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Rapport du Secrétaire général sur la mise en œuvre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel


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Nations Unies
Conseil de sécurité

S/2015/866

Distr. générale
12 novembre 2015
Français
Original : anglais

Rapport du Secrétaire général sur la mise en œuvre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel

I. Introduction

1. Le présent rapport est soumis en application de la résolution 2056 (2012), dans laquelle le Conseil de sécurité m'a prié d'arrêter et de mettre en œuvre une stratégie intégrée de l'ONU pour la région du Sahel. Il est également soumis en réponse à la déclaration du Président du Conseil de sécurité datée du 27 août 2014 (S/PRST/2014/17), dans laquelle le Conseil m'a prié de le tenir informé de l'état d'avancement de la mise en œuvre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel par la voie d'un exposé oral d'ici au 15 décembre 2014, et par la présentation d'un rapport et d'un exposé le 30 novembre 2015 au plus tard.

2. Le présent rapport rend compte des faits marquants intervenus dans la région du Sahel entre le 1er juin 2014 et le 30 octobre 2015 et de l'état d'avancement de la mise en œuvre de la Stratégie intégrée. Il renseigne également sur les efforts déployés en vue de renforcer l'appropriation régionale et de consolider les partenariats, ainsi que les initiatives de coordination régionale et internationale et l'action menée pour mobiliser des ressources financières aux fins de la mise en œuvre de la Stratégie intégrée. Il se fonde sur l'analyse contenue dans l'exposé oral que mon Envoyée spéciale pour le Sahel a fait au Conseil le 11 décembre 2014 (voir S/PV.7335).

II. Nouvelles tendances dans la région du Sahel

3. La situation au Sahel continue de susciter l'inquiétude. Les processus électoraux demeurent une source de tension dans les pays de la région. La situation en matière de sécurité reste instable en raison des crises qui se poursuivent en Libye et au Mali et de la persistance de la contrebande et du terrorisme, qui constituent les principales menaces contre la sécurité régionale. Les problèmes de gouvernance et de sécurité, conjugués aux effets des changements climatiques, contribuent à entretenir une situation humanitaire déplorable dans le Sahel, où les déplacés sont très nombreux et les secours humanitaires indispensables à bien des habitants. Quant au financement de l'aide humanitaire, il est encore insuffisant.

A. Situation politique et en matière de gouvernance

4. La gouvernance démocratique reste fragile dans la plupart des pays du Sahel. Les transitions politiques et les processus électoraux continuent d'alimenter les tensions et de fragiliser l'ordre public dans la région, comme en témoigne la transition complexe en cours au Burkina Faso depuis le mois d'octobre 2014, et le coup d'état qui s'est produit en septembre 2015. En revanche, la signature de l'accord de paix au Mali, à la mi-2015, a constitué une réalisation importante pour la stabilisation du pays et la stabilité générale de la région.

5. Il convient d'améliorer, dans toute la région, la participation à la vie politique de certains groupes de la population, en particulier les jeunes, les femmes, les minorités et les groupes vivant dans des zones reculées. La situation socioéconomique des jeunes et des femmes demeure un problème majeur. Bien que la population du Sahel soit composée à plus de 60 % de personnes âgées de moins de 25 ans, les jeunes de la plupart des pays de la région ne sont pas systématiquement représentés dans les instances de décision. Ils rencontrent également plus d'obstacles en matière d'intégration socioéconomique et sont davantage touchés par le chômage.

6. Les femmes se heurtent à des obstacles sociaux et culturels qui se traduisent par un accès restreint aux ressources, aux débouchés économiques et à la participation à la vie politique. Au Burkina Faso, au Tchad, au Mali, en Mauritanie et au Niger, la représentation des femmes au parlement et aux postes ministériels s'établit respectivement à 14 % et 19 %. Cette proportion demeure très inférieure à l'objectif de la Déclaration et Programme d'action de Beijing, qui fixe à 30 % le taux minimal de représentation des femmes aux postes de décision, et à celui de l'Acte constitutif de l'Union africaine (2002), dont l'article 4 l) consacre le principe de la parité de l'égalité entre les hommes et les femmes. La discrimination positive, notamment l'instauration de quotas, peut avoir un effet positif sur la participation des femmes à la vie politique. Au Sénégal, par exemple, la proportion de femmes à l'Assemblée nationale est passée de 22,7 % à 42,7 % lors des élections législatives de 2012, grâce à l'adoption en 2010 d'une loi imposant la parité absolue entre hommes et femmes dans toutes les institutions politiques dont la totalité ou une partie des membres sont élus. La représentation des femmes a également augmenté en Mauritanie et au Niger après l'adoption de lois établissant des quotas pour les femmes en 2006 et 2000, respectivement. Pour l'heure, le Tchad et le Mali n'appliquent pas de quota en ce qui concerne la représentation des femmes aux postes de décision, tandis que les quotas adoptés en Mauritanie (20 %) et au Niger (10 %) sont en deçà du niveau minimum prescrit de 30 %, et que le Burkina Faso doit encore atteindre l'objectif qu'il s'est lui -même fixé (30 %).

7. Les États du Sahel éprouvent toujours d'énormes difficultés à exercer véritablement leur autorité sur l'ensemble de leur territoire et à fournir des services sociaux de base à leur population, en particulier aux personnes qui vivent dans le désert périphérique ou les zones semi-arides, ce qui donne à ces dernières le sentiment que leur gouvernement central les néglige et les marginalise. Pour remédier à cette situation, la plupart des pays du Sahel ont opté pour une gouvernance décentralisée. Toutefois, en pratique, beaucoup ont du mal à mettre en place des institutions locales qui fonctionnent. Dans nombre de ces pays, les textes relatifs à la décentralisation n'ont pas été complétés par des mesures d'application adéquates. Le transfert de ressources humaines et financières et le renforcement des capacités locales restent limités.

B. Sécurité

8. La situation en matière de sécurité demeure instable au Sahel. Les cas de la Libye et du Mali sont particulièrement préoccupants à cet égard, tout comme la menace terroriste que font peser Boko Haram et d'autres groupes extrémistes, l'essor du trafic de stupéfiants et l'intensification marquée des migrations irrégulières.

9. Malgré le processus politique mené sous les auspices des Nations Unies en Libye et la signature d'un accord de paix au Mali, les conditions de sécurité dans les deux pays continuent de mettre la stabilité régionale en péril. La Libye fait toujours office de sanctuaire pour les groupes terroristes qui opèrent au Sahel, y compris ceux qui seraient liés à Al-Qaida et à l'État islamique d'Iraq et du Levant. L'Algérie et la Tunisie continuent de saisir d'importantes quantités d'armes illicites le long de leurs frontières nationales avec la Libye et d'intercepter des convois de terroristes qui se déplacent avec des armes, des munitions et des explosifs. Toutefois, l'absence de solides mécanismes nationaux de contrôle des armements est également source d'insécurité et d'instabilité.

