas et à titre temporaire, aux demandes de longue date qui lui ont été adressées pour travailler en partenariat avec des organisations humanitaires nationales et ouvrir des bureaux auxiliaires.
36. Le nombre d'organisations non gouvernementales nationales autorisées à établir des partenariats avec des organismes des Nations Unies est passé de 141 à 142 en février. Les organisations agréées continuent de se plier aux procédures complexes qui régissent les partenariats établis avec les organismes des Nations Unies.
Zones assiégées
37. Sur les 4,6 millions de personnes vivant dans des zones difficiles d'accès, quelque 486 700 continuent d'être assiégées, dont environ 274 200 par les forces gouvernementales en divers endroits de Rif-Damas, 6 000 par les forces gouvernementales et des groupes d'opposition armés non étatiques à Yarmouk (Damas), quelque 200 000 par l'EIIL dans la ville de Deir el-Zor, et environ 12 500 par des groupes d'opposition armés non étatiques et le Front Nosra à Fouaa et Kafraya (province d'Edleb).
38. En ce qui concerne l'accès aux zones assiégées, des progrès ont été enregistrés en février et début mars : quelque 150 000 personnes (31 %) de 10 des 18 zones assiégées ont bénéficié d'une aide grâce à des convois interinstitutions, et des habitants de Yarmouk ont pu se rendre à Yalda, une ville voisine, pour recevoir de l'aide. Toutefois, malgré les demandes répétées des organismes des Nations Unies, les autorités syriennes ont refusé d'autoriser l'accès à des secteurs de la Ghouta orientale (y compris Douma, Harasta, Irbin, Zamalka et Zebdin) et de Daraya. Les conditions humanitaires dans ces régions seraient dramatiques; les organismes des Nations Unies se tiennent prêts à fournir une assistance à ces zones assiégées, dès qu'ils auront l'autorisation d'y accéder. L'acheminement des marchandises par les circuits officiels demeure en grande partie bloqué, d'où les prix élevés pratiqués dans les zones assiégées pour les produits de base qui y sont livrés par le biais de filières officieuses et irrégulières. La liberté de circulation reste soumise à d'importantes restrictions, même si de petits groupes sont parfois autorisés à quitter les zones assiégées et à y revenir.
39. Dans la Ghouta orientale (Rif-Damas), quelque 176 500 personnes sont encore assiégées par les forces gouvernementales dans les localités suivantes : Douma, l'est de Harasta, Irbin, Zamalka, Aïn Terma, Hammoura, Jisreïn, Kafr Batna, Saqba et Zebdin. Les convois des organismes des Nations Unies et du Croissant-Rouge arabe syrien ont atteint la ville de Kafr Batna, ainsi qu'Aïn Terma, Saqba, Jisreïn et Hammoura les 23 février et 4 et 7 mars, et fourni une assistance multisectorielle à quelque 46 800 personnes au total. Malgré l'autorisation préalable donnée par les autorités syriennes, des fonctionnaires du Ministère de la santé se sont opposés à ce que certaines des fournitures médicales prévues fassent partie de chacun des convois. Des articles pour la prévention de la malnutrition infantile ont également été refusés. En collaboration avec l'UNICEF, l'OMS et le Ministère de la santé, le Croissant-Rouge arabe syrien a acheminé, dans le convoi du 4 mars, 21 000 vaccins à sa succursale de Douma, en vue de leur distribution dans toute la Ghouta orientale. D'après une rapide évaluation, il n'y avait pas de signes manifestes de malnutrition; selon des organisations locales, l'accès à la nourriture n'était pas un problème, les abords de Kfar Batna comptant des terres agricoles fertiles, et plusieurs sortes de viandes et de produits laitiers étant accessibles. On a observé que de très nombreux enfants étaient recrutés par des groupes armés. Parallèlement, les étudiants ne pourraient pas accéder à l'enseignement supérieur du fait des restrictions à leur liberté de circulation.
