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27avr16

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Rapport du Secrétaire général sur les progrès accomplis par la MANUI (jan.-avr.16)


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Nations Unies
Conseil de sécurité

S/2016/396

Distr. générale
27 avril 2016
Français
Original : anglais

Troisième rapport du Secrétaire général présenté en application du paragraphe 7 de la résolution 2233 (2015)

I. Introduction

1. Au paragraphe 7 de sa résolution 2233 (2015), le Conseil de sécurité m'a prié de lui rendre compte tous les trois mois des progrès accomplis par la Mission d'assistance des Nations Unies pour l'Iraq (MANUI) dans l'accomplissement de toutes les tâches dont elle est chargée. Le présent rapport fait le point des principaux faits nouveaux ayant trait à l'Iraq et des activités des Nations Unies menées en Iraq depuis la publication de mon rapport du 26 janvier 2016(S/2016/77).

II. Résumé des principaux faits politiques récents concernant l'Iraq

A. Évolution sur le plan intérieur

2. Au cours de la période considérée, les forces de sécurité iraquiennes, les peshmergas, les forces de mobilisation populaire et les forces tribales ont poursuivi efficacement leur campagne militaire contre l'État islamique d'Iraq et du Levant (EIIL) avec l'appui de la Coalition internationale contre l'EIIL. Leurs opérations avaient pour but d'étendre leur contrôle dans la province d'Anbar, y compris dans le centre de Ramadi, ainsi que de consolider leur contrôle des zones libérées des provinces de Salaheddin et Ninive. Ils se préparent maintenant à reprendre des zones, comme Mossoul, qui sont encore sous le contrôle de l'EIIL.

3. En février, afin de créer de meilleures conditions pour les réformes politiques et économiques, y compris celles visant à lutter contre la corruption, le Premier Ministre, Haïder el-Abadi, a annoncé un plan visant à désigner les membres de l'exécutif sur la base de leurs compétences et de leurs connaissances techniques plutôt que sur celle des quotas réservés aux partis. Cette initiative destinée à reconstruire entièrement le Gouvernement a été lancée alors que l'Iraq était toujours en butte à de graves difficultés économiques et budgétaires, en partie dues à la faiblesse des cours mondiaux du pétrole. Dans le même temps, les manifestations populaires en faveur des réformes et des mesures de lutte contre la corruption se sont multipliées. Le 31 mars, le Premier Ministre a présenté une liste de candidats au Conseil des représentants pour qu'il l'approuve, la rejette ou la modifie. Le Conseil des représentants a depuis reporté son vote à plusieurs reprises en raison de désaccords au sujet de la liste proposée. Le 12 avril, le Premier Ministre a présenté une version révisée de la liste de 14 technocrates devant former le Gouvernement, qui comprenait plusieurs noms proposés par les partis politiques, pour examen par le Parlement. Cent douze députés ont ensuite lancé une pétition réclamant la démission des trois présidents, indiquant que la liste révisée ne répondait pas aux revendications de la population.

4. Dans la Région du Kurdistan, les relations entre les partis sont restées dans l'impasse politique, empêchant le Parlement régional de fonctionner. Outre les combats contre l'EIIL, la région connaît de graves problèmes humanitaires, économiques et budgétaires, aggravés par la persistance des divergences sur les exportations de pétrole et le partage des recettes avec le Gouvernement fédéral.

B. Situation politique

5. Le 20 février 2016, le Premier Ministre a demandé l'appui du Conseil des représentants pour lancer son plan consistant à former un gouvernement de technocrates, que les législateurs ont soutenu à condition que les nouveaux ministres continuent à mettre en œuvre l'accord politique national et les réformes. Le dirigeant du Mouvement islamique Ahrar el-Cham, Moqtada el-Sadr, a appuyé sans réserve la restructuration du Gouvernement et a donné pour instruction à ses partisans d'organiser des manifestations publiques à l'appui des réformes. Il a publié son propre plan de réforme le 13 février et donné 45 jours au Premier Ministre pour achever le processus. Le grand ayatollah Sistani ayant décidé de ne pas encourager publiquement la réforme, M. Sadr a pris une place plus éminente dans le mouvement réformiste et anti-corruption.

6. Bien que tous les blocs politiques aient appuyé la restructuration du Gouvernement, ils restent en désaccord sur plusieurs questions et ont demandé au Premier Ministre de tenir de larges consultations en vue d'obtenir un consensus politique. La coalition de l'Alliance nationale a tenu plusieurs réunions pour régler ses désaccords internes concernant la restructuration. Contrairement à Ahrar el-Cham, la Coalition pour l'état de droit et le Conseil suprême islamique d'Iraq ont indiqué qu'ils préféraient que le Premier Ministre procède à un remaniement en fonction des résultats obtenus par chaque ministre, sans exclure la possibilité de renouveler le Gouvernement dans son entier. Le 2 mars, l'Alliance du Kurdistan et la Coalition des forces iraquiennes ont demandé au Premier Ministre de veiller à ce que les principes de partenariat ouvert à tous et d'équilibre entre les principales composantes sur lesquels a été fondé le Gouvernement d'union nationale soient maintenus.

7. Le 9 mars, le cabinet du Premier Ministre a invité chaque bloc politique à soumettre les noms de deux candidats à des postes ministériels avant le 16 mars. La lettre du Premier Ministre était accompagnée d'un document de 105 pages consacré à la réforme et exposant le mécanisme de restructuration, expliquant notamment qu'un comité d'experts non partisan recevrait et évaluerait les qualifications des candidats à des postes ministériels en fonction de leurs compétences professionnelles et de leur aptitude à appliquer le principe de responsabilité, ainsi que de leur engagement à mettre en œuvre l'accord politique national et les réformes. Le comité soumettrait ensuite au Premier Ministre la liste des candidats les plus qualifiés afin qu'il sélectionne ceux qu'il présenterait au Conseil des représentants pour approbation. Le 17 mars, la Coalition des forces iraquiennes, l'Alliance du Kurdistan et l'Alliance Wataniya ont publié des déclarations dans lesquelles elles ont exprimé leurs doutes quant au degré d'ouverture de la procédure. Déplorant qu'on ne l'ait pas consultée au sujet du processus de sélection, la Coalition des forces iraquiennes a annoncé qu'elle ne présenterait pas de candidatures. Le Premier Ministre a réagi le 17 mars en publiant une déclaration dans laquelle il s'engageait à nouveau à consulter plus largement ses partenaires politiques au sujet de la restructuration.

8. Dans des déclarations distinctes publiées entre le 16 et le 19 mars, le Conseil des ministres, les trois présidents et les blocs politiques ont soutenu le droit d'organiser des manifestations pacifiques. Ils ont annoncé la création d'un comité représentant tous les blocs, qui travaillerait avec le Premier Ministre à la restructuration et négocierait directement avec les manifestants. Ce comité devait également s'employer à accélérer les réformes, à placer l'ensemble des armes et des combattants sous le ferme contrôle de l'État et à lutter contre la corruption, conformément aux demandes des manifestants.

9. Le 26 février, répondant à un appel de Moqtada el-Saqr à manifester, environ 200 000 Iraquiens ont organisé un rassemblement pacifique en faveur de la réforme et contre la corruption sur la place Tahrir de Bagdad. Les manifestations ont duré jusqu'à la fin du délai de 45 jours qu'il avait donné au Premier Ministre pour former un nouveau gouvernement. Le 12 mars, Moqtada el-Sadr a appelé les manifestants à occuper pacifiquement l'entrée de la Zone verte à Bagdad pour soutenir le mouvement en faveur de la réforme, ce qu'ils ont fait à partir du 18 mars. La pression s'est intensifiée lorsque, le 27 mars, M. Sadr est entré dans la Zone verte pour participer en personne à l'occupation. Le 31 mars, le Premier Ministre ayant proposé une réduction du nombre de ministères de 21 à 18 et annoncé la publication d'une liste de technocrates en vue de restructurer le Gouvernement, M. Sadr a mis fin à toutes les manifestations autour de la Zone verte.

