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22oct15

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Rapport du Secrétaire général sur l'application des résolutions par toutes les parties au conflit syrien (sep 15)


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Nations Unies
Conseil de sécurité

S/2015/813

Distr. générale
22 octobre 2015
Français
Original : anglais

Rapport du Secrétaire général sur l'application des résolutions 2139 (2014), 2165 (2014) et 2191 (2014) du Conseil de sécurité

I. Introduction

1. Le présent rapport est le vingtième présenté en application du paragraphe 17 de la résolution 2139 (2014), du paragraphe 10 de la résolution 2165 (2014) et du paragraphe 5 de la résolution 2191 (2014) du Conseil de sécurité, dans lesquels le Conseil m'a prié de lui rendre compte tous les trente jours de l'application desdites résolutions par toutes les parties au conflit en République arabe syrienne.

2. Les informations qu'il contient reposent sur des données auxquelles les organismes des Nations Unies présents sur le terrain ont eu accès et sur des renseignements obtenus auprès du Gouvernement de la République arabe syrienne et de sources publiques. Les données communiquées par les organismes des Nations Unies et leurs partenaires au sujet de leurs livraisons d'aide humanitaire portent, lorsqu'elles sont disponibles, sur la période allant du 1er au 30 septembre 2015. Des données plus récentes ont été prises en compte le cas échéant.

II. Principaux faits nouveaux

A. Questions politiques et militaires

3. En septembre, le conflit généralisé et les violences se sont poursuivis avec la même intensité dans toute la République arabe syrienne. Les bombardements aériens aveugles et disproportionnés et les attaques au sol de lieux largement peuplés de civils, notamment les largages de barils d'explosifs menés par les forces gouvernementales et les pilonnages systématiques effectués par les groupes d'opposition armés non étatiques et des groupes désignés comme terroristes |1| ont continué de tuer, blesser et déplacer des civils. La conduite des hostilités par toutes les parties reste caractérisée par un mépris généralisé du droit international humanitaire et de l'obligation de protéger les civils.

4. Le 30 septembre, des frappes aériennes par des forces russes ont commencé et ont été signalées principalement à Hama, Edleb, Homs et Lattaquié; des frappes limitées ont aussi été signalées dans les provinces de Raqqa, Deir el-Zor et Rif-Damas. Selon des informations reçues par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme (HCDH), le village de Zaafarani aurait été touché et au moins 11 civils auraient été tués et plus de 50 autres blessés. Rastan a aussi été touché, et six civils, dont quatre enfants, ont été tués. Des quartiers résidentiels de Talbissé auraient aussi été touchés, et 15 civils au moins auraient trouvé la mort.

5. Dans les provinces de Damas et Rif-Damas, des combats extrêmement violents entre les forces gouvernementales et les groupes d'opposition armés non étatiques ont fait des morts et des blessés. Le 10 septembre, les groupes d'opposition armés non étatiques ont progressé en direction de Tell el-Kurdi depuis la Ghouta orientale et ont occupé des positions près de la prison d'Adra et à Dahiyat el-Assad dans la province de Rif-Damas. De ce fait, 15 000 civils ont temporairement dû quitter Dahiyat el-Assad et les zones avoisinantes. Les forces gouvernementales ont par la suite stoppé les avancées à Dahiyat el-Assad. Les groupes d'opposition armés non étatiques se sont emparés d'une partie de la principale route reliant Damas à Homs, qui a ainsi été fermée pendant trois jours. Cette route est officiellement rouverte, mais la circulation continue d'être détournée car les forces gouvernementales tentent de reprendre la région aux groupes d'opposition armés non étatiques. De plus, ces groupes ont continué de bombarder des zones civiles à l'intérieur de la capitale durant la période à l'examen, lançant plus de 80 obus de mortier qui ont tué quelque 38 civils et en ont blessé environ 250 autres.

6. Les forces gouvernementales ont poursuivi leurs attaques aériennes et terrestres à Douma dans la Ghouta orientale durant la période considérée, notamment dans des zones civiles, tuant au moins 25 civils et en blessant au moins 270 autres. Une école de Douma aurait été sérieusement endommagée par les bombardements le 20 septembre. D'autres secteurs de la Ghouta orientale ont également été frappés. Selon des informations, des avions de combat gouvernementaux auraient ainsi frappé un quartier résidentiel de la ville voisine de Harasta le 6 septembre, tuant quatre civils. Le 7 septembre, selon des informations reçues par le HCDH, les forces gouvernementales avaient frappé au voisinage du poste de contrôle de Kaws Bakkin, où des habitants de Zabadani déplacés s'étaient rassemblés, tuant six civils.

7. Le 22 septembre, un accord de cessez-le-feu conditionnel a été conclu pour Zabadani et Madaya dans la province de Rif-Damas et Fouaa et Kefraya dans la province d'Edleb, ainsi que pour des zones voisines. Avant la conclusion de cet accord, les forces progouvernementales et du Hezbollah avaient poursuivi leurs avancées à Zabadani au début du mois de septembre, prenant le contrôle du quartier de Jisr et repoussant les combattants et les habitants vers le centre de la ville. Pendant ces avancées des forces progouvernementales à Zabadani, Madaya et Bouquein ont été bombardées, et des civils ont été tués ou blessés. Dans le même temps, et avant la conclusion du cessez-le-feu, le Jeich el-Fatah (constitué par des groupes d'opposition armés non étatiques et le Front el -Nosra) continuait d'attaquer les deux villages de Fouaa et Kefraya: le 19 septembre, neuf véhicules piégés ont explosé et plus de 1 200 roquettes ont été tirées, tuant 60 personnes et en blessant 300 autres.

8. Après la conclusion de l'accord de cessez-le-feu conditionnel, le 26 septembre, des appareils de combat gouvernementaux ont bombardé Taftanaz, une ville proche de Fouaa et Kefraya visée dans l'accord de cessez-le-feu. Les groupes d'opposition armés non étatiques ont riposté en tirant plus de 20 obus de mortier sur Fouaa et Kefraya. Malgré cela, et alors que les combats se poursuivaient avec la même intensité dans des secteurs voisins, au 14 octobre l'accord de cessez-le-feu tenait toujours. Si l'Organisation des Nations Unies n'est pas partie à cet accord, ses signataires ont prié l'ONU et d'autres acteurs humanitaires de faciliter la mise en œuvre des dispositions humanitaires qu'il contient, notamment en ce qui concerne l'évacuation des blessés graves et les livraisons d'aide humanitaire. Le 2 octobre, l'ONU et ses partenaires ont dû suspendre l'exécution d'une mission humanitaire qu'ils avaient planifiée à l'appui de l'accord de cessez-le-feu en raison de l'insécurité le long de l'itinéraire proposé et de désaccords de dernière minute entre les parties. L'équipe conjointe constituée par l'Organisation et ses partenaires a néanmoins fait tous les préparatifs nécessaires et demeure prête à mettre immédiatement en œuvre les dispositions humanitaires de l'accord lorsque la situation le permettra. Le 12 octobre, mon Envoyé spécial pour la République arabe syrienne, Staffan de Mistura, a exhorté les Gouvernements de la Fédération de Russie et de la République arabe syrienne à autoriser les livraisons de l'aide humanitaire essentielle dans les zones couvertes par l'accord.

