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Vingt-troisième rapport semestriel du Secrétaire général sur l'application de la résolution 1559 (2004) relative au Liban


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Nations Unies
Conseil de sécurité

S/2016/366

Distr. générale
22 avril 2016
Français
Original : anglais

Vingt-troisième rapport semestriel du Secrétaire général au Conseil de sécurité sur l'application de la résolution 1559 (2004)

I. Généralités

1. Le présent rapport est mon vingt-troisième rapport semestriel sur l'application de la résolution 1559 (2004) du Conseil de sécurité. On y trouve une évaluation de l'application de cette résolution depuis mon précédent rapport sur la question, en date du 7 octobre 2015 (S/2015/764). J'y relève de nouveau l'absence de tout progrès dans l'application des principales dispositions de la résolution et souligne les menaces croissantes qui pèsent toujours sur la souveraineté, l'intégrité territoriale et l'indépendance politique du Liban.

2. Depuis près de deux ans, le Liban n'a pas de président, et ce, malgré les nombreux efforts déployés en vue de parvenir à un accord permettant de régler cette situation. Dans la déclaration de son président à la presse en date du 17 mars (SC/12287), le Conseil de sécurité s'est dit extrêmement préoccupé par cette situation de vacance et ses répercussions sur le reste des institutions libanaises. Malgré la dynamique créée par les nominations de candidats à la présidence, le Courant patriotique libre et le Hezbollah ont continué de boycotter les sessions parlementaires, empêchant ainsi le Parlement d'atteindre le quorum pour la trente-septième fois. Préoccupé par l'incapacité du Parlement à élire un président faute de quorum, le Conseil a de nouveau engagé tous les dirigeants libanais à agir de manière responsable, avec détermination et souplesse, en convoquant d'urgence une session parlementaire et en procédant à l'élection d'un président.

3. En dépit du durcissement du discours des deux partis, le dialogue entre le Hezbollah et le Courant du futur s'est poursuivi, de même que le dialogue parlementaire, tous deux sous les auspices du Président du Parlement, Nabih Berri. Le 14 janvier, le Conseil des ministres s'est réuni pour la première fois depuis juillet 2015.

4. Le conflit en République arabe syrienne a continué de peser lourdement sur la sécurité et la stabilité du Liban. Ainsi, le 12 novembre, Beyrouth a été le théâtre d'un double attentat-suicide revendiqué par l'État islamique d'Iraq et du Levant (EIIL), au cours duquel 43 personnes ont été tuées et plus de 200 blessées, ce qui en fait l'incident le plus meurtrier depuis la fin de la guerre civile libanaise et rappelle cruellement la vulnérabilité du Liban face à la menace du terrorisme. J'ai condamné cette attaque et rappelé qu'il importait que toutes les parties continuent à œuvrer à la préservation de la stabilité et de la sécurité au Liban, et j'ai demandé que les responsables de cet acte de terrorisme soient rapidement traduits en justice. Le 13 novembre, le Conseil de sécurité a également condamné cette attaque avec la plus grande fermeté (voir SC/12120).

5. Comme indiqué dans mon rapport sur l'application de la résolution 1701 (2006) du Conseil de sécurité (S/2016/189), le 20 décembre, des radars de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL) ont détecté le tir depuis sa zone d'opérations de trois roquettes visant Israël et, le 4 janvier, les Forces de défense israéliennes ont informé la FINUL que deux de leurs véhicules avaient été attaqués à l'aide de trois engins explosifs improvisés au sud de la Ligne bleue, dans la zone des fermes de Chebaa. Dans les deux cas, les Forces de défense israéliennes ont riposté par des tirs d'artillerie et de mortiers en direction du nord de la Ligne. Il n'y a eu aucune victime. Ces deux incidents constituent des violations graves des résolutions 1559 (2004) et 1701 (2006). J'ai condamné aussi bien l'attaque du 4 janvier que les tirs de roquettes du 20 décembre. J'ai en outre noté que les tirs de représailles d'Israël contre le Liban constituaient également une violation de la résolution 1701 (2006). J'ai demandé aux parties de respecter pleinement la cessation des hostilités et les ai toutes exhortées à faire preuve de la plus grande retenue et de coopérer avec la FINUL afin de prévenir une nouvelle escalade.

6. Le 19 février, l'Arabie saoudite a annoncé qu'elle suspendait l'aide d'un montant de 3 milliards de dollars qu'elle versait à l'armée libanaise ainsi que la contribution au titre de l'assistance de 1 milliard de dollars qu'elle avait prévu de verser aux services de sécurité libanais. Le 2 mars, le Conseil de coopération du Golfe, suivi de la Ligue des États arabes, le 11 mars, a qualifié le Hezbollah d'organisation terroriste.

7. L'armée libanaise a continué de faire face aux nombreuses menaces qui pèsent sur la souveraineté et l'intégrité territoriale du pays. Les forces de sécurité ont continué de combattre des éléments armés en provenance de la République arabe syrienne dans l'est de la zone frontalière, notamment autour de la ville d'Arsal. Le 1er décembre 2015, le Front el-Nosra a relâché les soldats de l'armée libanaise et des forces de sécurité intérieure qu'il détenait depuis août 2014; des membres des services de sécurité libanais sont toujours détenus par l'EIIL.

8. Le Liban reste le pays qui accueille le plus grand nombre de réfugiés par habitant au monde : il compte 1 069 111 réfugiés au total, dont 41 000 réfugiés palestiniens en provenance de la République arabe syrienne. Le 4 février, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, l'Allemagne, le Koweït, la Norvège et l'ONU ont organisé une conférence à Londres pour collecter des fonds afin de répondre aux besoins immédiats et à long terme des réfugiés et des communautés d'accueil libanaises, au cours de laquelle l'accent a été mis sur l'éducation et la création d'emplois. Dans une déclaration d'intention prononcée à l'occasion de la conférence, le Gouvernement libanais a présenté un programme quinquennal et admis que la crise s'installait dans la durée et qu'il fallait envisager à l'avenir des interventions présentant un meilleur rapport coût-efficacité.