10. D'autres mesures ont été prises en vue de poursuivre les fonctionnaires accusés de corruption et de recouvrer les fonds publics. Le 18 février, la Commission pour l'intégrité a traduit en justice les anciens Vice-Premiers Ministres Bahaa el-Araji et Saleh el-Moutlaq, le chef du cabinet militaire de l'ancien Premier Ministre Nouri el-Maliki, Farouk el-Araji, et l'ancien maire de Bagdad, Naim Abo'ab, accusés d'avoir profité de leur position pour s'enrichir illégalement. Le 20 février, en coordination avec les ministères et les organes de contrôle compétents, le Conseil des représentants a formé un comité chargé du suivi de la récupération des fonds iraquiens transférés illégalement à l'étranger. En réponse à des rapports de la presse internationale selon lesquels de hauts responsables iraquiens auraient été impliqués dans des affaires de corruption liées aux contrats de vente de pétrole sous les gouvernements précédents, le Premier Ministre a ordonné une enquête immédiate.

11. Au cours de la période considérée, les trois présidents ont poursuivi leurs efforts en faveur de la réconciliation nationale et locale en Iraq. Le 31 janvier, le Président iraquien, Fouad Massoum, a rencontré la Commission des dotations religieuses du Conseil des représentants pour évoquer le rôle que les personnalités religieuses et celles de la société civile pourraient jouer dans la promotion de la tolérance et de la coexistence pacifique au moyen de mesures de réconciliation. Le 27 février, le Président du Parlement, Salim el-Joubouri, a présenté un plan de réconciliation nationale à l'occasion d'un atelier sur la réconciliation intercommunautaire et la cohésion sociale appuyé par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme. Le Premier Ministre, M. Abadi, a également assisté à la réunion. Toutefois, un certain nombre de difficultés continuent d'entraver les efforts de réconciliation, y compris un déficit persistant de confiance et de consensus politique et l'absence d'une conception commune de l'avenir et d'un cadre pour la réconciliation nationale.

12. Les blocs politiques ont tenu des débats réguliers au Conseil des représentants sur la législation à adopter en priorité pour promouvoir la réconciliation. Le 14 mars, le Ministère de la défense a approuvé un projet de loi sur le service militaire obligatoire visant à garantir la participation de tous aux institutions iraquiennes chargées de la sécurité. Toutefois, les lois sur la justice et la responsabilité, l'interdiction du parti Baas, la cour fédérale et la garde nationale sont restées bloquées au Parlement.

13. Au cours de la période considérée, la situation économique et budgétaire de l'Iraq est restée durement touchée par la baisse des cours mondiaux du pétrole, les pratiques économiques inefficaces et inutiles, et la corruption. Cela a compliqué le financement de la guerre contre l'EEIL, la réponse aux besoins humanitaires des personnes déplacées et d'autres personnes, et les activités de reconstruction et de relèvement. En février 2016, les recettes pétrolières de l'Iraq ont chuté en dépit du volume des exportations, le troisième plus élevé jamais enregistré en moyenne journalière. En mars, cependant, les recettes pétrolières de l'Iraq ont augmenté grâce la remontée amorcée par les cours mondiaux du pétrole. Le 20 mars, le pays a également exporté pour la première fois du gaz naturel depuis le port d'Oum Qasr, dans la province de Bassora.

14. Le Gouvernement régional du Kurdistan a publié en mars des données financières indiquant un déficit mensuel de 370 millions de dollars des États-Unis de son budget de fonctionnement.

15. La grave crise économique et budgétaire qui touche Bagdad et Erbil et les manifestations qui se poursuivent dans différentes villes ont poussé le Gouvernement fédéral et le Gouvernement régional du Kurdistan à reprendre l'examen des questions en suspens. Les 31 janvier et 8 avril, une délégation dirigée par le Premier Ministre du Gouvernement régional du Kurdistan, Nechirvan Barzani, s'est rendue à Bagdad où elle a rencontré le Président et le Premier Ministre iraquiens pour discuter de la lutte commune contre l'EIIL, des questions économiques et du processus de réforme. De son côté, le Premier Ministre iraquien a rencontré en février le Président de la Région du Kurdistan, Massoud Barzani, à Munich (Allemagne). Le 11 mars, le Ministre du pétrole, Adel Abdoul Mehdi, a annoncé que Bagdad avait ordonné l'arrêt des exportations de pétrole extrait à Kirkouk vers Ceyhan (Turquie). Le 24 mars, il a déclaré publiquement qu'il avait cessé d'aller au ministère et annulé toutes ses activités en attendant la réponse à sa lettre de démission. Il a indiqué que sa démission avait pour objectif de donner au Premier Ministre la marge de manœuvre nécessaire pour restructurer le gouvernement.

16. Le 26 janvier, alors que l'on n'était pas sorti de l'impasse politique à laquelle on doit la suspension des activités du Parlement régional du Kurdistan depuis octobre 2015, le Président de la Région du Kurdistan a présidé une réunion des partis politiques à Erbil. Au cours de la réunion, un comité multipartite, composé de représentants du Parti démocratique kurde, de l'Union patriotique du Kurdistan et de l'Union islamique du Kurdistan, a été créé en vue de résoudre la crise politique, notamment dans le cadre d'un dialogue avec le Mouvement Gorran et le Groupe islamique du Kurdistan, qui avaient boycotté la réunion. Le 3 février, à l'occasion d'une réunion du comité multipartite, à laquelle ont également participé le Mouvement Gorran et le Groupe islamique du Kurdistan, le premier a posé comme conditions à la reprise de sa participation aux activités parlementaires le rétablissement de sa présidence du Parlement et de ses quatre ministres, ainsi que la mise en œuvre de lréformes pour faire face à la crise financière et lutter contre la corruption. Le 2 mars, les têtes de listes du Parlement régional du Kurdistan, dont celle du Mouvement Gorran, ont tenu leur première réunion en six mois. Toutes les parties ont souhaité que la crise politique et financière soit réglée aussi rapidement que possible, mais sans parvenir à un accord concret.

17. Le 3 février, le Président Barzani a déclaré à nouveau qu'il était temps que le peuple de la Région du Kurdistan décide de son avenir en répondant à un référendum. Il a ajouté qu'un tel référendum ne déboucherait pas immédiatement sur la proclamation d'un État.

C. Sécurité

18. Les conditions de sécurité en Iraq sont demeurées extrêmement précaires pendant la période considérée. Sur le plan militaire, les forces progouvernementales ont continué de remporter de nouveaux succès dans la lutte contre l'EIIL. Elles ont mené des opérations visant principalement à étendre leur contrôle à certaines parties de la province d'Anbar et à consolider les zones récemment reprises à l'EIIL, en particulier dans le centre du district de Ramadi. Elles ont poursuivi leurs préparatifs en vue de reprendre les zones encore sous le contrôle de l'EIIL, notamment Mossoul. Le Gouvernement a également consolidé sa position dans les zones des provinces de Salaheddin et de Ninive reprises à l'EIIL. Quoiqu'elle ait pris plus de temps que prévu, une intervention de spécialistes militaires et civils iraquiens est en cours, avec l'appui de la communauté internationale, en vue d'accélérer la neutralisation des engins explosifs improvisés et des munitions non explosées à Ramadi, ce qui est une étape essentielle pour garantir le retour en toute sécurité des personnes déplacées. Les forces de sécurité iraquiennes, les forces de mobilisation populaire, les forces tribales et les peshmergas ont continué de reprendre régulièrement du terrain à l'EIIL avec l'appui de la Coalition internationale contre l'EIIL et d'autres partenaires.

19. Le 20 février, le Premier Ministre a annoncé au Conseil des représentants que les forces de mobilisation populaire participeraient aux opérations militaires visant à reprendre Mossoul. Le 29 février, en réponse à cette annonce, le Conseil provincial de Ninive a rejeté l'idée d'une participation des forces de mobilisation populaire, invoquant des allégations de mauvaise conduite dans d'autres zones reprises. Après de longues discussions entre les blocs politiques, le Président iraquien a confirmé, le 17 mars, que toutes les forces participeraient à la campagne de libération de Mossoul, mais que ni les forces de mobilisation populaire ni les peshmergas n'entreraient dans la ville une fois que l'EIIL en aurait été chassé.