9. Les combats se sont poursuivis dans la province d'Edleb durant la période considérée. Jaish al Fatah a pris le contrôle de la base aérienne Abou el -Douhour le 9 septembre, la dernière installation militaire d'Edleb aux mains du Gouvernement. Les habitants de la ville de Douhour et des villages voisins se sont enfuis vers des lieux plus sûrs de la province d'Edleb durant cette avancée. Selon des informations reçues par le HCDH, huit civils ont été tués le 16 septembre lorsque des hélicoptères gouvernementaux ont largué des barils d'explosifs sur le village de Safouhan dans la province d'Edleb. Le 30 septembre, des frappes aériennes gouvernementales auraient touché la ville de Dana au nord-ouest de la province d'Edleb près de la frontière turque, tuant et blessant plusieurs personnes.

10. Dans la province d'Alep, les combats se sont poursuivis dans la ville d'Alep durant la période à l'examen. Les forces gouvernementales et les groupes d'opposition armés non étatiques ont continué à se bombarder mutuellement à l'intérieur de la ville, faisant un certain nombre de victimes parmi les civils. Le 15 septembre, plus de 35 personnes, dont 17 enfants, ont été tuées et quelque 160 autres blessées par les pilonnages effectués par les groupes d'opposition armés non étatiques sur les quartiers de Midan, Salaheddine, Hamdaniyah et Halab al Jadida. Le HCDH a indiqué que dans l'est de la ville d'Alep, plus de 20 civils auraient été tués et des dizaines blessés le 21 septembre lorsque des appareils gouvernementaux auraient tiré des missiles sur un marché et une zone résidentielle du quartier de Chaar. Ailleurs, des affrontements ont éclaté à la fin du mois de septembre entre les unités de protection populaire kurdes et le Front el-Nosra et d'autres groupes d'opposition armés non étatiques dans le quartier d'Al-Sheikh Maksood, qui ont fait de nombreux morts et blessés parmi les civils et temporairement affecté l'accès à l'est de la ville d'Alep. Une trêve a ultérieurement été convenue. Dans le même temps, les forces gouvernementales ont également poursuivi leurs frappes aériennes dans d'autres parties de la province d'Alep : par exemple, les 24 et 25 septembre, des attaques contre la ville d'Hayyan auraient tué deux civils.

11. L'État islamique d'Iraq et du Levant (EEIL) a continué de lancer des attaques dans diverses provinces durant la période à l'examen. Dans le nord de la province d'Alep, il a maintenu son offensive contre la ville de Marea, sous le contrôle de groupes d'opposition armés non étatiques. Ces groupes ont toutefois continué à résister à cette offensive. Les frappes aériennes de la coalition internationale contre l'EIIL ont également continué dans ce secteur. Le 9 octobre, l'EIIL a progressé au sud de Marea, s'emparant de plusieurs villages dans le secteur d'Handarat dans la campagne d'Alep, près de la ville d'Alep.

12. Dans la province de Hassaké, l'EIIL a fait exploser deux véhicules piégés le 14 septembre : le premier a explosé dans la région de Mahatta et aurait tué au moins 12 civils, le second dans le district de Khachman, tuant 5 personnes et en blessant 70. Dans la province de Damas, l'EIIL a, durant les premiers jours de septembre, lancé une offensive contre le district d'Assali au sud de la ville de Damas (qui était l'objet d'un accord local entre le Gouvernement et les groupes d'opposition armés non étatiques), prenant le contrôle de près de la moitié du district. Au début du mois d'octobre, l'EIIL et des groupes d'opposition armés non étatiques auraient conclu un accord de cessez-le-feu concernant Assali et Qadam. À Homs, l'EIIL a également progressé dans l'est de la province, prenant le contrôle du champ pétrolifère de Jazal à l'issue de combats contre les forces gouvernementales. Jazal était le dernier champ pétrolifère sous le contrôle du Gouvernement.

13. Dans la province de Deir el-Zor, les combats entre l'EIIL et les forces gouvernementales se sont poursuivis. L'EIIL a continué d'attaquer la base de l'armée de l'air de Deir el-Zor, s'emparant de deux camps militaires proches de l'aéroport, et aurait tué des dizaines de soldats des forces progouvernementales le 10 septembre. Dans le même temps, le 28 septembre, une frappe aérienne du Gouvernement syrien au voisinage de la place du marché de Mayadin a causé la mort d'au moins 40 civils.

14. Dans la province de Hama, d'intenses combats ont été signalés entre le Front el-Nosra et les groupes d'opposition armés non étatiques et les forces gouvernementales en divers lieux le long de la plaine du Ghab. Les groupes d'opposition armés non étatiques et le Front el-Nosra ont avancé sur les positions du Gouvernement le long de la plaine du Ghab, en particulier dans les montagnes surplombant la campagne de la province de Lattaquié. Des informations reçues indiquent que les groupes d'opposition armés non étatiques auraient pilonné la ville de Lattaquié, notamment l'aéroport Bassel el-Assad. Au début d'octobre, les forces gouvernementales ont lancé une offensive majeure dans le nord de la province de Hama pour regagner le terrain perdu. Environ 7 000 familles du nord de la province et de secteurs voisins de la province d'Edleb ont de ce fait été déplacées. Dans la province de Lattaquié, les forces gouvernementales ont lancé une offensive contre les positions des groupes armés non étatiques, s'emparant de plusieurs villages et attaquant la grande ville de Salma. Des frappes aériennes de la Fédération de Russie ont également été signalées dans le secteur.