10. Au Mali, les groupes terroristes ont multiplié les attaques asymétriques dans le nord et étendu leur champ d'action vers le sud en menant des assauts dans le centre du pays, y compris à Bamako et à la frontière avec le Burkina Faso et la Mauritanie, et dans le sud dans la région frontière de la Côte d'Ivoire. Un nouveau groupe extrémiste violent, le Front de libération du Macina, a revendiqué une attaque armée contre la préfecture de Tenenkou, dans la région de Mopti, en janvier 2015, et on le soupçonne également d'être derrière d'autres attaques perpétrées dans le centre du Mali. Au cours de la période considérée, des groupes basés dans le nord du pays ont aussi revendiqué des attentats terroristes commis dans des États voisins, notamment l'Algérie, le Burkina Faso et le Niger.

11. En ce qui concerne la région du bassin du lac Tchad, le groupe terroriste Boko Haram a intensifié ses opérations au Cameroun, au Niger, dans le nord-est du Nigéria et au Tchad, entraînant le déplacement de plus de 2,1 millions de personnes au Nigéria et l'afflux de 200 000 réfugiés au Cameroun, au Niger et au Tchad. Il se livre à des violations systématiques et généralisées des droits de l'homme - meurtres, enlèvements, viols, utilisation d'enfants dans les hostilités, notamment en commettant des attentats-suicides et en procédant à la destruction de biens. L'insurrection de Boko Haram a séparé au moins 23 000 enfants de leur famille dans le seul nord-est du Nigéria. Afin de contrer efficacement les attaques du groupe, les États membres de la Commission du bassin du lac Tchad et le Bénin ont créé la Force multinationale mixte, composée de 8 700 soldats, qui a lancé des opérations contre Boko Haram.

12. Le Sahel reste une plaque tournante du trafic de stupéfiants, avec des réseaux qui s'étendent dans toute l'Afrique de l'Ouest et jusqu'en Afrique du Nord. Les trafics, notamment de stupéfiants, de cigarettes et de migrants, continuent de faire peser une menace majeure sur la sécurité régionale, en raison de l'implication de groupes armés et de mouvements terroristes et de la concurrence qu'ils se font pour le contrôle des itinéraires. Les groupes armés assurent la sécurité et l'escorte des convois organisés par les trafiquants, en échange d'importantes sommes d'argent. Le processus de paix au Mali s'en trouve compromis, étant donné les gains monétaires considérables qui sont retirés des trafics. En 2014, les autorités maliennes ont saisi au moins 3,6 tonnes de cocaïne et 4,7 tonnes de cannabis.

13. Le Sahel est également au centre de la traite des êtres humains et des migrations de masse en provenance de l'Afrique subsaharienne et à destination de l'Afrique du Nord et de l'Europe. La région est à la fois un point de départ et un couloir de transit pour les migrations illégales et les déplacements forcés de personnes qui vont chercher sûreté et protection à l'étranger. L'Organisation internationale pour les migrations (OIM), citant les autorités locales d'Agadez (nord du Niger), a estimé qu'au moins 2 000 migrants et déplacés entraient chaque semaine sur le territoire libyen par le nord du Niger. Ces migrants sont souvent contraints à verser d'importantes sommes d'argent à des réseaux de passeurs pour traverser des territoires vastes et dangereux, notamment en Libye, avec l'objectif d'embarquer sur un navire à destination de l'Europe. La dégradation de l'environnement, les déséquilibres commerciaux, le faible niveau de développement socioéconomique, la gouvernance qui laisse à désirer, les violations des droits de l'homme, l'insécurité et les conflits prolongés sont parmi les principaux facteurs de migration et de déplacement forcé.

14. En août 2014, pour lutter contre le terrorisme au Sahel, la France a lancé l'opération Barkhane, dotée de quelque 3 500 soldats stationnés dans plusieurs bases au Burkina Faso, au Mali, en Mauritanie, au Niger et au Tchad. Les activités antiterroristes conduites par Barkhane en partenariat avec les pays du Sahel ont abouti à la mort ou à l'arrestation de plus de 100 terroristes en un an, et à la réduction des capacités opérationnelles des groupes terroristes. Entre août 2014 et septembre 2015, le Burkina Faso, le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Tchad ont mené, avec l'appui de Barkhane, huit opérations militaires transfrontières conjointes dont la coordination a été assurée dans le cadre de réunions trimestrielles des sous-chefs d'état-major des armées en charge des opérations et de réunions semestrielles des chefs d'état-major des armées du Groupe de cinq pays du Sahel (G-5 Sahel). Barkhane soutient également les initiatives régionales de lutte contre Boko Haram dans le bassin du lac Tchad et contribue à la stabilisation du Mali, en coopération avec l'armée malienne et en coordination avec la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) et la mission militaire de l'Union européenne visant à contribuer à la formation des forces armées maliennes (EUTM Mali).

C. Situation humanitaire

15. Dans tout le Sahel, la violence liée aux conflits, l'insécurité alimentaire, la malnutrition, les épidémies et les catastrophes naturelles demeurent les causes principales des besoins humanitaires. Les mauvaises récoltes dans certaines parties du Sahel en 2014, l'insécurité et les conflits ont aggravé l'insécurité alimentaire dans la région. La sécurité alimentaire de la population du sud de la Mauritanie s'est gravement détériorée, tandis que les pluies tardives et erratiques de 2014 ont prolongé la période de soudure pour de nombreuses collectivités dans tout le Mali, le nord du Sénégal et l'est du Tchad. Environ 5 millions de personnes souffrent de l'insécurité alimentaire dans le bassin du lac Tchad à cause des violences dues à Boko Haram. À l'échelle du Sahel, 5,8 millions d'enfants de moins de 5 ans risquent d'être victimes de malnutrition modérée ou sévère. Au pic de la période de soudure, en septembre 2015, plus de 20 millions de personnes étaient en situation d'insécurité alimentaire et 4,4 millions, soit une hausse notable par rapport aux 2,5 millions de janvier 2015, avaient besoin d'une aide alimentaire.

16. Si beaucoup de pays du Sahel ont connu des précipitations modérées durant l'actuelle saison des pluies, des inondations ont cependant touché plus de 300 000 personnes au Burkina Faso, au Niger, au Nigéria et en Sierra Leone et détruit plus de 700 hectares de terres agricoles. Certains s'inquiètent que la végétation régénérée par les pluies puisse encourager la reproduction des criquets pèlerins dans certaines parties du Sahel. Une flambée de grippe aviaire qui continue de s'étendre en Afrique de l'Ouest est en train d'arriver au Burkina Faso, au Niger et au Nigéria. En septembre 2015, rien qu'au Nigéria, 490 exploitations agricoles et 1,7 million d'oiseaux étaient touchés par le virus. Les épidémies récurrentes de maladies comme le choléra, la rougeole, la méningite et les affections endémiques telles que le paludisme posent toujours de graves problèmes de santé publique dans tout le Sahel. La flambée de maladie à virus Ebola qui a ravagé certains des voisins du Sahel a rappelé de la pire des façons qu'il était urgent de renforcer les systèmes de santé.