40. À Madaya (et Bouqeïn), dans la province de Rif-Damas, quelque 42 000 personnes sont encore assiégées par les forces gouvernementales. Des cas de malnutrition aiguë continuent d'être signalés. À Fouaa et Kafraya (province d'Edleb), quelque 12 500 personnes continuent d'être assiégées par des groupes d'opposition armés non étatiques et le Front Nosra. Le 17 février, les convois des Nations Unies et du Croissant-Rouge arabe syrien ont apporté aux populations de Madaya, Fouaa et Kafraya une aide multisectorielle suffisante pour un mois. Les centres de stabilisation en établissement de l'UNICEF ayant été supprimés de la liste de colisage, ils n'ont pas pu faire partie des convois.
41. À Zabadani (province de Rif-Damas), quelque 700 personnes continuent d'être assiégées par les forces gouvernementales. Le 17 février, un convoi des Nations Unies et du Croissant-Rouge arabe syrien y a acheminé une assistance multisectorielle pour un millier de personnes pour un mois.
42. À Daraya (province de Rif-Damas), quelque 4 000 personnes restent assiégées par les forces gouvernementales. Les organismes des Nations Unies n'ont pas réussi à y acheminer de l'aide depuis novembre 2012.
43. À Moudamiyet el-Cham (province de Rif-Damas), quelque 45 000 personnes sont encore assiégées par les forces gouvernementales. Les convois des Nations Unies et du Croissant-Rouge arabe syrien y ont acheminé de l'aide les 17, 23 et 29 février. Les forces de sécurité gouvernementales ont retiré des convois des articles de santé tels que les trousses destinées aux sages-femmes et les trousses de traitement de la diarrhée. Une partie de ces articles a finalement été acheminée à Moudamiyet el-Cham le 2 mars. Une évaluation rapide a mis au jour de nombreux cas de séparation de la famille, d'absence d'enregistrement des actes d'état civil et de renouvellement des papiers d'identité, et de recrutements d'enfants par des groupes armés non étatiques, ainsi qu'une augmentation des mariages d'enfants et un manque d'accès à l'éducation. On a aussi constaté l'existence d'un grand nombre de ménages dirigés par des femmes et la présence de nombreux enfants non accompagnés et séparés de leur famille, ainsi que d'adolescents armés.
44. À Yarmouk (Damas), quelque 6 000 personnes sont assiégées par les forces gouvernementales et des groupes d'opposition armés non étatiques. Toutes les opérations de l'Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) à Yarmouk sont restées suspendues en février. Toutefois, le 13 février, l'UNRWA a reçu carte blanche pour reprendre les distributions de vivres dans la ville voisine de Yalda, pour la première fois depuis juin 2015. L'Office a achevé une première série de livraisons d'aide humanitaire à Yalda et aidé un total de 5 700 familles, dont des familles qui ont pu venir de Yarmouk chercher des vivres et des articles non alimentaires. Durant ses missions de distribution, le personnel de l'UNRWA a constaté que les réfugiés qui venaient chercher de la nourriture et d'autres formes d'aide avaient l'air nettement moins désespérés qu'en avril 2015, tant dans leur apparence que dans leur attitude.
45. Dans les quartiers ouest de la ville de Deir el-Zor contrôlés par les forces gouvernementales, quelque 200 000 personnes sont assiégées par l'EIIL. La situation humanitaire dans les zones assiégées continue de se dégrader, et une pénurie alimentaire, une absence de soins médicaux et une malnutrition aiguë ont été signalés au cours de la période considérée. Le 24 février, le PAM a effectué son premier parachutage d'aide humanitaire sur la ville assiégée, larguant des vivres pour 2 500 personnes. Cependant, l'opération s'est heurtée à des difficultés techniques dues aux conditions météorologiques changeantes et à des vents violents et inattendus. Certaines des palettes larguées ont dérivé et n'ont pas encore été retrouvées ou sont inaccessibles; d'autres ont atteint leur cible, ou ont atterri à proximité, mais ont été endommagées, leur parachute ne s'étant pas ouvert correctement. Compte tenu de la complexité de l'opération, le PAM s'efforce de trouver des solutions aux problèmes techniques qui se posent et fait des essais en Jordanie pour tenter à nouveau de parachuter des articles d'aide vitale à la population assiégée.