15. Dans la province de Homs, les forces gouvernementales ont continué leurs bombardements aériens des zones tenues par les groupes armés non étatiques dans la campagne au nord de la province. Des sources du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme (HCDH) ont par exemple signalé que les forces gouvernementales avaient mené six raids aériens contre la ville de Rastan le 1er septembre, tuant au moins cinq personnes. Les groupes d'opposition armés non étatiques ont riposté en lançant l'opération « 150 roquettes et missiles » contre des positions gouvernementales au nord de Rastan. Dans le même temps, dans la ville de Homs, un véhicule piégé a explosé dans le quartier d'al-Zahra' contrôlé par le Gouvernement, tuant un civil et en blessant 15 autres le 22 septembre. Le 23 septembre, un autre véhicule piégé a explosé à un rond -point du quartier d'Akrama, tuant deux civils et en blessant sept autres. Durant la dernière semaine de septembre, des roquettes auraient touché les quartiers de Zahra, Abbassiyé, Walid et Wadi al-Dahab contrôlés par le Gouvernement, faisant deux morts.

16. Dans le district Waar de la ville d'Homs, de multiples bombardements et attaques des forces progouvernementales dans les secteurs voisins ont été signalés en septembre. Les 4 et 5 septembre, cinq civils ont été tués et plus de huit blessés par des obus tirés par des groupes progouvernementaux. Le 26 septembre, un missile sol-sol tiré par les forces gouvernementales est tombé sur un terrain de jeu, près d'un orphelinat, tuant 22 civils dont 14 enfants. Le 30 septembre, des roquettes sol-sol ont touché une école utilisée comme abri pour personnes déplacées, faisant une victime civile. Depuis le 31 août, les forces progouvernementales ont fermé toutes les routes menant à Waar. Les parties ont continué à négocier un accord local mais les fournitures humanitaires n'ont pas été autorisées à entrer dans le district de Waar.

17. Des combats ont aussi été signalés en septembre dans les provinces méridionales de la République arabe syrienne. Dans la province de Soueïda, un engin explosif improvisé aurait explosé le 4 septembre dans la ville de Soueïda près du convoi du cheik Wahid Al-Balous (un dirigeant spirituel druze et chef du mouvement « Rijal el-Karama »), tuant plusieurs personnes dont Al-Balous, et en blessant beaucoup d'autres. L'attaque initiale a été suivie par l'explosion non loin de là d'un second engin explosif improvisé au voisinage de l'hôpital national, où les blessés du premier attentat avaient été transportés. Au total, au moins 33 personnes ont été tuées lors des deux attentats. Ceux-ci ont été suivis d'une période de troubles dans la ville de Soueïda, qui ont amené les forces gouvernementales à fermer toutes les principales routes d'accès à la ville pendant trois jours. Dans la province de Quneitra, les groupes d'opposition armés non étatiques auraient avancé sur les positions du Gouvernement dans le nord-est de la province, l'objectif étant d'ouvrir une ligne d'approvisionnement allant de Quneitra à la Ghouta occidentale dans la province de Rif-Damas.

18. S'agissant de la province de Deraa, le HCDH a signalé que les forces gouvernementales avaient tiré un missile sol-sol sur un quartier résidentiel de Deraa el-Mahata le 11 septembre, tuant six membres de la même famille, dont trois enfants. Le 16 septembre, au moins 20 civils auraient été tués et au moins 40 autres blessés lorsque des forces gouvernementales ont largué des barils d'explosifs sur un marché à Busra al-Sham. La veille, le 15 septembre, le Front Sud de l'Armée syrienne libre avait annoncé l'arrêt de son offensive contre Deraa, après avoir tenté en vain, par trois fois, de s'emparer de la ville durant les mois précédents.

19. Les déplacements ont continué dans l'ensemble de la République arabe syrienne en septembre et au début du mois d'octobre, plus de 80 000 habitants de divers secteurs des provinces de Homs, Alep, Rif-Damas, Deir el-Zor, Hama et Edleb ayant été déplacés en raison des combats. Selon des informations, le Gouvernement de la République arabe syrienne aurait, au début du mois de septembre, forcé quelque 1 000 habitants de Bloudan et Maamoura Ichaat à s'installer dans la ville de Bouquein. Depuis le milieu du mois d'août, quelque 2 200 familles déplacées - de réfugiés palestiniens à 80 % - qui se trouvaient dans d'autres parties de la province de Rif-Damas sont revenues à Husseiniyé.

20. Les infrastructures civiles ont continué d'être prises pour cibles durant la période à l'examen. Quelque 2,1 millions de personnes ont été privées d'eau pendant 17 jours à Alep en raison de coupures effectuées par les groupes d'opposition armés non étatiques et d'une dégradation générale des infrastructures. Du fait de cette pénurie, de nombreuses personnes ont bu de l'eau non traitée et insalubre. Le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) a utilisé des camions-citernes pour approvisionner quotidiennement quelque 700 000 personnes en eau durant cette période. Dans le même temps, dans la province de Raqqa, l'EIIL aurait coupé l'électricité de la ville de Raqqa pendant deux semaines en septembre, au motif que les habitants ne payaient pas leurs factures d'électricité. La distribution d'électricité aurait continué d'être assurée dans les zones rurales pour permettre l'irrigation des terres agricoles. Séparément, dans la province de Raqqa, face à une pénurie d'eau potable, l'UNICEF a livré du matériel pour traiter 100 millions de litres d'eau.

21. Le patrimoine culturel a continué d'être pris pour cible durant la période à l'examen. Au début d'octobre, le Directeur des antiquités de la République arabe syrienne a confirmé que l'arc de triomphe de Palmyre, un monument du IIe siècle, avait été détruit par l'EIIL.

22. Outre l'accord de cessez-le-feu susmentionné concernant Zabadani, Madaya, Fouaa, Kefraya et les zones avoisinantes, une évolution est intervenue concernant plusieurs accords locaux. Le 17 septembre, un accord a été conclu entre le Gouvernement de la République arabe syrienne et des représentants de Tiba, une ville située au sud de Damas. En application de cet accord, la route entre Tiba et Khan Dannoun a été rouverte et de nombreux habitants de Tiba qui avaient été déplacés sont rentrés chez eux. À Barzé, l'accord local a été mis à l'épreuve lorsque les forces gouvernementales ont tué un civil et en ont arrêté un autre le 2 septembre. Les groupes d'opposition armés non étatiques ont riposté en bloquant la route traversant le district qui mène à l'hôpital de Tichrin utilisée par le Gouvernement et la population civile. Un accord de réconciliation aurait toutefois été conclu à la mi-septembre et la route d'accès à la ville rouverte à la circulation des civils.