9. Les 24 et 25 mars, je me suis rendu au Liban avec le Président de la Banque mondiale et le Président de la Banque islamique de développement. L'objectif de cette visite était de promouvoir le nouveau mécanisme de financement à des conditions favorables qui vise à permettre d'atténuer les effets de la crise syrienne sur l'économie libanaise. Au cours de cette visite, nous nous sommes rendus à Tripoli et dans la plaine de la Bekaa. Nous avons pu à cette occasion voir par nous-mêmes les sites de réfugiés syriens et le camp de réfugiés palestiniens de Nahr el-Bared. Je me suis également rendu au siège de la FINUL dans le sud du Liban. Je me suis entretenu des problèmes qui se posent sur le plan politique et sur celui de la sécurité avec le Premier Ministre Tammam Salam, le Président du Parlement et le Patriarche, Bechara Rahi, ainsi qu'avec les dirigeants de l'armée libanaise et des représentants du Groupe international d'appui au Liban à l'occasion d'une réunion que j'ai tenue avec eux.

II. Application de la résolution 1559 (2004)

10. Comme je l'ai souligné dans mes précédents rapports, plusieurs dispositions de la résolution 1559 (2004) du Conseil de sécurité ont été appliquées depuis l'adoption du texte, le 2 septembre 2004. La République arabe syrienne a retiré ses troupes et son arsenal militaires du Liban en avril 2005. Les élections présidentielle et législatives se sont déroulées de façon libre et régulière en 2008 et 2009. Le Liban et la République arabe syrienne ont noué des relations diplomatiques complètes en 2009.

11. Pendant la période considérée, le Premier Ministre a continué d'affirmer que le Liban respecte toutes les résolutions de l'Organisation des Nations Unies. Cependant, le conflit en République arabe syrienne et ses conséquences pour le Liban ont continué de limiter les progrès dans l'application des dispositions de la résolution 1599 (2004) auxquelles il n'a pas encore été donné suite et d'autres résolutions sur le Liban.

12. En dépit des vifs encouragements en ce sens exprimés par le Conseil de sécurité dans sa résolution 1680 (2006), le tracé de la frontière libano-syrienne n'a toujours pas été déterminé. En outre, la présence et les activités des milices libanaises et non libanaises le long de la frontière continuent de menacer la stabilité du pays et de la région. Trois régiments de l'armée libanaise sont toujours déployés à la frontière est du pays et le maintien de leur présence constitue à ce jour le signe le plus fort de l'autorité de l'État dans cette zone vulnérable. Il demeure essentiel que l'État parvienne à être seul à pouvoir détenir des armes et faire usage de la force sur tout le territoire libanais. Le maintien de l'aide de la communauté internationale dans ce domaine reste une priorité.

13. Pendant la période à l'examen, mes représentants et moi-même sommes restés en contact avec toutes les parties prenantes au Liban, y compris pendant mon déplacement au Liban, ainsi qu'avec les dirigeants régionaux et internationaux concernés.

A. Souveraineté, intégrité territoriale, unité et indépendance politique du Liban

14. En adoptant la résolution 1559 (2004), le Conseil de sécurité entendait renforcer la souveraineté, l'intégrité territoriale, l'unité et l'indépendance politique du Liban, sous l'autorité exclusive du Gouvernement libanais, conformément aux Accords de Taëf de 1989, auxquels tous les partis politiques libanais ont souscrit. Je continue d'accorder la plus haute priorité à cet objectif dans l'action que je mène pour faciliter l'application de toutes les résolutions concernant le Liban.

15. La vacance du pouvoir à la tête du pays est très préoccupante. En décembre, le dirigeant du Courant du futur, Saad Hariri, a apporté son soutien à la candidature du dirigeant du Courant des Marada, Sleïman Frangié, à l'élection présidentielle. À la suite de quoi, le chef des Forces libanaises, Samir Geagea, a quant à lui apporté son soutien à la candidature du dirigeant du Courant patriotique libre, Michel Aoun. Bien que deux dirigeants du Mouvement du 14 mars aient apporté leur soutien à la candidature de deux personnalités de l'Alliance du 8 mars, le Courant patriotique libre et le Hezbollah ont continué de boycotter le vote parlementaire.

16. Il convient de noter que le Parlement s'est réuni en session extraordinaire les 12 et 13 novembre et a adopté un certain nombre de projets de lois économiques et financières, mettant en lumière l'importance du rôle législatif et budgétaire que cette institution devrait pouvoir jouer. Le Président du Parlement a continué de travailler avec le Premier Ministre en vue de permettre aux principales institutions libanaises de reprendre leurs activités. Mais le boycottage des sessions parlementaires par le Hezbollah et le Courant patriotique libre a continué d'empêcher le Parlement d'atteindre le quorum et donc d'élire un président.

17. Le dialogue entre le Courant du futur et le Hezbollah s'est poursuivi sous la houlette du Président du Parlement. Le 13 avril, les deux parties ont tenu la vingt-septième session dudit dialogue, au cours de laquelle les participants ont souligné qu'il importait de renforcer le rôle de l'État et des institutions en vue de dénoncer et de combattre la corruption.

18. Le Premier Ministre a continué de faire preuve d'une grande détermination dans sa mission de conduite d'un pays qui fait face à des problèmes de sécurité et à des difficultés d'ordre économique et humanitaire. Il est essentiel que le Premier Ministre soit épaulé par un gouvernement et un parlement opérationnels. Le Conseil des ministres s'est réuni le 28 janvier 2016 pour sa 1re séance plénière depuis juillet 2015. Son unité reste fragile et, dans la mesure où toutes les autres institutions libanaises sont déjà paralysées, il est crucial que le Conseil puisse être uni autour du Premier Ministre, dans l'intérêt national. Lors d'une séance tenue le 2 février, le Conseil des ministres a approuvé le budget des élections municipales, qui, d'après le calendrier actuel, doivent se tenir à partir du 8 mai.