20. Les conditions de sécurité dans les zones libérées de la présence de l'EIIL continuent d'être difficiles à cause de la violence qui y règne, qu'elle soit d'origine terroriste, confessionnelle, intercommunautaire ou criminelle. Le 29 février, à Mouqdadiya, dans la province de Diyala, lors d'une cérémonie funéraire chiite, un attentat-suicide revendiqué par l'EIIL a faits 19 morts et 33 blessés parmi les civils. Quinze membres des forces de mobilisation populaire ont également été tués et 10 autres blessés. Les 1er et 9 mars, le Président du Parlement et d'autres dirigeants de la Coalition des forces iraquiennes se sont déclarés vivement préoccupés par des informations faisant état d'une deuxième campagne de représailles en un an contre la communauté sunnite de Mouqdadiya, après les attentats terroristes perpétrés contre cette communauté, et ont demandé que des mesures soient prises d'urgence pour placer tous les combattants et toutes les armes sous le strict contrôle de l'État. de son côté, le Président de la Coalition des forces iraquiennes au Conseil des représentants, Ahmed al-Msari, a appelé à renforcer les garanties et le suivi international des conditions de sécurité dans la province de Diyala.

21. Le 25 mars, un attentat-suicide commis lors d'un match de football à Iskandariya, dans la province de Babel, aurait fait 29 morts et 50 blessés. Le 29 mars, un autre attentat-suicide, qui a pris pour cible un groupe de travailleurs sur la place Tayaran au centre de Bagdad, aurait fait 10 morts et 31 blessés. L'EIIL a revendiqué ces deux attentats.

22. Bagdad a continué d'enregistrer le plus grand nombre d'attentats dirigés contre la population civile dans le pays et revendiqués par l'EIIL. Au cours de la période considérée, on y a dénombré 301 attentats contre des civils et 78 contre des membres des forces de sécurité iraquiennes. L'attentat-suicide perpétré le 28 février à Sadr City, qui a tué au moins 24 civils et en a blessé 62, a été parmi les plus meurtriers. Des corps non identifiés continuent d'être découverts quasiment chaque jour à Bagdad et dans ses environs.

D. Évolution de la situation aux niveaux régional et international

23. Au cours de la période considérée, le Gouvernement iraquien a poursuivi ses efforts de mobilisation à l'échelle régionale et internationale afin de renforcer ses relations bilatérales et multilatérales et d'assurer un appui politique, militaire et économique aux opérations humanitaires, à la reconstruction et à la lutte contre l'EIIL. Des consultations ont également commencé avec les institutions financières internationales, notamment la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, concernant la fourniture d'une aide financière après que des réformes économiques et budgétaires auront été adoptées par Bagdad et Erbil.

24. Des délégations de haut niveau du Gouvernement iraquien ont effectué des visites bilatérales en Égypte, en République islamique d'Iran et en Italie afin de solliciter une aide militaire et l'appui nécessaires à la reconstruction et de renforcer la coopération économique. Lors d'une visite au Caire effectuée du 7 au 10 mars, le Président iraquien a annoncé qu'il avait évoqué avec son homologue égyptien la possibilité d'obtenir un appui militaire afin d'améliorer les compétences professionnelles de l'armée iraquienne.

25. Le 8 mars, le Ministre iraquien du pétrole a rencontré au Caire le Premier Ministre égyptien et le Ministre jordanien de l'énergie pour étudier avec eux la possibilité de construire un nouvel oléoduc en vue d'exporter le pétrole iraquien et d'accroître les revenus de l'Iraq. À l'issue de cette rencontre, le Ministre égyptien du pétrole a annoncé que les trois ministres s'étaient mis d'accord sur un projet d'oléoduc qui relierait Bassora (Iraq) à Aqaba (Jordanie). En février, le Ministre iraquien du pétrole a également rencontré ses homologues iranien, saoudien, qatarien et vénézuélien afin de discuter des mesures à prendre pour faire face à la baisse des prix du pétrole.

26. À la mi-février, le Premier Ministre iraquien a assisté à la Conférence annuelle sur la sécurité de Munich (Allemagne), où il s'est engagé à chasser complètement l'EIIL de l'Iraq dès 2016. Les dirigeants mondiaux présents à cette conférence se sont engagés à fournir de manière suivie un appui militaire et d'autres formes d'aide à l'Iraq. Le Ministre iraquien de l'intérieur a participé à la 33e session du Conseil des ministres de l'intérieur des pays arabes qui s'est tenue à Tunis les 2 et 3 mars. À l'issue de cette réunion, les ministres ont publié une « Déclaration de Tunis » dans laquelle ils ont condamné tous les actes de terrorisme, notamment ceux qui visent des minorités ethniques, et demandé que les États arabes prennent des mesures pour s'attaquer au financement du terrorisme, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU. Le 11 mars, le Ministre iraquien des affaires étrangères, Ibrahim al-Jaafari, a participé à la session extraordinaire du Conseil de la Ligue des États arabes, où les États membres ont condamné toutes les formes de terrorisme et de financement du terrorisme. Parallèlement, le Secrétaire général de l'Organisation de la coopération islamique s'est rendu du 26 au 27 mars en Iraq, où il a réaffirmé le soutien de l'Organisation à ce pays et dit qu'elle était prête à faciliter une convention pour l'unité nationale dite « de la Mecque II », sur le modèle de la Conférence de la Mecque tenue en 2006. Le Ministre iraquien des affaires étrangères a exprimé l'adhésion de l'Iraq à ce projet.

27. La Coalition internationale contre l'EIIL a promis de fournir à l'Iraq un appui soutenu lors d'une réunion tenue le 2 février à Rome, à laquelle ont assisté mon Représentant spécial et ma Représentante spéciale adjointe, Coordonnatrice résidente et Coordonnatrice de l'action humanitaire. Les Ministres des affaires étrangères du Groupe restreint de la Coalition internationale ont salué l'action menée par le mécanisme de financement pour la stabilisation immédiate administré par le PNUD et demandé des contributions supplémentaires pour ce mécanisme, ainsi que pour l'Appel humanitaire pour l'Iraq lancé par l'ONU et pour le déminage, qui est indispensable pour permettre la stabilisation, la réinsertion et le retour des personnes déplacées. Le Groupe restreint s'est également engagé à continuer d'appuyer la formation des forces de police iraquiennes afin de les aider à tenir et à stabiliser les zones reprises à l'EIIL. Lors d'une autre réunion tenue à Bruxelles le 11 février, les Ministres de la défense de la Coalition internationale ont réaffirmé leur engagement à accélérer et intensifier leur action contre l'EIIL.

28. Le 14 mars, le Président du Parlement iraquien s'est rendu dans le Royaume d'Arabie saoudite, où il a rencontré le Roi, le Vice-Prince héritier, le Ministre des affaires étrangères et le Président du Parlement saoudien. Il a examiné avec ses interlocuteurs les moyens de promouvoir les relations bilatérales et régionales, de renforcer leurs efforts conjoints dans la lutte contre l'EIIL et de lutter contre le terrorisme. Ils ont également souligné la nécessité pour les deux pays de nouer entre eux des liens solides afin de pouvoir relever les défis auxquels la région fait face.

29. Au cours de la période considérée, les relations entre l'Iraq et certains membres du Conseil de coopération du Golfe, notamment les Émirats arabes unis et l'Arabie saoudite, ont subi le contrecoup des déclarations publiques faites par ces pays sur la conduite et la légalité des forces de mobilisation populaire.

30. L'Iraq et la Turquie n'ont pas réussi à trouver une solution mutuellement acceptable à la présence militaire turque dans le camp de Baachiqa, dans le nord de l'Iraq. Le 4 février, en marge d'une conférence des donateurs tenue à Londres en vue de soutenir la République arabe syrienne et la région, le Ministre iraquien des affaires étrangères a rencontré le Premier Ministre turc pour discuter d'une éventuelle solution qui respecte pleinement la souveraineté de l'Iraq. Mon Représentant spécial s'est également rendu le 8 février à Ankara, où il a rencontré des représentants du Gouvernement turc.