23. À Qoudsaya, dans la province de Rif-Damas, les négociations en vue de la réconciliation se sont poursuivies et les groupes d'opposition armés non étatiques auraient accepté de cesser le combat le 9 septembre, le Gouvernement syrien approvisionnant la ville en farine de froment et en légumes en contrepartie. Selon certaines informations, le 13 septembre, les employés du Gouvernement et du secteur privé ainsi que les étudiants pouvaient entrer et sortir de Qoudsaya. À Moadimayet, où un premier accord local avait été conclu, les forces gouvernementales ont pilonné le secteur à maintes reprises durant la période à l'examen, touchant notamment un centre de distribution de pain et tuant deux personnes le 2 septembre, et les passages aux abords des points de contrôle du Gouvernement ont fait l'objet de restrictions.

24. Mon Envoyé spécial a poursuivi ses consultations avec ses interlocuteurs internationaux, régionaux et syriens, y compris le Gouvernement de la République arabe syrienne et les groupes armés non étatiques et d'opposition politique, pour appuyer les groupes de travail thématiques et constituer un groupe de contact. Ces consultations ont eu lieu dans la région avec la Ligue des États arabes et l'Union européenne, et en marge du débat de haut niveau de l'Assemblée générale. Le 22 septembre, mon Envoyé spécial a annoncé la nomination des facilitateurs devant diriger les quatre groupes de travail.

B. Droits de l'homme

25. L'ampleur et la gravité des abus et des violations du droit humanitaire international et des droits de l'homme sont demeurées inquiétantes au cours de la période considérée. Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme a continué de recevoir des plaintes et de recenser les cas de détention arbitraire, de violence sexuelle et sexiste, de torture et autres mauvais traitements, ainsi que de décès dans les centres de détention du Gouvernement. Les victimes interrogées par le Haut-Commissariat ont indiqué qu'elles avaient subi des tortures et autres mauvais traitements dans l'aéroport militaire de Mezzeh à Damas et dans les services de renseignement de l'armée de l'air dans le quartier de Bab Touma, qui relèvent tous les deux du Ministère de la défense. Des témoins ont également mentionné d'autres détenus, y compris des femmes, torturés dans ces établissements. Le Haut-Commissariat a également reçu des allégations d'anciens détenus selon lesquelles ils auraient été témoins de violences sexuelles et sexistes et de décès en détention à la suite de tortures à la section Palestine du Service du renseignement militaire, à Damas. Le Haut-Commissariat n'a constaté aucun signe indiquant que le Gouvernement enquêtait sur les allégations de crimes commis par ses forces.

26. Les groupes d'opposition armés non étatiques et certains groupes terroristes ont également emprisonné des civils dans les zones qu'ils contrôlent. Des dizaines de résidents de la province d'Edleb ont été arbitrairement arrêtés et détenus par le Front el-Nosra, au cours de la période considérée. Par exemple, le 2 septembre, des combattants du Front el-Nosra ont détenu un nombre inconnu de manifestants à Khan Cheikhoun alors qu'ils protestaient contre l'arrestation d'un chef religieux local.

27. Le Haut-Commissariat a reçu des informations faisant état de l'exécution de sept hommes, par l'État islamique d'Iraq et du Levant, le 22 septembre, dans la province de Homs, en raison de leur orientation sexuelle. Le 20 septembre, l'État islamique d'Iraq et du Levant a exécuté une femme dans la province de Deir el-Zor parce qu'elle aurait coopéré avec des groupes d'opposition armés non étatiques. Par ailleurs, le 24 septembre, l'État islamique d'Iraq et du Levant aurait tué trois Assyriennes détenues en captivité et qui avaient été arrêtées en même temps que plus de 200 autres Assyriens en février 2015, à Tell el-Tamr dans la province de Hassaké.

28. Le 10 septembre, des combattants du Front el-Nosra, ainsi que d'autres groupes d'opposition armés non étatiques, auraient exécuté plus de 50 soldats des forces gouvernementales capturés à la suite de la prise de contrôle de la base militaire d'Abou el-Dohour dans la province d'Edleb.

29. Lors de mon allocution devant l'Assemblée générale à New York, le 28 septembre, j'ai demandé que la situation en République arabe syrienne soit déférée à la Cour pénale internationale.

C. Intervention humanitaire

30. En juin, les organismes humanitaires des Nations Unies et leurs partenaires ont continué de venir en aide à des millions de personnes en faisant appel à tous les moyens, aussi bien depuis l'intérieur du pays qu'à partir des pays voisins, conformément aux résolutions 2165 (2014) et 2191 (2014) du Conseil de sécurité. Le Programme alimentaire mondial (PAM) a fourni une aide alimentaire à plus de quatre millions de personnes dans 12 provinces. L'Organisation mondiale de la Santé (OMS) a distribué des médicaments et des fournitures nécessaires pour plus de 750 000 traitements dans huit provinces. L'UNICEF a fourni un appui multisectoriel à 2,5 millions de personnes, y compris dans le cadre du lancement de la campagne « rentrée des classes » ciblant environ 2,2 millions d'enfants d'âge scolaire et d'autres programmes ciblant 700 000 enfants déscolarisés grâce à des initiatives d'apprentissage informel. Le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a fourni des produits de première nécessité et des services de protection à environ 175 000 personnes dans trois provinces. Le Fonds des Nations Unies pour la population a fourni, par l'intermédiaire de partenaires d'exécution, 315 000 services de santé en matière de procréation et de lutte contre la violence sexiste, y compris des soins obstétriques d'urgence et des conseils en matière de planification familiale, à 106 000 personnes. L'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture a fourni une aide à près de 50 000 personnes dans les domaines de l'alimentation et de l'agriculture. L'Organisation internationale pour les migrations a distribué des produits de première nécessité à plus de 40 000 personnes. L'Office de travaux et de secours des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) a fourni une assistance à plus de 324 000 réfugiés palestiniens. Le Gouvernement syrien a continué de fournir des services de base dans les zones qu'il contrôle et, bien souvent, au-delà de ces zones.