19. Suite à la décision de suspendre son appui aux forces de sécurité qu'a prise l'Arabie saoudite le 19 février, le Conseil des ministres a tenu une réunion d'urgence le 22 février et publié une déclaration unanime, dans laquelle il affirme à nouveau son soutien à un consensus arabe. Le Premier Ministre a rappelé que son gouvernement condamnait l'attaque perpétrée le 2 janvier contre l'ambassade saoudienne à Téhéran. Un certain nombre de pays du Golfe ont exhorté leurs ressortissants à ne pas se rendre au Liban et, le 14 mars, Bahreïn a annoncé l'expulsion de son territoire de plusieurs citoyens libanais soupçonnés d'être liés au Hezbollah. Selon des informations non confirmées, certains États membres du Conseil de coopération du Golfe auraient pris d'autres mesures à l'encontre de citoyens libanais pour les mêmes raisons.

20. L'incidence sur le Liban des événements se produisant dans la région a continué d'augmenter les risques de tensions dans le pays. Le Secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, et le dirigeant du Courant du futur ont publiquement souligné l'importance d'éviter les tensions sectaires au niveau national et réaffirmé leur attachement au dialogue bilatéral. Le 7 mars, le Premier Ministre a demandé à Hassan Nasrallah de cesser d'attaquer verbalement l'Arabie saoudite et d'autres États du Golfe et a appelé au respect de la Déclaration de Baabda et de la politique de dissociation.

21. Les 27 et 28 février, des partisans du Hezbollah ont manifesté en réaction à la diffusion d'une émission télévisée, dans laquelle Hassan Nasrallah était raillé, en bloquant des routes au sud de Beyrouth et dans l'est du Liban, ce qui a fait craindre une nouvelle escalade. En réponse à ces manifestations, le Président du Parlement et le dirigeant du Courant du futur ont publié le 1 er mars une déclaration conjointe, dans laquelle ils ont engagé les dirigeants politiques à faire preuve de responsabilité et à lutter contre les tentatives visant à créer des tensions sectaires. Hassan Nasrallah a demandé à ses partisans d'éviter de descendre dans la rue et a réfuté toutes les accusations selon lesquelles son parti aurait prévu de répéter les événements de mai 2008, pendant lesquels des éléments armés du Hezbollah étaient descendus dans la rue et avaient occupé le centre de Beyrouth.

22. Le 8 avril, l'ancien Ministre Michel Samaha a été condamné à 13 ans de prison avec travaux forcés pour avoir introduit en contrebande au Liban des explosifs en provenance de la République arabe syrienne en vue de commettre des actes terroristes visant des cibles libanaises. Il aurait planifié ces actes dans le cadre d'un complot destiné à provoquer un conflit confessionnel après sa libération sous caution, le 14 janvier. Le 21 février, le Ministre de la justice et une personnalité de premier plan du Mouvement du 14 mars, Achraf Rifi, avait démissionné, notamment pour protester contre la libération sous caution de Michel Samaha et contre ce qu'il a appelé la « domination du Hezbollah » sur le Conseil des ministres.

23. Dans sa résolution 1680 (2006), le Conseil de sécurité a vivement encouragé le Gouvernement syrien à donner suite à la demande faite par le Gouvernement libanais de délimiter leur frontière commune. Je continue de demander à la République arabe syrienne et au Liban de se mettre d'accord sur le tracé de leur frontière commune. Cependant, depuis le début du conflit en République arabe syrienne, il est devenu encore plus difficile d'avancer sur ce point, et les deux parties n'ont pris aucune mesure concrète dans ce sens au cours de la période considérée.

24. La délimitation et la démarcation de ses frontières sont essentielles si l'on veut garantir la souveraineté nationale et l'intégrité territoriale du Liban. Ces mesures sont par ailleurs indispensables pour faciliter les contrôles aux frontières. La complexité de la situation sur le plan de la sécurité qui règne le long de la frontière entre la Syrie et le Liban, où se poursuivraient combats et mouvements d'armes et de personnes, montre encore davantage à quel point la démarcation de la frontière est urgente. La délimitation des frontières est par nature un exercice bilatéral, mais il incombe aux deux États de progresser sur cette question, conformément aux dispositions des résolutions 1680 (2006) et 1559 (2004) du Conseil de sécurité.

25. Les violations de la souveraineté et de l'intégrité territoriale du Liban se sont poursuivies aux frontières est et nord du pays, conséquences directes du conflit en République arabe syrienne. Pendant la période considérée, un certain nombre d'incidents se sont produits à la frontière entre la Syrie et le Liban de même que sur le territoire libanais qui jouxte celle-ci. Au moins 55 tirs transfrontaliers ont été signalés, ainsi que 3 frappes aériennes, 40 tirs d'artillerie, 7 attaques à la roquette en provenance du territoire syrien et 2 tentatives d'incursions de combattants. Ces attaques auraient fait 28 victimes au total. Le Gouvernement syrien a continué d'effectuer des bombardements aériens sur le territoire libanais, en violation de la souveraineté et de l'intégrité territoriale du Liban.

26. La poursuite de l'occupation par Israël de la partie nord du village de Ghajar et de la zone adjacente située au nord de la Ligne bleue constitue une violation de la souveraineté du Liban et des résolutions 1559 (2004) et 1701 (2006). Mes représentants et moi-même restons en contact étroit avec les deux parties en vue de faciliter le retrait des Forces de défense israéliennes de la zone, comme le prévoit la résolution 1701 (2006).

27. Aucun progrès n'a été enregistré pendant la période considérée sur la question de la zone des fermes de Chebaa. Ni la République arabe syrienne ni Israël ne se sont encore exprimés sur la définition provisoire de cette zone que j'avais donnée dans mon rapport sur l'application de la résolution 1701 (2006), en date du 30 octobre 2007 (S/2007/641).

28. Israël a continué à pénétrer sans autorisation dans l'espace aérien libanais et à survoler le territoire libanais, essentiellement au moyen de drones et d'avions, et ce, pratiquement tous les jours au cours de la période considérée. Ces survols, que le Gouvernement libanais ne cesse de dénoncer, constituent des violations de la souveraineté libanaise et des résolutions 1559 (2004) et 1701 (2006) du Conseil de sécurité. D'après les autorités israéliennes, ces survols se justifient pour des raisons de sécurité. Je les ai moi-même déplorés et j'ai exigé qu'ils cessent immédiatement.