31. Pendant ce temps, les frappes aériennes turques dirigées contre des cibles associées au PKK dans la région du Kurdistan iraquien se sont poursuivies et se sont concentrées sur des villages reculés des districts d'Amediya et de Zakho dans la province de Dahouk, ainsi que sur d'autres zones dans la province d'Erbil.

32. L'Iraq, en collaboration avec ses partenaires internationaux, a pris d'importantes mesures pour que les crimes perpétrés par l'EIIL contre le peuple iraquien ne restent pas impunis. À Rome, le 10 février, le Premier Ministre iraquien a rencontré le Pape François pour évoquer avec lui les crimes commis par l'EIIL contre les chrétiens d'Iraq. Le 14 mars, le Congrès des États-Unis a adopté une résolution proclamant que les crimes de l'EIIL constituent des crimes internationaux, notamment des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité et des crimes de génocide. Le 17 mars, le Secrétaire d'État des États-Unis a déclaré qu'il estimait que l'EIIL était responsable de génocide contre divers groupes dans les zones sous son contrôle, notamment les yézidis, les chrétiens et les chiites, ainsi que de crimes contre l'humanité et de nettoyage ethnique. Il a affirmé que les États-Unis appuieraient fermement les efforts visant à recueillir, répertorier, conserver et analyser des éléments de preuve des atrocités commises et qu'ils feraient tout leur possible pour veiller à ce que leurs auteurs aient à répondre de leurs actes.

III. Bilan des activités de la Mission d'assistance des Nations Unies pour l'Iraq et de l'équipe de pays des Nations Unies

A. Activités politiques

33. Le 26 mars, avec le Président du Groupe de la Banque mondiale, Jim Yong Kim, et le Président de la Banque islamique de développement, Ahmad Mohamed Ali, je me suis rendu en Iraq où je me suis entretenu avec le Président, le Premier Ministre, le Ministre des affaires étrangères et d'autres hauts responsables. J'ai félicité le peuple iraquien des victoires qu'il remporte régulièrement contre l'EIIL et salué l'héroïsme et l'esprit de sacrifice des forces de sécurité iraquiennes, des forces de mobilisation populaire, des peshmergas et des forces tribales. J'ai souligné l'importance d'un processus politique ouvert à tous qui fragiliserait l'appui à l'EIIL et renforcerait l'unité de l'Iraq. J'ai encouragé le Premier Ministre à poursuivre ses efforts pour surmonter les clivages et les divisions politiques et à renforcer le partenariat entre Bagdad et Erbil. J'ai accueilli avec intérêt le programme de réformes du Premier Ministre et confirmé que l'Organisation des Nations Unies appuyait ce programme. Le Président du Groupe de la Banque mondiale, le Président de la Banque islamique de développement et moi-même avons promis que la communauté internationale apporterait son appui pour répondre aux besoins humanitaires et aux difficultés budgétaires de l'Iraq. À Erbil, nous avons rencontré le Président et le Premier Ministre de la région du Kurdistan iraquien. Tout au long de cette visite, nous avons souligné l'importance primordiale de réformes économiques globales et d'un renforcement de la transparence.

34. Le 7 février, mon Représentant spécial a organisé une réunion des représentants à Bagdad du Groupe des Sept, de l'Union européenne et de la Banque mondiale avec le Ministre des finances et le Premier Ministre iraquiens pour examiner les difficultés budgétaires et économiques que rencontre l'Iraq et les réformes qui permettraient de les surmonter. Une réunion similaire ayant le même objectif a été facilitée le 7 mars avec le Président et le Premier Ministre du Gouvernement régional du Kurdistan à Erbil. Les dirigeants iraquiens et certains dirigeants de la région du Kurdistan iraquien ont accueilli favorablement ces efforts, dans lesquels ils ont vu l'occasion, pour la communauté internationale, de mieux comprendre la gravité de la crise et les réformes prévues ou mises en œuvre par les autorités.

35. L'ONU a célébré la Semaine mondiale de l'harmonie interconfessionnelle du 2 au 10 février, avec plusieurs manifestations organisées par la MANUI à Najaf, Bagdad et Erbil visant à promouvoir la coexistence, la cohésion, le pardon et la réconciliation à tous les niveaux de la société. Ces manifestations ont réuni des acteurs très divers, notamment des parlementaires, des représentants de la communauté internationale, des responsables religieux et culturels et des représentants de la société civile et de groupes de jeunes. Les participants ont souligné l'importance d'un dialogue ouvert à tous et la nécessité de trouver des solutions durables pour aider les personnes déplacées dans le pays et de mettre en place des programmes d'éducation et de sensibilisation pour détourner les jeunes des idéologies extrémistes. Ils ont exhorté le Gouvernement à améliorer les relations intercommunautaires et à rétablir rapidement l'autorité de l'État et des pouvoirs locaux, l'état de droit, la bonne gouvernance, la justice et les services aux zones libérées.

36. La MANUI a poursuivi son action de promotion des droits des femmes en Iraq, dans le cadre de la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité. Avec l'aide de la MANUI, des représentants de la société civile, notamment les membres de l'Alliance 1325 et du Iraqi Women Network, ont continué d'insister pour que les femmes aient toute leur place dans les activités de réconciliation nationale et dans les processus politiques nationaux. Le 7 mars, l'Entité des Nations Unies pour l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes (ONU-Femmes), en partenariat avec la Commission de la condition féminine du Conseil des représentants, a organisé une manifestation de haut niveau dans les locaux du Conseil pour célébrer la Journée internationale de la femme.

37. À Bagdad, le 12 mars, une conférence intitulée « Création du Réseau pour la paix civile et la coexistence sociale » a été organisée conjointement par le Comité de mise en œuvre et de suivi de la réconciliation nationale du Bureau du Premier Ministre et la MANUI. Cette conférence a réuni plus de 100 représentants d'organisations de la société civile venus étudier les moyens de renforcer la réconciliation politique et communautaire, de mieux lutter contre la ségrégation ethnique, confessionnelle et communautaire et de promouvoir la réconciliation nationale et la paix sociale.

38. Mon Représentant spécial a effectué plusieurs visites dans la région du Kurdistan iraquien pour encourager la coopération entre Bagdad et Erbil. En outre, il a continué à encourager les partis politiques kurdes à sortir de l'impasse politique actuelle dans la région en engageant un dialogue politique ouvert à tous.

B. Assistance électorale

39. Pendant la période considérée, la MANUI a continué d'aider la Haute Commission électorale indépendante. Mon Représentant Spécial a organisé le 3 mars une réunion entre la communauté diplomatique et le Président de la Haute Commission et Directeur général des élections. Au cours de cette réunion, des propositions de projet élaborées avec l'appui de la MANUI ont été présentées afin d'examiner les possibilités de financement international. La MANUI a continué d'offrir des conseils techniques à la Haute Commission électorale indépendante pour la planification des élections de 2017 aux conseils provinciaux, avec notamment l'élaboration d'un concept général d'opérations et d'un calendrier. Elle a continué d'aider la Haute Commission à formuler une politique institutionnelle d'égalité des sexes et les activités de formation connexes. Elle met à la disposition de la Haute Commission des compétences spécialisées dans les nouvelles méthodes de gestion des résultats électoraux et une assistance régulière pour la mise en place de la nouvelle Direction des entités politiques. Le 3 avril, la Haute Commission électorale indépendante a commencé l'enregistrement biométrique des électeurs déplacés dans 11 provinces.