31. Les livraisons transfrontières se sont poursuivies au cours de la période considérée. Au 30 septembre, 189 convois de l'ONU et de ses partenaires d'exécution étaient arrivés en République arabe syrienne en provenance de Turquie (127 convois) et de Jordanie (62 convois), conformément aux dispositions des résolutions 2165 (2014) et 2191 (2014) du Conseil de sécurité. Une aide alimentaire a ainsi été fournie à plus de 2,1 millions de personnes; des produits non alimentaires à 1,5 million de personnes; de l'eau et des produits d'hygiène à plus d'un million de personnes; et des fournitures médicales pour près de 2,5 millions de traitements dans les provinces d'Alep, Edleb, Deraa, Hama, Lattaquié et Quneitra. Comme le prévoient les résolutions 2165 (2014) et 2191 (2014), le Gouvernement syrien a été préalablement informé des envois par l'ONU, et notamment de la nature de leur contenu, de leur destination et du nombre de bénéficiaires.

32. Le Mécanisme de surveillance des Nations Unies a poursuivi ses activités en Jordanie et en Turquie. Il a contrôlé 14 convois humanitaires des Nations Unies au cours de la période visée dans le présent rapport, soit 329 camions, afin de confirmer le caractère humanitaire de chaque cargaison, et a avisé les autorités syriennes de chaque convoi. Il a continué de bénéficier d'une excellente coopération de la part des Gouvernements jordanien et turc.

33. Un convoi interinstitutions devant traverser les lignes de front pour se rendre à Houla a été effectué en trois phases : les 22 et 29 septembre, puis le 8 octobre du fait d'un retard dû à l'insécurité. Dans plusieurs secteurs, une aide a été apportée à 19 500 familles, dont 12 000 dans des zones difficiles d'accès. Les autorités gouvernementales ont interdit le chargement d'eau, d'articles sanitaires et d'hygiène pour tous et d'un certain nombre d'articles médicaux.

34. Les organisations non gouvernementales internationales aussi bien que syriennes ont continué de fournir une assistance multisectorielle dans le pays en septembre, notamment des services, comme au cours des mois précédents.

Accès humanitaire

35. L'acheminement de l'aide humanitaire à un grand nombre des 12,2 millions de personnes dans le besoin en République arabe syrienne est demeuré extrêmement difficile dans de nombreuses régions en raison de la poursuite des combats, de l'insécurité ainsi que des manœuvres délibérées d'obstruction par les parties, y compris de procédures administratives lourdes.

36. L'accès aux 4,6 millions de personnes qui vivent dans des régions difficiles d'accès demeure une préoccupation majeure. En septembre, les organismes des Nations Unies et leurs partenaires sont parvenus à atteindre 31 (soit 24 %) des 127 localités difficiles d'accès. Ils ont pu apporter une aide alimentaire à quelque 275 000 personnes dans 16 localités, un soutien sanitaire dans 13 localités (environ 90 000 traitements médicaux), de l'eau et des produits d'assainissement et d'hygiène dans sept localités (pour plus de 358 000 personnes) et des articles de première nécessité dans sept localités (pour plus de 60 000 personnes). Plus de la moitié de la population des régions difficiles d'accès se trouve dans des zones contrôlées par l'État islamique d'Iraq et du Levant, dans lesquelles l'Organisation des Nations Unies n'a pas livré d'aide en septembre, mis à part le matériel d'épuration de l'eau fourni par l'UNICEF.

37. Les combats qui se poursuivent dans plusieurs provinces ont également nui au bon acheminement de l'aide humanitaire et empêché les populations d'accéder aux services essentiels. Par exemple, les combats et l'insécurité ont empêché la livraison, en septembre, de l'aide alimentaire indispensable à la survie de plus de 1,2 million de personnes dans certaines zones rurales des provinces de Rif-Damas, de Homs et de Hama. Dans le même temps, des livraisons de l'Organisation des Nations Unies en provenance de Jordanie et transitant par le point de passage frontalier de Ramtha, ont été suspendues entre le 9 et le 16 septembre en raison de la présence de mines terrestres sur la route utilisée par les convois, lesquelles ont ensuite été neutralisées. Le poste frontière de Bab el-Haoua a été temporairement fermé entre le 10 et le 13 septembre suite à la mort d'un soldat turc à proximité, après que des soldats turcs patrouillant en territoire turc ont essuyé des coups de feu. Dans la province d'Alep, les combats fin septembre entre les groupes de Protection du peuple kurde et d'autres groupes d'opposition armés non étatiques, dans le quartier Cheikh-Maqsoud, ont entraîné la fermeture temporaire de l'une des principales voies d'accès reliant l'est de la ville d'Alep au poste frontière de Bab el-Salam. La voie d'accès a ensuite été à nouveau ouverte.

38. L'ingérence délibérée des parties au conflit et leurs restrictions à la liberté de circulation ont également continué d'empêcher l'acheminement de l'aide. Le PAM n'est toujours pas en mesure de prêter assistance à quelque 720 000 personnes dans le besoin qui se trouvent dans les zones contrôlées par l'État islamique d'Iraq et du Levant car les projets de fourniture d'assistance dans ces zones ont dû être suspendus en raison de l'impossibilité de travailler de manière indépendante et d'assurer le suivi des activités. Entre-temps, les autorités syriennes ont refusé l'inclusion de 37 trousses d'accouchement ainsi que d'eau et de produits d'assainissement et d'hygiène pour tous dans les convois interinstitutions de l'Organisation des Nations Unies à destination de Houla (province de Homs), ce qui aurait bénéficié à 1 850 femmes enceintes. Dans la province d'Edleb, la fourniture prévue de vivres à 42 500 personnes dans la ville d'Edleb a été suspendue en raison d'ingérences et de l'absence d'accord avec des groupes d'opposition armés non étatiques sur la distribution de farine de blé.

39. Le Programme alimentaire mondial (PAM) n'a pu effectuer aucune livraison par le passage frontalier de Nousseibin/Qamichli en septembre en raison de retards dans la délivrance de l'autorisation nécessaire par les autorités turques du fait de l'insécurité dans le nord-est de la République arabe syrienne. Les autorités syriennes avaient autorisé les convois à passer la frontière. Quoi qu'il en soit, le Programme alimentaire mondial a achevé la livraison de 90 % de l'aide prévue pour la province de Hassaké en septembre en utilisant des stocks expédiés de Turquie en août avec l'assentiment des Gouvernements turc et syrien. Le 9 octobre, les autorités turques ont autorisé le passage de convois du PAM par ce même point, et l'UNICEF a également été autorisé à utiliser ce passage pour acheminer l'équivalent de 2,5 millions de dollars de fournitures de survie.