B. Extension de l'autorité du Gouvernement libanais à l'ensemble du territoire libanais

29. Le Gouvernement libanais a de nouveau fait part à l'ONU de son intention d'étendre son autorité à l'ensemble du territoire libanais, conformément à ce qui est préconisé dans les Accords de Taëf et dans la résolution 1559 (2004). L'armée libanaise et les forces de sécurité intérieure du Liban ont joué à cet égard un rôle crucial, qui plus est dans des conditions difficiles; l'État libanais continue cependant d'éprouver des difficultés à exercer pleinement son autorité sur l'ensemble de son territoire.

30. La participation au conflit syrien de combattants libanais reste préoccupante. Le Hezbollah continue de reconnaître publiquement sa participation aux combats en République arabe syrienne, ce qui va à l'encontre de l'engagement qu'il a pris dans la Déclaration de Baabda et à son adhésion à la politique libanaise de dissociation. Les funérailles de ses membres morts au combat en République arabe syrienne ont continué de se dérouler au Liban durant la période considérée. D'autres Libanais ont participé aux combats en République arabe syrienne aux côtés des forces de l'opposition syrienne, du Front el-Nosra et de l'EIIL. La participation du Hezbollah et d'autres éléments libanais aux combats en République arabe syrienne compromet gravement la stabilité et la sécurité du Liban.

31. Les attentats-suicides qui ont frappé le quartier de Bourj el-Brajné dans le sud de Beyrouth le 12 novembre et qui ont été revendiqués par l'EIIL, ont tué 43 personnes et en ont blessé plus de 200. Il s'agit de l'attaque la plus meurtrière depuis la fin de la guerre civile au Liban. L'attentat visait une région habitée essentiellement par des chiites, ce qui risquait de déclencher des affrontements communautaires dans le pays. Les dirigeants politiques et religieux libanais ont condamné l'attentat et a appelé à la solidarité au lendemain des événements. Deux jours plus tard, Hassan Nasrallah, à l'occasion d'un discours télévisé, a mis en garde contre les divisions sectaires et salué le travail des forces de sécurité intérieure.

32. Les forces de sécurité libanaises ont continué de combattre les éléments armés syriens dans l'est de la zone frontalière, notamment autour de la ville d'Arsal. Le 6 novembre, une bombe a explosé à Arsal, faisant quatre victimes et plusieurs blessés. Le 7 novembre, cinq soldats ont été blessés dans une explosion qui a touché un char, toujours à Arsal. Entre le 25 et le 29 janvier 2016, des affrontements ont éclaté entre le Front el-Nosra et l'EIIL ainsi qu'entre l'armée libanaise et les éléments armés actifs dans la périphérie d'Arsal, et ont fait des blessés parmi ces derniers. Le 20 février, l'armée libanaise est intervenue pour mettre fin à des affrontements entre des locaux de Saadiyat, au cours desquels des roquettes ont été lancées. La région avait connu des affrontements similaires en juillet 2015, lesquels avaient fait plusieurs blessés. Le 10 mars, un soldat libanais a été tué au cours d'affrontements avec des éléments armés, dont cinq membres sont morts, à proximité de Baalbek. Le 24 mars, un soldat libanais est mort et trois autres ont été blessés à la suite de l'explosion d'une bombe dans les environs d'Arsal. L'armée libanaise a également continué d'arrêter des personnes soupçonnées d'appartenir à des réseaux terroristes, y compris des personnes qui seraient liées à la planification de l'attaque du 19 novembre 2013 contre l'ambassade iranienne à Beyrouth et du récent bombardement à Bourj el-Brajné. Le consensus politique en faveur de la mise en œuvre des plans de sécurité par les forces nationales et les forces de sécurité à Arsal, Tripoli, dans la province de Bekaa et dans les banlieues sud de Beyrouth, a été maintenu. Les 16 membres des forces de sécurité qui étaient détenus par le Front el-Nosra depuis août 2014 ont été libérés le 1er décembre, comme indiqué au paragraphe 7 ci-dessus. Neuf membres de ces forces sont encore détenus par l'EIIL.

33. La communauté internationale a continué d'appuyer le renforcement des capacités de l'armée libanaise. Le 12 novembre, le Parlement a approuvé l'allocation de 800 millions de dollars à l'armée libanaise. Le 17 mars, le Conseil de sécurité a demandé le maintien de l'appui international à l'armée libanaise, notamment dans les domaines de la lutte contre le terrorisme et de la protection des frontières (voir SC/12287). Plusieurs États Membres ont poursuivi leurs efforts d'appui à l'armée libanaise, comme le montre le mémorandum d'accord signé récemment par le Liban, le Royaume-Uni et le Canada en vue d'apporter un appui aux régiments frontaliers libanais. Des opérations de contrebande d'armes et des incidents transfrontaliers ont continué d'être signalés, ce qui montre qu'il est toujours nécessaire d'améliorer la capacité des forces de sécurité à gérer et à contrôler efficacement les frontières. Lors de ma rencontre à Beyrouth avec le commandement de l'armée libanaise et les représentants du Groupe international d'appui au Liban, le 24 mars, tout le monde s'est accordé sur la nécessité absolue pour les partenaires internationaux de continuer d'appuyer les efforts déployés par l'armée libanaise pour protéger la souveraineté et l'intégrité territoriale du Liban.

34. Le 19 décembre, un militant du Hezbollah, Samir Qantar, a été tué à Damas lors de ce que le Hezbollah a présenté comme une frappe aérienne israélienne. Le Hezbollah a revendiqué l'attaque du 4 janvier perpétrée contre deux véhicules des Forces de défense israéliennes au sud de la Ligne bleue et en a imputé la responsabilité à un « Groupe du Martyr Samir Qantar», en référence à la supposée frappe aérienne israélienne. Les Forces de défense israéliennes ont immédiatement répliqué en tirant des explosifs brisants et fumigènes de l'autre côté de la Ligne bleue. Ces incidents et leurs retombées sont détaillés dans mon rapport sur l'application de la résolution 1701 (2006) (S/2016/189).