17. Dans la région, 4,4 millions de personnes sont déracinées de leur foyer, ce qui est nettement plus qu'en janvier 2014 où leur nombre s'élevait à 1,6 million. Les collectivités du nord du Mali sont restées dans une situation très précaire pour la troisième année consécutive, avec peu d'espoir de retour des réfugiés ou d'amélioration des services publics. En septembre 2015, le conflit dans le bassin du lac Tchad avait entraîné le déplacement de 2,5 millions de personnes, dont 2,1 millions au Nigéria, soit la deuxième plus grande crise de déplacement du continent. Les enfants sont particulièrement touchés : on estime à 1,4 million le nombre d'entre eux qui font partie des déplacés au Nigéria et dans les pays voisins. Les mesures de sécurité, et notamment la fermeture des frontières, ont gravement porté atteinte aux activités économiques et au commerce, entraînant une hausse brutale des prix des denrées alimentaires et des produits de base. Une interdiction de la pêche dans le lac Tchad a compromis plus avant les moyens de subsistance et la sécurité alimentaire des ménages.

18. Le Plan d'intervention stratégique humanitaire 2014 -2016 pour le Sahel a pour but de répondre aux besoins urgents et chroniques par des interventions visant à sauver des vies et à améliorer la résilience, notamment en renforçant les capacités des gouvernements et en assurant une forte mobilisation des acteurs de développement. En septembre 2015, les donateurs avaient apporté à peine plus de 756 millions de dollars à la région, sur un appel à contributions de 1,9 milliard de dollars (en hausse notable par rapport à l'appel de 2014, qui s'élevait à 1,4 milliard). Les programmes humanitaires qui sont mis en œuvre au Sahel restent sous-financés, ce qui empêche de mener des activités de prévention et de répondre rapidement aux besoins des populations. Par ailleurs, le niveau de financement est inégal selon le domaine d'intervention, de telle sorte que l'éducation, l'eau, l'hygiène, l'assainissement et la santé sont relativement délaissés au profit d'autres secteurs et reçoivent moins de 30 % des fonds requis.

III. Renforcement de l'appropriation et consolidation des partenariats

19. Au cours de la période considérée, mon Envoyée spéciale a poursuivi ses efforts visant à renforcer la cohérence des interventions de l'ONU dans le cadre de la Stratégie. Le Comité directeur a continué de servir de plateforme principale de coordination interne pour les entités des Nations Unies concernées par la mise en œuvre de la Stratégie. Il s'est essentiellement employé à faire progresser l'exécution des projets, à améliorer l'appropriation régionale et nationale de la Stratégie et à ajuster les activités des programmes en fonction de l'évolution de la situation politique et des conditions de sécurité dans la région.

20. Afin de renforcer l'appropriation et la coopération avec les pays de la région, mon Envoyée spéciale a effectué plusieurs visites dans les cinq pays prioritaires, à savoir le Burkina Faso, le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Tchad. Elle en a profité pour apporter un appui et fournir des orientations aux équipes de pays des Nations Unies dans la mise en œuvre de la Stratégie, en mettant l'accent sur l'importance d'une approche régionale pour relever les défis transversaux au Sahel.

21. L'ONU a entrepris une série de consultations avec les pays du G-5 Sahel et son secrétariat permanent, ce qui a contribué à favoriser la convergence entre la Stratégie et le programme d'investissement prioritaire du Groupe, et abouti à l'élaboration d'un plan d'action pour consolider la coopération entre les deux entités. Le plan d'action prévoit une démarche conjointe pour l'élaboration, l'exécution, le suivi et l'évaluation des projets.

IV. Progrès dans la mise en œuvre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel

22. Durant la période considérée, mon Envoyée spéciale a mis en place des mécanismes destinés à accélérer la mise en œuvre de la Stratégie intégrée, notamment la fourniture d'un appui technique aux organisations régionales et aux entités des Nations Unies pour l'élaboration de projets régionaux et d'accords de coopération sur les principales questions thématiques. Cela a permis de réaliser des progrès notables dans l'identification, l'élaboration et l'exécution de projets aux niveaux régional et national.

A. Rôle d'orientation et de facilitation du Bureau de l'Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Sahel

23. Dans le but d'accélérer la mise en œuvre de la Stratégie, mon Envoyée spéciale a plaidé pour le concept de « projets phares » régionaux, qui sont des projets à fort impact et forte visibilité conçus à dessein comme des initiatives transfrontières. Son bureau fournit aux entités concernées des Nations Unies une assistance technique pour l'élaboration de projets.

24. Le Bureau de l'Envoyée spéciale a amélioré ses outils de communication en vue de maintenir l'attention sur les problèmes régionaux qui se posent au Sahel et de mieux faire connaître l'action menée par les organismes des Nations Unies. Il a ainsi lancé un site Web et un magazine trimestriel en ligne pour diffuser des informations sur la Stratégie et mettre en lumière difficultés et succès.

25. Sous la houlette de mon Envoyée spéciale, l'ONU a également apporté aux pays du Sahel et aux organisations régionales un soutien direct en ce qui concerne des questions transversales comme la lutte contre la radicalisation et l'extrémisme violent et le renforcement du rôle des femmes dans le règlement des problèmes de la région.

26. Le Bureau de l'Envoyée spéciale a conduit, en consultation avec les entités des Nations Unies et les organisations régionales concernées, une étude régionale visant à analyser le contexte dans lequel la radicalisation et l'extrémisme violent continuent de prospérer. Les principales recommandations du rapport sont en cours de mise en œuvre sous la forme de projets concrets pour prévenir et combattre la radicalisation et l'extrémisme violent au Sahel.

27. Le Bureau a également prêté son concours au G-5 Sahel pour l'organisation à Niamey, du 11 au 14 mai 2015, d'une réunion de haut niveau sur la radicalisation et l'extrémisme violent au Sahel, à laquelle ont participé les ministres chargés de la sécurité et des affaires religieuses et des experts du Burkina Faso, du Mali, de la Mauritanie, du Niger et du Tchad, ainsi que des partenaires régionaux et internationaux. Les participants ont examiné des mesures concrètes pour combattre la radicalisation et l'extrémisme violent et adopté la Déclaration du Groupe de cinq pays du Sahel sur la lutte contre la radicalisation et l'extrémisme violent au Sahel. Dans la Déclaration, le G-5 Sahel s'est engagé à employer une approche globale dans la lutte contre la radicalisation et l'extrémisme violent, en consolidant les cadres juridiques, en renforçant les capacités des chefs religieux et en assurant une supervision appropriée des institutions éducatives à caractère confessionnel. Ils y ont également mis l'accent sur la création de possibilités pour les jeunes et les femmes, la prévention de la radicalisation dans les lieux de détention et le renforcement des capacités des institutions publiques en vue de sensibiliser les populations et de décourager les appels publics à l'extrémisme violent. Est aussi annoncée dans la Déclaration la mise en place, avec l'appui de l'ONU, d'une cellule régionale de prévention de la radicalisation qui relèvera du secrétariat permanent du G-5 Sahel à Nouakchott.

