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03oct13


Theodor Meron, un nouveau mandat pour l'homme qui symbolise la faillite de la justice internationale


L'Américain Theodor Meron a été reconduit à la tête du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, et dirigera également l'instance qui prendra la relève du TPI lorsque les activités de celui-ci prendront fin. Une décision qui soulève la controverse après les acquittements prononcés par le tribunal à l'égard de nombreux chefs de guerre.

Malgré les accusations de partialité lancées contre Thedor Meron au cours des derniers mois, le rendant responsable de l'acquittement de plusieurs accusés de crimes de guerre, ce juriste américain âgé de 83 ans a été reconduit, pour la troisième fois, à la tête du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPI) de La Haye le 1er octobre dernier.

Theodor Meron a été également nommé président du « mécanisme résiduel », qui héritera des activités du TPI après la conclusion des trois derniers cas toujours en cours.

Jamais une élection du président du TPI n'avait été si controversée. Theodor Meron a été accusé à plusieurs reprises de n'être pas impartial, notamment lors de certains acquittements « célèbres » (l'ancien chef d'état-major serbe Momčilo Perišić, les anciens chefs des services secrets Jovica Stanišić Franko Simatović, le général croate Ante Gotovina), qui ont fortement miné la crédibilité du Tribunal.

Sa réélection est très importante car elle permettra d'appliquer ultérieurement les règles et les méthodes sur la base desquelles ces généraux serbes et croates, qui occupaient des positions-clés à l'époque des conflits yougoslaves, ont été acquittés de toutes les accusations de crimes de guerre.

Concentration du pouvoir

Le juge américain sera ainsi pour les prochaines années le président du Tribunal Pénal pour l'ex-Yougoslavie, pour le Rwanda, et aussi du mécanisme résiduel. Sa compétence s'étendra également à la Cour d'appel : fondamentalement, pour quatre ans, « Meron aura pouvoir de vie et de mort sur le Tribunal » ; explique notre source à La Haye, pour qui la réélection de Meron démontre « qu'il y a quelque chose de pourri dans ce tribunal ».

« C'est une situation qui est totalement contraire à toutes les normes qui règlent la vie des organismes internationaux comme le TPI. Meron occupera très probablement cette position jusqu'à la fermeture du Tribunal, et il aura aussi le pouvoir nécessaire pour écraser toute opposition interne, comme il l'a déjà fait avec le juge Harhoff, qui ne partageait pas ses positions, et qui a été obligé de démissionner ».

Charles Taylor, une leçon pour Meron

Pour comprendre l'importance de l'élection de Theodor Meron, et des nouveaux critères utilisés par lui au cours de ses jugements, il est utile de faire référence à la sentence récente avec laquelle le tribunal pour les crimes en Sierra Leone a condamné à cinquante ans de prison l'ancien président du Libéria, Charles Taylor, pour crimes contre l'humanité et crimes de guerre.

Charles Taylor, au cours de ce conflit, a aidé activement les rebelles sierra-leonais : il était donc responsable d'avoir aidé et soutenu des formations responsables de crimes de guerre tels que le viol ou l'enrôlement d'enfants dans le pays voisin. « Dans le jugement de Charles Taylor, la cour a considéré que l'aide offerte aux rebelles était déjà suffisante pour démontrer l'influence du président libérien dans les crimes », explique Florence Hartmann, journaliste française et ancienne porte-parole du procureur suisse Carla Del Ponte. « La cour n'a pas utilisé le concept, institué par Theodor Meron, de la "direction spécifique" des actions de Taylor. Une invention juridique qui, en avril, avait permis l'acquittement du général de l'armée yougoslave Momčilo Perišić ».

Dans le procès Perišić, mais aussi des généraux croates Gotovina et Markač, selon les indications du juge Meron, la Cour avait indiqué, comme condition indispensable pour prouver la culpabilité des suspects, l'existence d'une « direction spécifique » de leurs actes. Pour Momčilo Perišić, la Cour jugea que le soutien matériel, logistique et militaire de l'armée yougoslave à l'armée serbe de Bosnie d'août 1993 à octobre 1995 n'était pas « destiné spécifiquement à la commission de crimes contre l'humanité à Sarajevo ou à Srebrenica, son but étant de soutenir l'effort militaire des Serbes en Bosnie-Herzégovine ».

Bref, Momčilo Perišić, selon les règles de Meron, a été acquitté. Mais dans le cas de Taylor, la Cour a décidé de ne pas utiliser les mêmes critères. Pour Florence Hartmann, « ceci est très important, car il s'agit de principes contraire à la justice pour les victimes, que la jurisprudence internationale ait décidé de ne pas les utiliser lors du jugement Taylor. Il faut espérer que cela ne soit qu'un premier pas, et qu'elles seront bientôt abandonnées ».

Theodor Meron vs. Carla del Ponte

Le jour même où il était réélu à la tête du TPIY, Theodor Meron a accepté une requête de l'ancien président de Republika Srpska, Radovan Karadžić, qui a demandé d'ouvrir une enquête contre Carla Del Ponte pour manque de respect envers le Tribunal, à l'époque où la juriste suisse était procureur en chef du TPI.

Radovan Karadžić a accusé l'ancien procureur d'avoir transmis à des diplomates américaines, en 2004, le contenu de documents réservés à propos du procès contre Slobodan Milošević. Dans sa requête, Radovan Karadžić a cité des communications diplomatiques faites par l'Ambassade américaine de La Haye au Département d'Etat. Dans ces communications, les diplomates américains attestent que Carla Del Ponte a révélé aux autorités américaines la liste complète des témoins de la défense de Slobodan Milošević, qui était une information confidentielle. Il s'agit, d'après Karadžić, d'une grave infraction des lois du Tribunal.

Ce n'est pas la première fois que Theodor Meron s'oppose à Carla Del Ponte. Selon des informations rendues publiques par « Wikileaks », Theodor Meron avait demandé au gouvernement américain de faire pression afin de renvoyer Carla Del Ponte.

[Source: Par Par Mirha Dedić, Slobodna Bosna, Le Courier des Balkans, 03oct13. Traduit par Rodolfo Toè]

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