40. Au 30 septembre, 23 demandes interorganisations sur les 85 déposées en 2015 par l'Organisation des Nations Unies avaient été approuvées en principe par le Ministère syrien des affaires étrangères. 46 étaient en attente d'approbation, et trois avaient été mises en attente par l'Organisation des Nations Unies en raison de l'insécurité. Les 13 autres avaient été soumises précédemment mais ont par la suite été remplacées par des demandes plus récentes. Neuf demandes initiales ont été mises en attente par l'Organisation des Nations Unies pour des raisons de sécurité et en ce qui concerne les quatre autres, aucune réponse n'ayant été reçue du Gouvernement syrien dans un délai de trois mois, elles ont fait l'objet d'une nouvelle soumission. Le 30 septembre, l'Organisation des Nations Unies a demandé l'envoi de 48 convois interorganisations supplémentaires au cours des trois mois suivants, dans des zones difficiles d'accès et assiégées.

41. Sur les 23 demandes de convois approuvées en principe par le Ministère syrien des affaires étrangères, 10 convois ont été livrés entièrement et un partiellement. Sur les 12 demandes de convois approuvées en principe, cinq n'ont pu être honorées, faute d'autorisation des forces de sécurité du Gouvernement syrien; deux d'entre elles sont en attente du fait de l'absence d'accord entre l'Organisation des Nations Unies, le Croissant-Rouge arabe syrien (SARC) et le Gouvernement sur les voies d'accès; deux autres sont dans l'impasse car les groupes d'opposition armés non étatiques n'ont pas donné de garanties de libre passage; et une demeure en suspens en raison de la situation en matière de sécurité. Les deux autres convois approuvés en principe sont en préparation.

42. Outre les convois interorganisations, plusieurs demandes de convois d'un seul organisme sont toujours en attente d'approbation de la part des autorités syriennes. Six demandes présentées par le PAM n'avaient toujours pas été approuvées par le Gouvernement syrien en raison des conditions de sécurité dans plusieurs localités dans les provinces de Deraa et Rif-Damas au cours de la période considérée, empêchant l'acheminement de l'aide à 33 000 personnes. En septembre, le HCR comptait neuf lettres de facilitation de la circulation des produits de secours de base qui n'avaient pas été approuvées par les autorités syriennes en raison de l'insécurité aux emplacements demandés. Une mission de l'UNICEF devant traverser la ligne de front pour se rendre à Moudamiyet dans la province de Rif-Damas, prévue du 15 au 24 septembre pour acheminer des fournitures scolaires et des secours destinées à 10 000 enfants était toujours en attente d'approbation au 14 octobre.

43. Toutes les activités de l'UNRWA dans la ville de Yarmouk sont restées suspendues au cours de la période considérée. La dernière mission en date effectuée par l'Office à Yarmouk remonte au 28 mars. La voie de passage entre Yarmouk et Yalda est une zone instable contrôlée par des groupes d'opposition armés non étatiques. Des restrictions de plus en plus importantes sur la voie de passage ont été signalées du 19 au 21 septembre, y compris l'interdiction aux personnes de sexe masculin âgées de plus de 16 ans de passer par le poste de contrôle. Ces restrictions ont par la suite été levées, même si l'accès des civils à la voie de passage demeure imprévisible et risqué. L'Office a reçu l'autorisation d'effectuer six missions à Yalda au cours de la période considérée mais uniquement pour fournir des services de santé, suite à une épidémie présumée de typhoïde. Il n'a pas été autorisé à fournir d'aide alimentaire ou autre faisant pourtant cruellement défaut. Les autorités syriennes estiment que toute aide humanitaire ou fourniture de services supplémentaire par l'UNRWA serait superflue car les besoins des civils dans la zone sont déjà suffisamment pourvus. D'autres organisations humanitaires ont, semble-t-il, été autorisées à poursuivre leurs opérations et à fournir une assistance dans les localités de Babila, Beit Sahm et Yalda. L'accord local conclu dans ces trois secteurs est respecté et les autorités y laissent entrer chaque jour une petite quantité de marchandises.

44. Aucune modification majeure n'a été signalée en septembre dans les procédures administratives imposées par le Gouvernement syrien pour la livraison de l'aide humanitaire. Les procédures en vigueur ont continué de retarder ou de limiter l'acheminement de l'aide fournie par les organismes des Nations Unies et leurs partenaires. En ce qui concerne plus précisément l'importation de produits nutritionnels et de santé, une nouvelle procédure a été promulguée, stipulant que le dédouanement de ces produits au port d'entrée nécessitait également une autorisation du Ministère de la santé. C'est ce qui a retardé le dédouanement de quatre cargaisons contenant des compléments nutritionnels en dépit de l'autorisation préalable délivrée par le Ministère des affaires étrangères.

45. Les progrès se sont poursuivis en ce qui concerne la délivrance de visas aux membres du personnel des Nations Unies. En septembre, le Gouvernement syrien a approuvé 120 visas destinés au personnel des Nations Unies de 11 bureaux différents, dont 36 nouveaux visas et 84 renouvellements. Quatre-vingt-dix pour cent des visas approuvés en septembre ont été délivrés au cours de la période convenue de 15 jours ouvrables. Au 11 octobre, 31 demandes de visas émanant de l'Organisation des Nations Unies (nouveaux visas ou renouvellements) étaient encore en instance, seules neuf d'entre elles ayant dépassé la période convenue de 15 jours ouvrés. Aucune demande de visa n'a été rejetée en septembre. Le nombre total de demandes rejetées en 2015 s'élève à 39, compte non tenu des quatre fonctionnaires des Nations Unies déclarés persona non grata en février.

46. En tout 15 organisations non gouvernementales internationales sont autorisées à travailler en Syrie. Elles continuent d'être confrontées à une série d'obstacles administratifs et de restrictions qui ont des incidences sur leur capacité de fonctionner. Ainsi, elles restent limitées dans leurs possibilités de nouer des partenariats avec des organisations humanitaires nationales, d'ouvrir des antennes, d'effectuer des missions, de participer à des convois interorganisations et de procéder à des évaluations des besoins en toute indépendance. Six demandes de visas pour des membres du personnel de ces organisations étaient toujours en instance au 30 septembre, quatre d'entre elles ayant été soumises en août ou septembre. Quatre demandes de visas ont été approuvées en septembre, dont une présentée au cours du même mois. Le Coordonnateur résident et Coordonnateur de l'action humanitaire continue de mener des discussions avec le Gouvernement syrien concernant le cadre opérationnel de délivrance de visas aux organisations non gouvernementales internationales.