B. État d'avancement des programmes et projets régionaux

28. Au total, 19 projets régionaux ont été élaborés en collaboration étroite avec les partenaires internationaux et les donateurs bilatéraux dans le cadre de la Stratégie, dont quatre au titre du volet relatif à la gouvernance, cinq au titre du volet relatif à la sécurité et 10 au titre du volet relatif à la résilience. Trois projets au titre de chaque volet ont été désignés comme projets « phares » à exécuter en priorité. Ils portent notamment sur la gestion des frontières, l'insécurité et l'extrémisme violent, l'accès à la justice, la lutte contre la criminalité transnationale et transfrontière organisée, le contrôle des armes légères, le pastoralisme résilient, les dividendes démographiques et l'autonomisation économique des femmes.

29. Au titre du volet consacré à la gouvernance, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) mène, au Burkina Faso, au Mali, en Mauritanie, au Niger et au Tchad, un projet phare sur la gestion des frontières et les collectivités transfrontières au Sahel, dans l'objectif d'accroître la participation des populations à la gestion des zones frontalières, de renforcer les capacités des services de contrôle des frontières et de remédier à l'insécurité, notamment en promouvant la sécurité alimentaire par l'intermédiaire des activités commerciales transfrontières des femmes.

30. Le PNUD et la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme (DECT) ont mis la dernière main à un projet intitulé « Perception des facteurs d'insécurité et d'extrémisme violent dans les zones frontalières au Sahel », qui visait à évaluer la façon dont les populations vivant dans les zones frontalières voient les facteurs de radicalisation, d'insécurité et d'extrémisme violent dans huit pays du Sahel. Les résultats obtenus grâce à ce projet phare serviront de base à l'élaboration de stratégies et de programmes par pays en faveur du développement, de la paix et de la sécurité dans la région. La DECT a également obtenu un financement partiel, par l'entremise du Centre des Nations Unies pour la lutte contre le terrorisme, au profit d'un projet de renforcement des capacités de coordination et d'échange d'informations dans la lutte contre le terrorisme de six États du Sahel, qui doit être lancé en décembre 2015 au Niger.

31. Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme met actuellement en œuvre un projet régional qui vise à combattre la discrimination à l'égard des femmes et à accroître leur participation aux processus démocratiques. Ayant pour but de lutter contre les stéréotypes sexistes et de promouvoir l'égalité entre les sexes dans les médias en faisant connaître l'action menée par les femmes engagées dans la vie publique et politique, le projet couvre quatre pays : le Burkina Faso, la Gambie, le Niger et le Sénégal.

32. Au titre du volet consacré à la sécurité, l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) a poursuivi la mise en œuvre de son programme phare pour le Sahel, qui porte sur les activités de renforcement des capacités au Burkina Faso, au Mali, en Mauritanie, au Niger et au Tchad, dans les domaines de la prévention du terrorisme et de la lutte contre la criminalité transnationale organisée. Au cours de la période considérée, l'ONUDC a concentré ses efforts sur la formation des responsables du maintien de l'ordre et des cadres de la justice, le renforcement des cellules de renseignement financier et des mesures de lutte contre le blanchiment d'argent, et la facilitation de l'échange d'informations entre les fonctionnaires de justice. Il a réalisé 145 activités, touchant environ 4 500 bénéficiaires directs dans la région. Il a également appuyé l'adoption d'une loi sur l'aide juridictionnelle en Mauritanie et d'une loi sur la traite des êtres humains au Niger.

33. Le PNUD et le Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en Afrique ont entrepris une série d'enquêtes sur les armes légères et de petit calibre au Burkina Faso, au Mali, en Mauritanie, au Niger et au Tchad, ainsi que dans les pays voisins (Cameroun, Nigéria, République centrafricaine et Sénégal). Lancée en avril 2015, l'initiative devrait être menée à son terme en décembre 2015. L'exécution du projet devrait aboutir à la formulation de recommandations concrètes sur le contrôle et la réduction des armes légères qui répondent aux besoins réels de chaque pays et de la sous-région, ainsi qu'à un renforcement des capacités de réaction aux problèmes posés par les armes légères et de petit calibre.

34. Depuis 2014, le Centre régional conduit également un projet sur l'assistance technique pour améliorer le contrôle des armes légères et la sécurité physique et la gestion des stocks au Sahel, pour lequel un financement est partiellement assuré. Le projet concerne principalement le Burkina Faso, le Mali et le Niger.

35. Au titre du volet consacré à la résilience, la Banque mondiale a approuvé en décembre 2014 un programme majeur du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), pour un coût total estimé à 207 millions de dollars, sur l'autonomisation des femmes et le dividende démographique au Sahel. Le programme a pour but d'améliorer la disponibilité de produits de santé procréative à des prix raisonnables, de renforcer les centres de formation spécialisée pour les services de sages -femmes et d'infirmiers dans les zones rurales et de piloter les initiatives en faveur des adolescentes tout en diffusant les savoirs dans ce domaine. La mise en œuvre a commencé par des réunions techniques préparatoires, début 2015, notamment sur les ressources humaines de santé (février 2015) et l'autonomisation des femmes et des filles (mars 2015). Tous les gouvernements concernés (Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Mali, Mauritanie, Niger et Tchad) ont signé des accords de financement avec la Banque mondiale, aux fins de l'exécution du programme dans leurs pays respectifs.

36. Pour sa part, l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) mène un projet sur la gestion de l'information, l'analyse des risques et de la vulnérabilité et la mesure de la résilience, qui vise à faciliter une programmation multisectorielle efficace et rationnelle fondée sur une analyse cohérente des risques et vulnérabilités multiples qui touchent les ménages, les collectivités et les systèmes au Sahel. Ce projet, qui apporte un appui au Comité permanent inter-États de lutte contre la sécheresse dans le Sahel (CILSS), est exécuté au Burkina Faso, au Mali, en Mauritanie, au Niger, au Sénégal et au Tchad.

37. Plusieurs organismes des Nations Unies apportent un appui technique et financier à l'action de l'Alliance globale pour l'Initiative Résilience (AGIR), au niveau tant national que régional. AGIR est un programme -cadre sur la résilience qui allie des interventions dans les domaines de l'agriculture, de la sécurité alimentaire, de la nutrition et de la protection sociale, sous la direction de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), de l'Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et du Comité permanent interÉtats au niveau régional.