40. La MANUI a poursuivi son dialogue avec le Conseil des représentants sur la question du contrôle parlementaire des processus électoraux. Le 18 février, elle a rencontré la Commission juridique du Conseil des représentants pour examiner les amendements proposés à la loi régissant les élections aux conseils provinciaux et aux conseils de district et de sous-district, ainsi que le processus de sélection des membres du Conseil des commissaires de la Haute Commission électorale indépendante. Le mandat des commissaires actuels expire en effet en 2017. La MANUI a également sollicité les vues de la Commission juridique du Conseil des représentants sur le mémorandum d'accord entre la Haute Commission électorale indépendante et la Haute Commission électorale indépendante du Kurdistan, dont le Conseil des représentants est actuellement saisi.

C. Faits nouveaux et activités se rapportant aux droits de l'homme

41. Les Iraquiens continuent de subir le conflit armé, des actes de violence et des attaques terroristes. Entre le 27 janvier et le 31 mars 2016, la Mission a recensé au moins 3 418 victimes civiles (1 039 morts et 2 379 blessés), ce qui porte le nombre total de victimes civiles à au moins 62 656 (21 272 morts et 41 384 blessés) depuis la flambée de violence qui a marqué le déclenchement du conflit armé dans le pays en janvier 2014.

42. La période considérée a été marquée par une recrudescence des attentats terroristes et des attaques asymétriques, dont plusieurs revendiqués par l'EIIL, qui ont fait un grand nombre de victimes civiles. À compter du 25 février et cinq jours durant, la violence a atteint un niveau particulièrement élevé après que deux auteurs d'attentats-suicides à la bombe ont visé une mosquée chiite à Bagdad, tuant 8 civils et en blessant 18 autres. Le 28 février, toujours à Bagdad, deux autres attentats-suicides à la bombe ont été perpétrés sur un marché situé dans une zone majoritairement chiite, dans lesquels 24 civils au moins ont trouvé la mort et 62 ont été blessés. Le 6 mars, un attentat-suicide au principal point de contrôle de l'accès à la ville de Hilla (province de Babel) a causé la mort de 31 civils et de 10 policiers. Le 25 mars, un attentat terroriste à l'explosif, perpétré sur un terrain de football dans la province de Babel, a lui aussi fait de nombreux morts et blessés.

43. Les femmes, les enfants, les personnes handicapées et les personnes âgées, ainsi que les membres de certains groupes ethniques et communautés de croyants, continuent d'être particulièrement vulnérables aux violations du droit international des droits de l'homme et du droit international humanitaire et aux atteintes graves portées à ces droits. De multiples violations de cette nature, imputables notamment à l'EIIL, continuent d'être signalées à la MANUI. À cet égard, je ne cesse de craindre pour la sécurité d'au moins 1 500 femmes et enfants appartenant pour la plupart à la communauté yézidie mais aussi à d'autres groupes ethniques et communautés de croyants, qui sont tenus captifs par l'EIIL.

44. La Mission a continué de recevoir des informations selon lesquelles l'EIIL enlève, assassine et persécute ceux qui s'opposent à son idéologie ou à ses règles. Ainsi, le 1er février, à Mossoul (province de Ninive), trois propriétaires de café ont été enlevés en raison de prétendues infractions au « code de conduite » de l'organisation et, le 6 février, trois adolescents accusés de vol ont eu les mains coupées. Le 13 février, l'EIIL a noyé au moins sept civils accusés de coopération avec les forces de sécurité iraquiennes et, le 22 février, au sud-ouest de Kirkouk, il a exécuté en public quatre hommes faisant l'objet d'accusations similaires.

45. Des informations persistent à faire état d'une dégradation des conditions de vie dans les zones contrôlées par l'EIIL et du meurtre de civils qui tentent de s'enfuir. Le 29 février, dans le district de Mossoul, le groupe a tué un homme puis l'a pendu à un pylône et, le 6 mars, il aurait tué trois jeunes hommes qui avaient tenté de fuir le district de Haouija (province de Kirkouk).

46. Durant la période considérée, des rapports ont fait état de l'emploi d'agents chimiques militarisés par l'EIIL. Le 11 février, à la suite d'attaques au mortier lancées contre des peshmergas dans le sud du district de Sinjar (province de Ninive), au moins neuf militaires auraient souffert de suffocation, de vertiges et de douleurs oculaires. D'autres attaques contre des positions peshmergas, lancées le 17 février dans le district de Makhmour, le 25 février dans le district de Sinjar et le 2 mars dans le district de Tell Afar (province de Ninive dans les trois cas), ont causé des troubles semblables chez des peshmergas et des civils. Le 8 mars, à la suite d'une attaque à la roquette dans le district de Taza (province de Kirkouk), un certain nombre de personnes ont éprouvé des difficultés à respirer et ont dû être hospitalisées. Deux fillettes âgées respectivement de 3 et 9 ans sont mortes de complications vraisemblablement liées aux effets de cette attaque. La MANUI n'a pas pu vérifier que des agents chimiques militarisés avaient été utilisés et ces informations n'ont pas été officiellement confirmées. Par lettre datée du 20 mars 2016 (S/20161267), le Ministre iraquien des affaires étrangères a informé le Conseil de sécurité de l'incident de Taza et lui a fait savoir que l'incident avait été notifié à l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques.

47. Des fosses communes continuent d'être mises au jour en Iraq, dont celle découverte le 23 janvier dans le centre de Ramadi (province d'Anbar), qui contient un nombre indéterminé de corps. Les victimes auraient été tuées par l'EIIL lors de la prise de la ville par ses combattants en mai 2015. Le 16 février, une fosse commune contenant les restes d'une quarantaine de personnes aurait été mise au jour dans la partie est de Ramadi, où les responsables de la sécurité ont également signalé la découverte, le 2 mars, d'une fosse contenant les corps de sept policiers. Selon les autorités, il est difficile de réunir des preuves, les ressources et les connaissances spécialisées qui permettraient de protéger ces sites et de les fouiller de manière appropriée faisant défaut.

48. La MANUI a continué de recevoir des informations selon lesquelles des violations des droits de l'homme auraient été commises par des groupes armés qui passent pour être associés aux forces de mobilisation populaire. Le 1er mars, des membres de ces groupes ont tué un civil, en ont blessé plusieurs et ont détruit trois maisons dans diverses zones de Mouqdadiya (province de Diyala). Le même jour, ils auraient enlevé sept civils appartenant à la communauté arabe sunnite, à Mouqdadiya et à Baquouba. La Mission a également reçu des informations selon lesquelles ces mêmes groupes auraient empêché le retour de déplacés dans le district repris de Balad (province de Salaheddin). Des tensions provoquées par les réparations accordées aux victimes de précédentes attaques commises par l'EIIL et Al-Qaida et à leurs familles avaient provoqué une première crise le 7 février. Aux dires de certaines sources, entre le 7 et le 9 février, des membres locaux de ces groupes auraient détruit au moyen d'explosifs un certain nombre d'habitations appartenant à des déplacés ainsi que des commerces, pour empêcher le retour de leurs propriétaires dans le district de Balad.

49. Les frappes aériennes et les bombardements ont continué de faire des victimes civiles. Ainsi, l'attaque aérienne lancée le 4 février à Hit (province d'Anbar) aurait fait un nombre indéterminé de victimes; de même, les 8 et 9 février, des civils auraient été blessés et tués dans un bombardement dont l'EIIL serait l'auteur, à Amiriyet el-Fallouja (province d'Anbar). Les 15 et 18 février, d'autres frappes aériennes auraient également fait des victimes civiles, respectivement à Chirqat (province de Salaheddin) et à Routba et Hit (province d'Anbar); le 7 mars, dans cette dernière ville, cinq civils auraient péri dans une attaque. En raison des difficultés rencontrées pour vérifier ces informations, le nombre de victimes n'a pas été confirmé et la responsabilité de ces attaques n'a pu être établie.

50. Durant la période considérée, 57 violations graves commises contre des enfants ont été signalées à l'Équipe spéciale pour la question du sort des enfants en temps de conflit armé que coprésident la MANUI et le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF). Les meurtres et les mutilations restent les crimes les plus fréquemment signalés; il a été confirmé que 83 enfants avaient été tués et 90 autres mutilés. Faute d'accès et compte tenu des limitations imposées par les conditions de sécurité, les allégations de recrutement et d'utilisation d'enfants par l'EIIL n'ont pu être vérifiées. L'Équipe spéciale a également été informée de cinq attaques perpétrées contre des écoles, principalement à Bagdad et à Diyala. Parallèlement, les opérations militaires menées dans les zones touchées par le conflit ont continué d'entraver gravement l'accès des enfants à l'éducation et à la santé.