C. Dissolution et désarmement des milices libanaises et non libanaises

35. Dans sa résolution 1559 (2004), le Conseil de sécurité a demandé que toutes les milices libanaises et non libanaises soient dissoutes et désarmées. Cette disposition essentielle, qui n'a toujours pas été appliquée, reprend et réaffirme une décision que tous les Libanais s'étaient engagés à respecter dans les Accords de Taëf et à la suite de laquelle les milices libanaises, à l'exception du Hezbollah, avaient à l'époque déposé les armes. Compte tenu du contexte actuel et des incidences de la crise syrienne sur le Liban, les Accords doivent impérativement être préservés et appliqués par tous afin d'éviter le spectre d'une reprise des affrontements au Liban et de renforcer les institutions de l'État.

36. Les milices libanaises et non libanaises opérant sur le territoire continuent d'échapper au contrôle du Gouvernement, ce qui constitue une violation grave de la résolution 1559 (2004). Bien que plusieurs factions politiques, toutes tendances confondues, possèdent des armes en dehors du contrôle du Gouvernement, la branche armée du Hezbollah est la milice la plus importante et la plus lourdement armée du Liban. Le fait que le Hezbollah et d'autres groupes détiennent des armes entrave sérieusement la capacité de l'État d'exercer pleinement sa souveraineté et son autorité sur son territoire. En outre, plusieurs groupes armés palestiniens continuent d'opérer dans le pays à l'intérieur et à l'extérieur des camps de réfugiés. La présence de groupes armés extrémistes au Liban, en particulier autour de la région d'Arsal et de la Bekaa, est également très inquiétante. Dans une vidéo diffusée le 14 mars, l'EIIL a averti les autorités libanaises qu'elles ne pourraient l'empêcher d'entrer au Liban.

37. Aucun progrès tangible n'a été accompli en ce qui concerne la dissolution et le désarmement des milices libanaises et non libanaises, prévus par les Accords de Taëf et la résolution 1559 (2004). Depuis l'adoption de cette résolution, aucune mesure concrète n'a été prise pour régler cette question essentielle, qui est au cœur de la souveraineté et de l'indépendance politique du Liban. Plusieurs individus et groupes libanais continuent de dénoncer le maintien par le Hezbollah d'un arsenal militaire, qui constitue, selon eux, un facteur de déstabilisation du pays et va à l'encontre de la démocratie. De nombreux Libanais craignent que ces armes soient utilisées au Liban pour des raisons politiques.

38. À maintes reprises, j'ai exprimé aux dirigeants libanais ma vive préoccupation quant aux risques graves que les groupes armés font peser sur la stabilité du pays et de la région. Je les ai exhortés à régler cette question sans tarder, comme la résolution 1559 (2004) leur en fait l'obligation. Dans un État démocratique, il est tout à fait anormal qu'un parti politique ait sa propre milice. Cependant, le Hezbollah continue d'affirmer ouvertement que ses moyens militaires sont distincts de ceux de l'État libanais et que ses armes servent à dissuader Israël d'une éventuelle agression.

39. L'attaque perpétrée le 4 janvier et revendiquée par le Hezbollah a montré que celui-ci détenait des armes non autorisées, en dehors de tout contrôle du Gouvernement, et qu'il était prêt à les utiliser contre Israël, menaçant ainsi la stabilité et la sécurité du Liban. Dans un discours prononcé le 16 février, Hassan Nasrallah a réaffirmé que le Hezbollah détenait un arsenal de roquettes qu'il a menacé d'utiliser pour attaquer des installations de stockage israéliennes, ce qui entraînerait la mort de dizaines de milliers de citoyens israéliens. Le 20 mars, dans un entretien télévisé, il a également déclaré que le Hezbollah connaissait l'emplacement d'usines chimiques, de réacteurs et d'entrepôts en Israël, dont certains sont situés dans des villes ou à proximité, et a averti que le groupe avait les moyens de frapper ces cibles si Israël venait à attaquer le Liban. Dans une lettre adressée au Secrétaire général et au Président du Conseil de sécurité et datée du 23 mars (S/2016/277), le Représentant permanent d'Israël a demandé de nouveau au Conseil de sécurité de réagir fermement face aux menaces du Hezbollah et a appelé la communauté internationale à agir pour désarmer le groupe. En outre, le 11 avril, le Premier Ministre israélien, M. Benjamin Nétanyahou, a publiquement reconnu qu'Israël avait lancé des attaques contre la République arabe syrienne afin d'empêcher le Hezbollah de se procurer des armes susceptibles de changer la donne.

40. Outre la présence du Hezbollah en République arabe syrienne, Hassan Nasrallah a déclaré dans un discours prononcé le 6 mars que des membres du groupe présents au Liban et en République arabe syrienne avaient été envoyés en Iraq pour y combattre l'EIIL. Il est très préoccupant, en particulier compte tenu des tensions actuelles dans la région, que le Hezbollah prenne part aux conflits régionaux, au risque de menacer la stabilité et la sécurité du Liban. Il est important que toutes les parties libanaises respectent la politique de dissociation et la Déclaration de Baabda adoptée en 2012.

41. Dans de précédents rapports au Conseil de sécurité, j'ai souligné le rôle essentiel que le dialogue national a joué par le passé dans le désarmement des groupes armés. L'absence de dialogue national rappelle qu'il est nécessaire d'élire un président afin de reprendre les discussions sur la stratégie nationale de défense.

42. La situation dans les camps de réfugiés en Palestine s'est tendue ces derniers mois depuis l'annonce, le 14 décembre, de changements dans la politique d'hospitalisation de l'Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) et effectifs à compter de janvier 2016. Par ces ajustements, l'Office a augmenté le pourcentage de couverture des soins de santé tertiaires et a mis en place un partage des coûts pour certaines dépenses auparavant intégralement à la charge de l'organisation. Il a également créé un fonds complémentaire destiné aux personnes vivant dans une pauvreté extrême. Les modifications apportées à la politique de santé ont entraîné, à plusieurs reprises, nombre de fermetures forcées des installations de l'UNRWA par diverses factions politiques et militantes ainsi que la profération de menaces à l'encontre du personnel, et ont empêché la circulation des biens et du personnel. Le 21 mars, l'Office a temporairement suspendu la politique pour un mois, afin de la réexaminer. Par ailleurs, un réfugié palestinien a été tué le 13 octobre dans le camp de réfugiés de Miyé-Miyé. Le 28 janvier, dans le camp de Chatila, un palestinien a tué par balle un membre du Fatah-Intifada en raison d'un différend personnel. Le 28 mars, un affrontement armé entre le Fatah et des éléments extrémistes a eu lieu à Aïn el-Héloué, causant la mort de trois combattants et le déplacement de sept familles. La force de sécurité commune palestinienne a ouvert des enquêtes sur ces événements et a continué de contribuer au maintien de la sécurité dans les camps, y compris en déployant un grand nombre d'unités dans le camp concerné après l'affrontement du 28 mars et en appelant au calme par la suite. Le 12 avril, un haut responsable du Fatah présent dans le camp de Miyé-Miyé a été tué dans un attentat à la voiture piégée près d'Aïn el-Héloué.