C. État d'avancement des programmes et projets nationaux

38. Les projets nationaux continuent d'être principalement mis en œuvre dans le cadre des plans-cadres des Nations Unies pour l'aide au développement respectifs de chaque pays. Si certains des plans-cadres sont antérieurs à la Stratégie intégrée, des efforts concertés ont été accomplis pour les aligner sur cette dernière, ce qui a permis d'atteindre, dans certains pays, un taux de convergence allant jusqu'à 80 %. Les feuilles de route pour la révision des plans-cadres de la Mauritanie et du Tchad font d'ores et déjà de la Stratégie intégrée le document stratégique de référence pour toutes les activités opérationnelles du système des Nations Unies dans ces deux pays.

39. En matière de gouvernance, les trois projets suivants sont en cours au Burkina Faso : un projet d'appui à la bonne gouvernance financé par le Japon (5 millions de dollars), un projet d'appui électoral financé par le PNUD, la Suisse et la Suède (5 millions de dollars) et un projet portant sur la responsabilité sociale mis en œuvre par le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF). Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme met également en œuvre une série de projets visant à renforcer les capacités nationales en matière de droits de l'homme et à accroître la participation des femmes à la vie politique.

40. Au Niger, dans le cadre des préparatifs de la prochaine élection présidentielle, le PNUD a élaboré un projet d'appui électoral de 15,9 millions de dollars qui a été validé au niveau national. Un projet d'inscription biométrique sur les listes électorales (3 millions de dollars) est également en cours d'exécution. En juillet 2015, le Fonds pour la consolidation de la paix a approuvé un nouveau plan des priorités de consolidation de la paix doté d'un budget de 10 millions de dollars, au titre duquel il est prévu de consacrer jusqu'à 1 million de dollars à l'instauration d'un environnement propice à la consolidation de la paix dans le pays.

41. Au Tchad, le PNUD a constitué une provision de 25 millions de dollars destinée à l'appui aux élections pour la période 2014 -2017. En outre, en partenariat avec des organisations non gouvernementales locales, le Haut-Commissariat aux droits de l'homme, l'Organisation internationale pour les migrations, l'UNICEF et le Bureau de coordination des affaires humanitaires, le PNUD met actuellement en œuvre deux projets de prévention des conflits et de consolidation de la paix d'un montant de 15 millions de dollars. en Mauritanie, un projet visant à instaurer un cadre propice au développement des énergies renouvelables a été mené à bien au cours de la période considérée, et cinq nouveaux projets ont été lancés, pour un budget total d'environ 2,7 millions de dollars, tandis que l'exécution de 22 autres projets, lancés avant le début de la période considérée pour un budget total de plus de 26 millions de dollars, s'est poursuivie. Les projets portent notamment sur la protection juridique des réfugiés, le renforcement des capacités dans le domaine de la consolidation de la paix et dans le secteur de la justice, la lutte contre l'extrémisme violent, la création et la remise en état d'infrastructures et la santé maternelle et procréative.

42. Au Mali, outre les efforts soutenus qu'elle a déployés pour appuyer le processus politique et la sécurisation du pays, la MINUSMA a lancé un projet à effet rapide visant à créer et soutenir un réseau d'anciens, qui serait chargé de la réconciliation et de la paix à Goundam, dans le région de Tombouctou. L'Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI) et le PNUD exécutent aussi un projet conjoint d'un montant de 2,1 millions de dollars, financé au moyen du Fonds pour la consolidation de la paix, en vue de créer des capacités en matière de résilience face aux conflits à l'intention de femmes et de jeunes dans les régions de Gao et de Tombouctou.

43. Concernant l'objectif stratégique consacré à la sécurité, la deuxième phase du projet mené conjointement par le Programme des Nations Unies pour les établissements humains (HABITAT) et le PNUD sur la sécurité urbaine et les projets portant sur la gestion des armes de petit calibre se poursuivent au Burkina Faso. Au Niger, trois projets portant sur la sécurité, dont un projet d'appui aux organes de sécurité (1,7 million de dollars) et un projet portant sur la gestion des armes de petit calibre, sont en cours d'exécution. Dans le cadre du nouveau plan des priorités pour la consolidation de la paix financé par le Fonds pour la consolidation de la paix, un budget de 3,6 millions de dollars a été mis à disposition pour financer des activités d'appui à la sécurité des populations locales dans les régions du Niger qui bordent la frontière.

44. Au Tchad, trois projets sont en cours d'exécution pour un budget total de 15 millions de dollars : deux portent sur la gestion des frontières et des populations frontalières et le troisième sur les mines terrestres. Ces projets sont mis en œuvre par l'Organisation internationale pour les migrations, l'Entité des Nations Unies pour l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes (ONU-Femmes) et le PNUD. En Mauritanie, deux nouveaux projets ont été lancés, avec un budget total de 2,4 millions de dollars. Le premier porte sur la coopération et la coordination internationales en vue de l'élaboration et de la mise en œuvre de stratégies de gestion des frontières et le second sur le renforcement des capacités de collecte et d'analyse de données sur les flux transfrontaliers de personnes. La mise en œuvre de trois autres projets portant, eux, sur le renforcement des capacités nationales de gestion et de contrôle des frontières et de lutte contre le terrorisme, lancée avant la période couverte par le présent rapport, s'est également poursuivie, avec un budget total de près de 3,2 millions de dollars.

45. Au Mali, la MINUSMA a formé au total 4 615 agents chargés de l'application des lois entre juillet 2014 et octobre 2015. Le Bureau des Nations Unies pour les services d'appui aux projets a commencé à mettre en œuvre un projet d'un montant de 2,99 millions de dollars visant à restaurer la confiance grâce à l'appui au processus de cantonnement à Kidal. La construction de six sites de cantonnement pourra commencer dès que les sites auront été officiellement approuvés par les parties. Un programme d'amélioration de l'accès à la justice et de la sécurité pour les femmes victimes de violence sexuelle et sexiste dans le cadre de la construction de la paix au Mali est actuellement exécuté par ONU-Femmes, le FNUAP et la MINUSMA.

46. S'agissant de la résilience, des projets de plus de 100 millions de dollars sont actuellement exécutés au Burkina Faso. Ils portent principalement sur la nutrition, l'éducation, la sécurité sociale, l'agriculture, les services à la population et l'aide humanitaire. En ce qui concerne les moyens de subsistance agricoles, la FAO est venue en aide à 7 000 foyers en les faisant bénéficier de transferts en espèces sans condition et en promouvant les intrants agricoles dans les foires commerciales. L'Organisation internationale du Travail (OIT) a lancé la mise en œuvre d'un projet consacré à la révision de la politique nationale en matière d'emploi, dans le cadre duquel l'accent est mis sur la prise en compte de l'emploi dans l'élaboration des budgets. Ce projet vise à appuyer les efforts faits au niveau national pour stimuler l'emploi, en particulier celui des jeunes et des femmes, grâce à la budgétisation, au suivi et à l'évaluation des politiques dans tous les secteurs de l'économie.

47. Un budget de plus de 1,2 milliard de dollars est actuellement investi dans les projets portant sur la résilience. Ces projets visent entre autres à fournir une assistance aux rapatriés de République centrafricaine, à renforcer les capacités en vue d'améliorer la résilience des populations, à améliorer la prévention et la gestion des risques et à renforcer la protection sociale, y compris dans le domaine des transferts de fonds. La FAO a aidé les ménages ruraux en distribuant des fonds ainsi que des intrants agricoles et du bétail.