51. Le 18 février, à Bagdad, le Tribunal pénal central a condamné à mort 40 personnes pour leur participation au massacre perpétré dans le camp Speicher, en juin 2014. Le procès, qui est connu sous le nom de « Speicher Three » et s'est déroulé sous la surveillance de la MANUI, n'a pas été conduit selon les normes internationales en matière de procès équitable; en particulier, les accusés n'ont pas bénéficié d'une défense digne de ce nom et aucune enquête n'a été menée sur les allégations de torture. La décision du tribunal a fait l'objet d'un recours devant la Cour de cassation, comme le prévoit le droit iraquien.

52. La Rapporteuse spéciale sur les questions relatives aux minorités s'est rendue en Iraq du 27 février au 7 mars. Elle a tenu des réunions avec le Premier Ministre iraquien et le Premier Ministre du Kurdistan iraquien à Bagdad et à Erbil, elle a mené des consultations avec plusieurs dirigeants de groupes ethniques et de communautés de croyants et elle a visité des camps de déplacés dans la province de Dohouk. À son retour, elle a souligné qu'il fallait fournir une aide et un appui supplémentaires aux Iraquiens déplacés par le conflit et qu'il était tout aussi important de reconnaître la discrimination sociale et la marginalisation que subissaient de longue date les groupes ethniques et religieux et de s'efforcer d'y remédier.

D. Camp Nouvel Iraq et camp Hourriya

53. L'ONU a continué de surveiller la situation humanitaire des résidents du camp Hourriya. À ce jour, le camp abrite toujours 1 898 personnes, 1 173 ayant été réinstallées dans des pays tiers. Durant la période considérée, 55 déplacés internes s'y sont installés. Les 24, 25 et 26 février, des membres de familles de résidents se sont rendus au bureau de police du camp en vue de rencontrer leurs proches. Les résidents du camp ont toutefois refusé d'accueillir les visiteurs, se déclarant opposés à de telles visites. Ma Conseillère spéciale pour la réinstallation hors d'Iraq des résidents du camp Hourriya continue, en collaboration avec les parties prenantes, de conduire l'action menée par l'ONU en vue de la réinstallation des personnes encore présentes dans le camp.

E. Assistance humanitaire, reconstruction et développement

54. Durant l'année écoulée, le nombre de personnes nécessitant une aide humanitaire a doublé en Iraq. Au moins 10 millions d'Iraquiens, y compris 3,3 millions de déplacés, environ 550 000 rapatriés et près de 250 000 réfugiés syriens, ont besoin d'être aidés d'une manière ou d'une autre. En fonction de l'ampleur que prendront les opérations militaires, l'ONU estime que 2 à 3 millions supplémentaires de civils pourraient avoir besoin d'aide d'ici à la fin de 2016 et être contraints de se tourner vers les autorités, les fondations religieuses et les organisations humanitaires pour l'obtenir. Des centaines de milliers de personnes risquent de rester piégées à l'intérieur de zones assiégées, avec de faibles possibilités d'en sortir sinon aucune, et d'avoir désespérément besoin d'aide. Des milliers de familles sont déjà prises entre les lignes de front des forces belligérantes et de nombreuses autres pourraient se retrouver dans la même situation au cours des prochains mois. Selon les estimations, plus de 3 millions de personnes sont sous l'emprise de l'EIIL et ont besoin d'aide.

55. Les mauvaises conditions de sécurité demeurent la principale entrave à la protection et à l'assistance humanitaires. Les provinces d'Anbar, de Ninive, de Salaheddin et de Kirkouk, ainsi que la partie sud de la province d'Erbil, sont toujours sous le feu des combats. L'insécurité qui prévaut également à Bagdad et à Diyala continue de limiter, voire d'empêcher, la fourniture de l'aide humanitaire. Les civils fuyant les violences sont souvent les victimes des parties au conflit qui les retiennent aux points de contrôle, les empêchent de pénétrer dans les zones sûres et de circuler librement à l'intérieur des camps, notamment ceux de Nazrawa et de Garmawa (provinces de Kirkouk et de Ninive).

56. Depuis l'intensification des opérations militaires à la fin de décembre 2015, plus de 55 000 personnes ont été déplacées dans la province d'Anbar. La plupart de ces personnes ont trouvé refuge dans les camps surpeuplés et les zones d'installation temporaires du complexe d'Amiriyet el-Fallouja, de Habbaniya et du pont Bzeïbez ou des environs. La poursuite des opérations militaires à l'ouest de Ramadi (province d'Anbar) et dans le district de Makhmour (province d'Erbil) a donné lieu au déplacement d'environ 30 000 personnes supplémentaires qui ont été installées dans des camps temporaires où elles reçoivent une aide. Vingt-deux mille personnes que les hostilités ont contraintes au déplacement occupent également les environs de Samarra (province de Salaheddin). Les partenaires humanitaires ont intensifié leur action pour satisfaire les besoins croissants d'eau, d'assainissement et d'hygiène, d'abris, de soins et de nourriture.

57. À Fallouja, ville contrôlée par l'EIIL, la situation est très préoccupante. Bien que des affrontements réguliers et des bombardements aériens provoquent des destructions massives et fassent des morts et des blessés depuis deux ans, l'accès humanitaire est resté très limité. Durant la période considérée, le personnel des Nations Unies n'est pas parvenu à pénétrer dans la ville, mais il a reçu des informations de sources locales confirmant que la situation s'y détériorait rapidement. La plupart des marchés et commerces de la ville sont fermés. Le prix des denrées de base a augmenté de 800 % et les produits de première nécessité tels que le riz sont introuvables. La principale centrale électrique ne fonctionne pas et la distribution d'eau par le réseau public est limitée à un jour par semaine. Certains signes indiquent que la ville souffre d'une grave pénurie de médicaments et les signalements de décès sont dignes de foi. À la fin de mars, le Gouvernement a informé la Coordonnatrice des opérations humanitaires de son intention d'ouvrir des passages sécurisés pour permettre aux civils de quitter la ville.

58. Dans la province de Ninive, 36 familles arabes sunnites sont bloquées entre les lignes tenues par les peshmergas et l'EIIL depuis la mi-novembre 2015 et ne bénéficient que par intermittence d'une aide humanitaire. En février, une association locale a pu entrer en contact avec ces familles et leur fournir de la nourriture et des articles ménagers pour 20 jours. Des démarches sont toujours en cours afin que ces familles puissent rejoindre des zones plus sûres. Étant donné que les opérations militaires se poursuivent, il est nécessaire de mettre en place un mécanisme permettant de contrôler de manière digne, ouverte et sûre les personnes qui cherchent à quitter une zone de conflit pour rejoindre des territoires où les conditions de sécurité sont meilleures.

59. L'opération humanitaire qui se déroule en Iraq reste l'une des plus complexes et des plus vastes de la région. Plus de 180 partenaires continuent de fournir une assistance et une protection vitales à plus de 2,5 millions de personnes chaque mois. L'UNICEF et le Programme alimentaire mondial (PAM), en partenariat avec le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) et neuf organisations non gouvernementales, ont apporté, dans le cadre du mécanisme de réaction rapide, une aide vitale à plus de 150 000 nouveaux déplacés dans des régions difficiles d'accès des provinces d'Anbar, de Salaheddin et d'Erbil. Les équipes de surveillance du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés chargées de la protection sont entrées en contact avec des centaines de milliers de femmes et de filles vulnérables, et des partenaires spécialistes de la protection de l'enfance ont fourni un soutien psychosocial prolongé à plus de 4 000 enfants nouvellement inscrits. Plus de 1 500 enfants souffrant de troubles émotionnels graves ou d'une invalidité ont été orientés vers des services spécialisés. Le FNUAP a également fourni du matériel de santé procréative à des centaines d'hôpitaux, de centres de soins de santé primaires et de maternités.