43. La situation humanitaire des réfugiés palestiniens au Liban est de plus en plus critique, près de 41 000 de ceux qui s'y trouvent actuellement provenant de la République arabe syrienne. Cela pèse très lourdement sur la situation globale des camps et des rassemblements de réfugiés et sur l'assistance que l'UNRWA s'efforce de leur apporter. L'Office a pris des mesures pour atténuer certaines des tensions entre les réfugiés palestiniens installés au Liban et ceux qui arrivent de la République arabe syrienne, par exemple en incluant les enfants de réfugiés dans les classes ordinaires de ses écoles. Lors de la visite que j'ai effectuée au camp de réfugiés de Nahr el-Bared le 25 mars, j'ai constaté avec satisfaction que le Gouvernement s'était engagé à mener à bien sa reconstruction et j'ai prié instamment la communauté internationale d'apporter un financement à cette fin. Je continue d'exhorter les autorités libanaises à améliorer les conditions de vie des réfugiés. Les efforts accomplis en ce sens devraient se poursuivre sans que l'on préjuge du règlement éventuel de la question des réfugiés palestiniens dans le cadre d'un accord de paix global dans la région.

44. La présence de groupes palestiniens armés à l'extérieur des camps continue d'entraver le plein exercice de la souveraineté du Liban sur son territoire. Malgré la décision prise en 2006 dans le cadre du dialogue national et confirmée ultérieurement, aucun progrès n'a été accompli au cours de la période considérée en ce qui concerne le démantèlement des bases militaires du Front populaire de libération de la Palestine - Commandement général et du Fatah-Intifada dans le pays. Toutes ces bases sauf une sont implantées le long de la frontière libano-syrienne. Leur présence continue de porter atteinte à la souveraineté du Liban et à l'autorité du Gouvernement et rend plus difficile la délimitation de la frontière. Elle compromet également le contrôle effectif de la frontière orientale entre le Liban et la République arabe syrienne. J'ai de nouveau demandé aux autorités libanaises d'appliquer les décisions déjà prises dans le cadre du dialogue national, en particulier celles qui portent sur le démantèlement des bases militaires susmentionnées, et au Gouvernement syrien de coopérer de bonne foi en ce sens.

III. Observations

45. Je continue d'être déçu par l'absence de progrès tangibles dans l'application des autres dispositions de la résolution 1559 (2004). Le Liban reste en proie à des problèmes de stabilité et de sécurité, tant à l'intérieur que le long de ses frontières avec la République arabe syrienne, imputables notamment à des groupes terroristes et extrémistes et à la contrebande d'armes. Je crains que l'absence de progrès dans l'application de la résolution ne finisse par éroder l'effet des dispositions déjà appliquées et par déboucher sur une nouvelle dégradation de la stabilité du Liban. Je reste profondément convaincu qu'il est dans le meilleur intérêt du Liban et des Libanais de s'acheminer vers la pleine application de la résolution 1559 (2004) pour assurer la stabilité à long terme du pays et de la région.

46. Je suis de plus en plus préoccupé par le fait qu'il n'y ait toujours pas de président; cela fera bientôt deux ans que cette situation perdure. Le Liban a besoin d'un chef d'État pour surmonter les difficultés économiques, sociales et humanitaires et relever les défis en matière de sécurité que le pays connaît. Je félicite le Premier Ministre, qui, à la tête du Gouvernement, a su en maintenir l'unité et guider le pays dans un environnement régional de plus en plus tendu. Dans ce contexte, les déclarations récentes de certaines parties libanaises, qui risquent d'importer des tensions régionales sur la scène nationale libanaise, sont préoccupantes. L'effet négatif que ces déclarations pourraient avoir sur les dynamiques interconfessionnelles libanaises, en particulier à un moment où des institutions nationales majeures sont dans l'incapacité d'exercer leur fonction de réglementation, ne devrait pas être sous-estimé.

47. Je prends note des initiatives visant à dégager un consensus sur d'éventuels candidats à la présidence, et je note également que le Parlement et le Gouvernement ont tous deux repris leurs activités en tenant des sessions. Cela démontre que les dirigeants libanais peuvent mettre de côté leurs divergences politiques et s'unir pour permettre le fonctionnement des institutions nationales. Je leur demande instamment de mettre à profit cet esprit d'unité et de responsabilité en vue de convoquer d'urgence une session parlementaire pour élire un président. À cet égard, je demande à ceux qui ont boycotté les sessions de faire preuve de souplesse et d'agir dans l'intérêt national. Il est essentiel que toutes les institutions libanaises soient pleinement fonctionnelles afin que le pays puisse faire face aux difficultés qui menacent son unité et sa stabilité.

48. Je me félicite que le Gouvernement ait décidé d'organiser et de financer des élections municipales, qui marqueront la reprise du processus démocratique. Il est important que ces élections soient tenues en temps voulu. J'appelle de nouveau les dirigeants libanais à renforcer la participation et la représentation effective des femmes dans les élections.

49. Je me réjouis de la poursuite du dialogue entre le Courant du futur et le Hezbollah, ainsi que du rôle que joue le Président du Parlement à cet égard. Dans un contexte régional tendu, il est encourageant de constater que toutes les parties restent attachées au dialogue, contribuant ainsi à préserver le consensus politique sur la nécessité d'assurer la sécurité et la stabilité du pays. Outre désamorcer les tensions, j'espère que la poursuite du dialogue aidera à mettre fin à la vacance de la présidence.