48. En Mauritanie, un projet portant sur la prise en charge de la malnutrition aiguë sévère et un autre axé sur le contrôle des épidémies, dotés d'un budget global de plus de 1,5 million de dollars, ont été menés à bien. Deux autres projets ont été lancés au cours de la période considérée, pour un budget total de plus de 6,7 millions de dollars. L'un vise à renforcer les capacités des populations vivant de l'agropastoralisme en matière de gestion des ressources naturelles; l'autre, à fournir un ensemble de services humanitaires de proximité pour améliorer la résilience et remédier au problème de la malnutrition. La mise en œuvre de 13 autres projets lancés avant la période visée par le rapport s'est poursuivie, pour un budget total cumulé de plus de 32 millions de dollars. Ces projets portent notamment sur la lutte contre la violence sexiste, la protection des réfugiés et les activités génératrices de revenus pour les réfugiés et les collectivités locales. Ils contribuent également à la stabilisation des communautés en promouvant l'agriculture de contre-saison et le pastoralisme, notamment par la mise en place de systèmes de bons pour l'achat de fourrage, le renforcement des capacités nationales de planification préalable et d'intervention en cas de catastrophe, la protection des enfants et des femmes vulnérables touchés par la malnutrition et l'insécurité alimentaire, et le renforcement des moyens de subsistance durables.

49. Au Niger, l'équipe de pays des Nations Unies et les autorités locales ont signé un accord portant sur 15 plans d'action destinés à réduire la vulnérabilité des populations de 35 communes, pour un budget total de 38 millions de dollars. Le Niger a également bénéficié d'une subvention de 3 millions de dollars dans le cadre du Programme d'adaptation en Afrique pour atténuer les effets des changements climatiques. En outre, un montant de 62 millions de dollars (sur les 349 millions nécessaires) a été mobilisé au titre du projet visant à sauver des vies et à protéger les moyens de subsistance au sein des populations en situation de vulnérabilité chronique. Par ailleurs, les organismes des Nations Unies présents dans le pays participent à l'élaboration d'un plan de réduction des risques de catastrophe pour la période 2015-2030. L'OIT met actuellement en œuvre la phase II de son projet d'appui à la commission nationale pour la lutte contre la persistance du travail forcé et de la discrimination et au renforcement des capacités des organisations locales, notamment l'association nationale des chefs traditionnels, pour leur permettre de venir en aide aux victimes. Les actions menées ont permis au Niger de ratifier le Protocole de 2014 relatif à la Convention de 1930 sur le travail forcé et d'adopter un amendement visant à éradiquer le travail forcé. Dans le cadre du nouveau plan des priorités de consolidation de la paix, le Fonds pour la consolidation de la paix a approuvé un budget de 4,8 millions de dollars en faveur de l'autonomisation des jeunes au sein des communautés à risque du Niger.

D. Renforcement de la participation des femmes au règlement des problèmes de la région du Sahel

50. L'intégration de la problématique hommes-femmes et le renforcement de la participation des femmes à la mise en œuvre de la Stratégie intégrée demeurent une priorité pour les organismes des Nations Unies présents dans la région. Au cours de la période considérée, outre la mise en place de programmes visant à promouvoir l'égalité entre les sexes, l'ONU, sous la direction du Bureau de l'Envoyée spéciale du Secrétaire général pour le Sahel et avec l'appui technique d'ONU -Femmes, a amélioré la prise en compte de la problématique hommes-femmes dans les stratégies et programmes des pays du Sahel et des organisations régionales, comme convenu dans la feuille de route pour la coopération établie entre le G-5 Sahel et l'Organisation.

51. Dans le cadre des efforts déployés par l'ONU pour renforcer le rôle des femmes dans la région du Sahel, le Bureau de l'Envoyée spéciale a organisé, en collaboration avec ONU -Femmes et l'Union africaine et en partenariat avec le Gouvernement tchadien, un forum des femmes du Sahel, qui s'est tenu à N'Djamena les 22 et 23 juillet 2015. L'objectif du forum était de se faire une idée plus précise de la situation des femmes dans la région et de définir les nouvelles priorités et les actions concrètes à mener en vue de renforcer leur participation à la mise en œuvre des stratégies et des initiatives régionales et internationales en faveur du Sahel. Le forum a réuni les ministres chargés de la promotion de l'égalité hommes-femmes, des parlementaires, des femmes rurales et des acteurs de la société civile venus du Burkina Faso, du Tchad, du Mali, de Mauritanie et du Niger.

52. Le Bureau de l'Envoyée spéciale, ONU -Femmes et d'autres organismes des Nations Unies fournissent actuellement un appui à la mise en œuvre de la déclaration adoptée à l'issue du forum, et en particulier à la mise en place d'une plateforme régionale des femmes du Sahel. Une fois opérationnelle, la plateforme contribuera à la réalisation d'une analyse régionale de la condition des femmes qui permettra d'accroître les possibilités de participation de ces dernières au maintien de la paix et de la sécurité et à la promotion du développement socioéconomique dans la région du Sahel.

53. Dans le cadre du projet consacré à la gestion des frontières et des populations frontalières du Sahel, le PNUD et ONU-Femmes entendent mener une étude sur les échanges transfrontaliers informels réalisés par les femmes dans la région du Sahel, dispenser des formations destinées à renforcer la capacité des services de contrôle des frontières à prendre en compte la problématique hommes-femmes dans la gestion des frontières, et créer une plateforme de gestion du savoir qui servira d'outil de sensibilisation et de réseautage aux professionnels et aux autres parties prenantes.

E. Mobilisation des ressources

54. Mon Envoyée spéciale a activement appuyé, dans le cadre de son mandat, les efforts de mobilisation de ressources déployés par les organismes, fonds et programmes des Nations Unies, en ouvrant le dialogue avec d'éventuels pays et organisations donateurs pour accélérer la mise en œuvre de certains projets régionaux. Toutefois, l'un des principaux obstacles à la mobilisation de fonds est l'absence de mécanismes de collecte des fonds et de gouvernance, des éléments qui constituent souvent, pour les donateurs, une condition préalable au don. Le Bureau de l'Envoyée spéciale du Secrétaire général pour le Sahel et ses partenaires du système des Nations Unies présents dans la région sont donc en train de mettre en place un fonds d'affectation spéciale pluripartenaires des Nations Unies pour le Sahel doté d'objectifs précis et d'une structure de gouvernance claire. Ce nouveau mécanisme de financement permettra à l'ONU de répondre aux attentes que la Stratégie intégrée a fait naître chez les gouvernements et les peuples de la région grâce à une intervention coordonnée, cohérente et axée sur la qualité de la prestation. Le fonds d'affectation spéciale pluripartenaires rassemblera les contributions des pays donateurs et du secteur privé et tirera parti des sources de financement et des mécanismes de financement gérés par des organismes des Nations Unies existants pour financer les interventions régionales spécialisées mises en œuvre au titre des trois volets de la Stratégie intégrée. La création du fonds d'affectation spéciale pluripartenaires a été accueillie favorablement par certains pays donateurs, et certains d'entre eux ont déjà émis le souhait d'y apporter leur contribution. Parallèlement, d'autres pays et organismes donateurs se sont déclarés disposés à renforcer leur partenariat avec le système des Nations Unies et les pays du G-5 Sahel par la mise en œuvre de projets régionaux ciblés qui correspondent à leurs objectifs dans la région.