47. Quatre autres organisations non gouvernementales nationales ont été autorisées par le Gouvernement syrien à établir des partenariats avec des organismes des Nations Unies en septembre. Deux organisations non gouvernementales nationales ont été autorisées à opérer dans la province de Rif-Damas, une dans la province d'Alep et une autre dans la province de Damas. On compte actuellement 135 organisations non gouvernementales nationales autorisées à établir des partenariats avec des organismes des Nations Unies et qui opèrent par l'intermédiaire de 218 antennes.

Zones assiégées

48. Sur les 4,6 millions de personnes vivant dans des zones d'accès difficile, quelque 422 000 continuaient d'être assiégées en République arabe syrienne, dont 167 500 par les forces gouvernementales dans la Ghouta orientale et à Daraya, 26 500 par des groupes armés non étatiques à Noubl et Zahra, et 228 000 par l'EIIL dans les quartiers ouest de Deir el -Zor sous contrôle gouvernemental.

49. Au cours de la période considérée, les parties au conflit ont continué de limiter fortement l'accès aux zones assiégées. En septembre, quelque 7 800 personnes ont obtenu une assistance en matière d'approvisionnement en eau et de services d'assainissement et d'hygiène dans l'une des localités assiégées (1,8 %). Aucune zone assiégée n'a reçu de vivres ou d'autres secours humanitaires. L'acheminement de marchandises par les circuits officiels demeure en grande partie bloqué, d'où les prix élevés pratiqués dans les zones assiégées pour les produits de base qui y sont livrés via des filières non officielles et irrégulières. La liberté de circulation reste soumise à d'importantes restrictions, même si certains groupes, notamment les étudiants et les membres des conseils de réconciliation, sont parfois autorisés à quitter les zones assiégées et à y revenir.

50. Dans la Ghouta orientale (province de Rif-Damas), quelque 163 500 personnes sont toujours assiégées par les forces gouvernementales dans plusieurs localités. En septembre, les organismes des Nations Unies n'ont pu acheminer aucune aide dans les zones assiégées de la Ghouta orientale.

51. À Daraya (province de Rif-Damas), environ 4 000 personnes restent assiégées par les forces gouvernementales. Les organismes des Nations Unies n'ont pu acheminer aucune aide dans ces zones au cours de la période considérée. Les populations de Daraya n'ont bénéficié d'aucune assistance des organismes des Nations Unies depuis octobre 2012.

52. À Noubl et Zahra (province d'Alep), environ 26 500 personnes sont toujours assiégées par des groupes d'opposition armés non étatiques. Les organismes des Nations Unies n'ont pu acheminer aucune aide dans ces deux villages en septembre. Toutefois, d'après des témoignages concordants de sources fiables qui continuent d'être recueillis, l'accès à cette enclave s'est amélioré, tant pour la circulation des marchandises que pour celle des personnes.

53. Dans les quartiers ouest de la ville de Deir el-Zor sous contrôle gouvernemental, quelque 228 000 personnes sont assiégées par l'EIIL. En partenariat avec le Croissant-Rouge arabe syrien, l'UNICEF a distribué des fournitures d'hygiène et mené des activités de promotion de l'hygiène à l'intention de quelque 7 800 personnes vivant dans des abris pour déplacés situés dans les parties assiégées de la ville.

Libre passage de fournitures, personnel et matériel médicaux

54. L'accès aux services médicaux a continué d'être entravé par l'insécurité et les restrictions imposées par les parties au conflit, ce qui s'est traduit par une augmentation des prix des médicaments, une réduction de la production pharmaceutique et une pénurie de fournitures médicales sur les marchés locaux. La pénurie de personnel médical qualifié et la dégradation des services essentiels ont en outre réduit l'accès à des soins médicaux adéquats. La fourniture de services médicaux d'urgence vitale, en particulier les services de pédiatrie et de santé maternelle et les vaccinations de routine, suscite de graves préoccupations dans les provinces du nord-est, les provinces de Deraa, Edleb, Hama et Alep et dans les zones d'accès difficile et les zones assiégées de la province de Rif-Damas. Selon des évaluations effectuées récemment par le Ministère syrien de la santé, avec le concours de l'OMS et de l'UNICEF, le taux de vaccination de routine en Syrie a chuté, passant de 95 % en 2010 à 64 % en 2014 à l'échelle nationale et ne dépassant guère 20 % à certains endroits.

55. En septembre, l'OMS n'a plus sollicité l'autorisation du Gouvernement syrien pour expédier des fournitures dans des zones d'accès difficile et des zones assiégées. Ses demandes concernant l'acheminement d'une aide médicale par un convoi interorganisations à destination de Zabadani (province de Rif-Damas) et de Fouaa et Kafraya et les zones environnantes (province d'Edleb) ont été approuvées par le Ministère des affaires étrangères à la suite de l'accord de cessez-le-feu qui avait été signé récemment dans ces localités. Toutefois, l'opération n'est toujours pas effectuée pour des raisons de sécurité et en raison des désaccords qui persistent entre les parties à l'accord. Deux demandes concernant la livraison de trousses médicales d'intervention d'urgence et de matériel chirurgical ainsi que la tenue de séances d'hémodialyse à Douma (Rif-Damas) demeurent sans réponse. Parallèlement, l'ONU et ses partenaires du secteur de la santé continuent d'avoir beaucoup de mal à livrer des fournitures médicales et à assurer des services de prévention et de soins dans les zones contrôlées par l'EIIL.

56. En septembre, l'organisation Médecins pour les droits de l'homme a recensé six attaques contre des installations médicales, qui ont toutes été le fait des forces gouvernementales. Deux de ces attaques ont eu lieu dans chacune des provinces d'Alep et de Deir el-Zor et une dans chacune des provinces d'Edleb et de Rif-Damas. L'organisation a également enregistré la mort de neuf membres du personnel médical qui tous ont été délibérément pris pour cibles ou tués dans l'exercice de leurs fonctions. Huit d'entre eux ont péri dans les bombardements effectués par les forces gouvernementales syriennes et un médecin a été exécuté par l'EIIL. Trois ont été tués dans chacune des provinces de Damas et de Rif -Damas, et un dans chacune des provinces de Deir el-Zor, Edleb et Raqqa.

Sûreté et sécurité du personnel et des locaux

57. Le 29 septembre, trois membres du personnel d'une organisation non gouvernementale syrienne ont été tués au cours d'une attaque contre une installation médicale à Kafr Batna (province de Rif -Damas).