50. En ce qui concerne les violations graves de l'accord de cessation des hostilités entre Israël et le Liban, commises en décembre et en janvier, et comme indiqué dans mon rapport sur la mise en œuvre de la résolution 1701 (2006) (S/2016/189), j'ai maintes fois prévenu que le fait que le Hezbollah détienne des armes et soit prêt à les utiliser pourrait accroître les risques d'un conflit, dont les conséquences seraient gravement préjudiciables pour le Liban. Je condamne la menace proférée par Hassan Nasrallah lors de son entretien du 20 mars, faisant suite à sa déclaration du 16 février. À l'occasion de ma visite à Beyrouth, j'ai insisté sur la nécessité pour le Liban et Israël d'agir de manière responsable et conformément aux obligations qui leur incombent en vertu des résolutions pertinentes et des attentes de la communauté internationale à cet égard. Mes interlocuteurs libanais ont confirmé leur volonté de maintenir la stabilité au Liban, y compris le long de la Ligne bleue.

51. Les violations persistantes de la souveraineté et de l'intégrité territoriale du Liban commises par Israël, notamment les violations de l'espace aérien libanais par des appareils des Forces de défense israéliennes, restent très préoccupantes. Je demande de nouveau à Israël de respecter les obligations que lui imposent les résolutions du Conseil de sécurité, de retirer ses forces de la partie nord du village de Ghajar et de mettre fin aux survols du territoire libanais.

52. Je me félicite du retour au calme depuis les graves violations commises en décembre et en janvier, ainsi que de l'engagement renouvelé par le Liban et Israël en faveur de la cessation des hostilités. En outre, je demande à toutes les parties de s'abstenir de toute rhétorique provocatrice et de respecter leurs obligations respectives. La pleine application de l'ensemble des dispositions des résolutions pertinentes reste la meilleure prévention contre les erreurs d'appréciation ou les tensions.

53. La présence généralisée d'armes en dehors de tout contrôle de l'État, conjuguée à la présence de milices lourdement armées, met en péril la sécurité des Libanais. Le fait que le Hezbollah continue de disposer d'importants moyens militaires de pointe échappant au contrôle de l'État libanais reste très préoccupant. Cette situation crée un climat d'intimidation et remet en question la sécurité des civils libanais et la prérogative de l'État de recourir légitimement à la force. J'invite de nouveau le Hezbollah et tous les autres groupes concernés à s'abstenir de toute action militante à l'intérieur ou à l'extérieur du Liban, conformément aux Accords de Taëf et à la résolution 1559 (2004).

54. Je déplore que l'absence de président ait empêché la tenue du dialogue national pendant la période considérée et qu'aucun progrès n'ait donc été fait dans la mise en œuvre des décisions prises durant cette période ou dans le règlement de la question du désarmement des groupes armés libanais et non libanais. Il sera important que le président, une fois élu, examine en priorité les moyens de faire avancer ces décisions.

55. Je n'ai eu de cesse de condamner les violations persistantes de la souveraineté du Liban, notamment les incidents frontaliers au cours desquels des civils et des membres de l'Armée libanaise ont été tués ou blessés du côté libanais de la frontière à la suite d'actions menées par les parties au conflit en République arabe syrienne. Les tirs d'artillerie et de roquettes transfrontières de divers groupes se trouvant en République arabe syrienne ainsi que les raids aériens de l'armée de l'air syrienne en territoire libanais doivent cesser. Ces incidents constituent une violation manifeste de la souveraineté du Liban. Je continue d'exhorter toutes les parties, notamment le Gouvernement syrien, à respecter la souveraineté et l'intégrité territoriale du Liban, conformément à la résolution 1559 (2004).

56. La participation de citoyens libanais au conflit en République arabe syrienne constitue une violation de la politique de dissociation et des principes de la Déclaration de Baabda, qui a été acceptée par toutes les parties libanaises en juin 2012. La participation du Hezbollah et d'autres éléments libanais aux combats qui se déroulent en République arabe syrienne compromet sérieusement la sécurité et la stabilité du Liban. Je reste profondément préoccupé par la menace que représentent le terrorisme et l'extrémisme pour le Liban, notamment la menace constituée par des groupes tels que l'EIIL et le Front el-Nosra. Je déplore et condamne l'attentat terroriste perpétré le 12 novembre et salue la réaction des dirigeants libanais qui se sont rassemblés en signe de solidarité et ont contribué à prévenir de nouvelles violences, dans un contexte où les risques de violences interconfessionnelles étaient bien présents. Je suis préoccupé par les informations faisant état de la participation du Hezbollah et d'autres éléments libanais à des combats ailleurs dans la région, notamment en Iraq, qui risque d'exposer le Liban à des menaces bien plus grandes encore en matière de sécurité.

57. L'appui apporté par la communauté internationale à l'Armée et aux forces de sécurité libanaises reste essentiel pour renforcer leur capacité de faire face aux multiples problèmes de sécurité que le pays connaît. Ne pas renforcer cette capacité pourrait envoyer un message erroné aux groupes ou éléments déterminés à déstabiliser le Liban. Il est également important que les forces de sécurité libanaises maintiennent leur neutralité dans les différends politiques nationaux et protègent leur indépendance en tant que force de défense nationale et, qu'en cette qualité, elles soient convenablement équipées pour prévenir les menaces à la sécurité. Je me réjouis qu'au cours de la période considérée le Royaume-Uni et le Canada aient signé un mémorandum d'accord pour appuyer le régiment frontalier déployé par l'armée et que les États-Unis d'Amérique aient maintenu leur assistance. Alors que les forces de sécurité libanaises restent confrontées à des menaces à la sécurité et à la stabilité nationales, leur capacité d'y faire face continuera de dépendre de l'appui international. J'appelle donc les partenaires internationaux à renforcer cet appui en conséquence.

58. Je salue l'action que continue de mener l'Armée libanaise pour protéger les frontières nationales ainsi que la sécurité du pays et son intégrité territoriale contre les tentatives répétées destinées à ébranler la stabilité du Liban. L'incidence positive du déploiement de régiments frontaliers est toujours ressentie dans le pays, en particulier par les populations situées près de la frontière qui sont vulnérables aux tentatives d'infiltration de groupes extrémistes, tels que l'EIIL et le Front el-Nosra.

