Informations | ||
Derechos | Equipo Nizkor
|
28mar16
Il est "illusoire" de croire qu'on va reconstruire Palmyre, affirme une experte
Annie Sartre-Fauriat, membre du groupe d'experts de l'Unesco pour le patrimoine syrien, se dit "perplexe sur la capacité de reconstruire Palmyre" au vu des destructions considérables et des pillages sur le site et dans le musée, également "ravagé" par le groupe Etat Islamique.
"Tout le monde s'enflamme parce que Palmyre est +libérée+ entre guillemets, mais il ne faut pas oublier tout ce qui a été détruit et la catastrophe humanitaire du pays. Je suis très perplexe sur la capacité, même avec l'aide internationale, de rebâtir le site de Palmyre", a indiqué à l'AFP cette historienne spécialiste du Moyen-Orient, membre du groupe d'experts constitué par l'Unesco en 2013 sur le patrimoine syrien.
"Quand j'entends dire qu'on va reconstruire le temple de Bêl, ça me paraît illusoire. On ne va pas reconstruire quelque chose qui est à l'état de gravats et de poussière. Construire quoi? un temple neuf? Il y aura peut-être d'autres priorités en Syrie avant de reconstruire des ruines", observe-t-elle.
Outre la citadelle du XIIIe siècle, qui a été endommagée lors des combats pour la prise de la ville, les jihadistes ont détruit deux joyaux de Palmyre, les temples de Bêl et Baalshamin, l'Arc de triomphe, plusieurs tours funéraires ainsi que le Lion d'al-Lât.
Palmyre, la "perle" du désert syrien, est une cité de plus de 2.000 ans inscrite par l'Unesco au patrimoine mondial de l'humanité.
Le chef des Antiquités et des Musées de Syrie a affirmé lundi à l'AFP qu'il faudrait cinq ans pour réhabiliter les monuments détruits ou endommagés à Palmyre occupée pendant 10 mois par les jihadistes de l'EI.
"Si nous avons l'approbation de l'Unesco, il nous faut cinq ans pour restaurer les bâtiments détruits et endommagés par l'EI", a déclaré Maamoun Abdelkarim, qui s'est rendu dimanche sur place.
"Nous avons le personnel qualifié, nous avons le savoir-faire et nous avons les études, il faut bien sûr l'agrément de l'Unesco et nous pourrons commencer les travaux dans un an", a-t-il ajouté.
"Encore faudrait-il que la guerre soit finie et que le site soit sécurisé", souligne Mme Sartre-Fauriat. "Tant que l'armée syrienne est dedans, je ne suis pas rassurée, il ne faut pas oublier que l'armée, qui occupait le site entre 2012 et 2015 a fait beaucoup de dégâts et de pillages", rappelle l'historienne.
"Il ne faut pas se leurrer. Ce n'est pas parce qu'on a récupéré Palmyre sur Daech que la guerre est finie. Cette récupération est une opération politique, médiatique vis-à-vis de l'opinion publique du régime de Bachar al-Assad.", ajoute-t-elle.
Selon Mme Sartre-Fauriat, qui reçoit heure par heure des photos et vidéos transmises du terrain à différents sites spécialisés en archéologie, "beaucoup de vestiges devront être passés par perte et profits".
Ainsi, une vidéo qu'elle a reçue lundi montre pour la première fois l'intérieur du Musée de Palmyre, qui avait été transformé par l'EI en tribunal.
"C'est un vrai saccage. Contrairement à ce qu'on pensait, le musée n'avait pas été vidé des pièces qu'il contenait, car le service des antiquités n'a eu que 48 heures pour emballer, et les pièces monumentales n'ont pas pu être emportées".
Selon les photos prises sur place, "les personnages sur les couvercles des sarcophages ont été martelés, toutes les statues ont été renversées, décapitées, brisées etc."
Les plaques funéraires, qui sont typiques de Palmyre, "ont été arrachées sauvagement des murs, probablement pour être vendues par Daech sur le marché de l'art", ajoute-t-elle.
Le monumental Lion d'al-Lât tenant une gazelle entre ses pattes, qui avait été restauré et installé à l'entrée du musée "a été renversé, martelé, cassé, mais peut-être y a t-il une possibilité de le récupérer car il n'a pas été pulvérisé", souligne-t-elle.
[Source: La Libre.be, Afp, Bruxelles, 28mar16]
This document has been published on 29Mar16 by the Equipo Nizkor and Derechos Human Rights. In accordance with Title 17 U.S.C. Section 107, this material is distributed without profit to those who have expressed a prior interest in receiving the included information for research and educational purposes. |