60. Au cours de la période considérée, plus de 1,6 million de déplacés et 46 700 réfugiés ont reçu chaque mois une aide alimentaire du PAM et de ses partenaires. La FAO a distribué des engrais à des familles rurales vulnérables dans la province de Ninive. L'OMS et ses partenaires dans le domaine de la santé fournissent des services de santé de base et des services spécialisés à des centaines de milliers d'Iraquiens exposés qui vivent dans la Région du Kurdistan et dans les provinces d'Anbar, de Kirkouk, de Ninive, de Diyala et de Salaheddin. Ils ont également vacciné 5,4 millions d'enfants de moins de 5 ans contre la poliomyélite dans tout le pays. Avec l'appui d'organismes humanitaires agissant sous la conduite de l'UNICEF, des millions de personnes ont aujourd'hui un accès temporaire ou durable à l'eau potable et à des installations d'assainissement dans les zones où vivent des déplacés.

61. Grâce à des partenaires du secteur éducatif, des milliers d'enfants ont reçu du matériel pédagogique, et des centaines d'enseignants ont été formés dans la Région du Kurdistan et dans les provinces d'Anbar, de Bagdad, de Kirkouk, de Ninive, de Diyala et de Salaheddin. En coopération avec les Ministères de l'éducation du Gouvernement iraquien et du Gouvernement de la région du Kurdistan iraquien, l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO) a permis à 1 099 réfugiés syriens et à 5 009 déplacés qui vivent dans des camps ou des communautés d'accueil de suivre un enseignement secondaire, dans le cadre de deux projets financés par le Gouvernement japonais. Pour faire face aux rigueurs de l'hiver, des partenaires humanitaires ont fourni des articles ménagers et du combustible à plus de 378 000 déplacés et à plus de 68 000 réfugiés.

62. Dans les zones reconquises, la situation est extrêmement variable et il faudra des mois pour créer les conditions qui permettront un retour librement consenti, sûr et digne dans la plupart des villes concernées. À ce jour, quelque 550 000 personnes ont regagné les zones reconquises des provinces d'Anbar, de Diyala, de Salaheddin et de Ninive. En de nombreux endroits, notamment à Ramadi et à Sinjar, les retours ont été différés en raison de la forte concentration d'engins explosifs et de la destruction massive des infrastructures civiles. Le Service de la lutte antimines de l'ONU a continué de fournir des conseils stratégiques au Gouvernement iraquien par l'intermédiaire du Centre national d'opérations, de la Direction de la lutte antimines et de l'Autorité de la lutte antimines de la Région du Kurdistan, en appuyant le déploiement d'opérations d'urgence et d'activités de renforcement des capacités.

63. Dans le cadre du mécanisme de financement pour la stabilisation immédiate et avec le soutien de 18 donateurs internationaux, le PNUD a continué d'œuvrer sous la direction du Gouvernement iraquien à la stabilisation des zones récemment libérées. En novembre 2015, le comité directeur du mécanisme de financement, coprésidé par ma Représentante spéciale adjointe chargée du développement et des affaires humanitaires et par un représentant du Gouvernement iraquien, a élargi ses travaux à neuf villes libérées des provinces de Diyala, de Ninive et d'Anbar. Au cours de la période considérée, presque tous les habitants de Daour et de Moukeïchifa (province de Salaheddin) sont rentrés chez eux avec l'appui du mécanisme de financement, qui a permis de créer un passage sécurisé entre ces deux localités et Tikrit. En prévision de l'achèvement des opérations de déminage à Ramadi, le PNUD a mis en place par avance des équipements indispensables, notamment des panneaux solaires mobiles et des groupes électrogènes, qui pourront être acheminés dès que des zones seront déclarées sûres. Fin mars, l'action du mécanisme de financement a été élargie à quatre autres zones reconquises et un deuxième circuit de financement a été créé pour renforcer la stabilisation. Ce nouveau circuit sera utilisé pour des projets de taille moyenne à fort impact visant à créer un grand nombre d'emplois, à inciter les habitants à revenir en masse et à sécuriser les itinéraires reliant villes et districts stabilisés.

64. Le PNUD et le FNUAP ont continué à aider les personnes ayant subi des actes de violence sexuelle ou sexiste. Les équipes d'appui mobiles du FNUAP sont entrées en contact avec des centaines de victimes, notamment des femmes et des filles qui cherchaient à échapper à l'EIIL, tandis que les centres d'aide juridique appuyés par le PNUD et situés dans les provinces d'Erbil, de Souleimaniyé et de Dahouk ont fourni gratuitement des services juridiques et psychosociaux à des milliers de rescapés issus des populations de réfugiés et de déplacés. Le PNUD a continué à œuvrer avec des organisations non gouvernementales afin de mener des actions de sensibilisation concernant la gestion des affaires de violence sexuelle ou sexiste, l'orientation des victimes et l'action de la police, et d'assurer des formations sur ces questions.

65. Depuis son achèvement en 1984, le barrage de Mossoul a permis de stocker les eaux du Tigre, de produire de l'électricité et de réduire le risque d'inondation saisonnière. Malheureusement, les réparations qui étaient indispensables pour garantir l'intégrité de la structure de l'ouvrage ont été interrompues lorsque l'EIIL a occupé les lieux et détruit le matériel. Même si le barrage est aujourd'hui revenu sous le contrôle du Gouvernement, des capteurs situés sur place et en aval montrent que le parafouille est soumis à de fortes contraintes et que le risque de rupture catastrophique est réel et grandissant. L'effondrement de l'ouvrage aurait des conséquences directes pour un tiers de la population du pays au minimum. Des démarches ont été engagées afin d'empêcher que ce désastre ne se produise. En février 2016, le Premier Ministre a approuvé un contrat aux termes duquel une entreprise italienne de génie civil pourra démarrer des travaux d'entretien sur le barrage.

66. L'ONU agit en concertation avec les autorités iraquiennes afin de se préparer à un éventuel effondrement de l'ouvrage. Grâce à un financement de la United States Agency for International Development (USAID), le PNUD appuie le Gouvernement pour mettre en place et tester un système d'alerte et de communication d'urgence permettant de mobiliser la protection civile en cas de rupture. En mars, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) a dépêché sur place un spécialiste des catastrophes technologiques, membre du groupe conjoint qu'il a formé avec le PNUE, afin d'aider le Gouvernement à établir des procédures pour déclencher un soutien international en cas de besoin. L'effondrement du barrage de Mossoul aurait aussi de lourdes conséquences pour les activités de l'ONU en Iraq, et notamment sur la sûreté et la sécurité des membres de son personnel et de leur famille.

F. Sécurité et questions opérationnelles

67. L'élaboration d'un cadre stratégique intégré pour les Nations Unies en Iraq sur la période 2016-2017 sera bientôt achevée. Ce cadre offrira une vision stratégique commune qui intégrera les objectifs de la MANUI et de l'équipe de pays des Nations Unies sur le plan de la politique, des droits de l'homme et du développement à partir d'une analyse actualisée de la situation.

68. Le personnel de l'ONU en Iraq continue de travailler dans des conditions de sécurité précaires et dans un contexte difficile et son système de gestion de la sécurité doit mettre en œuvre de nombreuses mesures pour pouvoir réduire les principaux risques. Cette réalité est apparue en pleine lumière lorsque le meurtre d'Amer al-Kaissy, un agent de la MANUI, a été confirmé le 15 février. M. al-Kaissy avait été enlevé à Baqouba (province de Diyala) le 26 avril 2015 par des hommes armés non identifiés.

69. Au cours de la période considérée, des manifestations importantes ont eu lieu dans de nombreuses régions du pays, et notamment à proximité des complexes de la MANUI à Bagdad. Le système de gestion de la sécurité des Nations Unies a continué à travailler en coopération avec les services de sécurité du Gouvernement iraquien pour réduire le risque que posent de telles manifestations pour la sûreté et la sécurité du personnel. L'ONU poursuit par ailleurs ses contacts avec la Direction juridique du Ministère des affaires étrangères pour conclure un accord sur le statut de la Mission.