Libre passage des fournitures, du personnel et du matériel médicaux
46. Alors que les installations médicales font l'objet d'une protection spéciale dans le droit international humanitaire, les attaques les prenant pour cibles ont continué sans relâche. D'après des informations reçues par l'ONU et ses partenaires dans le domaine de la santé, qui sont en cours de vérification, 30 attaques auraient visé des installations médicales au cours du mois de février.
47. L'Organisation mondiale de la Santé et d'autres partenaires dans le domaine de la santé ont livré environ 294 000 traitements médicaux dans des localités difficiles d'accès et situées au-delà des lignes de front dans les provinces d'Alep, d'Edleb, de Rif-Damas, d'Homs, de Deir el-Zor et de Raqqa. Entre le 31 janvier et le 5 février 2016, l'OMS a fourni une assistance à ses partenaires dans le cadre d'une campagne de vaccination contre la poliomyélite à Talbissé, à Rastan et à Houlé, dans le nord rural de la province d'Homs : 39 769 enfants de moins de 5 ans ont été vaccinés, soit plus de 95 % de l'objectif fixé. Depuis la mi-février, l'UNICEF appuie une campagne locale du même type menée à Raqqa et qui concerne 200 000 enfants de moins de 5 ans. Le 16 février, l'UNICEF a livré une cargaison de fournitures nécessaires à la vaccination de routine à Deir el-Zor afin de relancer les services fournis dans le cadre de ce type de vaccination, qui étaient interrompus depuis avril 2015. Ces services concerneront 40 000 enfants de moins d'un an.
48. En 2016, l'OMS a présenté 17 demandes au Gouvernement syrien en vue de l'acheminement de médicaments et de fournitures médicales vers des localités difficiles d'accès et assiégées dans neuf provinces, afin de venir en aide à plus de 2,5 millions de personnes. Deux de ces demandes ont été approuvées : l'une concernant l'envoi d'un dispensaire mobile à Madaya et l'autre concernant la fourniture de médicaments et de fournitures médicales dans l'est de la ville d'Alep. Les 15 autres sont toujours en attente. L'OMS a en outre obtenu deux approbations pour des demandes qu'elle avait présentées en 2015 en vue d'avoir accès à Douma, à Rastan, à Talbissé et à Tell Daou, dans le nord rural de la province d'Homs.
49. Bien que l'accès aux zones assiégées se soit amélioré, au cours de la période considérée quelque 80 000 traitements médicaux n'ont pas pu être chargés à bord des convois humanitaires se rendant dans ces zones, faute d'autorisation, ou ont été saisis. Environ 60 700 traitements ont été retirés du convoi se rendant à Moudamiyet el-Cham, le 17 février, dont 50 % des articles constituant les trousses sanitaires d'urgence interorganisations, 90 % des articles composant les trousses obstétriques et 50 % des articles composant les trousses de soins des maladies diarrhéiques. Parmi les articles saisis on trouvait entre autres choses des kits trauma, des antibiotiques, des médicaments essentiels, notamment pour les soins gastrointestinaux, et des psychotropes. Le 2 mars, le Gouvernement syrien a autorisé l'ONU et le Croissant-Rouge arabe syrien à livrer une partie de ces produits à des établissements sanitaires à l'intérieur de la ville de Moudamiyet el-Cham. Dans le cas du convoi qui se rendait à Kafr Batna le 23 février, 18 500 traitements médicaux n'ont pas pu être chargés dans les véhicules, faute d'autorisation; il y avait notamment des comprimés et des ampoules destinés à soigner des pathologies de santé mentale; 15 trousses de soins des brûlures; un stérilisateur à vapeur; 30 000 ampoules et flacons d'antibiotiques achetés sur place; des analgésiques; des médicaments essentiels et 34 articles composant les kits trauma standard de l'OMS. Des produits permettant de prévenir la malnutrition chez l'enfant ont également été interdits. L'ONU et le Croissant-Rouge arabe syrien continuent de demander l'autorisation d'inclure ces produits dans les convois qui doivent se rendre dans ces zones.