55. Mon Envoyée spéciale a également demandé à l'Union européenne de renforcer son partenariat stratégique et en matière de programmes avec l'ONU dans le cadre du plan d'action régional pour la mise en œuvre de la Stratégie de l'Union européenne pour la sécurité et le développement dans la région du Sahel et du fonds d'affectation spéciale d'urgence pour la stabilité et la lutte contre les causes profondes de migration illégale et de déplacement de populations en Afrique, dont la création a été annoncée.

V. Coordination

56. Le Bureau de l'Envoyée spéciale a continué d'apporter son concours aux initiatives de coordination menées au Sahel, y compris aux mécanismes mis en place par les pays de la région, tels que la plateforme ministérielle de coordination, le G-5 Sahel et le Processus de Nouakchott, ainsi qu'aux initiatives visant à harmoniser les stratégies d'appui adoptées par les partenaires internationaux dans la région, grâce à la mise en place d'un groupe de contact informel des partenaires internationaux présents au Sahel.

A. Plateforme ministérielle de coordination pour le Sahel

57. La période considérée a vu la plateforme ministérielle de coordination franchir une étape importante en s'imposant comme un mécanisme de coordination incontournable pour la mise en œuvre effective des initiatives et des stratégies en faveur du Sahel. À leur troisième réunion, qui s'est tenue à Bamako le 18 novembre 2014 sous la présidence du Mali, les membres de la plateforme ont adopté plusieurs résolutions, portant notamment sur l'élargissement du G-5 Sahel à d'autres pays, l'ouverture d'un bureau du secrétariat technique à Bamako et la création de quatre groupes thématiques au titre des composantes gouvernance, sécurité, résilience et développement, respectivement menés par le Burkina Faso, le Tchad, le Niger et la Mauritanie. L'objectif de ces groupes thématiques est d'aider la plateforme ministérielle à assurer la coordination effective de la mise en œuvre des stratégies et initiatives en faveur du Sahel portant sur leurs domaines de compétence respectifs. Il a également été convenu que la plateforme de coordination demeurerait le principal cadre politique pour la coordination des différentes initiatives en faveur du Sahel, tandis que le G-5 Sahel s'occuperait en priorité des aspects opérationnels de ces initiatives dans les cinq pays membres.

58. Le secrétariat technique de la plateforme ministérielle de coordination, coprésidé par l'Union africaine et l'ONU, a par la suite organisé une série de réunions consacrées au lancement officiel des travaux des groupes de travail thématiques et à l'adoption d'un plan d' action qui mette l'accent sur le recensement, par secteur d'activité, des programmes en cours dans la région du Sahel. Cet état des lieux des programmes, réalisé avec l'appui d'un consortium d'instituts de recherche, permettra à toutes les parties prenantes de repérer les lacunes et les éventuelles synergies entre les différents acteurs régionaux et internationaux dans les domaines de la sécurité, de la gouvernance, de la résilience et du développement.

B. Groupe des 5 pour le Sahel

59. Dans mon dernier rapport relatif aux progrès accomplis dans la mise en œuvre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel (S/2014/397), j'ai informé le Conseil de sécurité que le Burkina Faso, le Tchad, le Mali, la Mauritanie et le Niger avaient créé le « Groupe de cinq pays du Sahel » (G-5 Sahel) en vue de favoriser une approche commune des membres dans les domaines du développement et de la sécurité. Au cours de la période visée par le présent rapport, le G-5 Sahel a évolué, pour devenir un cadre institutionnel pour la coordination et le suivi de la coopération régionale aux termes d'une convention adoptée par les cinq pays membres au cours d'un sommet extraordinaire organisé à Nouakchott le 19 novembre 2014. Conformément à la déclaration du Président du Conseil de sécurité en date du 27 août 2014 (S/PRST/2014/17), dans laquelle il encourage mon Envoyée spéciale à poursuivre la coopération avec le G-5 Sahel et d'autres organisations régionales, l'ONU a soutenu et mené des initiatives régionales conjointes avec le G-5 Sahel.

60. Le G-5 Sahel a pris plusieurs initiatives destinées à renforcer la coopération entre ses États membres en matière de sécurité, notamment grâce à la tenue de réunions régulières des chefs d'état-major et à l'établissement d'une plateforme de coopération en matière de sécurité visant à permettre la mise en place d'un réseau intégré d'échange d'informations opérationnelles et à offrir un cadre aux activités de formation dans les domaines de la sécurité et de la gestion des frontières. L'ONUDC apporte son appui à la mise en œuvre de cette plateforme dans le cadre de sa contribution à la mise en œuvre de la Stratégie intégrée. Les membres du G-5 Sahel renforcent également leurs capacités de coopération régionale en matière de sécurité en effectuant des exercices militaires transfrontaliers conjoints, avec l'appui de partenaires, en particulier la France, dans le cadre de l'Opération Barkhane.

C. Processus de Nouakchott

61. Au cours de la période visée par le rapport, le Processus de Nouakchott relatif au renforcement de la coopération en matière de sécurité et à l'opérationnalisation de l'Architecture africaine de paix et de sécurité dans la région sahélo-saharienne, lancé par l'Union africaine en mars 2013, a confirmé son statut de mécanisme de coopération en matière de sécurité le plus inclusif de la région. Un sommet des chefs d'État, des réunions bimensuelles des responsables des services de renseignement et de sécurité et des réunions semestrielles des ministres des affaires étrangères, de la défense et de la sécurité des pays participants ont été organisés dans le cadre du Processus de Nouakchott. Ces réunions ont été l'occasion d'examiner la situation de la région en matière de sécurité, de renforcer la coopération en matière de sécurité et de passer en revue les activités de renforcement des capacités mises en œuvre aux niveaux régional et national. Des mesures ont également été prises en vue de mettre en place un système de communication sécurisée pour l'échange d'informations relatives à la sécurité par les pays participants, ainsi que plusieurs activités de renforcement des capacités.