70. Le manque de logements suffisamment sûrs à Bagdad pour le personnel des Nations Unies recruté sur le plan international continue de peser sur la capacité de l'ONU d'exécuter son mandat et de mener les activités prévues par les programmes. Le complexe D-2 compte aujourd'hui 185 logements, auxquels devraient s'ajouter 99 logements supplémentaires : 10 devraient être prêts en avril 2016, 10 en septembre 2016 et les 79 restants d'ici la fin de juin 2017. L'équipe de pays des Nations Unies et la MANUI ont elles aussi besoin de logements supplémentaires pour pouvoir mener leurs programmes et leurs activités dans tout le pays.

VI. Observations

71. Je félicite les forces de sécurité iraquiennes, les peshmergas, les forces de mobilisation populaire et les volontaires tribaux de la série de victoires qu'ils ont remportées contre l'EIIL. J'espère qu'ils poursuivront sur leur lancée jusqu'à l'élimination complète de la violence et de la haine cultivées par l'EIIL.

72. Il est manifeste, cependant, que des opérations militaires ne suffiront pas, à elles seules, à faire disparaître la menace que le terrorisme fait peser sur l'Iraq. Il y faudra aussi que les dirigeants politiques iraquiens surmontent leur méfiance et leurs divisions et parviennent à un consensus sur un projet commun de réconciliation. Ils doivent redoubler d'efforts pour trouver un compromis qui leur permette d'adopter un certain nombre de textes législatifs indispensables.

73. Je salue les efforts que le Premier Ministre continue de déployer pour faire adopter les réformes dont l'Iraq a un criant besoin. Je l'exhorte à procéder à de larges consultations au cours de ce processus et à veiller à ce qu'il soit ouvert à tous, notamment aux femmes et aux diverses composantes de la société iraquienne. Il importe que le Gouvernement et tous les acteurs politiques continuent d'écouter les aspirations légitimes de la population iraquienne à des réformes éclairées et authentiques, défendent la liberté d'expression et le droit de réunion pacifique et garantissent l'exercice en toute sécurité de cette liberté et de ce droit.

74. Une réorganisation de l'administration constituerait un premier pas vers des réformes plus approfondies, en particulier des réformes économiques et institutionnelles qui amélioreront les conditions de vie de tous les Iraquiens. Ces réformes doivent inclure une action permanente au service de la transparence et contre la corruption; le transfert de missions aujourd'hui centralisées à des administrations locales afin d'améliorer la prestation des services concernés; la mise en œuvre de mesures économiques pragmatiques permettant de rationaliser la gestion des finances publiques, la collecte de l'impôt et la gestion des biens publics; et des mesures visant à diversifier l'économie et à attirer des investissements. J'exhorte tous les partis politiques iraquiens à appuyer sans réserve l'action menée par le Premier Ministre pour mettre en place les réformes aussi urgentes que nécessaires que le peuple iraquien appelle de ses vœux. Je réaffirme l'engagement de l'ONU à soutenir cette action en offrant conseils et assistance technique.

75. Les graves problèmes auxquels est confronté l'Iraq exigent de la part de Bagdad et d'Erbil une coopération menée dans un authentique esprit de partenariat. Il est impératif que les deux parties continuent de s'efforcer de parvenir à un accord sur les exportations de pétrole et le partage des revenus, la solde des peshmergas et d'autres questions en suspens. J'exhorte les partis politiques de la région du Kurdistan iraquien à sortir de l'impasse politique actuelle en engageant un dialogue basé sur les principes démocratiques et le respect de la légalité.

76. Il est essentiel pour la stabilité à long terme de l'Iraq que des dispositions soient prises pour garantir une paix durable entre les communautés après les victoires militaires remportées contre l'EIIL. J'engage le Gouvernement à continuer d'attribuer un degré élevé de priorité au retour en toute sécurité, librement consenti, dans la dignité et durable des personnes déplacées dans leurs foyers d'origine dans les zones reprises à l'EIIL. La présence à Ramadi d'un nombre élevé d'engins explosifs improvisés et de restes explosifs de guerre est très préoccupante. L'ampleur de ce phénomène dépasse très largement les capacités nationales de déminage. Il faut donc mobiliser et financer immédiatement des capacités internationales.

77. Je continue également de trouver extrêmement préoccupants les rapports persistants qui font état de représailles contre les communautés qui essaient de se réinstaller dans les zones reprises à l'EIIL, et notamment dans des zones situées entre des frontières intérieures contestées. Je renouvelle l'appel que j'ai lancé au Gouvernement iraquien pour qu'il exerce un ferme contrôle sur tous les combattants et toutes les armes et qu'il traduise en justice ceux qui contreviennent à la loi.

78. Je condamne dans les termes les plus vigoureux les assassinats, les enlèvements, les viols et les actes de torture que l'EIIL continue de faire subir aux Iraquiens et qui peuvent constituer des crimes contre l'humanité, des crimes de guerre et même des crimes de génocide. De même, je condamne vigoureusement les attentats-suicide que l'EIIL continue de commettre dans des lieux publics et des lieux de culte et qui font des morts dans la population civile, y compris des enfants. Ces attentats ont manifestement pour but d'exacerber les tensions confessionnelles en Iraq. Les Iraquiens doivent s'abstenir de recourir à la violence et de lancer des représailles, car celles-ci ne peuvent que porter atteinte à l'unité de l'Iraq et de son peuple et favoriser le terrorisme.

79. Je suis préoccupé par des rapports récents selon lesquels, dans ses attaques contre les civils et les forces de sécurité, l'EIIL se servirait d'agents chimiques militarisés comme armes, ce qui est interdit par le droit international et constitue une violation de ce droit. Je demande à la communauté internationale d'aider le Gouvernement iraquien à enquêter sur ces rapports, à donner des soins appropriées aux victimes et à traduire en justice quiconque aura été impliqué dans le déploiement d'agents chimiques militarisés contre des civils ou des membres des forces de sécurité.

80. Je demande également à la communauté internationale de prendre les dispositions voulues pour garantir que les membres de l'EIIL auront à répondre des crimes abominables qu'ils ont commis contre le peuple iraquien et pour reconnaître la gravité de ces crimes. J'engage en outre le Gouvernement iraquien à prendre de toute urgence des mesures pour juger les crimes et autres infractions commis par le passé en donnant aux tribunaux iraquiens juridiction sur les crimes de droit international commis en Iraq, et à garantir que les auteurs de ces crimes seront jugés dans le plein respect des droits de la défense et des principes d'un procès équitable reconnus par le droit international et la Constitution iraquienne.

81. Je condamne dans les termes les plus vigoureux l'assassinat d'Amer al-Kaissy, membre du personnel de la MANUI, suite à son enlèvement par des hommes armés non identifiés en avril 2015. Il incombe aux autorités iraquiennes de procéder à une enquête transparente et approfondie et de traduire rapidement les auteurs en justice. Je renouvelle l'appel que j'ai lancé aux autorités à cette fin.

82. La crise humanitaire en Iraq continue d'être une source de profonde préoccupation. Des moyens supplémentaires sont requis de toute urgence. L'ONU et ses partenaires ont demandé 861 millions de dollars pour 2016 afin de pouvoir offrir des secours d'urgence à 7,3 millions d'Iraquiens en situation de vulnérabilité. Seulement 15 %, soit 128 millions de dollars, ont été reçus à ce jour. Mobiliser des fonds supplémentaires, y compris pour fournir une aide aux zones reprises à l'EIIL, reste une de mes principales priorités.

83. Enfin, je tiens à remercier mon Représentant spécial, Jân Kubis, et le personnel des Nations unies en Iraq de l'action qu'ils continuent de mener pour aider le Gouvernement et le peuple iraquiens. Je ne doute pas que les partenaires internationaux, notamment les voisins de l'Iraq, continueront d'aider mon Représentant spécial à s'acquitter de ses fonctions.


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