Sûreté et sécurité du personnel et des locaux
50. Le 2 février, deux membres du personnel du Croissant-Rouge arabe syrien ont été tués après qu'une frappe aérienne a touché leur véhicule alors qu'ils distribuaient du pain près d'Anadan, dans la province d'Alep.
51. Le 10 février, un convoi commun du PAM et du HCR qui se rendait de Damas à Alep a été pris dans un tir croisé alors qu'il passait par un poste de contrôle du Gouvernement syrien près de Salamiyé. Le convoi a réussi à s'échapper sans qu'il y ait de victimes ou de dégâts aux véhicules et a continué sa route vers Alep.
52. En tout, 35 membres du personnel des Nations Unies, dont 33 membres du personnel recruté sur le plan régional de l'UNRWA, 1 fonctionnaire du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et 1 de l'UNICEF sont toujours détenus ou portés disparus. Au total, 87 humanitaires ont été tués au cours du conflit depuis mars 2011, dont 17 membres du personnel des Nations Unies, 53 membres du personnel et volontaires du Croissant-Rouge arabe syrien, 8 membres du personnel et volontaires de la Société du Croissant-Rouge palestinien et 9 membres du personnel d'organisations non gouvernementales internationales. Sur ces 87 personnes, 21 ont perdu la vie depuis le 1er janvier 2015.
III. Observations
53. Cinq ans après le début de ce conflit brutal et insensé, plus de 250 000 personnes ont été tuées et près de la moitié des Syriens ont été contraints de quitter leurs foyers et de chercher refuge dans d'autres régions du pays ou en dehors de celui-ci. De nombreux détenus ont été torturés et battus à mort. L'engagement pris par les membres du Groupe international de soutien pour la Syrie d'user de leur influence auprès des parties au conflit pour améliorer l'accès humanitaire aux zones assiégées ou difficiles d'accès en Syrie et faire cesser les hostilités a donné une lueur d'espoir aux Syriens. On peut voir des signes de cet espoir dans des villes de différentes régions de Syrie, où des familles recommencent à marcher dans les rues et les enfants à jouer dans les parcs. Nous ne pouvons pas laisser passer cette occasion unique de mettre enfin, et une fois pour toutes, un terme à ce conflit.
54. Je me félicite des progrès accomplis récemment, au cours du premier trimestre de 2016, dans l'acheminement de l'aide vers plusieurs localités assiégées. Au cours de la même période en 2015, les convois interorganisations des Nations Unies n'avaient accès à personne dans ces localités. Les choses progressent donc, mais cela reste insuffisant. Cet accès doit s'étendre à l'ensemble des 4,6 millions de personnes vivant dans des localités assiégées et difficiles d'accès. Il convient de noter que l'ONU n'a toujours pas été autorisée par le Gouvernement syrien à pénétrer dans plusieurs localités assiégées, comme Douma et Daraya. Les membres du GISS doivent continuer à fournir un appui afin de veiller à ce que les parties facilitent l'acheminement de l'aide vers tous ceux qui ont besoin, de manière durable et inconditionnelle et sans entrave, conformément aux obligations qui leur incombent en vertu du droit international humanitaire et du droit international des droits de l'homme, le cas échéant. Mais en fin de compte, quelle que soit son ampleur, l'aide apportée aux zones assiégées ne pourra jamais être considérée comme suffisante, et c'est pourquoi je demande une nouvelle fois la levée des sièges et la garantie de la liberté de mouvement des personnes.