58. Le 25 septembre, il y a eu un échange de coups de feu devant les locaux du HCR à Qamichli et cinq blessés civils auraient été blessés

59. Le 15 septembre, un obus de mortier a touché un espace d'accueil des enfants animé par l'UNICEF à Alep, tuant six enfants et en blessant deux. Deux agents humanitaires ont également été blessés à cette occasion. Le même jour, un centre communautaire financé par le HCR à Alep a été touché par plusieurs obus de mortier et a été obligé de fermer.

60. Le 3 septembre, un véhicule blindé du HCR a été pris au milieu d'une manifestation à Alep. Les manifestants ont tenté d'attaquer le véhicule et lancé des slogans hostiles à l'Organisation des Nations Unies. Les forces gouvernementales sont intervenues et le véhicule a pu quitter les lieux en toute sécurité.

61. Trente-six fonctionnaires des Nations Unies, dont 31 de l'UNRWA, un du Programme des Nations Unies pour le développement, trois du HCR et un de l'UNICEF, continuent d'être détenus ou portés disparus. Le nombre total des agents humanitaires tués dans le conflit depuis mars 2011 est de 81, dont 17 fonctionnaires des Nations Unies, 48 membres du personnel et volontaires du Croissant-Rouge arabe syrien, 8 volontaires et membres du personnel de la Société palestinienne du Croissant-Rouge et 8 membres du personnel d'organisations non gouvernementales internationales. Quinze de ces 81 agents humanitaires ont été tués depuis le 1er janvier 2015.

III. Observations

62. Après près de cinq années de combats, la situation en République arabe syrienne continue d'être caractérisée par un mépris total pour le droit international des droits de l'homme et le droit international humanitaire, notamment en ce qui concerne les civils, en particulier les femmes et les enfants, dans le contexte des hostilités. Les parties au conflit mènent des attaques, imposent le siège à des communautés sans défense, attaquent des installations protégées, telles que des écoles et des hôpitaux, tuent sommairement des civils et commettent des actes qui constituent des formes de torture et de mauvais traitements. Les graves violations sont désormais la norme dans plusieurs parties de la République arabe syrienne, souvent sans que personne n'en parle ou n'y prête attention.

63. Je condamne vivement la pratique des attaques aveugles et disproportionnées par n'importe quelle partie au conflit, notamment par l'usage de barils explosifs, de l'artillerie lourde, de mortiers et d'autres armes explosives dans des zones densément peuplées. L'usage d'armes explosives dans les zones peuplées aura de graves incidences humanitaires à long terme en Syrie, du fait de la destruction des logements et des infrastructures essentielles dont dépendent les populations civiles. Ces attaques doivent cesser immédiatement. Ceux qui commettent ces graves violations du droit international des droits de l'homme et du droit international humanitaire doivent répondre de leurs actes. Je réitère mon appel pour que la situation en République arabe syrienne soit renvoyée devant la Cour pénale internationale.

64. Outre le conflit et l'insécurité qui règnent dans le pays, les efforts visant à fournir une assistance à ceux qui en ont le plus besoin continuent d'être en butte à des retards et à des obstacles. Toutefois, je me félicite des progrès accomplis récemment en ce qui concerne la délivrance, par le Gouvernement syrien, de visas pour les membres du personnel des Nations Unies. Je demande instamment que les progrès se poursuivent dans ce domaine et soient suivis de toute urgence de progrès sensibles en ce qui concerne l'acheminement des convois interorganisations à destination des localités d'accès difficile et des zones assiégées. Les agents humanitaires doivent être autorisés à s'acquitter de leur mission sans aucune entrave et les parties doivent accorder rapidement aux organismes humanitaires l'accès aux populations touchées dans l'ensemble du pays et leur faciliter la tâche. Grâce à des pressions accrues et soutenues des membres du Conseil de sécurité et d'autres États Membres, l'ONU et ses partenaires seraient en mesure de toucher un plus grand nombre de personnes dans le besoin.

65. Malgré les exigences du Conseil de sécurité, les dispositions de la résolution 2139 (2014) restent, dans une grande mesure, inappliquées au fil des mois. Nous attendons des parties au conflit qu'elles s'engagent à appliquer cette résolution. Davantage de progrès doivent être accomplis d'urgence s'agissant des cinq tâches que j'ai énumérées plus tôt cette année, à savoir : a) lutter contre les attaques incessantes qui frappent sans discernement des civils; b) lever le siège; c) garantir l'acheminement de fournitures médicales et chirurgicales dans tout le pays; d) mettre fin à la pratique consistant à utiliser la privation de services essentiels comme arme de guerre; e) reconstruire le système national d'enseignement en République arabe syrienne.

66. L'arrivée de centaines de milliers de réfugiés syriens en Europe a de nouveau attiré l'attention sur la crise humanitaire effroyable qui sévit en République arabe syrienne et dans les pays voisins. Si les organismes des Nations Unies et les organisations non gouvernementales internationales et nationales fournissent toujours une aide à des millions de personnes dans le besoin, la situation humanitaire dans le pays ne cesse de se détériorer et les besoins humanitaires continuent de croître. En l'absence d'une solution politique, nous devons continuer d'axer notre action sur la meilleure façon d'aider et de supporter la population syrienne, dont l'espoir de retourner dans ses foyers et dans son pays diminue au jour le jour. J'exhorte vivement les donateurs à maintenir et, si possible, accroître en 2016 l'appui généreux qu'ils apportent aux opérations humanitaires d'urgence vitale, ainsi qu'aux activités de reprise et d'adaptation.

67. II n'y a pas de solution militaire à la crise syrienne. Seule une action politique sérieuse peut permettre de répondre aux aspirations de la population syrienne et de traiter les causes profondes du conflit. Il y a également lieu de souligner, une fois de plus, que l'action humanitaire, pour essentielle qu'elle soit, ne peut se substituer à un processus politique crédible, sur la base du Communiqué de Genève du 30 juin 2012, en particulier les lignes directrices et principes convenus pour une transition conduite par les Syriens. Le Conseil doit transformer ses paroles en actes concrets face aux atrocités qui continuent d'être commises et à la nécessité d'une solution politique. L'absence d'une solution politique condamne les Syriens à vivre dans le chaos et compromet dangereusement les perspectives des générations futures.


Notes :

1. Le 30 mai 2013, le Conseil de sécurité a, conformément à sa résolution 1267 (1999), désigné l'État islamique d'Iraq et du Levant (EIIL) et le Front el -Nosra comme groupes terroristes. Ces deux groupes sont actifs en République arabe syrienne. [Retour]


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