D. Groupe informel des partenaires internationaux présents au Sahel

62. Le 17 novembre 2014, un an après la visite que j'ai effectuée dans la région du Sahel aux côtés de la Présidente de la Commission de l'Union africaine, du Président de la Banque mondiale, du Président de la Banque africaine de développement et d'un représentant de l'Union européenne, les envoyés et représentants spéciaux pour le Sahel des cinq institutions se sont réunis à Bamako, pour faire le point sur les efforts que nous déployons collectivement et examiner les moyens de renforcer la coordination et veiller à ce que le message délivré par tous dans la région soit unanime. La réunion a débouché sur la création d'un groupe de contact informel des partenaires internationaux présents au Sahel, qui sert d'instance commune permettant aux partenaires internationaux d'harmoniser le message, les efforts diplomatiques et les activités de sensibilisation aux questions se rapportant au Sahel. Lors d'une réunion tenue à La Haye le 22 avril 2015, les membres du groupe de contact informel sont convenus d' inviter les envoyés spéciaux pour le Sahel de la Belgique, de l'Espagne, de la Norvège, de la Suisse et du Royaume -Uni de Grande Bretagne et d'Irlande du Nord à rejoindre le groupe.

VI. Observations et conclusion

63. La région du Sahel continue de se heurter à de graves difficultés, sur le plan socioéconomique comme sur ceux de la sécurité et du développement. La prolifération des armes, la libre circulation des groupes armés à travers les frontières et la présence de groupes terroristes continuent de porter préjudice aux moyens de subsistance, à la bonne gouvernance et au développement humain dans la région. Dans ce contexte, je salue la création et la mise en service de la Force multinationale mixte pour lutter contre Boko Haram. Je demande aux États Membres d'apporter leur soutien à la Force, et j'insiste sur le fait que les opérations de cette dernière doivent être menées dans le respect absolu des obligations qui incombent aux États Membres en vertu du droit international des droits de l'homme, du droit international des réfugiés et du droit international humanitaire. Je tiens également à féliciter le Mali et l'équipe de médiation dirigée par l'Algérie pour la signature d'un accord de paix, qui, je l'espère, débouchera sur une paix et un développement durables pour tous les Maliens.

64. Le trafic de stupéfiants reste un commerce lucratif qui bénéficie, partout au Sahel, de la complicité et de la protection des groupes armés et des mouvements extrémistes. Les conflits armés qui font rage au Mali et en Libye et ceux qui sont liés à Boko Haram incitent les États du Sahel à financer en priorité le secteur de la sécurité, au détriment d'autres postes, essentiels sur le plan socioéconomique et décisifs pour le développement à long terme de la région. Pour inverser cette tendance, il est impératif que les interventions de maintien de la sécurité soient accompagnées de programmes visant à stimuler le développement socioéconomique.

65. Je suis vivement préoccupé par les sombres perspectives qui se présentent à des millions de jeunes Sahéliens, du fait de la marginalisation socioéconomique, de la dégradation de l'environnement, du manque d'accès à l'éducation et de l'insuffisance des offres d'emploi, et ce, au beau milieu d'un boom démographique, dans une région qui a cruellement besoin d'investir dans les domaines de l'éducation, de la santé, de l'emploi et des infrastructures. Avec l'aide de la communauté internationale, les pays de la région doivent faire davantage pour promouvoir la bonne gestion des affaires publiques, notamment en adoptant des plans de décentralisation efficaces, et pour promouvoir les moyens de subsistance durables, notamment en favorisant l'agriculture, les petites entreprises et l'entrepreneuriat et en protégeant l'environnement. Remédier à ces problèmes pourrait permettre de créer des débouchés pour les jeunes de la région et d'inverser ainsi la dérive actuelle, qui les pousse à migrer massivement, à se radicaliser et à rejoindre des groupes extrémistes.

66. L'existence de multiples stratégies en faveur du Sahel témoigne du fait que la communauté internationale et les pays de la région ont pris la mesure de l'urgence de remédier durablement à la situation de la région. Toutefois, il ne sera possible d'y parvenir qu'en instaurant une coordination et une coopération efficaces entre les partenaires internationaux, les organisations régionales et les pays de la région. À cette fin, je demande instamment à tous les États Membres, aux donateurs et à la communauté internationale de renforcer la coopération et la coordination des programmes, notamment en tirant parti des dispositifs existants, afin de remédier aux grave difficultés auxquelles la région fait face. C'est dans ce même but que l'Organisation des Nations Unies mène son action dans la région en étroite collaboration avec tous les acteurs régionaux et sous-régionaux concernés, dont l'Union africaine, la CEDEAO et le G-5 Sahel, et que l'Organisation redoublera d'efforts pour renforcer ses partenariats avec ces acteurs, en tirant le meilleur parti des atouts et avantages comparatifs de chacun.

67. Dans le cadre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel, d'importants progrès ont été faits pour ce qui est de mobiliser les partenariats, de favoriser l'appropriation nationale et régionale des projets et de promouvoir la coopération régionale aux fins de la lutte contre les causes structurelles de l'instabilité dans la région. Je salue les efforts faits par les organismes, fonds et programmes des Nations Unies pour promouvoir une programmation intégrée, dans le véritable esprit de l'initiative Unité d'action des Nations Unies. La Stratégie intégrée continuera de guider les efforts déployés par l'Organisation des Nations Unies pour aider les pays du Sahel à relever ces défis dans une perspective régionale tout en respectant et en encourageant l'appropriation nationale des programmes et initiatives. Les organismes, fonds et programmes des Nations Unies intensifient en ce sens leurs efforts pour mettre en œuvre des programmes intégrés en consolidant une stratégie régionale de lutte contre les nouvelles menaces qui pèsent sur la paix, la sécurité et le développement au Sahel. Dans le cadre de la mise en œuvre de la Stratégie intégrée pour le Sahel, l'Organisation des Nations Unies continuera d'exercer son pouvoir de mobilisation pour réunir les acteurs concernés en vue d'aider les pays du Sahel à surmonter les difficultés régionales et d'appuyer les efforts de mobilisation des ressources et de sensibilisation.

68. La mise en œuvre de la Stratégie pour le Sahel est un exemple concret de l'approche sur mesure de la prévention des conflits, reposant sur les partenariats, la mobilisation à l'échelle régionale et le renforcement des capacités de prévention, à laquelle j'ai fait référence dans mon récent rapport intitulé : L'avenir des opérations de maintien de la paix des Nations Unies : application des recommandations du Groupe indépendant de haut niveau chargé d'étudier les opérations de paix (A/70/357-S/2015/682). La Stratégie doit aussi demeurer un instrument souple, qui devra être revu et affiné de façon continue, à la faveur de consultations et d'une coopération avec les pays de la région et avec la communauté internationale. Je félicite mon Envoyée spéciale pour le Sahel, ainsi que le personnel de son bureau, pour le rôle moteur qu'ils ont joué dans la mobilisation de l'appui en faveur de la Stratégie et la promotion d'une meilleure coopération entre les organismes des Nations Unies, les États Membres, les pays de la région et les donateurs en vue d'inverser certaines des tendances les plus préoccupantes observées au Sahel et d'y apporter une réponse globale conforme aux objectifs du Programme de développement durable à l'horizon 2030.


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