55. Si l'on peut se féliciter que des livraisons aient pu récemment être effectuées dans des zones assiégées, je regrette que l'on ait toujours à déplorer des attaques visant des installations médicales et le fait que des fournitures et du matériel à usage médical ne soient pas autorisés dans les convois se rendant dans ces zones ou soient saisis, toutes situations qui ne cessent d'être préoccupantes. Rien ne peut justifier la saisie de produits destinés à traiter la malnutrition chez l'enfant ou de médicaments essentiels qui permettent de sauver des vies. En outre, les civils vivant dans ces zones assiégées doivent pouvoir se déplacer librement pour aller chercher l'aide et les soins médicaux dont ils ont désespérément besoin. Je demande aux parties au conflit, en particulier au Gouvernement syrien, de veiller à ce que les civils puissent quitter ces zones pour recevoir les soins dont ils ont besoin, en toute sécurité et sans délai et sans entrave, et à ce que la livraison de tous les produits médicaux et chirurgicaux nécessaires soit autorisée. Qu'il soit rappelé à toutes les parties qui imposent un siège, attaquent des installations médicales et pratiquent la détention illégale que ces actes constituent une violation grave du droit international humanitaire.
56. En cette période critique de la crise syrienne, je tiens à saluer le travail extraordinaire des humanitaires qui, en dépit de toutes les difficultés qu'ils rencontrent, ont fourni une aide à des millions de personnes, mois après mois, au cours des cinq dernières années. Les Syriens eux-mêmes ont montré la voie et joué un rôle clef dans l'action visant à alléger les souffrances de leurs concitoyens. Cette action se paye au prix fort : 87 humanitaires et des centaines de membres du personnel médical ont perdu la vie. Je leur rends hommage pour leur courage et pour les sacrifices qu'ils ont consentis.
57. Pendant la première semaine de février, mon Envoyé spécial pour la Syrie, Staffan de Mistura, a convoqué à Genève le premier cycle des pourparlers entre Syriens. Par la suite, l'ONU a décidé de suspendre ces pourparlers, à titre temporaire, en raison de questions de procédure non résolues ainsi que de la détérioration spectaculaire de la situation humanitaire sur le terrain. Depuis, la situation s'est progressivement améliorée, ce qui a créé les conditions nécessaires à la reprise des négociations officielles, le 14 mars, en vue de la mise en œuvre intégrale de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité et du Communiqué de Genève du 30 juin 2012, sur lesquels doit se fonder une transition politique dirigée par les Syriens. Comme le Conseil de sécurité l'a exigé à plusieurs reprises dans ses résolutions, il est impératif que les parties au conflit assurent la protection des civils et garantissent l'accès humanitaire. Pour que les négociations en cours puissent être utiles et fructueuses, il importe que tous les Syriens sentent des progrès tangibles se manifestant par la réduction de la violence, la libération des détenus, en particulier des femmes et des enfants, et l'amélioration de l'accès à l'aide humanitaire, et que les parties s'acquittent de leurs obligations au regard du droit international humanitaire. Je demande instamment à toutes les parties de ne pas laisser passer l'occasion qui leur est donnée de s'engager de manière constructive dans le processus politique mené sous l'égide des Nations Unies et de se tenir prêtes à faire des propositions fondées sur leur conception de ce que devrait être la transition politique.
Annexe
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Notes :
1. Le 30 mai 2013, le Conseil de sécurité a désigné l'État islamique d'Iraq et du Levant (EIIL) et le Front Nosra comme groupes terroristes, en application de sa résolution 1267 (1999). Ces deux groupes sont actifs en République arabe syrienne. [Retour]
2. Ces chiffres portent sur les incidents consignés par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme durant la période considérée, d'après sa méthode de surveillance de la situation relative aux droits de l'homme. Ils n'englobent pas tous les incidents susceptibles d'avoir eu des retombées sur les civils au cours de la période visée par le rapport. Malgré les demandes qui lui ont été adressées à plusieurs reprises, le Gouvernement n'a accordé l'autorisation d'accéder à son territoire ni au Haut-Commissariat ni à la Commission d'enquête internationale indépendante sur la République arabe syrienne établie par le Conseil des droits de l'homme. [Retour]
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