59. J'ai été profondément soulagé par la libération des soldats détenus par le Front el-Nosra depuis plus d'un an. Je condamne le maintien en détention des autres soldats et des membres des forces de sécurité retenus en captivité par l'EIIL et je demande leur libération immédiate.

60. Je me félicite de la poursuite de la coopération entre les divers organismes de sécurité de l'État et l'Armée libanaise, laquelle a permis d'obtenir de nouveaux résultats dans la lutte contre le terrorisme dans le pays et qui s'est traduite notamment par l'arrestation et la détention de plusieurs extrémistes, dont certains sont impliqués dans l'attaque perpétrée à Bourj el-Brajné. J'encourage le consensus politique qui a permis le maintien des plans de sécurité, étant donné qu'il est essentiel d'apporter l'appui nécessaire aux forces de sécurité, qui contribuent à préserver la sécurité et la stabilité du Liban. Un large soutien politique aux opérations de sécurité, et notamment aux procédures judiciaires qui en découlent, reste indispensable pour montrer clairement que la violence ne saurait rester impunie.

61. Je continue de prier instamment le Gouvernement libanais et l'Armée libanaise de prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher le Hezbollah et les autres groupes armés de se procurer des armes et de développer une capacité paramilitaire en marge de l'autorité de l'État, en violation de la résolution 1559 (2004). Le document de réflexion sur une stratégie de défense nationale, élaboré dans le cadre du dialogue national, reste un excellent point de départ. J'appelle en outre les pays de la région qui entretiennent des liens étroits avec le Hezbollah à encourager ce groupe armé à devenir un parti exclusivement politique et à déposer les armes, conformément aux dispositions des Accords de Taëf et de la résolution 1559 (2004), dans l'intérêt du Liban et de la paix et de la sécurité régionales.

62. La situation des réfugiés palestiniens au Liban et la limitation des ressources dont dispose l'UNRWA pour leur venir en aide demeurent un sujet de préoccupation, compte tenu en particulier de la présence persistante de réfugiés palestiniens venus de la République arabe syrienne qui ont fui la violence. En continuant de fermer des installations, les groupes politiques et militants compromettent la capacité de l'Office de s'acquitter de ses obligations envers les réfugiés et la communauté internationale. Je compte sur le Gouvernement libanais pour continuer de soutenir et de protéger les services et le personnel de l'Office afin que celui-ci reste en mesure d'aider la communauté des réfugiés de Palestine au Liban. Un soutien financier à l'UNRWA reste crucial pour lui permettre de fournir des services vitaux à ces réfugiés. Je demande aux donateurs de renforcer l'appui qu'ils apportent à l'Office. Je note que la force de sécurité commune palestinienne est intervenue à plusieurs reprises pour empêcher une escalade des conflits dans le camp d'Aïn el-Héloué et me félicite que les dirigeants palestiniens aient renouvelé leur engagement de dissocier les camps au Liban de la violence qui sévit en République arabe syrienne et dans l'ensemble de la région.

63. Je déplore l'absence de tout progrès dans la délimitation et la démarcation de la frontière avec la République arabe syrienne, qui nuit au contrôle de cette frontière. Je reste d'avis qu'à long terme, la gestion intégrée des frontières permettra d'améliorer sensiblement les contrôles aux frontières du Liban et contribuera à prévenir le passage illicite d'armes et de combattants dans les deux sens, question devenue encore plus pressante du fait des événements en République arabe syrienne.

64. L'évolution récente des conditions de sécurité, en particulier dans la région frontalière orientale du Liban, a encore accentué les pressions s'exerçant sur les réfugiés, les communautés d'accueil et le pays dans son ensemble et requiert un soutien accru de la part de la communauté internationale. Je salue une fois de plus l'apport unique du Liban, qui contribue au bien public en accueillant des réfugiés, et me félicite des efforts déployés par le Gouvernement en vue d'élaborer des stratégies durables pour résoudre la crise, compte tenu de sa nature prolongée et de la nécessité d'envisager des solutions plus viables en attendant le retour éventuel des réfugiés, conformément au droit international. J'encourage le Gouvernement et l'Organisation à poursuivre leur coordination étroite en vue d'accueillir, d'aider et de protéger les réfugiés conformément aux droits de l'homme et aux principes humanitaires. Non seulement la crise syrienne constitue un grave problème humanitaire et socioéconomique pour le Liban, mais elle représente également une menace pour la stabilité du pays et doit être traitée comme telle.

65. J'encourage vivement les États Membres, notamment les donateurs régionaux, à assumer leur part de responsabilité en versant rapidement les contributions annoncées à la conférence tenue à Londres le 4 février 2016 et en tenant les engagements pris lors de la conférence des donateurs qui a eu lieu au Koweït le 31 mars 2015. Je me félicite de l'occasion offerte par le nouveau mécanisme de financement à des conditions de faveur mis au point conjointement par l'Organisation des Nations Unies, la Banque mondiale et la Banque islamique de développement, et exhorte le Liban et la communauté des donateurs à se tenir prêts à faciliter la mise en œuvre de cette importante source d'appui pour la stabilité du Liban. J'attends avec intérêt certaines mesures de suivi de la conférence de Londres et de ma récente visite conjointe au Liban, prises notamment sous les auspices du Groupe international d'appui au Liban.

66. La sécurité, la stabilité et l'unité du Liban sont en permanence menacées alors que le pays fait face à un environnement régional tendu et doit se préserver des effets que cet environnement pourrait avoir sur sa situation interne. Je reste fermement attaché à la mise en œuvre de la résolution 1559 (2004). J'attends donc du Gouvernement qu'il continue d'honorer les obligations internationales qui sont les siennes, et j'invite toutes les parties et tous les acteurs à respecter pleinement les résolutions 1559 (2004), 1680 (2006) et 1701 (2006). Je demande par ailleurs aux États Membres de redoubler d'efforts pour aider le Liban à s'acquitter des obligations que lui imposent ces résolutions, meilleur moyen de favoriser la prospérité et la stabilité à long terme d'un Liban démocratique. Je continuerai de m'efforcer d'assurer la pleine application de ces résolutions ainsi que des autres résolutions concernant le Liban.


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